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3.3 Indexation des pics et traitement final

4.1.2 Échantillon bi-spectral

La particularité de la mesure du εzz par cette technique en microdiffraction est qu’elle

est résolue en profondeur et que l’on peut déterminer la déformation en chaque point de mesure. Cette caractéristique est indispensable pour un échantillon dont l’écart de para-

Figure 4.8– Cartographie et profil de composition TEM de l’échantillon bi-spectral montrant les 2 couches de composition 0,3 et 0,22 en cadmium séparées d’une barrière riche en zinc.

mètre de maille évolue en profondeur, ce qui est le cas d’un échantillon de type bi-spectral : 2 couches de composition en cadmium différente sont épitaxiées par EJM sur le même sub- strat, séparées par une barrière les isolant électriquement [23]. Le but de cette structure est de pouvoir détecter 2 bandes spectrales différentes avec un même détecteur. Une car- tographie et un profil de composition réalisés par TEM de la structure étudiée est montré sur la figure 4.8. Une 1`ere couche est épitaxiée sur le substrat, avec un taux de cadmium de 0,3, pour une détection dans la bande MWIR, suivie d’une barrière riche en cadmium avec addition de zinc pour isoler électriquement cette dernière avec la couche supérieure comportant un taux de cadmium de 0,22, détection dans la bande LWIR. L’ensemble des couches et de la barrière fait environ 12 µm d’épaisseur avec la 1`ere couche de 6 µm, la barrière de 1,6 µm et la 2nde couche de 2,5 µm. Une dernière couche à x=0,3 est présente au

niveau de la surface pour réaliser une hétérostructure, suivie d’une ouverture de gap (OG) pour améliorer les performances électriques du détecteur.

Cet échantillon bi-spectral est le parfait exemple d’un échantillon où différentes com- positions sont présentes dans les couches et donnent lieu à différents écarts de paramètre de maille. En effet, le paramètre de maille du CMT dépendant de sa composition en cad- mium/mercure, un unique taux de zinc ne permet pas au substrat d’être accordé aux 2 couches. Le déplacement de chaque pic est tracé sur la figure4.9où l’on voit clairement les distinctions entre les différentes zones de l’échantillon.

Figure 4.9 – Déplacement individuel de chacun des pics de diffraction de l’échantillon bi-spectral en fonction de la profondeur dans le matériau. Les différentes couches et la barrière sont séparées par les lignes pointillées.

Les pics du substrat sont bien resserrés entre eux autour de 0 et juste avant de passer dans la couche, on voit un gradient de scission de 12,25 à 11,5 µm. Une fois totalement dans la couche (à une profondeur inférieure à 11,5µm) on remarque une scission des pics assez

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importante et marquée, accompagnée d’une désorientation de -28 arcsec. Cette scission est, comme sur les échantillons étudiés précédemment, stable sur toute l’épaisseur de la 1`ere couche. Une fois la barrière atteinte, les pics s’écartent encore plus et de façon brutale, dans le même sens que ceux de la couche en-dessous, ce qui montre une contrainte de même signe mais bien plus importante dans cette barrière. La 2`eme couche à x=0,22 montre par contre des pics très resserrés autour de la valeur de l’offset, ce qui semble être lié à une couche parfaitement accordée sur le substrat. Enfin dans la dernière couche, de composition x=0,3 identique à la 1`ere, les pics se ré-écartent de la même valeur que cette 1`ere couche, avec un gradient de scission similaire à celui observé dans le substrat. Ceci montre bien que la scission des pics est uniquement liée à la composition de la couche, et donc à son paramètre de maille. L’épaisseur d’environ 0,25 µm de l’ouverture de gap pose le même problème que pour l’étude de l’interface (voir section 4.1.1.4) et on ne la distingue pas ici.

On peut donc calculer la déformation bi-axiale en chaque point de mesure et ainsi tracer l’évolution de cette déformation sur toute la profondeur mesurée. La pente du déplacement des pics en fonction de leur position en x sur la caméra est donc déterminée tous les 0,25 µm et on obtient la figure4.10. Le ε|| est tracé en rouge et mis en positif pour pouvoir

le comparer directement au profil TEM de la composition en cadmium dans le matériau. On voit très clairement l’évolution de la déformation bi-axiale suivre les 5 différentes zones présentes dans ce matériau.

Dans le substrat, aucune déformation n’est présente jusqu’à 0,75 µm sous l’interface où l’on voit une montée de celle-ci pour atteindre la valeur de contrainte présente dans la couche de façon continue. Il est à noter que cette contrainte n’est pas liée à un gradient

Figure 4.10– Mesure du ε|| sur toute la profondeur mesurée, en rouge. Le profil SIMS du taux de

cadmium est superposé, en bleu, et on voit parfaitement la déformation dans le matériau suivre les évolutions de compositions dans celui-ci.

de composition. Notre technique permet donc de mesurer la zone d’influence de la couche dans le substrat, qui est de 0,75 µm. Dès que l’on passe dans la couche, ε|| atteint une

valeur de 5,1.10−4 et reste stable jusqu’à environ 1 µm sous la barrière où ce dernier baisse légèrement. On remarque la présence d’un gradient de composition à l’interface avec le substrat, de 0,4 à 0,3 en cadmium qui génère un écart de paramètre de maille de 3,1.10−4. Or on ne voit quasiment aucun effet de ce gradient sur le ε||, et on peut donc penser avoir

atteint la limite de plastification de cette couche puisque l’on observe une saturation de la valeur de déformation. De plus, on a vu dans la section 4.1.1.3 que pour une couche en compression, un écart de paramètre de maille de 4,1.10−4 suffisait pour atteindre la limite de déformation plastique dans le CMT.

