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La mise au jour des valeurs agies dans la relation d’accompagnement

1- Le respect de l’engagement bénévole : le contact

Le respect de l’engagement bénévole passe par un intérêt porté aux parcours pendant l’entretien qui se prolongera par des attentions spontanées lors de temps informels tout au long de l’accompagnement. Chez Sandra, cet intérêt porté aux motivations repose sur un préalable en termes de premier accueil (informel) permettant au bénévole de se sentir ‘attendu’.

197 Le zoom 1 (axe de la relation) exploré spontanément par Sandra engage ainsi plus particulièrement le processus relationnel de l’accompagnement ; ce dernier sous-tend une trajectoire de participation qui s’inscrit plus largement au niveau des expériences de référence que Sandra exprime dans la continuité de l’Ede.

1-1La trajectoire de Sandra

Sandra décline le zoom 1 en deux temps distincts : un temps dédié aux échanges informels que nous avons nommé ‘présentation croisée’ et un temps dédié à l’écoute des motivations. Le temps d’accueil informel implique une présentation mutuelle coordinateur/bénévole sur des éléments non directement reliés aux finalités de l’entretien de recrutement. Les échanges portent sur une connaissance respective des

habitudes et des centres d’intérêts : « un échange d’individu à individu sympathique ».

Ces premières minutes de rencontre permettent à Sandra de se faire une première idée de la personne (prises d’information) qu’elle a en face d’elle, de repérer son positionnement dans la relation (intelligence relationnelle). L’accueil est pris au sens physique du terme qui renvoie à une habitude chez Sandra : accueillir l’autre en lui faisant une place (aménager le bureau, ranger les dossiers, déplacer l’ordinateur). Ce temps préalable d’accueil crée les conditions pour que la rencontre se fasse. Le temps d’accueil formel s’engage autour d’une demande de présentation à partir d’une

question ouverte « pour savoir un peu mieux qui vous êtes, pour que l’on se connaisse

mieux, pour que l’on se comprenne un peu mieux ».

Dans ce temps formel, Sandra mobilise plusieurs critères de ‘sélection’ parmi lesquels le dynamisme et la curiosité. La recherche de qualités humaines sous-tend une préoccupation sous-jacente concernant les publics. Sandra cherche ainsi à repérer

si les motivations exprimées correspondent au projet institutionnel. Elle identifie « en

quoi la présence de cette personne va apporter quelque chose pour les apprenants » ce qui correspond à un objectif général dans sa pratique de recrutement.

198 Sandra opère également une contre-généralisation s’agissant d’une vigilance

vis-à-vis de bénévoles en souffrance confrontés à une problématique « de l’ordre de rompre

l’isolement total pour être avec l’autre » ; des bénévoles à qui elle ne dira pas non mais

pour lesquels elle cherchera une solution intermédiaire : « C’est vraiment presque un

accompagnement social, voir qu’est-ce que le centre social peut faire pour cette personne ».

Le temps formel de la rencontre repose sur une invitation à exprimer les motivations associées au projet de bénévolat. Parmi les qualités recherchées, Sandra est sensible aux valeurs générales que la bénévole (journaliste) exprime et qui correspondent à sa vision de l’animation de formation (donner vie). Ces qualités viendraient ici combler l’absence de compétence particulière dans le champ de la formation au profit d’une compétence qui s’exprime davantage dans le rapport à l’écrit. Le profil de la journaliste la touche plus particulièrement au niveau du lien qu’elle exprime entre sa vie professionnelle et son projet de bénévolat : les mots qu’elle maîtrise/ les mots que les migrants ne maîtrisent pas. Les valeurs exprimées s’articulent à un double niveau

d’engagement : « une entrée générale d’aider l’autre, le bénévolat…et par son métier, elle

trouvait que c’était une bonne porte d’entrée d’aider l’autre ». La bénévole exprime ainsi une envie générale d’aider l’autre à travers des attentes qui correspondent à ce que

Sandra recherche : « Elle est beaucoup sur le sens et la valeur au niveau philosophique ».

Elle exprime par ailleurs une entrée plus personnelle reliée à son parcours : « Par son

métier de journaliste, elle s’est rendue compte des difficultés que les autres personnes pouvaient avoir dans la vie, qu’elle aimerait bien à un moment donné pouvoir un minimum aider ».

1-2Une reconnaissance partagée

Tout en admettant le caractère très subjectif de l’enthousiasme provoqué par cette rencontre, Sandra replace ce temps de recrutement dans un contexte institutionnel en proie à une absence prolongée de bénévole et reconnaît que cet enjeu la guide tout au

long de l’échange pour faire en sorte que ça n’aille pas trop vite : « C’est bon je sais

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C’est le moment qu’elle retient comme étant le moment le plus important : « C’est

quand je me suis dit, c’est ok pour moi en tant que coordinatrice…Quand j’ai assez d’informations pour dire ‘je valide’. C’est là que je me suis dit ‘c’est bon ça me rassure, maintenant je peux aller doucement’ »175.

Dans la continuité de cette émergence de sens (écho demandé avec des expériences de référence), Sandra évoque un contre-exemple d’une situation de recrutement dans laquelle elle a adopté le même positionnent mais où elle a su que « ça ne marcherait pas » : une personne autocentrée, un discours qui manque de vie et d’émotions, un problème de positionnement, un manque de maturité et de sens, un manque de simplicité. Cette situation permet de confirmer les valeurs qui la guident dans sa démarche relationnelle à travers des indices qui l’orienteront dans sa décision quand elle est en position de recrutement. Le « contact » repose ici sur le respect de l’engagement bénévole qui contribue à la construction symbolique d’un espace de reconnaissance partagée. Cette reconnaissance mutuelle s’engage à la fois sur un plan informel dans les premiers temps de la rencontre et au niveau d’une reconnaissance formelle des valeurs qui contribuera à l’émergence d’un espace commun de références.