• Aucun résultat trouvé

L'AGENT DE CHANGEMENT

3 CHAPITRE : MÉTHODOLOGIE

3.2 MÉTHODE DE RECHERCHE

Compte tenu des caractéristiques de la question de recherche, la méthode d’accès au réel choisie est l’étude de cas. Cette méthode s’intéresse surtout aux spécificités des phénomènes113 en les étudiant dans leur contexte particulier, car la réalité professionnelle et

les actions entreprises par les acteurs ne peuvent pas être captées loin du contexte dans lequel ils évoluent.

En utilisant cette méthode, nous voulons faire émerger à la source, les données capables d’aider la compréhension du rôle de l’Agent de changement et de ses compétences clés, ainsi que les conditions favorables à leur développement. C’est pourquoi l’étude de cas semble

110 Savoie-Zacj, 2007, (en ligne). 111 Charmillot et Dayer, 2007 112 Savoie-Zacj, 2007, (en ligne). 113 Gagnon, Y. C., 2011.

85

particulièrement adaptée à notre recherche par sa capacité à revendiquer la description de la dynamique d’un système en particulier aux fins de compréhension. Ce faisant, il apparaît important de mentionner que nos attentes par rapport aux finalités de cette méthode sont de l’ordre des hypothèses et non pas des résultats exhaustifs.

Selon Paillé et Mucchielli (2008), toutes les méthodes qualitatives semblent utiliser des processus intellectuels universels « à base de comparaisons, de généralisation, de mise en relation et de construction corrélative d’une forme et d’un sens ». Toutefois, il n’existe aucune méthode qui apparaît meilleure que d’autres, mais seulement des méthodes plus appropriées compte tenu de la tradition dans laquelle le chercheur travaille114.

Bien qu’elle ne soit pas parfaite, la méthode de l’étude de cas comporte plusieurs avantages. D’abord, elle est considérée comme « intensive », car malgré le faible nombre de participants, elle possède la capacité de recueillir un nombre considérable d’informations sur chacun d’eux et sur le contexte environnant dans lequel ils évoluent (Roy, 2003). De plus, selon Roy (2003), cette méthode permet au chercheur d’approfondir davantage des phénomènes inattendus ou difficiles à mesurer. Finalement, l’étude de cas s’avère une méthode peu onéreuse, considération non négligeable dans un contexte de faisabilité de la recherche. Par ailleurs, les critiques à l’égard de l’étude de cas sont partagées en fonction de la position épistémologique personnelle de chacun et, généralement, font référence à la notion de validité interne et validité externe de la recherche. Concernant la validité interne, les opposants reprochent à cette méthode le fait de laisser une totale liberté au chercheur, liberté qui pourrait provoquer un biais des résultats. Cela étant dit, la validité interne d’une recherche qualitative s’exprime surtout par une préoccupation de cohérence interne des résultats et ne se réduit en rien à une analyse des causalités.

Ainsi, nous avons choisi d’utiliser la méthode de triangulation des données par la variation de personnes115. Selon Denzin et Lincoln (1994), le processus de triangulation est défini comme une démarche capable d’augmenter la validité et la qualité des résultats à l’aide d’une combinaison de diverses approches. Cette technique peut se mettre en action à différents

114 Trudel et Gilbert, 1999. Compléter la formation des chercheurs avec le logiciel NUDIST. Recherches qualitatives, vol.20, pp. 87-111. 115 Denzin et Lincoln, 1994.

86

niveaux de la recherche, autant en ce qui concerne les volets théorique et méthodologique, que pour les données.

Aux fins de notre étude, le choix a été arrêté sur la technique de triangulation des données par le recours à une tactique de diversification des participants. En effet, nous avons eu la chance d’obtenir la collaboration d’acteurs qui occupaient diverses positions hiérarchiques au sein de l’organisation, en plus d’être issus de directions différentes de l’organisation et de zones géographiques distinctes. Les participants occupaient des fonctions telles que Gestionnaire-Chef d’équipe, Gestionnaire-Directeur de service, ainsi que celle de Cadre membre du Conseil d’administration.

Ces acteurs provenaient de la Direction des ressources humaines, la Direction des opérations, la Direction des communications de même que de la Direction des ventes et services client. Les zones géographiques couvertes par cette étude sont au nombre de trois, soit la grande région de Montréal, la grande région de Québec, ainsi que celle du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Il apparaît important de mentionner qu’aux fins de la collecte des données, le chercheur s’est présenté dans chacun des lieux susmentionnés.

Concernant la validité externe des résultats, les critiques reprochent à la méthode de cas, le fait qu’elle s’attarde à des événements qui ne sont pas représentatifs de l’ensemble de la population et qui impliquent l’impossibilité pour le chercheur de généraliser les résultats116. Cependant, l’étude de cas emploie ouvertement un nombre limité de sujets et ne prétend nullement à une quelconque représentativité probabiliste. C’est pourquoi notre étude ne revendique en aucun cas un pouvoir de généralisation, car nous essayons de comprendre la richesse de l’activité humaine à travers le singulier des actions individuelles dans leur contexte spécifique.

