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Dynamique non-linéaire d’objets magnétiques en champ variable 42

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En raison de la similitude entre les équations 1.35 et 1.66, traitant respectivement du cas ferromagnétique avec un terme d’anisotropie ς d’une part, et du cas parama-gnétique d’autre part, on voit apparaître ici la même fonction Σ2(x) introduite en 1.48. On remarque ainsi que S2(ζ) = Σ2(ζ/2).

Dans ce cas, l’aimantation sous champ de la suspension est liée à la susceptibilité magnétique tensorielle ¯¯χm de la dispersion en présence d’un champ ~H. Puisque les objets s’alignent de plus en plus à mesure que le champ devient fort, la susceptibilité magnétique χ est susceptible de changer avec l’orientation des objets. Dans la gamme linéaire où le matériau composant les objets admet effectivement une aimantation sous champ ~M linéaire avec le champ imposé ~H (donc ~M = χintH~int), on aura :

~ Mχ(H) = φobjet χext+ ∆χhcos2θiH~ (1.78) = φobjet  χint2∆χ 3 + 2∆χ 3 S2(H)  ~ H (1.79)

Nous venons de présenter une description de l’aimantation et de l’orientation à l’équilibre d’objets browniens présentant différentes propriétés magnétiques lors-qu’ils sont soumis à un champ magnétique statique. Nous allons nous intéresser maintenant à la relaxation dynamique sans prendre en compte les fluctuations brow-niennes.

3.5 Dynamique non-linéaire d’objets magnétiques en champ

magnétique variable

La dynamique d’objets magnétiques microscopiques sous champ magnétique va-riable ~H(t) présente des aspects non-linéaires qui ont été étudiés dans des configu-rations variées. On peut citer quelques travaux intéressants de relaxation de sondes magnétiques sous champ basculé, oscillant, tournant, ou dans d’autres configura-tions, permettant de décrire les propriétés magnétiques de la sonde ou du milieu sondé en régime dynamique :

– en champ statique : des particules « motorisées » sont simplement orientées par l’application d’un champ magnétique parallèle à leur direction de propagation (bactéries magnéto-tactiques propulsées par leurs flagelles [230]) ou perpen-diculairement (bâtonnets de Ni-Au-Pt propulsés par la catalyse de H2O2 en solution par le Pt [231]) ;

– en champ basculant brutalement : Anguelouch et al. [68] ont étudié le frotte-ment visqueux de bâtonnets ferromagnétiques de Nickel (D = 350 nm, 5 mm < L < 30 mm), confinés dans un film d’huile de silicone très fin (∼ 100 nm posé sur un mélange eau + glycerol) ;

– en champ oscillant sinusoïdalement : Cette géométrie a été utilisée pour son-der des phénomènes de relaxations intrinsèques (relaxation de Néel [221]) aux objets magnétiques, ou extrinsèques tels que leur couplage visqueux ou visco-élastique avec un fluide non-newtonien à l’équilibre [66], servant ainsi comme sonde microrhéologique locale. Wilhelm et al. [11, 65] ont utilisé des arrange-ments de phasogomes magnétiques micrométriques alignés sous champ comme sondes microrhéologiques paramagnétiques du milieu intra-cellulaire. L’utili-sation passive puis active de cette sonde a permis d’y mettre en évidence une violation du théorème fluctuation-dissipation (TFD). Singh et al. [232] ont pro-posé une description plus précise adaptée au cas d’une sonde micro-rhéologique formée du chaînage d’un petit nombre de sphères paramagnétiques.

– en champ tournant : Helgesen et al. [233, 234] ont décrit en détail le compor-tement non-linéaire de doublets de sphères diamagnétiques immergées dans un ferrofluide paramagnétique. Ils ont mis en évidence un seuil en fréquence ωc au-delà duquel l’objet adopte une rotation asynchrone alternant une rota-tion dans le sens du champ puis dans le sens opposé. Le déplacement de ce seuil a été utilisé par McNaughton et al. [235] sur des particules ferromagné-tiques de 2 mm pour détecter l’adsorption de bactéries à la surface de la sonde. Les dynamiques de systèmes plus complexes ont été étudiées en champ tour-nant, tels que celle de bâtonnets aimantés transversalement, où une transition vertical-horizontal s’ajoute au seuil synchrone-asynchrone [236], celles des bac-téries magnétotactiques auto-propulsées, décrivant des trajectoires synchrones ou asynchrones interrompues par des inversions de leur vitesse [237, 238], ou des bâtonnets semi-flexibles déformables [239,240], proposant des applications comme micro-mélangeurs dans un circuit microfluidique [75,77]. Le comporte-ment non-linéaire de doublets de particules superparamagnétiques a été étudié par Ranzoni et al. [77] jusque dans le domaine radio-fréquence. Ghosh et al. [78] ont récemment mis au point des micro-nageurs hélicoïdaux propulsés par l’ap-plication d’un champ magnétique tournant.

