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Les spécificités des différents rayonnements

H, et l’on peut en déduire un paramètre d’ordre orientationnel S2(H)également im-pliqué dans l’apparition d’une biréfringence de l’échantillon ∆n(H) sous champ (cf. section 3.3 p. 34). Un exemple de diffusion anisotrope est présenté dans la figure 3.4.

Figure 3.4 – Spectre 2D de diffusion anisotrope mesuré en DXPA, orienté sous l’ef-fet d’un champ magnétique ~H (représentation en échelle d’intensité logarithmique, en fonction de qk et q exprimés en nm−1). L’échantillon analysé est une suspension de bâtonnets magnétiques décrits au chapitre 7.

2.2 Les spécificités des différents rayonnements

La diffusion des rayons X et des neutrons aux petits angles sont tous deux des techniques de choix pour sonder les inhomogénéités d’un échantillon à l’échelle du nanomètre. Dans les deux cas, le rayonnement diffuse élastiquement aux petits angles (entre 0,1° et 10°) avec une longueur d’onde de 1 à 10 Å. Ces deux rayonnements diffusent sur les obstacles qu’ils rencontrent et en cela sont tout à fait analogues : les mêmes lois de la diffusion s’appliquent quelle que soit la nature physique de l’onde. Toutefois, les neutrons et les rayons X n’ont pas les mêmes propriétés d’interaction rayonnement-matière et donc ne voient pas les mêmes obstacles :

– les neutrons interagissent par interaction forte avec les noyaux atomiques, et sont sensibles à la densité de longueur de diffusion de chaque noyau atomique j,

notée6 b

j, que l’on relie à sa section efficace7 σ j.

– les rayons X interagissent par interaction électromagnétique avec les électrons des atomes, et sont donc sensibles à la densité électronique, directement relié au numéro atomique Z de chaque élément. La longueur de diffusion de chaque atome est alors bj = Zjbe, où be− = 0, 282 10−12cmest la longueur de diffusion de l’interaction « rayon X-électron ».

Pour chaque espèce chimique α, on calcule un terme de densité de longueur de diffusion ρα, propre à la nature du rayonnement choisi. L’onde incidente sera finalement diffusée par les inhomogénéités de contraste (∆ρ)2 du milieu.

Les spécificités des neutrons

La diffusion de neutrons aux petits angles8 (DNPA) utilise des neutrons non-relativistes thermalisés à 20K de longueur d’onde associée λ = h/mv que l’on sélec-tionne avec un collimateur à temps de vol et selon les besoins de l’expérience, entre 4 et 20 Å.

Le choix d’utiliser les neutrons présente le gros avantage de pouvoir jouer sur la variation de contraste par mélange isotopique. La densité de longueur de diffusion de l’eau légère H2O (ρH2O = −0, 56 1010cm−2) est très différente de celle de l’eau lourde D2O (ρD2O = +6, 34 1010cm−2). Lorsque l’on étudie un complexe formé de deux espèces chimiques, on peut avoir besoin de ne voir que l’une des deux espèces chimiques. C’est ce que l’on parvient à faire avec un mélange « eau lourde + eau légère » d’indice intermédiaire, ajusté sur l’indice de l’espèce que l’on souhaite rendre invisible [21]. Ce matching d’indice constitue le point fort des neutrons, et tire son intérêt de la grande variation de contraste entre deux isotopes, ce qui n’est pas le cas pour les rayons X.

Toutefois, il faut être vigilant : les neutrons, par leur spins, sont sensibles à l’ai-mantation des matériaux, et diffusent également avec une petite contribution magné-tique qui peut être exploitée pour des mesures d’aimantation. Lorsqu’au contraire cette diffusion magnétique est indésirable, on doit veiller à la rendre négligeable, notamment en augmentant le contraste nucléaire. En particulier, la contribution magnétique ici indésirable des NPM est faible dans H2O mais prédomine dans D2O

[129,225] !

Dû à sa très faible interaction, le faisceau de neutrons a également l’avantage de ne pas abîmer les échantillons, même organiques, et dans le pire des cas ceux-ci peuvent être légèrement activés radioactivement, mais sans risque de dénaturation par irradiation.

Enfin, les neutrons sont difficiles à produire en grand nombre et nécessitent l’uti-lisation d’un réacteur nucléaire dédié à la recherche pour des solutions diluées de ferrofluides (φ < 1%). Même dans ces conditions, les acquisitions de spectre né-cessitent souvent de 30 minutes jusqu’à plusieurs heures (réacteur Orphée, LLB, CEA-Saclay).

