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Chapitre 4 : La gestion de la collection vidéo et film

4.1 La documentation de la collection

4.1.2 Les documents administratifs

Les documents administratifs qui accompagnent les œuvres jouent dans cette constitution des archives de la collection vidéo un rôle particulièrement important. Les œuvres d’art vidéo sont soumises, sur le marché de l’art, à deux enjeux contradictoires. D’une part c’est une forme d’art qui effraie les collectionneurs qui lui reprochent son caractère immatériel car le support contient l’œuvre sans être l’œuvre. Pourtant, sa circulation dans les échanges commerciaux est soumise à la vente du support matériel de l’œuvre qui est la première source de revenus pour les artistes. Plus que le caractère supposé immatériel de ces œuvres, c’est la reproductibilité du médium qui peut parfois brouiller les pistes. À l’instar de la photographie dans les années 1980, le marché a alors mis en place des stratégies pour parvenir à une raréfaction artificielle de ces œuvres que rappelle Raymonde Moulin :

Les procédures de raréfaction sont claquées sur celles de la photographie : tirage limité, certificat d’authenticité comportant le nombre d’exemplaires, le numéro de série et la signature de l’artiste728.

Les documents administratifs sont dans cette perspective ce qui assure de la propriété légitime de l’œuvre et, donc, de sa valeur. S’il est facile de posséder sur son ordinateur une copie du master d’une œuvre vidéo, seuls les documents administratifs permettent alors, dans cette recherche d’une rareté artificielle, d’en établir la valeur. Ces documents sont également une source fondamentale, de première main, pour la documentation des œuvres. Pour cela, il est important de les recenser et de les conserver.

a. La facture et la preuve de paiement

L’émission d’une facture figure parmi les obligations d’un vendeur professionnel. Avec cette facture, il peut être utile pour le collectionneur de conserver une preuve de paiement qui pourra notamment l’aider à prouver la date de son acquisition pour obtenir une exonération de taxation sur les plus-values en cas de revente éventuelle d’une œuvre.

L’examen des factures de la collection permet de conclure que les informations suivantes figurent toujours sur celles-ci :

- Titre de l’œuvre

152 - Nom de l’artiste

- Numéro d’exemplaire de l’œuvre - Coordonnées du vendeur

- Coordonnées de l’acquéreur - Prix de vente

- Date d’acquisition - Numéro de la facture

Au-delà de ces informations a minima, certaines incluent des informations plus précises sur l’œuvre et notamment :

- Date de l’œuvre - Durée de l’œuvre

- Détail des différents supports fournis

La facture des œuvres d’art vidéo de la collection n’apporte ainsi que rarement des informations techniques sur celles-ci qui sont parfois retranscrites dans les certificats d’authenticité et plus sûrement dans les documents techniques qui sont joints par les galeries ou les artistes les plus sérieux.

b. Le certificat d’authenticité

La vente d’une œuvre d’art vidéo doit, quelque soit le vendeur, être accompagnée d’un certificat d’authenticité. Compte tenu de la facile reproduction de ces œuvres sur différents supports, le certificat est ce qui fait la valeur de l’œuvre et il prouve que le collectionneur a bien acquis un exemplaire original de l’œuvre. Sans ce certificat la possession d’une simple copie ou d’un master n’a

aucune valeur et il sera impossible de la revendre. Ainsi, « sans certificat d’authenticité les

exemplaires s’avéreraient invendables et pourraient même constituer des contrefaçons729 ». Le

certificat est pour l’instant la seule chose qui assure le collectionneur de la patrimonialité de son bien. Isabelle et Jean-Conrad Lemaître sont dans cette perspective parfaitement conscients de la valeur de ces documents. Pour cela, ils ont été numérisés, classés et archivés au cours de cette année de recherche730. Un recensement est également en cours pour vérifier que le certificat d’authenticité correspondant à chaque œuvre est bien conservé dans les archives et pour, en cas d’absence, conduire les démarches nécessaires à son obtention.

Le certificat d’authenticité doit contenir des informations précises sur l’œuvre (titre, date, durée,

729FOURNOL Alexis, « La singularité juridique de l’œuvre vidéo », Le Journal des Arts, n° 418, 5 septembre 2014. 730 Supra, p. 149.

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format, support) qui permettent de l’identifier précisément et éventuellement une capture d’écran. L’élément le plus important d’un certificat est le nombre d’éditions de l’œuvre, le nombre d’éditions d’artistes et le numéro du tirage vendu. La signature de l’artiste permet d’authentifier la véracité des informations qu’il contient et notamment la limitation du nombre de tirages.

Ainsi, le certificat d’authenticité permet de protéger l’acquisition d’une vidéo et de prouver sa possession légitime pour un art reproductible. Pour cela, sa conservation doit faire l’objet d’un soin tout particulier.

c. Le plan de montage et la documentation technique

Les informations techniques sur les œuvres sont beaucoup plus rares dans les archives mais elles constituent une source d’informations particulièrement utiles. Ces documents sont parfois fournis au moment de l’acquisition par les vendeurs les plus sérieux et généralement demandés par les collectionneurs au moment de la préparation d’une exposition.

La nature de ces documents varie tout comme les informations qu’ils contiennent. Pour cette raison, il a été choisi d’en sélectionner un particulièrement complet pour en extraire l’ensemble des données techniques qui peuvent être utiles à la documentation de ces œuvres. Celui-ci précise les conditions d’exposition d’un film super 8 transféré en vidéo numérique HD. Le protocole d’installation comprend cinq catégories : le système de projection des images, l’écran et le mur, le son, le sol et l’assise. Deux plans d’installation de l’œuvre complètent ces informations731. L’œuvre

doit ainsi être projetée en boucle depuis un vidéoprojecteur Full HD de 4000 lumens. Celui-ci doit être relié par un câble HDMI à un lecteur Blu-ray ou à un Media Player sur lequel il faut brancher un disque dur qui contiendra le fichier MPEG2 de l’œuvre. Les dimensions de l’écran à suspendre, sa hauteur d’accrochage et sa distance du mur sont également précisées tout comme la couleur dont il faut peindre les murs et le sol. Il est également spécifié que le son doit provenir de deux enceintes stéréo pré-amplifiées fixées de part et d’autre de l’écran. L’assise du spectateur, enfin, un sofa noir, doit être placée à environ six mètres de l’écran.

Ainsi, ces documents contiennent des informations précieuses qu’il serait judicieux de rassembler dans un même dossier sur chaque œuvre.