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1.2 Le cas d’un m´ elange de liquides binaire : le syst` eme eau/glyc´ erol

1.2.1 D´ etails exp´ erimentaux

Comme expliqu´e dans les parties pr´ec´edentes, le micropervaporateur de J. Leng et al. [3] permet de mesurer des coefficients de diffusion mutuelle en g´en´erant un gradient de concentration stationnaire et en mesurant les champs de concentration et de vitesse `a l’in-t´erieur de la puce microfluidique. Des mesures de coefficient de diffusion mutuelle sur des solutions de copolym`ere tribloc ont d’ailleurs ´et´e r´ealis´ees par L. Daubersies et al. [36]. La proc´edure a ´et´e reprise ici en apportant quelques am´eliorations qui permettent d’acc´eder `a des valeurs tr`es pr´ecises du coefficient de diffusion collective pour le m´elange eau/glyc´erol.

Design du micropervaporateur

Quelques modifications de la puce microfluidique de J. Leng et al. ont ´et´e apport´ees afin de faciliter les manipulations et d’optimiser la pr´ecision des mesures et sont d´etaill´ees ici. La g´eom´etrie du micropervaporateur utilis´e est pr´esent´ee sur la figure 1.13. Le canal principal est un canal rectangulaire de largeur w, de hauteur h et de longueur L. Il est recouvert par un second canal o`u l’on peut faire circuler de l’air `a une humidit´e ae sur une longueur de pervaporation L0. Les deux niveaux sont s´epar´es par une fine membrane de PDMS d’´epaisseur e. Le micropervaporateur utilis´e pour la suite a les dimensions sui-vantes : w = 100 µm, h = 35 µm, L0 ≈ 1 cm et e = 15 µm. La fabrication des puces microfluidiques est d´etaill´ee dans l’annexe A. Dans le cas o`u l’on impose une humidit´e nulle ae≈ 0, on estime exp´erimentalement, par le suivi d’un m´enisque air/eau, un temps de pervaporation τe d’une dizaine de minutes.

L’am´elioration principale r´eside dans la conception d’une g´eom´etrie en Y. Cette g´ eo-m´etrie pr´esente un r´eel avantage pour la mise en place de gradient de concentration stationnaire car elle permet une alimentation astucieuse de la puce microfluidique. Une branche du Y est en effet reli´ee `a un r´eservoir contenant la solution ´etudi´ee. La seconde

air (entrée) air (sortie) solution/dispersion (entrée) solution/dispersion (sortie) ݔ ݕ ܮ ܳ ݓ ݖ ݕ ݄ ݁ ݓ

air

verre

ݍ (a) (b) (c)

sortie

réservoir

ܳ ܳ െ ܳ ܳ

Figure 1.13 – Sch´ema de la puce microfluidique utilis´ee. (a) Vue de dessus : les fl`eches illustrent la pervaporation de l’eau `a travers la membrane de PDMS qui induit un flux qui concentre les solut´es contenus dans le r´eservoir au bout du canal. Les couleurs montrent sch´ematiquement le gradient de concentration qui en r´esulte. Les dimensions sont : h = 35 µm, w = 100 µm, L0 = 1 cm. (b) Vue de profil mettant en ´evidence la superposition du canal qui contient la solution avec le canal dans lequel circule de l’air sec. Les fl`eches bleues indiquent la pervaporation de l’eau `a travers la membrane de PDMS. L’´epaisseur e de la membrane est ´egale `a 15 µm. (c) Vue de dessus de la totalit´e du montage : le canal microfluidique est connect´e `a un r´eservoir contenant les solut´es. La pression hydrostatique impose un d´ebit Q  Q0 entre le r´eservoir et la sortie. Cette astuce permet de changer rapidement les solut´es qui sont concentr´es `a l’entr´ee du canal en plongeant le tube dans un r´eservoir diff´erent.