6. bj correspond au paramètre d’impact de la collision neutron-noyauj.

7. à cause de leur spin, les neutrons sont également sensibles à l’aimantation du milieu, à l’origine d’une section efficace magnétique σM du matériau, décrite quantitativement pour un ferrofluide dans [129, 225]

La ligne PAXY (LLB - Saclay)

Nous avons effectué nos mesures de diffusion de neutrons sur la ligne PAXY au laboratoire Léon Brillouin (LLB) sur le site du CEA à Saclay (montage décrit sur la figure 3.5). Nous avons utilisé un faisceau collimaté de neutron centré sur λ = 6 Å. Les neutrons diffusés sont captés par un détecteur 2D BF3 de 64×64 cm2

(constitué de 15500 cellules de 5×5 mm chacune) situé à une distance ajustable entre 1 et 7 m. Dans ces conditions, l’acquisition d’un spectre prend entre 1h et 2h par échantillon, selon le choix de la concentration des échantillons, leur nature et la gamme de q sondée (i.e. la distance au détecteur). Ce montage mesure une intensité I(~q) en échelle absolue correctement dimensionnée en cm−1. Nous avons utilisé deux configurations correspondant à deux gammes de vecteur de diffusion q (exprimé en Å−1) :

– à 1,2m : 0, 045 < q < 0, 3 – à 6,8m : 0, 008 < q < 0, 056

Figure 3.5 – Représentation du spectromètre PAXY de diffusion de neutrons aux petits angles, au laboratoire Léon Brillouin (LLB, CEA - Saclay). Le faisceau de neutron est d’abord sélectionné en énergie par le sélecteur (ou « chopper »), puis le faisceau est collimaté par une série de diaphragmes, avant d’être envoyé sur l’échantillon. Les neutrons sont détectés par un multicompteur XY proportionnel à BF3, situé dans une enceinte à vide à une distance ajustable entre 1 et 7 mètres

Pour améliorer le contraste des nanoparticules (maghémite : ρ = 6, 97 1010cm−2, ferrite de cobalt : ρ = 6, 74 1010 cm−2), on préfère utiliser ici l’eau légère comme solvant (cf fig. 3.6). Rappelons que l’utilisation d’eau lourde pure ne suffit pas à réaliser un matching total des nanoparticules magnétiques utilisées, dans lequel le signal magnétique (indésirable) prédomine. Un tel matching est par contre possible pour des chaînes de polymères, à une concentration en eau lourde pour laquelle la contribution magnétique de la maghémite est suffisamment faible pour être négligée.

Figure 3.6 – Représentation des différentes contributions au signal total diffusé par un échantillon contenant de la maghémite et du PTEA11k–b–PAM30k en égale proportion massique (X = 1).

Le traitement des spectres Pour accéder au spectre de diffusion cohérente de l’échantillon, il faut soustraire la diffusion incohérente de l’eau ainsi que la contri-bution de la cellule contenant l’échantillon, ici liquide. La cellule de mesure est en quartz amorphe et son épaisseur e est bien calibrée. Par une mesure préalable de l’intensité diffusée par une cellule vide (CV), celle d’une cellule remplie d’eau, ainsi que l’intensité du faisceau transmis en l’absence d’échantillon (pour pouvoir calcu-ler la transmission T ), on est capable d’effectuer le traitement de données suivant, appliqué sur tous les spectres bruts acquis sur PAXY :

INP(q) = Iech(q) TecheICV(q) TCVe Ieau(q) TeaueICV(q) TCVe (3.50)

Les spécificités des rayons X

La diffusion de rayons X aux petits angles9 (DXPA) peut être obtenue sur des montages de laboratoire, mais le recours à un rayonnement synchrotron est nécessaire pour avoir un signal suffisamment important, bien maîtrisé et dans une large gamme de vecteur de diffusion. Le signal de DXPA est surtout dû à la diffusion des atomes lourds, donc dans notre cas aux nanoparticules de ferrite, les polymères étant très peu contrastés.

Les rayons X obtenus par une source synchrotron nécessitent alors un temps d’acquisition bien plus court que pour les neutrons, jusqu’à moins d’une seconde, ce qui donne un avantage évident comme la possibilité d’étudier un plus grand nombre d’échantillons, mais surtout d’analyser une famille d’échantillons en faisant varier un paramètre de contrôle pertinent, ou même d’effectuer des acquisitions « quasi-instantanées » pour suivre la cinétique d’une réaction résolue à la seconde.

Par contre, l’intense interaction photon-électron peut sérieusement abîmer les liaisons chimiques plus fragiles et en particulier détériorer les échantillons organiques.

