• Aucun résultat trouvé

2. Quantifier l’utilisation des produits phytosanitaires : Réflexions théorique et empirique

2.3. Quantification, mesure et modélisation de l’utilisation des produits phytosanitaires

2.3.2. Fondements empiriques : quantification, mesure et modélisation de l’utilisation des produits phytosanitaires

2.3.2.3. Mesure indirecte de l’utilisation des produits phytosanitaires : la certification

La confiance ébranlée des consommateurs vis-à-vis des produits agricoles a nécessité de définir et mettre en œuvre des stratégies de protection et de contrôle. Acteurs publics et acteurs privés ont défini des normes et standards pour répondre notamment aux exigences croissantes des consommateurs.

Etre certifié signifie que le producteur adopte des pratiques conformes au cahier des charges défini par les clients. Celui-ci répond aux exigences de ces clients en matière notamment de qualité. La certification est aussi un passeport pour la commercialisation dans la mesure où il permet au producteur d’accéder à certains marchés. La mise en conformité avec le cahier des charges est par ailleurs validée par un organisme certificateur tiers, ce qui renforce la confiance des clients en ce certificat. Dans le cadre de la certification GlobalGap51, les « Bonnes Pratiques Agricoles » (GAP : Good Agricultural Practices) sont définies dans le cadre d’un cahier des charges. Ces bonnes pratiques peuvent être adoptées au niveau de l’exploitation (option 1) ou au niveau d’un groupe de producteurs (option 2). La certification formalise des pratiques qui peuvent être qualifiées de majeures ou mineures. Un exemple de pratique majeure est le fait d’être en possession des listes de Limite Maximale des Résidus (LMR) sur les marchés de destination. Un exemple de pratique mineure est le fait de faire appel à un laboratoire chargé des analyses de résidus qui soit accrédité par les autorités nationales compétentes, ou encore assorties d’un statut de recommandation comme le fait de respecter la procédure d’échantillonnage. La certification permet ainsi de contrôler les pratiques des producteurs.

Les exigences de la grande distribution sont une réponse aux exigences publiques considérées comme insuffisantes : « Au niveau du secteur de production, la norme publique est souvent considérée par les détaillants comme insuffisante et devant donc être complétée par les normes définies et contrôlées par les acteurs privés »52 (Codron et al., 2005a, p. 272).

Les études relatives à la gestion de la qualité sanitaire des produits, et plus précisément à l’adoption d’innovations environnementales, ont essentiellement porté sur la certification GlobalGap (Fernandez-Cornejo, 1996 ; Dörr et Grote, 2009 ; Souza Monteiro et Caswell, 2009 ; Kersting et Wollni, 2011). Elles ont porté, dans une moindre mesure sur l’adoption : du label Agriculture Biologique (Burton et al., 2003), de la norme ISO 900053, relative au management de la qualité, ou de l’HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point)54 (Caswell et al., 1998 ; Zhou et al., 2011), sur les cahiers des charges des distributeurs (Filière Qualité Carrefour ...) ou encore sur les chartes portées par les producteurs comme la charte nationale tomate ou Verger EcoResponsable (Codron et Habib, 2003).

51www.globalgap.org/uk-en/for-producers/crops/FV/

52 « In the produce sector, the public standard is often judged by retailers to be insufficient and thus must

complemented by standards defined and monitored by private actors »

53http://www.iso.org/iso/fr/iso_9000

Considérée de façon dichotomique, l’adoption d’un certificat de bonnes pratiques différencie les exploitations certifiées des autres exploitations. Cette dichotomie présente comme avantage majeur d’observer et de caractériser des producteurs en fonction de leur gestion de la qualité sanitaire effectivement mise en œuvre. Une telle différenciation souligne l’importance des exigences sanitaires requises par les acheteurs ainsi que les débouchés qui en découlent pour le producteur.

Une limite à cette approche est de considérer chacune des deux sous-populations définies comme homogène au regard de la gestion de la qualité sanitaire. Alors que les producteurs adoptants sont supposés avoir des pratiques agricoles comparables, ils ont pour point commun de répondre au minimum aux exigences associées à l’adoption de la certification considérée. Certains producteurs peuvent avoir été précurseurs dans cette adoption et anticiper dans leurs pratiques de nouvelles exigences plus restrictives alors que d’autres producteurs peuvent n’avoir été adoptants que récemment. La notion même d’adoption peut ainsi renvoyer à des pratiques différentes alors même que tous les producteurs répondent a minima aux exigences requises pour être adoptants. De la même façon, parmi les producteurs non-adoptants, de nombreuses différenciations peuvent être faites selon que l’exploitant ne souhaite pas du tout adopter la certification, qu’il souhaite l’adopter à court ou moyen terme ou qu’il soit déjà en cours de conversion.

Cette limite, relative à toute catégorisation (cf. sous-section 2.2) renvoie essentiellement à l’homogénéité des sous-populations identifiées au regard du critère considéré. Cette hypothèse d’homogénéité n’est pas sans incidence sur les modélisations mises en œuvre et surtout sur l’interprétation des résultats obtenus. En effet, toute modélisation qui repose sur une catégorisation de la population fait l’hypothèse que chacune des sous-populations est homogène. Or, comme nous venons de le souligner, la sous- population des exploitants adoptants peut être considérée comme hétérogène au regard de la date d’adoption. De même, la sous-population des non-adoptants peut être hétérogène suivant la volonté de l'agriculteur, à court ou moyen terme, d’adopter la certification considérée. Cette limite est à mettre en perspective avec la nature des modèles considérés. Les études empiriques qui ont mesuré l’utilisation des produits phytosanitaires à travers l’adoption d’une certification reposent toutes sur des modèles en coupe transversale. Il est alors possible de considérer que l’homogénéité observée au temps (t) révèle un comportement homogène au sein des différentes catégories identifiées.

Dans le cas de la certification GlobalGap, il apparaît important de souligner que, dans les études identifiées, l’option souscrite (option 1 : souscription individuelle vs option 2 : souscription d’un groupement de producteurs) n’est jamais mentionnée, ne permettant pas d’apprécier dans quelle mesure cette démarche d’adoption revêt un caractère individuel ou collectif, ni dans quelle mesure le contexte environnemental conditionne le mode d’adoption de cette certification.

La certification est l’une des mesures indirectes de l’utilisation des produits phytosanitaires. Une autre mesure souvent considérée dans les études empiriques porte sur la mise en œuvre de pratiques IPM.

2.3.2.4. Mesure indirecte de l’utilisation des produits phytosanitaires :