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Mesure des représentations du leadership politique féminin : une analyse

PARTIE I : LES CONSTRUCTIONS CONCEPTUELLES ET THEORIQUES

Chapitre 6 : Analyse descriptive des populations françaises et camerounaises

2. Méthodologie

2.2. Mesure des variables inspirées de l’approche du comportement planifié

2.2.3. Mesure des représentations du leadership politique féminin : une analyse

Pour étudier l’impact des différences culturelles sur la manière dont nos participants construisent et pensent le leadership politique féminin, nous avons opté pour la méthode des associations libres. Cette technique permet d’explorer les significations spontanées face à l’objet de représentation ; elle est alors particulièrement adaptée à la mise en évidence de catégories cognitives sur le plan de leur organisation et de leur systématisation par les sujets (Abric, 1994). L’intérêt de cette technique se trouve également dans sa capacité à pointer les mécanismes d’approbation sociale (Valence & Roussieau, 2005).Cette méthode propre à l’étude des représentations sociales permet de repérer les éléments constitutifs de la représentation et d’en connaitre l’organisation et la structure (Pachtchenko-de Preville, 2006). Elle permet de « révéler les éléments constitutifs du champ sémantique activé par un mot-stimulus, c’est-à-dire tout le dictionnaire de la représentation (Pachtchenko-de Preville, 2006, P.63). La méthode des associations libres permet d’accéder plus facilement à l’univers sémantique de l’objet étudié du fait de sa nature projective. Il existe deux méthodes d'association verbale, celle d'évocation hiérarchisée et celle des schèmes cognitifs de base. La méthode d'évocation hiérarchisée (Vergès, 1992) consiste à faire produire aux sujets des associations à partir d'un mot inducteur. On demande aux sujets de produire un certains nombres d'associations, à partir d'un mot ou d'une expression, qu'on appelle inducteur. Vergès fait l'hypothèse d'un fonctionnement cognitif ou certains termes sont plus immédiatement mobilisés pour exprimer une représentation (Vergès, Tyszka & Vergès, 1994). On parle alors de saillance, par la fréquence d'un terme à une question d'évocation. L'analyse des mots suite à l'évocation hiérarchisée, peut se faire soit en s’intéressant aux fréquences ou alors à l'analyse du rang dans la liste de mots cités. On arrive ainsi à croiser analyse quantitative et analyse qualitative en croisant la fréquence d'apparition, indicateur de la saillance, avec le rang moyen qui reflète l'importance que le sujet accorde à l'item. Quatre catégories peuvent être possibles dans ce croisement:

1- Les items fréquemment évoqués et dont le rang moyen dans la suite associative tend vers 1. 2- Les items peu évoqués et dont le rang moyen tend vers 1.

3- Les items fréquemment évoqués et dont le rang moyen tend vers 5 (le rang le moins important).

108 4- Les items peu évoqués et dont le rang moyen tend vers 5.

Les items qui appartiennent à la première catégorie sont saillants et significatifs pour toute la population, ils ont donc, la plus forte probabilité d'appartenir au système central de la représentation car ils reflètent une congruence positive entre les deux critères. Cependant Abric (2003), propose d'abandonner le critère du rang moyen pour lui substituer celui du rang d'importance. En effet le rang moyen suppose que le premier mot produit par le sujet est le plus important pour lui, or ce n'est pas forcément le cas. Avec le rang d'importance, les sujets hiérarchisent eux-mêmes ses productions par ordre d'importance. L'hypothèse de la centralité se fait en regardant les seuils d'évocations et d'importances. Si 10% de la population a associé un même mot, alors ce dernier présente une centralité quantitative. Pour qu'un élément soit central, il doit avoir à la fois une centralité quantitative, mais aussi qualitative. La centralité qualitative est donnée par l'importance moyenne accordée à une production de données. Cependant, il faut rappeler que cette méthode permet uniquement de faire une hypothèse de centralité, on ne peut pas être sûr de la centralité des éléments d’où l’importance de mesurer l’importance des éléments identifiés dans un questionnaire pour une population plus importante.