Le contraste perçu par les rayons X dépend alors aussi de l’énergie des photons. De plus, le couplage photon-électron dépend de l’énergie du photon X, et varie très fortement au voisinage d’un seuil d’absorption du matériau, entraînant une absorption importante que l’on évitera en travaillant un peu en-dessous ou très au-dessus du seuil. C’est le cas pour les ferrites qui absorbent les rayons X à 8 keV, énergie à laquelle l’installation ID2 à l’ESRF est en temps normal optimisée.

Enfin, notons que les rayons X ne sont pas sensibles à la nature magnétique des particules, ce qui pour nous constitue un avantage supplémentaire.

La ligne ID2 de l’ESRF

Nous avons utilisé la ligne de diffusion de rayons X aux petits angles ID2 du Eu-ropean Synchrotron Radiation Facility (ESRF) de Grenoble. Il s’agit d’une ligne de haute brillance permettant d’effectuer des mesures de diffusion à deux dimensions sur une large gamme de vecteurs de diffusion (0,001 Å−1<q<0,5 Å−1). Quelques secondes par échantillon suffisent en général pour avoir un spectre statistiquement acceptable. Le détecteur est un capteur FReLoN Kodak CCD de 100×100 mm2 (constitué de 1024×1024 cellules d’environ 100×100 mm2 chacune) situé à une distance ajustable entre 1,5 et 10 m. La section du faisceau de rayons X est de 200×400 mm2 avec une divergence de 20 mrad et 40 mrad (respectivement verticalement et horizontalement). Le volume d’échantillon sondé est donc de Vd = eS ≈ 0, 36 mm3 pour nos cellules (e = 1,8 mm). Un schéma de la ligne ID2 est représenté sur la fig. 3.7. Ce dispositif est réglé en échelle absolue, c’est-à-dire que l’intensité mesurée I(~q) est correctement dimensionnée en cm−1, ce qui n’est pas le cas de la plupart des montages de diffusion de rayonnements de laboratoire. Nous avons utilisé des rayons X de 12 keV, i.e. de longueur d’onde λ ∼ 1 Å, et trois configurations correspondant à trois gammes de vecteur de diffusion q (exprimé en Å−1) :

– à 1,5 m : 0, 007 < q < 0, 3 ; – à 5 m : 0, 002 < q < 0, 1 ; – à 10 m : 0, 0008 < q < 0, 045

Le traitement des spectres Les spectres brut acquis sur ID2 sont déjà préala-blement traités par un programme interne tenant compte de l’épaisseur e des cellules utilisées, si bien que le traitement des spectres est plus simples, en soustrayant sim-plement la contribution de l’eau et des parois de la cellule contenant l’échantillon. La cuve est formée d’un porte-échantillon comportant deux ouvertures laissant pas-ser le faisceau, et qui sont chacune fermées par une fine pellicule de mica souple, espacées d’un joint d’épaisseur calibrée.

L’épaisseur de la cuve e = 0, 18 cm est néanmoins mal maîtrisée en raison de la souplesse des films de mica, c’est pourquoi d’un échantillon à l’autre les spectres mesurés doivent parfois être corrigés par un coefficient multiplicatif proche de l’unité (zcorr ∼ 1).

Iech = zechcorrIechbrut− Ibrut

eau (3.51)

Lorsque les échantillons sédimentent avant la mesure, la fraction volumique en objets sur le trajet du faisceau de rayons X peut varier beaucoup plus significativement, et entraîner une variation proportionnelle en intensité diffusée (notamment si le faisceau passe par le floc). Nous en tenons également compte par le coefficient correctif zcorr

déterminé lors du calcul du facteur de structure S(q) = I(q)/IFF(q), en imposant la condition S(q → ∞) = 1.

Figure 3.7 – Représentation du spectromètre ID02 de diffusion de rayons X aux pe-tits angles, à l’ESRF (Grenoble). Les électrons de l’anneau de stockage sont accélérés par des arrangements périodiques d’aimants (onduleurs), à l’origine d’un rayonne-ment synchrotron renforcé dans certaines raies par des interférences constructives. Le faisceau de rayons X ainsi généré est monochromatisé en sélectionnant une raie par réflexion sur un cristal de silicium puis un miroir toroïdal. La collimation du fais-ceau est répétée régulièrement entre chacune de ces étapes avant d’être dirigée sur l’échantillon. Les rayons X diffusés par celui-ci sont détectés par un capteur CCD XY situé dans une enceinte à vide à une distance ajustable entre 1,5 et 10 mètres

2.3 Les propriétés de contraste des espèces chimiques