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Chapitre1 Problématique

ÉTAPES DE SUPERVISION DE STAGE

2.2 Les compétences professionnelles

2.2.3 Le stress lié à l’évaluation des stagiaires

Le stagiaire qui en est à ses premières armes dans le milieu scolaire vit souvent un grand stress face au fait de devoir mettre en pratique ses nouveaux apprentissages devant des observateurs et mobiliser ses compétences professionnelles en pleine construction. (Acheson et Gall, 1993; Gervais et Desrosiers, 2005; Montgomery, 2001; Montgomery, Bujold et Kaszap, 1999). « Même prévues et planifiées, les visites de supervision sont jugées comme des situations stressantes pour les stagiaires et même pour les enseignants associés » (Gervais et Desrosiers, 2005, p.136).

Pour Lazarus et Folkman (1984, p.21), « le stress met en relation l’individu et son environnement. D’une part, il tient compte des caractéristiques de l’individu et d’autre part, de la nature de l’environnement »17

. Ainsi, une situation stressante telle une séance d’observation en stage pourrait contribuer à stresser un stagiaire. Acheson et Gall (1993, p. 133) prétendent même que « la menace que crée la perspective de l’évaluation peut détruire le potentiel inhérent aux techniques de supervision clinique dont le but est de favoriser chez [le supervisé] l’auto-analyse, la réflexion et la

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croissance ». Et si, par surcroît, l’environnement est modifié par la présence de caméras par exemple, comme c’est le cas dans la présente étude, il est envisageable que ce niveau de stress en soit aussi transformé (Acheson et Gall, 1993; Tochon, 2002). En effet, Acheson et Gall (1993), dans la présentation de différentes techniques de supervision, font état de l’inquiétude ressentie par le stagiaire à l’idée d’être enregistré sur bande vidéo lorsque ce moyen est mis de l’avant pour effectuer l’observation. Quant à Dudding et Justice (2004), dans leur étude portant sur la mise en place d’une supervision de stage par vidéoconférence, une e-supervision, ils constatent que le stress des stagiaires est en effet transformé lors d’une supervision en distanciel, mais à la baisse. « Participants suggested that e-supervision is less intrusive and that the supervisor becomes “transparent”. One participant indicated that she almost forgot that she was being supervised » (Dudding et Justice, 2004, p.149).

Bien que la relation avec le superviseur universitaire ne soit pas identifiée comme étant un facteur de stress par Matte, Montgomery et Demers (2006) dans leur étude sur les sources de stress des stagiaires en enseignement, lorsque vient le temps d’être observé par un tiers, il n’est pas surprenant que ce stress prenne de plus grandes proportions. En effet, « l’activité d’évaluation par le superviseur est souvent synonyme de stress pour l’étudiant » (St-Pierre, 2005, p.35). D’ailleurs, Montgomery et Bujold (2002), dans leur revue de littérature sur le stress des stagiaires en enseignement, rapportent plusieurs résultats d’études qui convergent vers le fait que l’évaluation fait partie des principales causes de stress des étudiants pendant leur formation pratique. Montgomery (2007) ajoute qu’une situation perçue comme une menace peut susciter du stress chez les individus. « La situation même de stage comporte des éléments de stress spécifiques tels que l’accompagnement de tous les instants et l’évaluation continue du milieu scolaire et universitaire […] » (Montgomery, 2007, p.112). Le stage étant tributaire en grande partie de la carrière de l’étudiant, il n’est pas étonnant qu’il crée quelques remous.

Afin de bien préparer le stagiaire à mieux gérer les situations stressantes, Montgomery, Bujold et Kaszap (1999) et St-Pierre (2005) suggèrent que l’équipe d’accompagnateurs aide le stagiaire à identifier et à comprendre les sources de stress. Entre autres, la crainte d’être jugé par le superviseur et la performance à donner lors des prestations d’enseignement (St-Pierre, 2005) font partie des principaux stresseurs associés au stage. Pour Montgomery (2001, p.39), « les situations difficiles ou stressantes peuvent provenir de trois sources principales : l’anxiété (surtout provoquée par la perception d’un avenir incertain), la frustration (provoquée par un échec temporaire ou définitif dans la poursuite d’un objectif personnel), le conflit (intervient lors d’un différent dans les relations avec d’autres personnes) ». Dans le contexte particulier de cette étude, spécifions à nouveau que la supervision se déroule en partie à travers une lentille de caméra. En étant conscient qu’une telle pratique peut avoir un effet sur le stress des stagiaires en créant de l’incertitude et par la modification de l’environnement (Acheson et Gall, 1993; Lazarus et Folkman, 1984; Tochon, 2002), il importe de rassurer les participants tant au niveau technique qu’au niveau éthique18.

Que ce soit en situation de formation, de perfectionnement ou de changement éducatif, chaque participant souhaite paraître compétent, consistant, et veut contrôler la situation. La nouveauté et l’incertitude sont des facteurs de stress […] (Tochon, 2002, p.120).

Selon Lazarus et Folkman (1984), l’individu est aussi une donnée importante dans la gestion du stress. S’il parvient à identifier ce qui crée cet état, il pourra cerner ce qu’il peut contrôler et ce qu’il ne peut pas changer (Montgomery, 2001). En formation pratique, le stagiaire peut compter sur l’accompagnement et l’encadrement d’une équipe de formateurs pour l’aider à identifier ses sources de stress. Toutefois, selon St-Pierre (2005), le stagiaire n’est pas nécessairement à l’aise de discuter de ses problèmes personnels avec son superviseur, en l’occurrence du stress qu’il vit, de

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peur d’être jugé et que ce jugement ait des répercussions sur sa note. Il se confierait plus facilement à son enseignant associé. Ainsi, la communication entre l’enseignant associé et le superviseur devient importante afin d’arriver à mieux comprendre l’état d’esprit du stagiaire au moment où il est observé et l’aider à combattre les effets négatifs causés par son stress (St-Pierre, 2005).

Dans la présente étude, l’objectif est de décrire le modèle de supervision en distanciel appuyé par les TIC lors des stages réalisés dans les milieux éloignés des universités. En prenant en compte que l’évaluation des stagiaires leur cause d’emblée un certain niveau de stress (Gervais et Desrosiers, 2005; Montgomery, 2007) et que nous anticipons que ce stress sera modifié compte tenu de l’utilisation de la caméra (Tochon, 2002), nous comptons observer cet aspect de la supervision lorsque nous identifierons les avantages et les limites d’une approche de supervision de stage en distanciel.