• Aucun résultat trouvé

Marc Debène *

Dans le document Polynésie française, 30 ans d’autonomie (Page 106-109)

Si l'Autonomie a 30 ans, et la loi organique qui porte son actuel statut 10 ans, l'autonomie fiscale est ici séculaire. Il y a donc eu autonomie avant l'Autonomie, autonomie financière pour les EFO et le TOM, autonomie fiscale depuis l'époque coloniale. Territoire fiscal indépendant du territoire national, la Polynésie française comme la Nouvelle Calédonie est liée à la République par une convention fiscale qui a pu amener la Cour des comptes à souligner, peut être rapidement, sa souveraineté fiscale. Comment le statut d'Autonomie prend-il en compte ces éléments? La compétence de principe de la Polynésie française lui permet de fixer elle-même ses règles financières et comptables et surtout de décider du contenu de sa fiscalité. L'autonomie financière et fiscale sont ici garanties par un pouvoir normatif, délibératif la première, passant par les «lois du pays impôts et taxes» pour la seconde. Mais, ce pouvoir financier est encadré par les dispositions de la loi organique (dont plusieurs ont été ajoutées en 2007 et en 2011) tant pour le budget et les comptes de la Polynésie Française qui restent traités sur un mode administratif s'apparentant au droit commun des collectivités territoriales de la République que pour la fiscalité. Si l'Autonomie peut être considérée de manière dynamique, il faut se demander si sur ces questions des évolutions ne seraient pas souhaitables. Déjà la loi organique de 2011 a aligné le régime contentieux des délibérations budgétaires sur celui de la loi du pays. Ne peut-on aller plus loin en introduisant des lois de finances du pays ce qui pourrait avoir deux types de conséquences: mieux intégrer les impôts et taxes dans le budget; et amener le pays à revoir son droit budgétaire dans le sens de l'efficacité et de la performance.

Although there has been 30 years of Autonomy and the organic law in its current form is of 10 years' standing, fiscal autonomy is centuries old. Therefore there was

autonomy before Autonomy, financial autonomy for the EFOs and the TOM, and fiscal autonomy in the colonial era. The fiscal territory being separate from the national territory, French Polynesia like New Caledonia is linked to the Republic by a fiscal arrangement which led the Court of Audit to emphasise early its sovereignty in fiscal matters.

How does the status of Autonomy deal with these matters? In principle, French Polynesia has the power itself to set the financial and accounting rules and to decide on the reach of its tax system. Financial and fiscal autonomy are guaranteed by a normative power, which is deliberative in the first instance, leading to "laws of the country on duties and taxes". But, this financial power is bounded by provisions in the organic law (several of which were added in 2007 and 2011) both for the budget and the accounts of French Polynesia which continued to be dealt with administratively under a common set of rules for the territorial entities of the Republic, and for tax.

If Autonomy can be considered as a dynamic concept, then it is necessary to enquire whether evolution on these matters would be desirable. Already, the organic law of 2011 has aligned the regime for dealing with budgetary disputes with that of the country's legislation. Would it be possible to go further and introduce finance laws which would have two sorts of consequence: a better integration of duties and taxes into the budgetary system; and secondly leading the country to a review of the efficiency and effectiveness of its budgetary laws.

Monsieur le Président, Madame la Ministre, Messieurs les Députés,

Mesdames et Messieurs les membres de cette assemblée, chers collègues, chers amis.

L'autonomie, si nous ne l'avions pas su, nous le saurions depuis ce matin, donne lieu à de nombreux débats qui peuvent être alimentés par les historiens, par les économistes, par les politistes, par les anthropologues… donc aussi par les juristes. Il y a un premier débat dont l'un ou l'autre peut se faire ici l'écho, c'est celui, on l'a vu, entre l'autonomie et l'indépendance. On se situe plutôt à ce moment-là sur un plan externe. Chez les juristes, ce serait plutôt au niveau du droit international que cette question serait posée.