– en champ en précession : Tierno et al. [241] ont étudié le comportement non-linéaire d’un ellipsoïde prolate et ses applications comme mélangeur ou vanne magnétique dans des circuits microfluidiques ;

– en champ alternatif (AC) : dans l’étude de fluctuations de bactéries magnéto-tactiques [230] ou de micro-nageurs [79,80].

– en gradient de champ large : l’utilisation d’un gradient de champ sur une zone étendue permet de procéder à des mesures de magnétophorèse, comme sur des cellules magnétiques [74] ou des microtubules magnétiques [242], et ne sous-entend pas un couplage magnéto-orientationnel ;

– en gradient de champ localisé : un tel gradient est à l’origine des pinces ma-gnétiques, utilisables pour manipuler des sondes micro-rhéologiques [67, 243], mais également pour imposer des rotations pilotées magnétiquement comme des sur-enroulements de chaînes polymères [244].

Pour sonder les propriétés magnétiques des objets que nous étudierons, et dé-montrer la faisabilité d’expériences de ce type avec ces objets, nous utiliserons des modèles de réponse dynamique dans les géométries de champ basculé et de champ tournant, pour des objets ferromagnétiques et paramagnétiques.

3.6 Relaxation d’un bâtonnet magnétique en champ basculé

Considérons le cas de la relaxation d’un objet ferromagnétique puis parama-gnétique sous l’effet d’un champ maparama-gnétique basculé ~H(t). Dans ce qui suit, nous désignerons cet objet par le terme de « bâtonnet », bien que cela s’applique à tout objet d’anisotropie uniaxiale prolate. Ce résultat nous sera utile pour examiner les propriétés magnéto-orientationnelles des objets étudiés dans le chapitre 7.

On s’intéresse à la dynamique d’un bâtonnet magnétique soumis à un champ magnétique appliqué selon ~h à t > 0. Elle pourra être soit mesurée sous microscope optique pour un bâtonnet individuel, soit par biréfringence magnéto-induite en fai-sant une mesure moyenne sur tous les objets. On considère que sur ce bâtonnet, le couple magnétique et le couple visqueux se compensent à chaque instant, et l’on néglige les termes inertiels7.

Lorsque le bâtonnet est subitement soumis à un champ magnétique ~H, un couple magnétique ~Γmag entraîne sa rotation jusqu’à ce que le bâtonnet s’aligne dans la direction du champ :

~

Γmag = µ0VMM~ × ~H (1.80)

où ~M est l’aimantation sous champ du bâtonnet magnétique, et VM son volume ma-gnétique, qui ne tient pas compte d’une éventuelle pellicule non-magnétique autour de celui-ci (par exemple due à une couronne de polymère).

Lors de sa rotation, le bâtonnet est freiné par le couple visqueux ~Γη exercé par le fluide en fonction du vecteur vitesse angulaire ~Ω du bâtonnet :

~Γη =−fη~ (1.81)

Lorsque l’on néglige les termes inertiels, le couple magnétique s’équilibre avec le couple visqueux. Les équations du mouvement s’écrivent ainsi :

d~n

dt = ~× ~n (1.82)

fηΩ = µ~ 0 ~µ× ~H (1.83)

où ~n désigne le vecteur directeur du bâtonnet et ~µ le moment dipolaire, permanent ou induit, porté par ce bâtonnet en présence du champ ~H. Les frottements visqueux sont proportionnels au terme fη (discuté dans l’annexe A. 1).

L’orientation du bâtonnet paramagnétique est décrite par le vecteur ~n qui dans le référentiel du laboratoire (~ex, ~ey, ~ez) s’écrit :

~n =   cos θ sin θ 0   ; d~n dt = dθ dt   − sin θcos θ 0   (1.84)

On choisit d’appliquer un champ magnétique constant ~H dans la direction ~ey : ~ H = H0   01 0   (1.85)

On introduit alors l’angle β comme l’angle formé entre les vecteurs ~H et ~n (voir figure 1.25) :

β = π

2 − θ (1.86)

Figure 1.25 – Schéma de la relaxation en champ basculé, et définition des angles θ et β dans cette géométrie.

Relaxation d’un bâtonnet ferromagnétique dans un champ basculant Le moment magnétique ~µp porté par le bâtonnet est constant et ne dépend pas du champ H. Lorsqu’on écrit les composantes du vecteur ~µp dans la base (~ex, ~ey, ~ez), on obtient trivialement : ~ µp = µp   cos θ sin θ 0   (1.87)

À l’aide de l’éq. 1.83, et comme cos θ = sin β, on calcule le couple magnétique exercé par ~H sur ~µp en posant :

µ0 µ~p× ~H = µ0µpH0   0 0 sin β   (1.88)

En utilisant l’équation 1.82 et 1.86, on obtient une équation différentielle en β : dβ

dt =1

τµsin(β) avec τµ= fη

où l’on introduit le temps propre τµ de rotation d’un bâtonnet ferromagnétique. L’équation du mouvement admet alors trois solutions, soit β(t) = 0 modulo 2π (équilibre stable), soit β(t) = π modulo 2π (équilibre instable), soit :

βµ(t) = 2 arctan  exp  −t− tπ/2 τµ  (1.90) où l’indice µ sert à spécifier le cas ferromagnétique, et avec tπ/2 le temps pour lequel βµ(t = tπ/2) =±π/2.