Finalement, les critiques à l’égard de la méthode de cas font valoir l’aspect onéreux en termes de durée, tant pour le chercheur que pour les participants117. C’est pourquoi, ayant pu avoir accès à 30 heures d’entretien, nous sommes conscientes du précieux apport des acteurs à cette étude. Nous tenons ici à exprimer notre profonde gratitude à leur égard.

116 Roy, 2003.

87

3.3 POPULATION

3.3.1 Critères de sélection de l’organisation participante

Les critères de sélection de la population sont issus du cadre théorique et tiennent compte de nos objectifs de recherche. Ainsi, nous avons choisi trois critères conjointement inclusifs, à savoir, la nature et la structure de l’organisation, ainsi que l’historique organisationnel en matière de changement. Dans l’ordre, ces critères expriment d’abord une organisation multiservice, ensuite une organisation multisites et, enfin, une organisation avec à son actif au moins deux changements importants118 dans les cinq dernières années. En ce qui concerne la nature des changements, nous avons fait le choix de ne pas mettre de critères spécifiques hormis l’ampleur du changement. À cet effet, l’organisation participante a été choisie en fonction de son vécu en lien avec les changements qui l’ont bouleversée et qui ont façonné la grande majorité de ses départements. Dès lors, le changement pouvait être aussi bien d’ordre technologique, que social et culturel. C’est pourquoi nos efforts se sont concentrés afin de trouver l’organisation capable de répondre simultanément à ces trois critères. Justement, pourquoi ces critères? D’abord, le fait de proposer plusieurs services nous dévoile une organisation ayant une structure horizontale, où les directions forment des micro-entités plus ou moins autonomes. Ce critère apparaît utile dans la collecte des données par la diversité de points de vue qu’il offre, car l’accès se fait à travers la réalité des acteurs ayant des expériences et des visions différentes quant à leur rôle. Ensuite, l’ouverture sur plusieurs sites pour la même organisation augmente nos chances de recueillir des données riches et diversifiées, en fonction de leur environnement respectif, critère important quant à la triangulation des données.

Finalement, l’organisation a été sélectionnée en fonction de son vécu, car son historique de changement fait d’elle une organisation susceptible de recourir davantage à des Gestionnaires/Agent de changement. Ce faisant, et dans le but de mieux répondre aux objectifs de la recherche, ce dernier critère pouvait nous offrir l’accès à un plus grand nombre d’acteurs occupant le rôle d’Agent de changement.

88

Du reste, aux fins de cette étude, nous avons limité le choix de la population au secteur tertiaire, particulièrement à l’industrie des services. Cette industrie s’articule, entre autres, autour des technologies de l’information, du commerce électronique, ou bien de l’industrie touristique. Pourquoi ce choix? D’abord, pour des raisons pratiques d’accessibilité, car en 2012, ce secteur représentait 79,4 %119 du PIB du Québec. Pour les villes de Québec et de Montréal, ce ratio s’élevait respectivement à 87,7 %120 et 85,1 %.

De plus, le secteur des services a connu de nombreux bouleversements en raison de son environnement concurrentiel et des nouvelles technologies. Forcément, ces bouleversements ont contribué à façonner et à enrichir l’historique des changements des organisations et, de ce fait, à nous offrir un grand choix quant au type de population recherchée. C’est pourquoi l’industrie de services apparaît comme une option intéressante en tant qu’échantillon

occasionnel121 pour notre étude.

3.3.2 Recherche de l’organisation participante

Le premier grand défi entourant la réalisation de cette étude a été de trouver l’organisation participante. Une première phase a consisté à cibler certaines organisations de l’industrie des services aptes à répondre aux critères établis préalablement. C’est ainsi qu’à travers l’actualité économique et financière, en plus des recherches sur Internet, quinze organisations susceptibles de répondre favorablement aux conditions demandées par cette étude ont été identifiées.

En vue d’un premier contact, nous avons préparé un court texte résumant le projet, les conditions de participation et en mentionnant les coordonnées de la personne responsable. Ensuite, une deuxième étape a consisté à contacter par téléphone le Service des ressources humaines de chaque organisation identifiée précédemment, en l’invitant à participer à l’étude. Ces appels ont été faits entre septembre et novembre 2010 avec l’objectif d’approcher la personne capable de représenter l’organisation dans de telles circonstances. Dans l’éventualité où l’organisation souhaitait poursuivre ce processus et avoir des

119 Ministère des Finances et de l’Économie. Portrait économique des régions du Québec 2013. 120 Idem.

121 Selon Deldime et Demoulin (1994), un échantillon occasionnel « est celui qui est facilement accessible et disponible et qui renonce à toute représentativité ».

89

informations plus détaillées, une troisième étape prenait la forme d’un envoi par courriel de la présentation du projet122. Finalement, dans le cas où une organisation manifestait l’intérêt de participer à l’étude, l’étape finale se concrétisait avec la prise d’un rendez-vous dans le but d’entreprendre la collaboration.

Sur quinze organismes contactés au départ, seulement cinq ont souhaité recevoir le document explicatif. De ce nombre, une seule a décidé de continuer en donnant son accord de participation. Ce faisant, cette organisation acceptait consciemment de libérer son personnel pour trois à quatre heures d’entretien individuel par participant, suivies de quatre heures d’entretien de groupe avec l’ensemble des participants.