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5.3 Action ´electrostatique sur le micro-miroir

5.3.3 Mesure de la susceptibilit´e m´ecanique

a l’instant t=0. La courbe de droite est un agrandissement de la courbe de gauche et montre les oscillations individuelles. Le mode propre ´etudi´e est celui oscillant `a 919 kHz du r´esonateur P2

de la fr´equence du laser et le signal d’erreur est envoy´e vers un filtre passe-bande centr´e sur la fr´equence de modulation. Le signal est r´ecup´er´e sur un oscilloscope num´erique (mod`ele Wavesurferde la marque Lecroy), qui est d´eclench´e sur le signal pilotant l’interrupteur command´e. On a repr´esent´e sur la figure 5.21 la courbe obtenue lorsqu’on stoppe `a l’instant t = 0 la modulation de la force ´electrostatique, qui induit une amplitude de modulation forc´ee de l’ordre de 400 fm. La courbe en noir sur la figure de gauche est un ajustement exponentiel de l’enveloppe. L’oscilloscope acquiert un point toutes les 10 ns, ce qui permet de r´esoudre correctement l’oscillation `a 919 kHz du r´esonateur comme on peut le voir sur la courbe de droite et l’amplitude des oscillations du r´esonateur tend exponentiellement vers z´ero lorsqu’on coupe l’excitation. Le temps caract´eristique de cette d´ecroissance est ´egal `a 2.36 ms, ce qui correspond `a une largeur spectrale de la r´esonance de Γ/2π = 134 Hz, en bon accord avec la valeur de 136 Hz obtenue `a partir du spectre de bruit thermique.

5.3.3 Mesure de la susceptibilit´e m´ecanique

L’´etude de la r´eponse m´ecanique `a une force modul´ee permet de d´eterminer compl`etement la susceptibilit´e m´ecanique du r´esonateur, et ainsi de valider les spectres de bruit thermique que nous avons observ´es. Si la mesure de ces spectres est limit´ee par des bruits qui ne sont pas li´es au r´esonateur, ce n’est pas le cas pour la r´eponse `a une force modul´ee car celle-ci peut ˆetre rendue grande devant les bruits parasites. Elle permet donc plus facilement d’´etudier la r´eponse m´ecanique sur les ailes d’une r´esonance, ou le fond li´e `a la r´eponse de tous les autres modes. Nous allons voir qu’il existe une autre diff´erence essentielle entre le spectre de bruit thermique et la r´eponse `a une force : le bruit thermique est la somme des r´eponses de tous les modes `a des forces de Langevin d´ecorr´el´ees tandis qu’avec une force modul´ee, les modes contribuent de mani`ere coh´erente et leurs r´eponses peuvent interf´erer entre elles. Nous avons ainsi mis en ´evidence un effet d’annulation de la r´eponse globale du r´esonateur, par interf´erence destructive entre une r´esonance m´ecanique et le fond associ´e aux autres modes.

Fig. 5.22 – Spectres de bruit thermique (courbe a en haut) et r´eponse `a la force ´electrostatique (courbe e en bas), pour des fr´equences voisines de la r´esonance `a 2824 kHz du r´esonateur P3. Pour chaque courbe, on a repr´esent´e les ajustements th´eoriques selon les ´equations (5.31) et (5.32), avec les contributions du mode r´esonnant (courbes c et g), du fond (d et h) et la contribution totale (b et f).

au voisinage du mode propre oscillant `a Ωm/2π = 2824 kHz du r´esonateur P3. Les mesures ont ´et´e effectu´ees avec une bande passante de 10 Hz pour une puissance incidente de 1.5 mW. On a superpos´e `a cette courbe un ajustement Lorentzien auquel on a ajout´e la contribution d’un fond thermique. La courbe (c) repr´esente uniquement la lorentzienne, de largeur Γ/2π = 1050 Hz avec une masse effective de M = 211 µg. La courbe (d) correspond au fond plat li´e `

a la contribution des autres modes propres, ajust´e `a un niveau de 2.0 × 10−17m/√ Hz. La courbe (b), `a peine visible sous les points exp´erimentaux, repr´esente l’ajustement prenant en compte ces deux termes, d’´equation :

