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Une des motivations de nos travaux sur le rôle du frottement était de mieux comprendre l’origine des grandes dispersions expérimentales sur N1ainsi que l’écart entre ces mesures et les simulations

numériques existantes (sans frottement). La prise en compte des forces de frottement conduit à une réduction sensible de |N1| et permet d’accorder – dans une certaine mesure – simulations et expériences. La relative sensibilité au coefficient de frottement peut également contribuer à des dispersions selon la nature des particules utilisées

Toutefois, le frottement seul ne peut expliquer l’extrême disparité des résultats, surtout sur

N1. En particulier, les mesures de Couturier et al. (2011) et Dbouk et al. (2013) reportent des N1

respectivement nuls et positifs. Nos précédents résultats montrent que le N1 calculé dans une

suspension modérément confinée (Ly/a=20) conduit, en présence de frottement, à des valeurs

positives de N1. Ainsi, l’action conjointe du frottement et des parois pourrait expliquer ces résultats

expérimentaux.

La Fig. 10.20 reprend les résultats expérimentaux de Couturier et al. (2011) et Dbouk et al. (2013) avec nos prédictions de différences de contraintes normales dans le cas frottant (µd=0,5). Nous

présentons les valeurs totales N1,tot, c’est-à-dire obtenues sur l’ensemble de la suspension, ainsi que

les valeurs à cœur N1,cor epour servir de comparaison.

Fig. 10.20 – Différences de contraintes normales N1 (a) et N2 (b) en fonction de la fraction

volumique pour µd=0,5 et comparaisons avec les mesures (Couturier et al., 2011; Dbouk et al.,

2013). Ces grandeurs sont estimées sur toute la suspension (N1,tot, en orange) ou juste au cœur

(N1,cor e, en bleu). Le confinement vaut Ly/a=20.

Comme attendu, la valeur de N1change de signe pour une concentration suffisante (de l’ordre de

correct mais il reste néanmoins toujours difficile de recoller aux expériences de Dbouk et al. (2013). L’effet sur N2est sans surprise relativement limité et ne modifie pas la corrélation déjà satisfaisante

sans prise en compte des parois.

Nous conclurons que bien que les parois et le frottement permettent théoriquement d’obtenir des

N1positifs, il reste difficile de prédire parfaitement les comportements observés dans les expériences

de Dbouk et al. (2013). Bien évidemment, les résultats de simulation présentés dépendent du confinement et nous n’avons ici considéré que le cas Ly/a=20. Cette valeur est cependant proche de

celle utilisée dans les expériences de Dbouk et al. (2013) telles que présentées en Fig. 10.20 (Ly/a ≈

27). Cependant, des expériences complémentaires avec un confinement nettement moins important (Ly/a ≈ 100) mènent à des résultats similaires sur N1 alors que l’on s’attendrait à des valeurs se

rapprochant d’une suspension homogène (courbes bleues, sur la Fig. 10.20).

Une hypothèse est alors que les expériences – qui s’appuient sur une mesure de Σy y à la paroi –

seraient plutôt représentatives d’un état rhéologique de la suspension en proche paroi. Comme cet état reste inchangé quelle que soit la taille Ly du domaine (voir Fig. 10.5), ceci expliquerait que les

C

H A P I

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PERCOLATION DAMAS DANS LES SUSPENSIONS

Sommaire

11.1 Objectifs . . . 189

11.2 Taille des amas . . . 190

11.3 Percolation d’amas . . . 193

11.4 Seuil de percolation . . . 194

11.5 Quelques caractéristiques des amas percolants . . . 196

11.6 Lois d’échelle et exposants critiques . . . 200

11.7 Accord avec la théorie de De Gennes . . . 203

11.8 Lien avec la rhéologie . . . 204

11.1 Objectifs

Dès leur début, les simulations numériques de suspensions ont mis en évidence la formation d’amas de particules, s’agençant principalement selon l’axe de compression. La taille de ces amas augmente avec la fraction volumique et ils peuvent éventuellement s’étendre à travers tout le domaine : on parle alors d’amas percolants. Un amas percolant forme donc un réseau de particules connectées entre elles de part et d’autre du domaine.

Cette percolation peut conduire à des effets macroscopiques notables (chaînes de force en mécanique, transition isolant/conducteur pour la conductivité,...) et il apparaît donc important de mieux la comprendre et la prédire. D’un point de vue rhéologique, l’apparition d’amas percolants est susceptible d’engendrer une augmentation importante de la viscosité (Chang et Powell, 1993; Lefebvre, 2007b; Singh et Nott, 2000).

Le seuil de percolation, c’est-à-dire la fraction volumique critique φcr pour laquelle un amas

percolant apparaît, a été reporté dans quelques simulations – principalement en 2D monocouche par SD. Les valeurs sont relativement dispersées et s’étalent entre 0,25 et 0,40 (Chang et Powell, 1993; Meunier et Bossis, 2008; Phung et al., 1996).

A notre connaissance, il n’existe pas d’étude entièrement dédiée à la percolation dans les suspensions. L’objectif de ce travail est d’utiliser la simulation pour mieux comprendre les conditions d’apparition de la percolation (fraction critique) ainsi qu’étudier certaines caractéristiques de ces amas percolants. Nous aborderons en particulier le lien entre rhéologie et percolation afin d’en préciser la nature. Enfin, nous évaluerons dans quelle mesure nos résultats cadrent avec la théorie standard de la percolation. Cela sera également l’occasion de vérifier la pertinence des conjectures de De Gennes sur ce point (De Gennes, 1979).

D’un point de vue pratique, toutes les simulations de ce chapitre sont réalisées sur un temps d’environ 100 ˙γ−1une fois un régime établi obtenu (i.e., en écartant le transitoire initial). La config-

uration instantanée des particules est stockée tous les 0,01 ˙γ−1: nous disposons ainsi d’environ 104

configurations qui peuvent par la suite être étudiées à loisir.

Concernant le domaine de simulation, nous évaluerons différentes hauteurs Ly. La longueur

Lx (dans la direction de la vitesse) sera choisie égale ou supérieure à Ly : l’idée est ici de pouvoir

entièrement capter un amas dans le domaine de calcul dans le cas où celui-ci est orienté selon l’axe de compression à 135°. La taille Lz dans la direction de la vorticité sera maintenue à Lz=20a. Ainsi,

pour Ly=60a (la plus grande hauteur testée), le domaine de calcul est relativement imposant, de taille

60a × 60a × 20a. A φbul k=0,45, cela conduit à environ Np≈ 7500 particules.

Les concepts liés à la percolation (statistiques d’amas, effets de taille finie, seuils de percolation, etc.) pourront être trouvés dans des ouvrages de référence comme Torquato (2002).