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Les éléments issus des questionnaires

4.  PRESENTATION DES RESULTATS ET ANALYSE

4.1.   L ES DEFINITIONS LIEES A LA NEUTRALITE

4.1.1.  Les éléments issus des questionnaires

Les résultats obtenus sont organisés en deux parties successives. La première concerne  les définitions de la neutralité, que nous discuterons à la lumière des réponses au  questionnaire et des propos issus des entretiens. Ceux‐ci complètent, contredisent et  détaillent, en effet, les significations accordées au concept qui nous préoccupe. Nous  présenterons également les moyens utilisés par les enseignants pour être neutre, liés  aux définitions retenues de la neutralité. Dans la seconde partie, nous poursuivrons avec  un panorama fait des représentations associées à la neutralité. En effet, comme nous  avons pu le constater lors de la partie théorique de ce travail, d’autres mots émergent  lorsque l’on aborde la neutralité.  

   

4.1. Les définitions liées à la neutralité 

 

4.1.1. Les éléments issus des questionnaires  

Les premiers résultats nous permettent de dire qu’il n’existe pas chez les interviewés  une seule et unique définition de la neutralité. Cette dernière, en effet, est envisagée  selon  deux  tendances  principales  suivant  l’objet  auquel  elle  se  rapporte.  Dans  les  réponses à la question : « Que signifie pour vous le terme de neutralité, que contient‐

il? », les personnes interrogées se disent neutres par rapport à une problématique  abordée (un débat, une discussion, un problème), ou envers un autrui présent en face  d’eux (un élève, un parent, un(e) collègue). La neutralité se détermine ainsi soit par une  position  de  retrait,  en  fonction  des  sujets  ou  des  situations  traités,  soit  par  une  ouverture prenant en compte l’interlocuteur et ses opinions personnelles39. Ces deux  conceptions de la neutralité ne s’excluent pas mutuellement dans les propos recueillis et  se déclinent selon des nuances individuelles. Si, pour Florent, la neutralité se définit en  fonction  des  deux  tendances  mentionnées,  Solange,  Norbert  et  Jean  se  réfèrent  davantage à l’une ou à l’autre. Les réponses de Solange se rassemblent ainsi autour  d’une vision communément répandue de la neutralité : « être ni pour ni contre »40, qui  dans ses paroles implique plutôt un repli. Chez Jean, les différentes réponses convergent  au contraire vers la diversité, qu’il valorise tout au long de ses propos. Quant à Norbert,  ses paroles illustrent la tendance au retrait, qui pour lui signifie un désengagement de        

39 Voir tableau A 

40 Cette vision correspond au sens commun que nous avons pu retrouver lors de discussions informelles au sujet de la 

neutralité.  

soi. Il ajoute dans ses explications la notion d’utopie, qu’il associe aux difficultés d’une  réelle neutralité.  

Voici  les  différents  propos  des  participants  indiquant  leurs  positions  respectives    (tableau A) : 

   

Florent      Norbert      Solange      Jean 

   

  Position de retrait par rapport à une situation ou un sujet   

 

Avoir un certain recul    La Suisse  

La neutralité c’est une retenue  

La neutralité signifie aucune prise de décision, aucun engagement   C’est utopique d’être neutre, tu ne peux pas être neutre 

Etre neutre c’est être ni pour ni contre 

La neutralité, ne pas entrer dans un débat ou un conflit 

La neutralité peut être une manière d’argumenter qui ressemble plus à une analyse  objective qu’à une prise de position  

La neutralité c’est quand il n’y a pas de position personnelle   

 

Position d’ouverture à l’autre et à ses opinions   

 

Prendre en compte l’autre, sans imposer ma vision de manière unilatérale  

Une manière d’être qui enlève le côté « moi je pense que, je sais, moi ce que je pense c’est  juste » 

Regarder toutes les facettes  

Ne pas émettre de jugement pour laisser le libre choix à l’élève   C’est une ouverture pour laisser à chacun sa propre vision   Une exposition multiple d’un problème 

Elle peut comprendre les avis opposés de divers acteurs.  

Plusieurs éléments qu’il faut mettre ensemble    

 

Les éléments présentés ici se retrouvent de manière générale dans les entretiens, où ils  sont détaillés et parfois nuancés, montrant ainsi que les réflexions évoluent, entre le 

moment du questionnaire et celui de l’entretien. Pour Norbert, une nouvelle notion,  plus adéquate, pour lui, à définir la neutralité apparaît dans l’entretien : « être juste ». 

