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Mesure des rotations, déformations et plastification

1.5 Microdiffraction des rayons X

1.5.2 Mesure des rotations, déformations et plastification

En un seul cliché de diffraction, on mesure ainsi simultanément tous les pics arrivant sur la caméra CCD, voir figure 1.25. Cette technique nous permettra de réaliser des carto- graphies autour d’une zone d’intérêt en prenant une image de diffraction en chaque point voulu. Le temps d’acquisition d’une image de diffraction est de l’ordre de la dizaine de secondes (durée d’exposition du faisceau + temps mort de lecture de la caméra CCD). Les

images sont ensuite traitées en étudiant la position de chacun des pics de diffraction ainsi que leur forme [18, 42].

Figure 1.25 – Image de microdiffraction Laue sur une couche de HgCdTe en coupe, avec les plans (hkl) indéxés.

En diffraction haute résolution de laboratoire, seule la longueur d’onde de la source (par exemple, λCu,kα1 = 1,54056 Å) permet la réalisation de la loi de Bragg (1.24) : on doit donc

scanner l’angle θ pour réussir à faire diffracter un seul plan (hkl) particulier. Au contraire, la microdiffraction de Laue en faisceau blanc est capable de détecter des changements dans les angles de diffraction des pics sans tilter l’échantillon. De manière tout à fait générale, toute rotation de la maille induit simultanément un changement d’angle de diffraction des plans et un changement d’énergie de diffraction qui n’est pas un problème grâce au caractère polychromatique du faisceau. Ainsi, le déplacement moyen de l’ensemble des pics de diffraction permet de déduire une rotation des plans cristallins et de remonter à une modification de l’orientation de la maille [20, 52], comme illustré sur la figure1.26.

Un changement de position relative des pics de diffraction, les uns par rapport aux autres (indépendamment du déplacement global de l’ensemble des pics), est une preuve d’apparition de contrainte dans l’échantillon et leur traitement de façon individuelle nous donne l’indication sur la composante déviatorique du tenseur de contrainte du cristal [60, 71, 83, 93]. Ce changement est dû à une déformation de la maille élémentaire du cristal modifiant les paramètres a1, a2, a3 et les angles α1 , α2 , α3 [21], voir figure 1.27.

La microdiffraction de Laue ne donne aucune indication sur les paramètres de maille ab- solus de l’échantillon mesuré, uniquement une déviation par rapport à une référence. Le changement de position relative des pics entre cette référence et la mesure nous permet de remonter uniquement à la partie déviatorique du tenseur de contrainte, soit 5 coefficients sur 6, seul le coefficient de dilatation volumique est manquant.

1.5. Microdiffraction des rayons X 33

Figure 1.26 – Schéma de l’effet de la rotation des plans cristallins sur la position des pics de microdiffraction. Les pics de diffraction d’un cristal de référence (a) sont attendus à une certaine position sur la caméra. Suite à une rotation des plans cristallins (b), ces derniers s’inclinent et l’angle de diffraction va donc changer pour l’ensemble des pics hkl du matériau.

maille du cristal, ui, tel que a1 et u1 soient colinéaires, a2 soit dans le plan u1u2 et u3

perpendiculaire au plan u1u2, schématisé en figure1.27. On peut donc définir une position

dans la maille cristalline grâce à un vecteur dans les coordonnées de la maille, v, ou grâce à un vecteur dans les coordonnées cartésiennes, vu. Le passage entre les 2 systèmes de

coordonnées se fait avec l’équation suivante :

vu = Av, (1.26) avec A= ©­ ­ « a1 a2cos(α3) a3cos(α2)

0 a2sin(α3) −a3sin(α2)cos(β1)

0 0 1/b3 ª ® ® ® ¬ (1.27)

où b3et β1 sont les paramètres de maille dans l’espace réciproque.

Une rotation, translation ou déformation de la maille cristalline va faire varier la position du vecteur v lié au cristal. On introduit Am la matrice de passage d’un vecteur v mesuré

dans les coordonnées cartésiennes du cristal calculée grâce à l’équation (1.27). Et A0 la

matrice d’une maille non contrainte qui convertit v dans les coordonnées cartésiennes du cristal, calculée grâce aux paramètres de maille et angles du cristal non contraint. Ainsi le vecteur est défini dans le système de coordonnées cartésiennes dans le cas contraint, Amv,

Figure 1.27 – Système de coordonnées cartésiennes (ui) lié à une maille élémentaire quelconque

définie par ai et αi. On définit u1 = a1 / |a1|, u3 = a1× a2 / |a1× a2|, et u2 = a3× a1· |a3× a1|

[21].

contraint :

Am = T A0 (1.28)

Les termes de translation ayant été éliminés en définissant la même origine pour les 2 systèmes de coordonnées, seuls les termes de rotation ou de déformation sont présents dans la matrice T. Le tenseur des déformations déviatoriques, i j0, est donc donné dans les coordonnées cartésiennes du cristal par :

0

i j = (Ti j+ Tji)/2 − Ii j (1.29)

où I est la matrice identité.

On peut donc calculer la déformation équivalente dans le matériau [58] grâce à :

εeq = 2/3 s (ε0 11−ε 0 22)2+ (ε 0 11−ε 0 33)2+ (ε 0 22−ε 0 33)2+ 6(ε 0 122+ ε 0 132+ ε 0 232) 2 (1.30)

On peut enfin définir le tenseur des contraintes déviatoriques par :

σ0 i j = 3 Õ k, l=1 Ci j klε0kl (1.31)

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contrainte équivalente dans le cristal :

σ0

eq = Eε 0

eq (1.32)

avec E le module de Young du matériau.

Les déplacements, absolus et relatifs, des pics étant traités, il reste une troisième in- formation contenue dans une image de microdiffraction de Laue : la forme des pics, qui amène l’information sur la qualité cristalline du matériau et une potentielle déformation plastique [43, 88, 94]. En effet, la largeur à mi-hauteur des pics nous renseigne sur la qua- lité cristalline de l’échantillon et la présence d’un pic éclaté est une preuve d’une relaxation plastique dans le cristal. Le pic a) de la figure 1.28 est un parfait exemple d’un pic de dif- fraction rond et avec une très faible largeur à mi-hauteur, signe d’une très bonne qualité cristalline de l’échantillon. Contrairement au pic b) qui présente à la fois un étirement du pic principal et un éclatement de ce pic en plusieurs taches de diffraction. L’étirement du pic, ou l’augmentation de sa largeur à mi-hauteur, peut venir d’une courbure des plans cristallins qui se traduit par un étalement de la tache de diffraction. L’éclatement des pics vient de l’apparition de plusieurs grains légèrement désorientés entre eux, qui diffractent donc à des angles différents. Ces 2 types de déformations sont illustrées sur la figure1.29. Grâce au faisceau blanc, ces déformations sont mesurées en une seule image, sans avoir besoin de tilter l’échantillon.

Figure 1.28– Forme de pics de diffraction dans le cas (a) d’un échantillon parfaitement cristallin et (b) d’un échantillon déformé plastiquement.

Figure 1.29 – Illustration des déformations plastiques dans l’échantillon. La courbure des plans cristallins (a) étire le pic de diffraction et l’apparition de grains désorientés (b) éclate le signal de diffraction en plusieurs pics.