branche du Y fait office de sortie. La pression hydrostatique induite par une faible diff´ e-rence de hauteur entre le r´eservoir et la sortie impose un d´ebit Q  Q0 = hwL0e. Il est alors possible, en plongeant le tube dans un r´eservoir diff´erent, de changer rapidement les compos´es qui seront concentr´es par le pervaporateur au niveau de l’intersection du Y. En utilisant un canal qui ne pr´esenterait qu’une entr´ee, le d´ebit induit par la pervaporation (Q0 ≈ 4 nL.min−1) serait trop faible pour drainer rapidement le volume du tube reliant la puce au r´eservoir (volumes typiquement compris entre 1 et 10 µL) et la manipulation serait consid´erablement ralentie.

Donn´ees thermodynamiques

Dans le cas du syst`eme eau/glyc´erol, le volume du m´elange ne change pas significative-ment lors du m´elange comme le prouve le trac´e de ϕe+ ϕs= ρe0

e+ ρs0

s, (ϕe et ρe´etant respectivement le pourcentage volumique et la densit´e de l’eau) en fonction de la concen-tration en glyc´erol ws sur l’insert de la figure 1.14. Ces donn´ees montrent en effet que le

(a) (b) ws 0 0.5 1 a 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 ws 0 0.5 1 ρ (k g. m 3 ) 1000 1100 1200 1300 ws 0 0.5 1 ϕ e + ϕ s 1 1.01

Figure 1.14 – Activit´e (a) et densit´e (b) du m´elange eau/glyc´erol en fonction de la concentration massique en glyc´erol. Les donn´ees sont issues des r´ef´erences [48–51] pour les valeurs d’activit´e et de la r´ef´erence [52] pour les valeurs de densit´e du m´elange. La ligne continue est donn´ee par l’´equation 1.35. L’insert repr´esente ϕe+ ϕs= ρee0+ ρs0s en fonction de ws.

m´elange eau/glyc´erol ne d´evie du cas id´eal que de ≈ 0.01 `a ws = 0.6. Utiliser le r´ef´erentiel de vitesses volumiques n’induirait donc pas d’erreur significative pour la r´esolution du mod`ele. Cependant, afin de pouvoir appliquer cette d´emarche pour des m´elanges binaires non id´eaux dont le volume serait modifi´e lorsque les deux compos´es sont m´elang´es, les ´

equations du mod`ele de M. Schindler et A. Adjari ont tout de mˆeme ´et´e consid´er´ees dans le r´ef´erentiel de vitesses massiques pour la suite. On rappelle ces ´equations :

tρ = −∂x(ρv) −Qeρ

0 e

hw , (1.33)

tρs = ∂x(ρD(ws)∂xws) − ∂xsv) . (1.34) Les ´equations 1.33 et 1.34 montrent que les variables thermodynamiques ρ(ws) et a(ws) sont requises. Ces param`etres sont connus et pr´esent´es sur la figure 1.14. L’activit´e du m´elange eau/glyc´erol, a(ws), a ´et´e r´ef´erenc´ee par plusieurs groupes pour des temp´eratures allant de 20 `a 35C [48–51]. Les valeurs sont quasi-ind´ependantes de la temp´erature et sont bien mod´elis´ees par la relation empirique 1.35 :

a(ws) = (1 − ws)(1.6514ws3− 0.2362ws2+ 0.9542ws+ 1) . (1.35) La figure 1.14 (b) pr´esente quant `a elle la masse volumique du m´elange `a 20C [52].

Les exp´eriences ont ´et´e r´ealis´ees `a temp´erature ambiante T = 20 ± 0.5C. Les di-mensions transverses (h × w = 35 × 100 µm2) du micropervaporateur ´etant faibles, les flux de convection induits par de petits gradients de temp´erature sont largement n´ egli-geables. Un contrˆole strict de la temp´erature lors de l’exp´erience n’est donc pas n´ecessaire.