SxT[Ω] = ¯ ¯ ¯ ¯ 1 M (Ω2 m− Ω2− iΓΩ) ¯ ¯ ¯ ¯ 2 ST[Ω] + S0T, (5.31)

o`u ST[Ω] = 2M ΓΩmkBT est le spectre de la force de Langevin et ST

0 le niveau du fond ther-mique. On constate que pour ajuster correctement le spectre de bruit thermique observ´e, il

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est n´ecessaire de prendre en compte la contribution de tous les autres modes propres. Notons que le fait de r´ealiser ces mesures `a la pression atmosph´erique augmente la largeur de la r´esonance (1050 Hz au lieu de 190 Hz sous vide, voir le tableau 5.1 page 162) et r´eduit sa hauteur, rendant l’effet du fond plus visible. Par ailleurs, le fond ´etant gouvern´e par des forces de Langevin d´ecorr´el´ees du mode r´esonnant, on somme ici les spectres de bruit thermique de mani`ere ind´ependante.

Il n’en va pas de mˆeme lorsqu’on ´etudie la r´eponse `a une force ext´erieure car alors tous les modes propres sont excit´es par la mˆeme source, et on teste la r´eponse totale du r´esonateur. On peut ´ecrire le spectre observ´e en modulation sous la forme :

Sxmod[Ω] = ¯ ¯ ¯ ¯ 1 M (Ω2 m− Ω2+ iΓΩ) + χ0 ¯ ¯ ¯ ¯ 2 SF[Ω], (5.32)

o`u on a d´efini une susceptibilit´e χ0 ind´ependante de la fr´equence pour le fond m´ecanique dˆu `

a tous les autres modes. Tant que le fond reste petit devant la r´eponse du mode r´esonnant, on peut en balayant la fr´equence de modulation d´eterminer une r´eponse m´ecanique qui reproduit le spectre de bruit thermique. On a ainsi acc`es `a la fr´equence de r´esonance et `a la largeur de la r´esonance. On peut aussi mesurer en principe la masse effective du mode si on connaˆıt avec pr´ecision l’amplitude de la force appliqu´ee. Notons toutefois qu’un calcul prenant en compte les int´egrales de recouvrement spatial au niveau du r´esonateur [23] montre que l’amplitude de la r´eponse d´epend de l’adaptation spatiale de la force : en particulier les masses effectives apparaissant dans les ´equations (5.31) et (5.32) ne sont ´egales que si la force a la mˆeme struc-ture spatiale que le faisceau dans la cavit´e de mesure3.

La courbe obtenue en r´eponse `a la force ´electrostatique est repr´esent´ee dans la partie inf´erieure de la figure 5.22 (courbe e). Elle a ´et´e obtenue en utilisant une tension de d´ecalage de 30 V et une amplitude de modulation de 5 V, la pointe ´etant `a environ 200 µm du r´esonateur. On a utilis´e l’analyseur de spectre en mode “max hold” pour enregistrer les niveaux maximums obtenus `a chaque fr´equence au cours des diff´erents balayages. La r´esolution spectrale ´etant de 10 Hz, chaque balayage dure environs 20 s. La fr´equence de l’excitation est lentement balay´ee avec une p´eriode non multiple du temps de balayage de l’analyseur pour pouvoir obtenir une densit´e de points de mesure suffisamment importante. Un programme ´ecrit sur un PC r´ecup`ere les spectres pour extraire les maxima locaux correspondant `a la r´eponse `a la modulation, ce qui donne les points de la courbe (e).

On constate au premier abord une dissym´etrie importante dans la r´eponse du r´esonateur. Un creux apparaˆıt aux fr´equences sup´erieures `a la fr´equence de r´esonance. On peut interpr´eter cet effet `a partir de la formule (5.32). La susceptibilit´e χ0 correspond en g´en´eral aux ailes `a basse fr´equences des modes ayant des fr´equences de r´esonance sup´erieures (en 1/Mn2n), les modes de fr´equence de r´esonance inf´erieure ayant une contribution plus faible (en −1/Mn2). On peut donc supposer χ0 r´eelle et positive. Par contre le mode r´esonnant a une phase qui d´epend de l’´ecart entre la fr´equence de modulation et la fr´equence de r´esonance : si on l’excite `a une fr´equence nettement inf´erieure `a sa fr´equence de r´esonance, il va r´epondre en phase avec l’excitation alors qu’il va r´epondre en opposition de phase si on module `a des