Au passage de la barrière, la déformation augmente de manière spectaculaire et brutale jusqu’à 19,6.10−4 et diminue graduellement pour s’accorder de manière continue avec la seconde couche. Cette barrière est composée d’un taux de cadmium élevé, ce qui augmente son paramètre de maille, voir section 4.1.1.4, et conduit à cette valeur de déformation. Grâce à l’addition de zinc, sa limite de plasticité est grandement améliorée - celle-ci étant augmentée d’un facteur 4 par rapport à la couche de CMT dans le substrat de CZT avec un taux de zinc de 4 % - et cette valeur de presque 2.10−3n’est donc pas incohérente. Cette très forte déformation dans les 1,8 µm de la barrière est donc concentrée proche de l’interface avec la 1`ere couche, déformée plastiquement donc de manière non bi-axiale, mais s’atténue au fur et à mesure que l’on se rapproche de la couche supérieure qui semble quant à elle parfaitement accordée avec le substrat.

En effet, proche de la barrière une légère déformation de 1,7.10−4 permet d’accorder ces 2 matériaux, et sur les 1,5 µm restant, la déformation est nulle. Cette couche comporte donc un écart de paramètre de maille avec le substrat, et donc une contrainte bi-axiale négligeables. Enfin, la couche proche de la surface étant de même composition que la 1`ere (x=0,3), on voit une augmentation progressive du ε|| entre les 2 dernières couches pour

retrouver la même valeur de déformation dans cette dernière couche que dans la 1`ere. Ceci montre qu’une couche de même composition, donc même paramètre de maille, subit une déformation identique malgré les différentes couches épitaxiées entre celles-ci : il y a donc continuité de l’alignement en x des plans atomiques malgré la couche à x=0,3 qui semble être en limite du domaine plastique.

Pour comparer ces valeurs de déformation bi-axiale à l’écart de paramètre de maille trouvé en HRXRD, on mesure un spectre de diffraction 2θ-ω sur cet échantillon, voir fi- gure 4.11. L’ensemble des couches faisant 11,5 µm d’épaisseur, une mesure face arrière est réalisée pour visualiser le pic du substrat. La mesure HRXRD n’étant pas résolue en pro- fondeur, on ne peut pas directement identifier chacun des pics. Pour ce faire, on réalise une gravure chimique de l’échantillon pour enlever la couche de surface (ouverture de gap + couche à x=0,3). On observe la disparition du pic étendu à 2θ=71,35° qui correspond donc à l’ouverture de gap en surface et une diminution de l’intensité du pic à 2θ=71,4° qui est lié aux couches d’une composition en cadmium de 0,3 puisque l’on ne voit plus que

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Figure 4.11 – Scan 2θ-ω en face avant (bleu) et face arrière (rouge). Le pic du substrat se cale presque parfaitement avec celui de la couche à x =0,22.

la contribution de la couche enterrée, donc moins intense. Chaque pic est donc identifié et on peut maintenant comparer les valeurs des deux méthodes de mesure : les valeurs

Couche x=0,22 x=0,3 OG Barrière ε||, via HRXRD (-1.10−4) 0,5 3,4 9,5 19,8

ε||, via microdiffraction (-1.10−4) 0,9 5,1 na 19,6

de déformation de la couche à x=0,22 (moyennée sur la partie proche de la barrière et la partie à déformation nulle) et de la barrière mesurées en microdiffraction correspondent donc quasiment parfaitement avec celles mesurées par HRXRD. Pour la couche x=0,3 qui semble avoir atteint la saturation plastique, les valeurs ne sont pas comparables. On mesure cependant par HRXRD une déformation ε|| de seulement -3,4.10−4, qui est plus faible que

les -4,3.10−4 de la limite plastique. On peut donc supposer que le fait d’encapsuler cette couche entre 2 couches très déformées a un effet sur la déformation subit par celle-ci.

L’étude des déplacements individuels des pics selon x et leur dépendance selon la po- sition sur la caméra a donc mis en évidence une contrainte bi-axiale dans les couches étudiées. Elle a pu être comparée à l’écart de paramètre de maille entre la couche et le substrat mesuré en HRXRD, et les valeurs correspondent parfaitement. On a mesuré une forte augmentation de la déformation après un dépôt de passivation, déformation nette- ment réduite par le recuit. Cette mesure par microdiffraction à l’avantage de pouvoir être réalisée en tout point de l’épaisseur de l’échantillon et ainsi d’obtenir la variation de cette contrainte bi-axiale en fonction de la profondeur dans l’échantillon, ce grâce à quoi on a montré que la contrainte située à l’interface provient de l’interdiffusion des éléments chi-

miques. Cette résolution en profondeur est particulièrement pertinente dans le cas d’une structure bi-spectrale où différentes couches de différents paramètres de mailles sont épi- taxiées sur un même échantillon. Elle permet aussi de distinguer, peu importe le nombre de couches, la contrainte dans une couche d’une désorientation de celle-ci, et cela même pour des valeurs extrêmement faibles.