ݔ ݔ ݔ ݔ ݔ

ݓ,ݒ ݓ,ݒ ݓ,ݒ ݓ,ݒ ݓ

ݐ ߜݐ

ן1/ܶ

Figure 1.15 – Illustration du processus de concentration du glyc´erol dans le micropervaporateur. Les courbes rouges et bleues pr´esentent respectivement les profils de concentration et les profils de vitesse. La ligne pointill´ee repr´esente la concentration maximale ws. δt correspond au temps auquel on impose une concentration en glyc´erol nulle `a l’entr´ee du canal.

Proc´edure exp´erimentale

La proc´edure exp´erimentale pour g´en´erer un gradient de concentration stationnaire, d´etaill´ee dans la partie pr´ec´edente, est appliqu´ee pour mesurer le coefficient de diffusion mutuelle du m´elange eau/glyc´erol. On illustre le processus de concentration par la figure 1.15.

Le micropervaporateur pr´esent´e sur la figure 1.13 est pr´ealablement rempli par une solution de glyc´erol `a une concentration ws = 0.01. Le glyc´erol est conduit par le flux induit par la pervaporation au bout du canal o`u il s’y concentre. Aux temps courts, la concentration en glyc´erol est faible ws(x)  1 et n’affecte que peu l’activit´e chimique de l’eau (a(ws) ≈ 1) et la densit´e du m´elange (ρ(ws) ' ρ0e). Le glyc´erol s’accumule au bout du canal et la pervaporation au bout du canal est toujours assur´ee dans une zone de taille p o`u le flux est domin´e par la diffusion [29, 32–37]. Lorsque x  p, le processus de concentration est domin´e par la convection [32, 34, 37], ws(x)  1, ∂tρ ≈ 0 et la vitesse

est donn´ee par :

v(x) ' −(1 − ae)

τe x . (1.36)

Aliment´e par le flux de pervaporation qui conduit le glyc´erol, la concentration au bout du canal augmente jusqu’`a atteindre une concentration maximale ws impos´ee par l’´equilibre local a(ws) = ae : le flux induit par la pervaporation diminue et entrave l’accumulation du glyc´erol. Une fois ce plateau atteint, un ´etat de concentration maximale croˆıt le long du canal et la vitesse du flux est d´ecal´ee vers l’entr´ee du canal. Lorsque l’on s’´eloigne de la position du gradient, la concentration reste faible ws(x)  1 et l’´equation 1.22 m`ene `

a la vitesse du flux induit par la pervaporation avec une pente constante (´equation 1.36). Apr`es un d´elai d’une vingtaine de minutes (δt > τe), le r´eservoir est remplac´e par un r´eservoir d’eau pure. La pression hydrostatique induite entre le r´eservoir et la sortie impose un flux Q  Q0, ce qui permet de fixer rapidement la concentration ws = 0 `a l’entr´ee du canal, au niveau de l’intersection du Y. Un gradient de concentration station-naire (∂tws = 0) s’´etablit en cons´equence de la comp´etition entre convection et diffusion du glyc´erol. Une mesure in situ du profil de concentration ws(x) est r´ealis´ee apr`es un

temps suffisamment long pour s’assurer que le gradient de concentration stationnaire est ´

etabli (t > 3 h). Apr`es avoir r´ealis´e la mesure du profil de concentration, le r´eservoir est de nouveau remplac´e par un r´eservoir d’eau pure dans lequel ont ´et´e ajout´es des traceurs fluorescents. Le canal se remplit alors de ces particules qui sont conduites vers l’extr´emit´e du canal principal. La vitesse de ces particules permet de calculer le temps de pervapora-tion τeet de remonter au profil de vitesses v(x) grˆace `a l’´equation 1.30. La d´eriv´ee spatiale du profil de concentration ∂xws m`ene alors directement `a des estimations du coefficient de diffusion mutuelle D(ws).