Au cours des 40 entretiens (20 au Cameroun et 20 en France enregistrés sur support audio) que nous avons menés avec les participants camerounais et français, il leur était demandé d’indiquer tous les mots ou expressions qui leur viennent spontanément à l’esprit après avoir entendu un ou plusieurs mots stimuli. La consigne était d’indiquer quatre mots selon la technique dite multiple des associations libres, où le nombre de mots est fixé d’avance. Et comme l’ont relevé Abric, (1994) ; Flament et Rouquette, (2003), les mots les premiers employés sont prédominants dans la représentation. Concrètement dans cette partie portant sur les représentations du leadership politique féminin, nous avons cherché à collecter des évocations lors d’une tâche d’associations de mots afin de repérer les contenus des représentations. Un ensemble de mots stimuli a été utilisé : Leadership

politique féminin. Les verbatim recueillis aux entretiens ont été analysés avec le logiciel d’analyse

EVOC 2000. Il s’agit d’un logiciel d’analyse lexical élaboré par Vergès qui l’a utilisé pour la première fois dans une étude portant sur les représentations sociales de l’argent (Vergès, 1992). A la suite de Vergès, d’autres auteurs vont également l’utiliser (Dany & Apostolidis, 2002 ; Doutre, 2008). Nous avons pu ainsi procéder à une « lemmatisation » c’est-à-dire, regrouper les réponses qui ne diffèrent entre elles que selon un critère grammatical (Flamment & Rouquette, 2003). Nous nous sommes intéressés uniquement au critère le plus classique de l’analyse à savoir les fréquences des évocations et leur rang d’importance (Annexe 3). Les mots qui ont une fréquence supérieure ou égale à 10% (Pachtchenko-de Preville, 2006) ont été retenus, comme nous le montre le tableau ci- dessous.

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Tableau 7 : Termes les plus fréquents associés aux mots-stimulus leadership politique féminin par

les participants camerounais et français.

Rang< 2.5 Rang>2.5

Cameroun France Cameroun France

ZONE1 ZONE2

Fréquence >10 Elles feraient mieux de s’occuper de leur mari

et enfants (F68,Rg 1,3)

Elles sont à l’écoute (F60, Rg 1,14)

Elles sont pragmatiques (F57, Rg 2,3)

Elles pensent plus au développement de la

société (F 52, Rg 2,33) C’est dévalorisant pour

une femme (F24, Rg 2.15) C’est un effet de mode (F69, Rg 1,18) Elles apportent plus de moralité en politique (F66, Rg 1,3) C’est une chance

pour la société (F22, Rg, 2,2) Elles sont plus à l’écoute (F17, Rg 2,11) Elles sont inconscientes (F18, Rg 2.1) Insoumises (F25,Rg 3) Pistonnées (F 18, Rg 2,8) ZONE3 ZONE4 Fréquence <10 Courageuse (F 6, Rg 2,6) Sans scrupule (F 4, Rg 3,1) Charismatique (F4, Rg 2,66) Personne alibi (F3, Rg 3.14) Ambietieuse (F7, Rg 3.11) C’est des modèles

110 F : Fréquence

Rg : Rang

Le tableau ci-dessus présente la structure de la représentation du leadership politique féminin et permet de mettre en évidence des éléments plus ou moins forts, et des informations dites ambigües (Flament & Rouquette, 2003). Un élément dit fort possède une forte fréquence d’apparition et un rang moyen faible. Il est présent dans la zone centrale de la représentation, c’est- à-dire la zone 1. Un élément faible possède une faible fréquence d’apparition et un rang moyen élevé, il est dans la zone périphérique, soit la zone 4. Les zones 2 et 3 regroupent les termes ayant soit une fréquence d’apparition forte et un rang moyen élevé, soit une fréquence d’apparition faible et un rang moyen faible. Ce sont donc des termes plus flous, dits périphériques. Dans l’ensemble, les éléments de la zone 1 et 4 sont ceux qui seront utilisés pour construire notre échelle sur les représentations du leadership politique féminin. Cette échelle sera administrée à l’ensemble de nos participants. Les mesures de notre échelle vont de 1= Pas du tout d’accord à 5= Tout à fait

d’accord. Exemples d’items Camerounais: « Célibataire ou marié, le statut matrimonial de la femme camerounaise peut être un obstacle pour occuper une position de leader (député, maire, etc.) en politique » ; « Dans notre pays, le sens pragmatique souvent reconnu aux femmes élues politiques leur permet de se démarquer en politique ». Exemples d’items Français : « En France, la présence des femmes à des positions de leaders en politique est plus un effet de mode qu’une véritable nécessité » ; « En France la présence des femmes à des positions de leaders en politique pourraient apporter plus de moralité ».