Si l’on se ramène en θµ(t), on aura : θµ(t) = π 2 − 2 arctan  exp  −t− t0 τµ  (1.91) Puisqu’il n’y a pas de terme d’inertie dans ce modèle, le bâtonnet est à l’équilibre des moments à chaque instant, et θµ(t) décrit la progression de l’orientation d’un bâtonnet ferromagnétique quelle que soit son orientation de départ θ0 ∈ [0; 2π] à t = 0. Le temps tπ/2 ne représente que le temps au moment duquel le bâtonnet passe par la valeur θµ = π/2± π.

Relaxation d’un bâtonnet paramagnétique dans un champ basculant Le moment magnétique ~µχ porté par le bâtonnet apparaît sous l’effet du champ et est proportionnel au tenseur de susceptibilité magnétique ¯¯χ de celui-ci :

~

µ = µ0χV¯¯ MH~

= χkVMH0cos β ~ek+ χVMH0sin β ~e (1.92) où VM est le volume magnétique de l’objet et où l’on a définit ¯¯χ dans ses axes propres comme : ¯ ¯ χ =   χk 0 0 0 χ 0 0 0 χ   (~ek,~e,~ez) ; ∆χ = χk− χ (1.93) On peut séparer les composantes de ~µχ en deux composantes telles que ~µχ = ~

µ1+ ~µ2, avec ~µ2 étant par construction toujours colinéaire à ~H : ~ µ1 = ∆χVMH0cos β ~ek (1.94) ~ µ2 = χVMH0 cos β ~ek + sin β ~e  (1.95) Lorsqu’on écrit les vecteurs ~µ1 et ~µ2 dans la base (~ex, ~ey, ~ez), on obtient :

~

µ1 = ∆χVMH0

cos β cos θcos β sin θ 0   ; ~µ2 = χVMH0   01 0   (1.96)

À l’aide de l’éq. 1.83, et comme sin θ = cos β, on calcule le couple magnétique exercé par ~H sur ~µχ sur chacune des composantes ~µ1 et ~µ2 en posant :

µ01× ~H = µ0∆χVMH 2 0 2   0 0 sin 2β   ; ~µ2× ~H = 0 (1.97)

En utilisant l’équation 1.82 et 1.86, on obtient une équation différentielle en β : dβ dt =1χsin(2β) avec τχ = fη µ0∆χVMH2 0 (1.98) où l’indice χ sert à spécifier le cas paramagnétique, et où l’on introduit le temps propre τχ de rotation d’un bâtonnet paramagnétique.

L’équation du mouvement admet ici aussi trois solutions, soit β(t) = 0 modulo π (équilibre stable), soit β(t) = π/2 modulo π (équilibre instable), soit :

βχ(t) = arctan  exp  −t− tτ π/4 χ  (1.99) avec tπ/4 tel que βχ(t = tπ/4) =±π/4.

On a donc pour θχ(t) : θχ(t) = π 2 − arctan  exp  −t− t0 τχ  (1.100) Compte tenu de la symétrie par retournement, θχ(t)est défini sur [0, π] modulo π. Comme pour le modèle ferromagnétique, ce modèle est à chaque instant à l’équilibre des moments.

Remarques communes aux deux modèles

Ces deux modèles décrivent la cinétique d’orientation de bâtonnets magnétiques non-browniens avec un temps caractéristique τµ ou τχ selon la nature du matériau. On peut déjà faire les remarques suivantes :

Les deux relaxations se différencient clairement par l’amplitude des angles de rotation, seul un bâtonnet ferromagnétique pouvant effectuer des rotations de plus de 90° (figure 1.26).

Figure 1.26 – Exemple de relaxation d’un bâtonnet ferromagnétique (τµ−1 = 2s−1) et paramagnétique (τ−1

χ = 2 s−1) en fonction du temps ti = tπ/2 dans le cas ferro-magnétique et ti = tπ/4 dans le cas paramagnétique.

Selon la valeur de β0 de β à t = 0, le paramètre ti pour lequel β = π/2 dans le cas ferromagnétique et β = π/4 dans le cas paramagnétique est différent. Il diverge lorsque β0 = π dans le premier cas et pour β0 = π/2 dans le second. Toutefois en pratique, un léger mouvement brownien, même très faible, contribue à déloger le bâtonnet de cet équilibre instable.

Expression explicite du temps de relaxation

Lorsque le bâtonnet est fortement allongé, on peut l’assimiler à un ellipsoïde ou à un cylindre très allongé. Les coefficients de friction fη d’un cylindre et d’un ellipsoïde de révolution sont détaillés en annexe A. 1. On peut dans les deux cas exprimer ce coefficient à l’aide du diamètre D et de la longueur L de l’objet, et d’une fonction h(L/D) lentement variable dépendant du choix du modèle (elliptique ou cylindrique). On écrit alors

fηi = πηL