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2. Revue de littérature 9 

2.4 La résilience en formation infirmière 39

2.4.2 Le processus de résilience en formation infirmière 41

L’apprentissage en IFSI offre certaines possibilités aux étudiants de mobiliser des facteurs de protection individuels, des facteurs de protection externes ainsi que des mécanismes de défense, permettant le processus de résilience. Elle organise également un cadre contenant concernant l’affectivité générée par les situations de soins.

D’abord, les facteurs de protection individuels peuvent être stimulés et mobilisés en formation en IFSI. Le premier peut concerner de supposées capacités intellectuelles suffisantes pour prendre du recul et mentaliser leurs futures difficultés en formation. Les apprentis infirmiers sont sélectionnés sur concours, avec entre autres la réussite à des tests psychotechniques et un entretien oral (Référentiel de formation, 2009). Nous pouvons présumer que cet examen sélectionne des étudiants qui disposent d’un QI suffisamment élevé pour faire des liens, chercher à comprendre et surmonter les évènements difficiles auxquels ils seront confrontés. En outre, les IFSI organisent une formation par alternance. Un étudiant apprend sur un lieu de stage différent toutes les 5 à 10 semaines (Référentiel de formation, 2009). S’il réussit à s’adapter à ces changements et faire preuve de flexibilité, nous pouvons penser qu’il peut avoir ces compétences pour entrer en résilience si nécessaire. De même, le fait d’avoir des objectifs de succès aux examens, des buts de stage et de soins à atteindre pour maintenir la santé de patients par exemple, montrent que la formation infirmière est stimulante pour le processus de résilience, car elle permet au sujet de se fixer des objectifs personnels et collectifs.

Par ailleurs, nous ne pouvons pas garantir des compétences relationnelles individuelles de chaque étudiant infirmier. Néanmoins, à l’oral du concours, le jury est vigilant à l’ouverture d’esprit, à l’écoute, à l’acceptation de la controverse et aux capacités relationnelles globales du candidat. En stage et à l’IFSI, les étudiants développent ces compétences et sont évalués à propos de celles-ci notamment à travers la compétence 6 (Référentiel de formation, 2009). Ils apprennent et mettent en pratique en permanence sur le terrain la relation d’aide et ses principes d’authenticité, d’empathie et de congruence. Par conséquent, concernant les facteurs de protection individuels mobilisables dans le

processus de résilience, les dispositions sociales positives, les capacités de bienveillance, la patience et la tolérance sont potentiellement des atouts dont peuvent faire preuve les étudiants soignants. Aussi, les situations de stage étant très variées, chaque cas étant unique, chaque organisation de travail étant différente selon les unités de soins, les apprentis infirmiers qui arrivent à poursuivre leur formation en dépit de l’adversité rencontrée durant leurs scolarités sont des étudiants flexibles sachant s’adapter et planifier de manière autonome. Ces données individuelles sont des facteurs de protection essentiels dans le processus de résilience.

En outre, nous avons vu que ces études, tant dans leur dimension pratique que théorique, pouvait être très stressantes. Un des facteurs de protection individuel très important dans le cadre de la résilience est la capacité à gérer le stress et ne pas être accablé par celui-ci. La formation incite l’individu à mobiliser des mécanismes de défense pour faire face à l’angoisse générée par les situations anxiogènes. En effet, lorsque les élèves infirmiers sont en stage, ils travaillent et prodiguent des soins. Ceci leur permet d’utiliser l’activisme en étant investis dans des tâches à effectuer. Cet activisme pourra aussi faire en sorte que l’étudiant oublie un temps ses problèmes personnels en se concentrant sur le travail. De même, ce dernier favorise la sublimation en transformant les pulsions négatives en plaisir de travailler et en créativité. La rédaction d’APP mobilise aussi ce mécanisme. Soigner les autres permet aussi de faire preuve d’altruisme en donnant de soi-même à un autre souffrant qui a besoin d’aide.

Ensuite, outre l’activisme et la sublimation que l’on peut retrouver semblablement dans l’apprentissage théorique, le mécanisme d’affiliation est très présent en IFSI. En effet, de nombreux temps de travail en groupe permettent aux étudiants de partager entre pairs et donc de décharger les affects négatifs ressentis au moment de situations difficiles. Ils favorisent également le processus de mentalisation essentiel à la résilience. Par conséquent, lors des séances d’APP, durant des séances d’exploitations de stage où chaque ESI raconte comment il a vécu son apprentissage pratique, ou pendant des travaux de groupes par exemple, les étudiants ont de nombreuses occasions de partager leurs difficultés avec d’autres qui peuvent se reconnaître en eux. Enfin, en formation et ainsi en IFSI, l’intellectualisation favorisant le processus de mentalisation est très centrale. Le fait de comprendre ce qu’ils ont vécu par une explication théorique en cours, ou d’avoir un regard bienveillant extérieur et des explications théoriques en analyse de la pratique... sont des exemples apportés par la formation permettant l’intellectualisation et favorisant la mentalisation.

Pour finir à propos des facteurs de protection individuels mobilisés en IFSI, cette formation offre un cadre structurant à l’affectivité générée par les situations de soins. En effet, nous avons vu que les soins et la relation pédagogique pouvaient produire un transfert d’affects négatifs potentiellement vulnérabilisant pour l’étudiant. Mais le contraire est possible. D’une part, les patients et leur famille, bien que parfois agressifs dans leur comportement et par leur maladie, transfèrent aussi énormément d’émotions positives. Par leurs remerciements manifestés verbalement ou dans leurs gestes, ils peuvent être très valorisants pour l’apprenant. Ils peuvent permettre également de s’occuper d’eux malgré leur inexpérience et être assez bienveillants avec les novices. Ces situations renvoient aux étudiants une image narcissiquement positive en termes de sentiment d’utilité, mais aussi peuvent leur transmettre des émotions de soulagement, d’apaisement, de rire et de sympathie par exemple. Cette affectivité mobilisée lors de la formation aux soins peut en outre favoriser le processus de résilience. Dans le même ordre d’idée, les évaluations, facteurs importants de stress, sont aussi des moments structurants pour la construction de l’identité soignante des étudiants, car ils voient concrètement la validation de leurs compétences par leurs futurs pairs. Ces évaluations, lorsqu’elles sont réussies sont génératrices de plaisir, de satisfaction et témoigne de la progression de l’individu. Ces instants peuvent participer à la résilience dans le cadre d’une scolarité infirmière. Enfin, ces moments de transfert positif d’affectivité s’effectuent dans le cadre structuré des études. Le climat général de l’école par ses règles, son programme de formation, son équité de traitement, quels que soient les problèmes personnels des sujets, offre un milieu rassurant et bienveillant à l’affectivité et à l’apprentissage. Ce cadre est un facteur de protection externe important pour la résilience.