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1.1 Générer la WDM en laboratoire, le défi des hautes pressions

1.1.3 Une onde de choc permet de produire de la WDM

1.1.3.2 Lois de conservation et équation d’état du milieu

Dans cette section, nous allons développer les relations qui permettent de décrire la pro- pagation d’une onde de choc plane dans un matériau comme celui présenté sur la figure 1.6. Pour cela, les grandeurs thermodynamiques qui nous intéresserons seront la pression P, la densité ⇢ ainsi que l’énergie interne et cinétique E. Avant le passage du choc, le milieu se trouve être au repos, dans son état initial et ces variables seront indicées d’un 0. Le choc traverse ce milieu avec une certaine vitesse, notée Us et met en mouvement les particules du milieu à sa traversée à la

vitesse Up. Ce qui entraine un brusque changement des variables d’état citées précédemment :

elles seront alors indicées d’un 1.

Figure 1.6: Une onde de choc traverse un milieu initialement au repos (P0, ⇢0, E0) à la vitesse

Us; les particules du milieu choqué (P1, ⇢1, E1) sont alors mises en mouvement à la vitesse Up.

Il est alors possible de relier ces nouvelles grandeurs à celles du milieu initial, non perturbé, en appliquant à la transformation par choc les principes fondamentaux de la mécanique, à savoir la conservation de la masse, de l’impulsion et de l’énergie.

La conservation de la masse

Reprenons la figure 1.6 : l’onde de choc se propage à la vitesse Us pendant un laps de

temps t du point A au point C. En notant S la section comprimée correspondante, la quantité de matière m comprise entre les points A et C au temps t s’écrit alors :

m = ⇢0SAC = ⇢0SUs t

Or, au temps t+ t, le point A s’est déplacé, par le passage de l’onde, à la vitesse Up en

B. Alors que l’onde de choc se situe quant à elle en C : la matière comprise entre B et C a été comprimée, sa densité étant passée de ⇢0 à ⇢1 et peut s’écrire :

m = ⇢1SBC = ⇢1S(Us Up) t

La combinaison de ces deux équations nous fournit alors l’équation de conservation de la masse :

La conservation de l’impulsion

Considérons désormais la pression. Elle exerce, de chaque côté de AC, une force (P1-P0)S. De plus, l’impulsion du fluide mis en mouvement peut s’écrire :

dp = mUp = ⇢0SUs tUp

La conservation de la quantité de mouvement impose donc :

⇢0UsUp = P1 P0 (1.15)

La conservation de l’énergie

Enfin, considérons la conservation de l’énergie totale du système. L’énergie reçue par la section AC pendant le laps de temps t est égale au travail des forces extérieures. Or, ce travail est celui effectué par le piston, soit égal à SP1Up t. Et l’énergie reçue comprend une augmentation

d’énergie interne E1 - E0 par unité de masse ainsi que l’énergie cinétique 1/2Up2 par unité de

masse. Ce qui donne :

P1Up= (E1 E0+

1 2U

2 p)⇢0Us

Et qui peut être réécrit, en utilisant les relations 1.14 et 1.15trouvées précédemment : E1 E0=

Up2

2 +

P0Up

⇢0Us (1.16)

Ecrite sous cette forme, nous pouvons constater que dans le cas d’un choc fort, l’énergie est répartie de manière identique entre énergie interne et énergie cinétique puisque le dernier terme peut être négligé. Les températures atteintes à pression donnée seront donc élevées dans le cas d’un tel choc. De plus, en considérant le volume spécifique V=1/⇢, on peut transformer la dernière relation sous la forme suivante, appelée adiabatique dynamique, ou encore relation d’Hugoniot :

E1 E0 =

1

2(P1 P0)(V0 V1) (1.17)

Les équations 1.14, 1.15 et 1.17 constituent ainsi les relations de Rankine-Hugoniot, qui assurent la conservation des quantités hydrodynamiques du fluide choqué et non-choqué. Elles ont été obtenues sans aucune hypothèse concernant l’état thermodynamique du milieu considéré. Mais en réalité, les trois grandeurs d’état introduites (P, ⇢, E) ne sont pas indépendantes. Elles sont reliées par une relation, appelée équation d’état du milieu :

f (P, ⇢, E) = 0 (1.18)

Si cette équation d’état est connue, on se retrouve donc avec un système de quatre équations à cinq inconnues (P, ⇢, E, Us, Up) et il devient possible d’exprimer chacune de ces grandeurs en

fonction d’une seule d’entre elles ou d’établir des relations deux à deux. Par exemple, en éliminant les variables d’énergie interne de la relation d’Hugoniot 1.17, il est possible de lier directement les pressions et volumes spécifiques avant et après le choc. La courbe dans le plan (P,V) est appelée courbe d’Hugoniot :

P1 = PH(V1, P0, V0) (1.19)

Nous pouvons constater que cette courbe ne prend comme paramètres que les deux va- riables initiales P0 et V0 . Ce qui signifie que l’ensemble des états finaux accessibles après un

choc ne dépend uniquement que de l’état initial considéré. En particulier, l’ensemble des états accessibles à partir d’un état comprimé P0bis,V0bis (par exemple grâce à un premier choc) est

distinct de celui des états accessibles à partir de l’état P0,V0. Contrairement à une transformation

isentropique, le processus de génération du choc est un processus dissipatif et il est par conséquent impossible de décomposer une transformation due à un choc en deux chocs successifs à cause de l’irréversibilité de la transformation.

L’accroissement d’entropie dans une transformation produite par une onde de choc est, quant à elle, déterminée par les relations de conservation et l’équation d’état, indépendamment du détail des processus physiques qui l’engendrent et qui relèvent de la viscosité et de la conduction thermique : S1 S0 = P0V0 T0( 1) ln ⇢ P1 P0 ✓ ( 1)P1/P0+ ( + 1) ( + 1)P1/P0+ ( 1) ◆ (1.20) Ce saut d’entropie est d’autant plus important que le choc est fort. En effet, comme on l’a vu précédemment, plus le choc est fort, plus grande est la part de l’énergie utilisée pour éle- ver la température du milieu. Par conséquent, un choc comprime moins qu’une transformation isentropique parce qu’il chauffe plus la matière. Un choc faible se rapprochant d’une compression adiabatique réversible, le saut d’entropie sera moins grand. A pression finale donnée, la compres- sion sera donc meilleure et la température finale plus faible pour une succession de chocs que pour un choc unique. Toutes ces considérations sont résumées dans le schéma 1.7.

Dans certaines de nos expériences, nous avons été amenés à utiliser cette technique de multi-chocs afin d’atteindre des compressions plus importantes que celles pouvant être obtenues avec un simple choc. Ces multi-chocs peuvent être créés à l’aide de plusieurs lasers, mais également par réflexion de l’onde de choc à l’interface entre deux milieux. C’est ce que nous allons étudier plus en détail dans la section suivante.