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A La Définition de L'autonomie

Dans le document Polynésie française, 30 ans d’autonomie (Page 146-149)

De manière préalable, peut être mentionnée la décision n° 82-151 dc du 12 janvier 1983 (loi modifiant certaines dispositions relatives à l'élection des conseils municipaux dans les territoires de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française) même si elle concerne surtout la Nouvelle-Calédonie mais le conseil considère que le législateur compétent au titre de l'article 74 peut prévoir des règles distinctes de celles applicables dans les autres départements et territoires», compte tenu de la situation géographique et de la diversité ethnique de ce territoire (cons 3)38.

Ce qui est vrai pour la Nouvelle-Calédonie l'était aussi pour la Polynésie française. Cette loi rentre bien dans la définition de la situation particulière d'un T.O.M. au sein de la république, même sous la forme d'une loi ordinaire, à l'époque.

Ce sont assez logiquement, les lois statutaires qui fournissent les éléments les plus précieux quant à la définition de l'autonomie. Ces lois s'étant succédé et formant une forme de continuité, le conseil constitutionnel avait été conduit à préciser, en 1996, que son contrôle ne devait porter que sur les éléments nouveaux et pas sur ce qui avait été déjà jugé: «considérant que sous réserve de la détermination de leur caractère organique, il n'y a pas lieu de procéder à un examen de la constitutionnalité des dispositions de la loi organique soumise à l'examen du conseil constitutionnel ayant une rédaction ou un contenu identique à ceux des dispositions déclarées conformes à la constitution par les décisions précitées» (déc. N° 96-373 dc du 9 avril 1996 du 9 avril 1996 cons. 5, loi organique portant statut

d'autonomie de la Polynésie française). Toutes proportions gardées, cette attitude est aussi celle adoptée par le conseil pour l'examen des traités européens39.

Le conseil constitutionnel n'a pas eu la même position lors de l'examen de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, car il a estimé que le changement de circonstance de droit provoqué par la promulgation de la loi constitutionnelle précitée du 28 mars 2003 nécessitait un réexamen complet de la nouvelle loi organique statutaire, quand bien même celle-ci contiendrait des dispositions analogues à celles déjà prévues dans les lois statutaires de 1984 et de 1996: «considérant… qu'en raison du changement des circonstances de droit résultant de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, d'où sont issues les dispositions précitées, il y a lieu, pour le conseil constitutionnel, de procéder à l'examen de l'ensemble des dispositions de la loi organique, alors même que certaines d'entre elles ont une rédaction ou un contenu analogue aux dispositions antérieurement déclarées conformes à la constitution par le conseil constitutionnel dans sa décision n° 84-177 dc du 30 août 1984 relative à la loi du 6 septembre 1984 susvisée portant statut du territoire de Polynésie française et sa décision n° 96-373 dc du 9 avril 1996 relative à la loi organique du 12 avril 1996 susvisée portant statut d'autonomie de la Polynésie française» (déc. N° 2004-490 dc du 12 février 2004 cons. 9, loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française).

Il est certain que le conseil a eu une conception relativement stricte de l'autonomie, y compris (et peut-être surtout?).

Dans la décision précitée n° 2004-490 dc relative à la dernière loi statutaire en date et qui est, sans doute, la «grande décision» relative à la Polynésie française, elle est notamment connue pour avoir défini ou précisé la notion de «pays d'outre- mer».

Si la loi organique désigne la Polynésie française comme un pays d'outre-mer dans son article 1er40, cette dénomination n'emporte, aux yeux du conseil, aucun

39 Voir, par exemple, le considérant 10 de la décision n° 2007-560DC du 20 décembre 2007, Traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, « Considérant que c'est au regard de ces principes qu'il revient au Conseil constitutionnel de procéder à l'examen du traité de Lisbonne, ainsi que de ses protocoles et de son annexe; que sont toutefois soustraites au contrôle de conformité à la Constitution celles des stipulations du traité qui reprennent des engagements antérieurement souscrits par la France ». 40 Son alinéa 2 précise en effet que « Pays d'outre-mer au sein de la République, la Polynésie

française constitue une collectivité d'outre-mer dont l'autonomie est régie par l'article 74 de la Constitution ».

effet de droit. La Polynésie n'est qu'une collectivité d'outre-mer dotée de l'autonomie.