Quand, en 1880, le Pays est annexé à la République, un rapport à la Chambre de députés de l'époque nous dit que: à ce moment-là, l'autonomie locale disparaît.

Cette autonomie locale, on peut aussi en parler sur le plan de ce que nous appelons le «droit interne», le droit constitutionnel, le droit administratif; et, là, on va notamment se demander si on est plutôt sur le registre de la libre administration des collectivités territoriales ou si l'on est passé à une autre question posée notamment par la formule, rappelée ce matin par le Président, selon laquelle la Polynésie se gouverne librement et démocratiquement.

En fait, je ne continuerai pas à développer ces questions, je ne reprendrai pas ces débats qui peuvent parfois avoir un caractère sidéral. Je ne m'interrogerai pas non plus sur le sexe des anges. Ce que je voudrais faire, c'est vous parler d'autre chose. Alors, ça peut paraître très ennuyeux puisque je vais vous parler de finances. Je vais vous parler d'impôts et de taxes. Je vais vous parler de budget, peut-être même de comptabilité à un moment ou à un autre. Mais, admettez – et les élus sont les premiers à le savoir – que ce sont, là, des questions capitales qui reviennent chaque année depuis très certainement le début de l'existence de ce pays, des questions vitales, des questions stratégiques.

La Cour des comptes et, sur place, les travaux de la Chambre territoriale des comptes nous alertent régulièrement sur un certain nombre de questions, essayent d'évaluer ce qui se passe concrètement sur le terrain, nous parlent de transparence ou d'absence de transparence, de performance ou d'absence de performance et, le fond, dans un cadre qui se caractérise justement par l'autonomie. Un des derniers rapports de la Cour des comptes est d'ailleurs consacré à l'autonomie fiscale et, lecteurs des rapports de la Cour des comptes, nous avions même pu lire – en s'étonnant un peu, il est vrai! – en 2012 que la Polynésie française et la Nouvelle- Calédonie possèderaient la «souveraineté fiscale». On va, là encore, beaucoup plus loin que l'autonomie. Je précise que ce terme me paraît quand même un peu exagéré, même si on le trouve sous la plume de personnes particulièrement compétentes en ce domaine.

L'autonomie fiscale qui nous permet d'aller plus loin que l'autonomie financière – et je reviendrais sur ces concepts d'autonomie fiscale et d'autonomie financière – sachant que, malgré leurs très grandes importances, elles ne figurent pas expressément dans la loi organique du 27 février 2004, à la différence d'ailleurs du statut de 1977 qui, lui, citait l'autonomie financière, et à la différence aussi de ce que l'on peut lire ailleurs, notamment là où l'État peut être qualifié d'«autonomique». Je prends l'exemple de la Constitution Espagnole qui, dans son article 156, dit qu'il ne peut pas y avoir véritablement d'Autonomie, au sens où nous l'entendons ici avec un grand A, s'il n'y a pas d'autonomie financière, s'il n'y a pas pour chacune des communautés espagnoles cette possibilité de maîtriser ses finances.

Je vous invite donc à réfléchir sur ces questions qui relèvent des finances publiques. Et pour en parler, et ça me permettra d'ailleurs d'aller encore plus en avant sur la question de la date de l'Autonomie. Je vais, en effet, d'abord vous parler de l'autonomie avant l'Autonomie. Je vais, dans un premier temps, revenir en arrière, voir ce qu'il en était hier. Puis, naturellement, dans un second temps, on essayera de voir ce qu'il en est aujourd'hui. Et puis, comme chacun a pu le rappeler ce matin, le statut d'Autonomie étant un statut évolutif et, naturellement, il est absolument indispensable de s'interroger de ce qu'il pourrait advenir demain. Donc, trois points: hier, aujourd'hui, demain.

Dans le document Polynésie française, 30 ans d’autonomie (Page 106-109)