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RICA Unité = exploitation

3.3.2. L’adoption d’innovations est conditionnée par l’environnement dans lequel évolue l’exploitant

3.3.2.2. Codétermination de la stratégie commerciale et de la stratégie productive

3.3.2.2.3. Circuit court et durabilité environnementale

L’enjeu de la durabilité environnementale est celui avec lequel la vente en circuit court est le plus souvent assimilée (Penker, 2006 ; Maréchal et Spanu, 2010). Plus précisément, deux niveaux d’activité sont considérés: l’activité productive et l’activité de distribution (Aubert et Enjolras, 2015). En effet, les produits vendus via les circuits courts sont assimilés à des « produits à faible impact environnemental eu égard à leurs conditions de production et de distribution » (Loi 2014- 1170 du 13 Octobre 2014 d’avenir pour l’Agriculture, l’Alimentation et la Forêt).

• Activité de distribution

Le premier argument avancé est que la vente en circuit court induit une réduction des emballages et des conditionnements des produits (Ministère de l'Alimantation de l'Agriculture et de la Pêche, 2009b). Le second est que la proximité entre producteur et consommateur se traduit par une réduction des produits agricoles et donc des émissions de gaz à effet de serre (Penker, 2006). Si le premier argument est entendu unanimement, le second porte à discussion. La relation entre d’une part la proximité entre producteur et consommateur et d’autre part la réduction des émissions de gaz à effet de serre est plus complexe qu’il n’y paraît et nécessite de considérer différents paramètres. Premièrement, cette relation est à conditionner par la distance du consommateur au lieu d’achat. En effet, « la vente directe n’implique pas systématiquement un moindre déplacement du consommateur qui peut être amené à se déplacer davantage en cas de dispersion des points de distributions » (ADEME, 2012). Deuxièmement, la dimension logistique à travers notamment le remplissage des camions est un élément indispensable dans la mesure où une faible distance parcourue par le producteur ne signifie pas pour autant que les émissions de

gaz à effet de serre sont moins importantes. Afin de s’en persuader, il faut considérer les émissions conditionnellement au mode de transport. Pour un kilo et un kilomètre parcouru, une camionnette de moins de 3,5 tonnes à un impact 10 fois supérieur à celui d’un camion de 32 tonnes et 100 fois supérieur à celui d’un cargo transocéanique (ADEME, 2012). Ainsi, « si la logistique est optimisée (adéquation moyen de transport/volume transporté, optimisation du circuit de livraison, remplissage du camion...), les circuits courts peuvent s’avérer très performants du point de vue du transport jusqu’au point de distribution » (ADEME, 2012).

• Activité de production

L’existence d’un lien entre commercialisation en circuit court et plus grand respect de l’environnement est souvent supposée (Alim'Agri, 2010 ; Dufour et Lanciano, 2012). Ainsi, le Plan d’Action visant à développer les circuits courts va de pair avec des « modes de production durables et respectueux de l’environnement ». Il a été démontré que les exploitations qui vendent en circuit court ont généralement une logique de production moins intensive et plus respectueuse de l’environnement (Kotilla et Rönni, 2008 ; Maréchal et Spanu, 2010 ; ADEME, 2012). Un des arguments clef est que la proximité du producteur et du consommateur se traduit par une diminution du délai récolte-vente. Si la vente en circuit court est souvent associée à un plus grand respect de l’environnement, cette relation doit toutefois être conditionnée par la nature des produits considérés, et plus précisément par les conditions de production qui en découlent. Des produits dits de saison, c’est-à-dire dont la production ne nécessite pas de serres chauffées, ont des émissions de gaz à effet de serre inférieurs aux autres produits. De ce fait, la vente de produits saisonniers est soulignée comme « crucial(e) pour l’impact énergie-effet de serre » (ADEME, 2012). Cette prise en compte de la saisonnalité est d’autant plus importante à considérer que « des aliments produits localement mais ‘hors saison’ sous serre chauffée pourront consommer plus d’énergie et rejeter plus de gaz à effet de serre que des produits importés où ils sont cultivés en plein air, même en incluant le transport » (ADEME, 2012). Ceci permet notamment de comprendre pourquoi les recommandations du Ministère portent simultanément sur la valorisation de la vente en circuit court et des produits de saison.

Tant du point de vue de l’activité de production que de l’activité de distribution, la vente en circuit court semble répondre aux enjeux de durabilité environnementale. Une étude prospective commandée en 2010 par M. Dacian Ciolos, alors Commissaire Européen à l’Agriculture et au Développement Rural, synthétise l’interdépendance entre vente en circuit court et enjeux de développement durable, en soulignant « les intérêts économiques et sociaux des circuits courts (emploi local, soutien aux entreprises, interaction entre producteurs et consommateur...) » mais aussi « environnementaux (réduction des « food miles » et donc des émissions liées au transport de marchandises) » (Ciolos, 2012).

La codétermination de la stratégie productive et de la stratégie commerciale démontrée dans le cadre de notre étude souligne que les producteurs les plus enclins à développer l’une de ces deux stratégies répondent aux exigences des pouvoirs publics à un double titre. Les producteurs qui adoptent des pratiques plus respectueuses de l’environnement sont plus enclins à vendre en circuit court et, réciproquement, les producteurs qui vendent en circuit court sont les plus enclins à adopter de telles pratiques. Ce résultat met donc en exergue l’interaction des stratégies productives et commerciales et leurs effets directs et indirects qui vont dans le sens de politiques publiques en faveur d’une agriculture durable.

L’originalité des études réalisées est ainsi appréhendée à travers des mesures, des jeux de données ou encore des contextes différents. Les résultats obtenus viennent enrichir les études identifiées dans le corpus développé en partie 2. Les travaux menés confirment en effet l’importance des facteurs endogènes dans la mise en œuvre de pratiques plus respectueuses de l’environnement. Ils ont également permis de souligner que l’adoption d’innovations environnementales est conditionnée par des facteurs exogènes à l’exploitant et à son exploitation. Les articles publiés, ou actuellement en cours en soumission, sont présentés dans la section suivante. Leur contenu permet d’apprécier dans le détail les points saillants qui viennent d’être évoqués.

4. Articles

4.1. Aubert M. et Enjolras G. (2014). The determinants of chemical input use in