Cette proposition, comme nous le verrons plus loin, lui pose néanmoins problème41. Les  points  de  vue  se  modifient  ainsi  chez  Norbert  et  les  premières  conclusions  ne  déterminent pas encore une vision définitive de la neutralité pour cet interviewé. Chez  Solange, un élément ne sera pas repris dans l’entrevue, alors qu’il offre pour nous une  option  intéressante.  Cette  participante  établit,  en  effet,  une  distinction  entre  une  manière d’argumenter qu’elle définit comme « une analyse objective » représentant  pour elle la manière d’être neutre, et une « prise de position » qui ne l’est pas. En ce qui  concerne Jean, la diversité reste associée à la neutralité au fil de ses réflexions, même si  cette dernière n’est pas le seul critère avec lequel il pense son quotidien d’enseignant. 

La position de Florent demeure identique dans les deux moments chronologiques de  recueil  de  données,  ses  idées  principales  ayant  été  énoncées.  Dans  l’entretien,  il  approfondit cependant certaines de ses considérations.  

Toujours dans le cadre du questionnaire, d’autres résultats nous renseignent sur les  définitions de la neutralité42. Un des items du questionnaire demande aux personnes  interrogées de sélectionner parmi plusieurs possibilités : « les deux qui correspondent le  plus à votre conception  de la  neutralité ». L’éventail  de  choix  regroupe les avis de  certains auteurs  étudiés43, ainsi que nos propres  conceptions,  élaborées  au fil des  lectures. Nous souhaitions ainsi, à travers la proposition : « un processus de réflexion  éthique »,  changer  la  définition  même  de  la  neutralité  présentée,  jusqu’ici,  plutôt  comme un état44. Nous voulions l’envisager sous la forme d’un mouvement, tel un  processus se déroulant au fil du temps et qui s’associe à une analyse construite peu à  peu.  Cette  option  s’est  élaborée  par  référence  à  certaines  idées  de  l’éthique  mentionnées par Pachod (2007)45.  

Sur les sept suggestions mentionnées, c’est « un processus de réflexion éthique » qui a  été  choisie  par  trois  personnes sur  quatre, sans  que ces  dernières n’argumentent  réellement leurs choix. Seule Solange explicite son adhésion. Ce phénomène est d’autant  plus  intéressant  que  Jean  est  l’unique  participant  à  reprendre  la  terminologie  de  l’éthique dans l’entretien. Deux possibilités n’ont, par contre, pas été retenues : « un  silence sur ce qui n’est pas du domaine scolaire, des connaissances » et « une prise de  position partisane explicitée ». La première option s’inspire des volontés affichées par  des hommes politiques tels que Ferry et Buisson, qui ne semblent pas convenir aux        

41 Voir point 4.5.2. 

42 Voir tableau B 

43 Nous nous référons ici au point 2. 

44 Voir point 1.2. 

45 Voir point 2.3.3. 

enseignants interrogés. La seconde est en lien avec un engagement juste, sans parti  pris46, qui est la position défendue par Le Clézio (2006).  

Les positions pouvant être interprétées par les interviewés comme plus radicales ont été  rejetées, alors que les moins connotées étaient sollicitées. On comprend aisément que  pour  un  enseignant,  choisir :  « une  position  partisane  explicitée »  est  plus  délicat  qu’opter pour « un engagement juste, sans parti pris ». Cet élément met en exergue  l’impact possible du vocabulaire. En effet, les images construites par les mots utilisés  sont analysées par un système de valeur interne à chaque personne, qui détermine si la  neutralité ainsi évoquée est acceptable ou non.  

 

Voici les différentes réponses obtenues à cet item, les propositions faites aux personnes  interrogées ayant été regroupées en fonction de leur similarité (tableau B): 

   

une prise de position partisane explicitée  ‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐ 

un engagement juste, sans parti pris           Florent et Norbert 

 

un silence sur ce qui n’est pas du domaine scolaire, des connaissances ‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐ 

une non‐prise de position quant à certains thèmes         Solange 

 

une attitude équitable et juste     Jean 

 

une non‐imposition des valeurs de l’enseignant  Florent 

 

un processus de réflexion éthique       Jean, Solange, Norbert