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Les mouvements apostoliques d’Action Catholique

ASPECTS GÉNÉRAUX, JURIDIQUES ET PASTORAUX

B. Les mouvements apostoliques d’Action Catholique

Les mouvements de l’Action Catholique ont eu, en leur temps, une grande influence dans les milieux où vivaient les personnes handicapées, lieux souvent peu christianisés voire peu humains, selon Bissonnier. Toutefois, celui-ci regrettait que ces mouvements aient tendance à organiser des « services » animés par des personnes valides, pour les personnes handicapées, sans toujours rendre ces dernières suffisamment actrices, à leur manière, de ces services. D’autre part, l’Action Catholique distingue les milieux (ouvriers, indépendants, agriculteurs, étudiants,

500 Cf. Marie-Thérèse CHEROUTRE, op. cit., p. 515.

501 Cf. Leonello GIORGETTI, Paolo è in branco, il cammino scout di un ragazzo disabile, Edizioni Scout / nuova fiordaliso, 2002, 88 p. Cf. AGESCI, Tutti uguali, tutti diversi,

scautismo e diversibilità, Collana tracce – metodo, Edizioni Scout, agesci / fiordaliso, 2006,

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enfants) mais pour ce qui concernait les personnes handicapées, ces distinctions s’effaçaient, les enfermant dans cet état, oubliant leur milieu d’origine et leurs besoins spécifiques.502 Dans les années 1960, un changement s’est progressivement opéré : tout en ayant un « service » dédié au handicap, intégrer le plus possible les personnes handicapées dans leur milieu de vie et dans l’ensemble de l’Action Catholique, inciter les personnes handicapées à y prendre aussi elles-mêmes leur place, sans attendre que le mouvement soit le seul initiateur et organisateur de cette démarche, mais aussi inciter les membres valides à aller vers les personnes handicapées du mouvement. Cela s’est concrétisé, par exemple, à l’occasion du trentième anniversaire de la JAC (Jeunesse Agricole Chrétienne) et du Congrès international de la jeunesse rurale catholique : les équipes de préparation de ces rencontres étaient composées de personnes handicapées et de personnes valides. Les publications, journaux d’Action Catholique devaient dorénavant tenir compte de cette nouvelle donne.503

Le changement ne s’est fait que progressivement puisque dix-sept ans plus tard, un aumônier de la JOCF (Jeunesse Ouvrière Chrétienne Féminine) écrivait « il y a longtemps que la JOC504 entend bien être présente aux handicapés et faire entendre leur voix ; c’est nouveau pour elle cependant de leur donner la parole, de leur faire confiance pour parler de leur vie, décider des actions à mener, faire révision de vie. »505

Aujourd’hui, il n’existe plus de proposition particulière, tout groupe est invité à accueillir des personnes handicapées. Néanmoins, il existe des groupes composés uniquement de personnes handicapées, pour leur permettre une réflexion sur leur vie avec ce qu’elle a de spécifique, par exemple lorsque les personnes sont en ESAT.

502 Cf. Henri BISSONNIER, Provoqués à l’espérance, op. cit., p. 104-107.

503 Cf. « L’Action Catholique spécialisée et les malades », in Présences, revue trimestrielle

du monde des malades, n°74, 1er trimestre 1961, p. 64-76.

504 Jeunesse Ouvrière Chrétienne.

505 François-Xavier ROMEFORT, « Jeunes filles handicapées en JOCF », in Recherches,

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Qu’en est-il plus particulièrement de l’Action Catholique Ouvrière et de l’Action Catholique des Enfants ?

1. L’Action Catholique Ouvrière (ACO)

L’ACO est particulièrement attentive aux personnes handicapées. En effet, un certain nombre d’entre elles travaillent dans des ateliers protégés, appelés ESAT en France (ou en milieu ordinaire, mais trop rarement, sur des postes de cadre). Toutefois, le mouvement évite l’amalgame entre précarité et handicap, qui augmente le risque de rejet. C’est ainsi que la JOC a mis en place en région des commissions spécifiques sur l’accompagnement du handicap.506

À Lille, des liens se sont noués entre un groupe de PPH et l’ACO, donnant lieu à quelques rencontres communes par an. Cela permet aux personnes handicapées de s’exprimer en tant que travailleurs et a contribué à dénouer quelques situations difficiles, non pas parce que les animateurs d’ACO sont intervenus au nom des personnes handicapées, mais parce que les personnes handicapées elles-mêmes ont trouvé, suite aux rencontres, les moyens de remédier aux problèmes rencontrés.

2. L’Action Catholique des Enfants (ACE)

Les mouvements « Cœur vaillants » et « Âmes vaillantes », aujourd’hui ACE, ont eux aussi, sur le modèle du scoutisme, créé une « branche d’extension ». Des prêtres, qui avaient été malades dans leur jeunesse, se sont beaucoup investis pour leur développement et leur réussite.507

Dans les années 1960-1970, l’ACE s’est dotée d’une commission « Espoir », pour rejoindre les enfants des établissements spécialisés, suite à une interpellation du SCEJI. Aux 5ème Rencontres Nationales de l’ACE

506 Cf. Joëlle REMY, Guy LE BOUËDEC, Jean ROSSIGNOL, « Mouvements d’Église et intégration des personnes handicapées dans le diocèse d’Angers », in Handicaps, Ethique et

Société, Recherches, n°111, 6/2003, p. 110.

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en 1972, une brochure qui expliquait le projet du mouvement pour les enfants « inadaptés » fut diffusée : « Ces enfants qu’on dit inadaptés sont, eux aussi, en Mouvement avec leurs camarades. Ils y vivent pleinement leur vie, témoignent à leur façon originale de l’espérance de l’Église.» Par ailleurs, les journaux Perlin, Fripounet, Sapajou, furent transcrits en braille. Mais cet effort s’est progressivement essoufflé, les établissements ne soutenant pas forcément la démarche initiée par l’ACE.508

En 2009-2010, les enfants de l’ACE, lors du Conseil des Enfants, ont choisi de traiter le thème du handicap, à travers le slogan « T’es pas comme moi, et alors ! ? ». Les clubs étaient invités à découvrir les différentes familles de handicap, à prendre conscience que chacun a quelque chose qui le handicape, mais aussi des talents à combiner pour en faire des atouts.509 Voici un exemple d’action menée par un « club » ACE : les enfants sont allés rencontrer d’autres enfants handicapés hospitalisés. La relation a été donnant-donnant : tous les enfants, valides et handicapés, ont participé, ont été partie prenante, chacun a pu s’exprimer. Il ne s’agissait pas pour les enfants du club de faire une bonne action en allant rendre visite aux enfants handicapés, mais il y a eu un véritable échange de part et d’autre, dans la réciprocité.510