Le conseil constitutionnel ne connaît, en effet, que les catégories constitutionnelles: «considérant que l'article 1er de la loi organique, après avoir précisé la configuration territoriale de la Polynésie française, énonce les principes généraux applicables à la Polynésie française, collectivité d'outre-mer dont l'autonomie est régie par l'article 74 de la constitution; que, s'il désigne cette dernière comme " pays d'outre-mer ", cette dénomination n'emporte aucun effet de droit; que, dans ces conditions, l'article 1er n'est pas contraire à la constitution» (cons. 13).

En revanche, la dénomination de lois du pays, utilisée pour désigner certaines délibérations de l'assemblée de Polynésie française, n'est pas inconstitutionnelle même si ces actes restent bien des actes administratifs, comme le conseil le précise dans la même décision: «considérant qu'il ressort des dispositions soumises au conseil constitutionnel que les actes dits " lois du pays " procèdent des délibérations de l'assemblée de la Polynésie française et ont le caractère d'actes administratifs; qu'il doivent notamment respecter les principes généraux du droit, ainsi que les engagements internationaux applicables en Polynésie française» (cons. 90).

La même décision n° 490 dc a tenu également à rappeler le statut des parlementaires qui, bien qu'élus en Polynésie française, sont ceux de la nation tout entière. Le fait qu'ils soient élus dans cette collectivité d'outre-mer n'a qu'une signification géographique et n'emporte pas une quelconque forme de représentation locale, malgré la rédaction de l'article 4 de la loi organique selon lequel «la Polynésie française est représentée au parlement et au conseil économique et social dans les conditions définies par les lois organiques».

Les parlementaires représentent la nation, qu'ils soient élus en Polynésie ou en bourgogne: « considérant que, si députés et sénateurs sont élus au suffrage universel, direct pour les premiers, indirect pour les seconds, chacun d'eux représente au parlement la nation tout entière et non la population de sa circonscription d'élection; que l'article 4 de la loi organique doit dès lors être entendu comme se bornant à rappeler que, comme l'a déjà prévu le législateur organique, des élections législatives et sénatoriales se tiennent en Polynésie française; que, sous cette réserve, il n'est pas contraire à la constitution» (cons. 14). Enfin, le conseil a profité de l'examen des mesures qui peuvent être prises par les autorités de Polynésie en faveur de la population de Polynésie en matière d'accès à l'emploi, de droit d'établissement ou de protection du patrimoine foncier pour définir, au sens de l'alinéa 10 de l'article 74, ce qu'il faut entendre par le mot

«population». Celle-ci ne peut être comprise que comme désignant les «personnes justifiant d'une durée suffisante de résidence dans la collectivité d'outre-mer concernée» (cons. 31).

Les exemples pourraient être multipliés en matière de conduite des relations internationales, comme, par exemple, à propos du caractère non diplomatique de la toute forme de représentation de la Polynésie française. Le conseil a, en effet, jugé que « l'article 15 de la loi organique permet à la Polynésie française de " disposer de représentations auprès de tout état ainsi que l'une de ses entités territoriales ou territoire reconnu par la république française ou de tout organisme international dont cette dernière est membre ou tout organisme international du pacifique "; que, toutefois, cette faculté, qui n'appartenait pas jusqu'à présent à la Polynésie française, ne saurait, sans empiéter sur une matière de la compétence exclusive de l'état, conférer à ces représentations un caractère diplomatique; que, sous cette réserve, l'article 15 n'est pas contraire à la constitution» (cons. 27).

Si l'autonomie est proclamée par la loi organique, elle est encadrée par le conseil constitutionnel à la lumière de sa lecture de l'article 74, même modifié en 2003. La Polynésie dispose, néanmoins, d'une protection par l'édiction constitutionnellement nécessaire de lois organiques.

Dans le document Polynésie française, 30 ans d’autonomie (Page 146-149)