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La masse effective ´electrostatique est beaucoup plus d´elicate `a d´eterminer que la masse effective optique. Elle d´epend de la forme de l’´electrode utilis´ee et de sa distance au micro-r´esonateur, et son profil spatial n’est en g´en´eral pas gaussien.

fr´equences nettement sup´erieures. En fonction de la fr´equence, le fond m´ecanique va donc s’ajouter ou se retrancher de la r´eponse du mode propre r´esonnant, et c’est ce que l’on ob-serve exp´erimentalement : les courbes (g) et (h) de la figure 5.22 repr´esentent respectivement les contributions du mode r´esonnant et du fond, qui s’ajoutent `a basse fr´equence et se re-tranchent `a haute fr´equence pour donner l’ajustement (f) des points exp´erimentaux. L’accord est excellent, d’autant plus que la fr´equence de r´esonance est la largeur du mode sont en fait d´eduits du spectre de bruit thermique.

On peut caract´eriser de fa¸con plus pr´ecise l’effet d’annulation `a partir de l’´equation (5.32). Le minimum de la susceptibilit´e est atteint lorsque la partie r´eelle de la susceptibilit´e du mode r´esonnant compense le fond χ0. En supposant Γ ≪ Ωm et le fond χ0 petit devant la valeur |χ[Ωm]| = 1/MΓΩmatteinte `a r´esonance, la fr´equence Ωmincorrespondant au minimum v´erifie :

M Ω2min= M Ω2m+ χ−10 . (5.33)

La position du minimum d´epend donc du rapport entre la susceptibilit´e `a basse fr´equence 1/M Ω2m du mode r´esonnant, et le fond χ0 de tous les autres modes. Plus la contribution χ0 du fond est importante, plus la fr´equence Ωmin du creux se rapproche de la fr´equence de r´esonance Ωm. La susceptibilit´e m´ecanique correspondant au minimum atteint `a la fr´equence Ωmin est purement imaginaire et v´erifie :

χ[Ωmin] · χ[Ωm] = χ20. (5.34)

Autrement dit, les niveaux du pic `a r´esonance et du creux `a la fr´equence Ωminsont, en ´echelle logarithmique, sym´etriques par rapport au niveau χ0 du fond, comme on peut le voir sur la figure 5.22. L’ajustement repr´esent´e par la courbe (f) est en bon accord avec les r´esultats exp´erimentaux sauf au voisinage du minimum. Il faut noter toutefois la tr`es grande dyna-mique du signal, puisque l’´ecart entre le pic `a r´esonance et le creux est sup´erieur `a 50 dB. Le fait que le creux observ´e ne soit pas aussi prononc´e que dans l’ajustement th´eorique peut ˆetre dˆu `a l’existence de parasites ´electromagn´etiques rayonn´es par la pointe et par le dispositif ´electrostatique. On aurait pu essayer de s’en affranchir en rapprochant la pointe du r´esonateur car on augmente alors le signal sans modifier les parasites, mais nous avons pr´ef´er´e ne pas prendre le risque d’abimer le micro-miroir.

On a choisi ce mode propre car il est bien isol´e des autres modes propres et sa dyna-mique par rapport au fond est suffisante pour observer cet effet d’annulation de la r´eponse m´ecanique. Ainsi, cet effet n’est pas visible avec le mode propre oscillant `a 814 kHz car sa dynamique par rapport au fond m´ecanique est importante, ce qui d´eplace la fr´equence du creux vers des fr´equences trop ´eloign´ees de la r´esonance. De semblable effets d’annulation ont ´et´e observ´es avec l’autre exp´erience d´evelopp´ee dans l’´equipe mais en r´eponse `a une force de pression de radiation [106]. Cette annulation permet de s’affranchir du bruit de pression de radiation qui s’exerce sur les miroirs et d’´eliminer les effets quantiques d’action en retour dans la mesure optique des petits d´eplacements [107]. Ceci pourrait en particulier s’av´erer utile pour am´eliorer la sensibilit´e des d´etecteurs r´esonnants d’onde gravitationnelles au-del`a de la limite quantique standard.

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