• Aucun résultat trouvé

Le diplôme, premier rempart contre le déclassement

qui sont les déclassés ?

3.1. Les déterminants du statut social

3.2.2. Le diplôme, premier rempart contre le déclassement

Si une origine cadre solide facilite le maintien de la position du père, l’accès à l’emploi d’encadrement n’est guère possible sans un parcours scolaire réussi : le diplôme constitue indubitablement le meilleur rempart contre le déclassement social (FIG.3.5).

FIG.3.5. Niveau de diplôme et devenir professionnel des enfants de père CPIS (%)

0 20 40 60 80 100 Aucun ou CEP Inférieur au bac

Bac Bac+2 2ème ou 3ème cycle univ. Niveau de diplôme Employé / ouvrier Prof. Int. CPIS indépendant Source : FQP 2003

Ainsi, alors que moins de 10% des individus qui n’ont aucun diplôme deviennent cadre supérieur, c’est le cas de plus de 70% de ceux qui sont titulaires d’un diplôme de deuxième ou troisième cycle universitaire.

Au-delà de ce constat général, on remarque en outre que deux niveaux de diplôme constituent de véritables passerelles. Tout d’abord, le fait d’être diplômé d’un deuxième ou troisième cycle universitaire constitue véritablement le passeport pour l’accès à la position de cadre supérieur. Plus particulièrement, le fait de détenir un diplôme de niveau bac+2 n’est pas associé à une forte probabilité de devenir cadre supérieur puisque seuls 29% de ces diplômés sont dans ce cas. C’est donc bien la poursuite des études au-delà du niveau bac+2 qui assure dans 70% des cas l’accès à l’encadrement supérieur.

Second diplôme charnière, le baccalauréat. Ne pas le détenir est en effet un facteur très net de mobilité descendante. Près de 70% des enfants de cadres supérieurs qui n’ont qu’un CEP occupent des emplois d’ouvriers ou d’employés. La proportion est encore de plus de 60% pour ceux qui ont un autre diplôme inférieur au bac (brevet des collèges par exemple) et c’est bien l’obtention du baccalauréat qui constitue une protection relative face à ces trajectoires fortement descendantes, la proportion d’employés et d’ouvriers chutant à 37%.

Le poids du niveau de diplôme doit être nuancé de deux manières. Premier point à souligner, toutes les formations de ce niveau n’ouvrent pas des perspectives équivalentes (TAB.3.7). Moins d’un tiers62 des titulaires d’un diplôme de premier cycle universitaire (DEUG notamment)

accèdent à la position de cadre supérieur contre la moitié des titulaires d’un diplôme de second cycle et 82% des titulaires d’un diplôme de troisième cycle. La proportion est la même pour les individus qui possèdent un diplôme d’une grande école ou d’ingénieur. Sans surprise, la proportion est encore plus élevée pour les titulaires d’un diplôme de médecine ou de pharmacie, diplômes dont l’obtention se traduit alors de manière quasi automatique par l’entrée dans la profession visée.

62 Les effectifs étant relativement faibles, il faut évidemment considérer avec prudence des éléments chiffrés qui font

TAB.3.7. Devenir professionnel en fonction du type de diplôme Profession (%)

Diplôme CPIS PI Employé / ouvrier

Diplôme universitaire de premier cycle (N = 70) 32,9 44,3 22,9

Diplôme Universitaire de Technologie (N = 219) 37 26 32,9

Diplôme universitaire de deuxième cycle (N = 256) 50 26,7 16

Ensemble des diplômés du supérieur 57,5 26,7 13,5

CAPES, agrégation (N = 47) 73 27, 0

Diplôme universitaire de troisième cycle (N = 150) 82 13,3 4

Autre diplôme (N = 62) 82,3 11,3 6,5

Ecole d’ingénieur, institut, grande école (N = 181) 82,3 10,5 5,5

Doctorat médecine, pharmacie, dentiste (N = 63) 88,9 11,1 0

Source : FQP 2003

Champ : enfants de père CPIS, âgés de 30 à 45 ans

Seconde nuance ensuite, la protection qu’offre un diplôme de deuxième ou troisième cycle universitaire n’est pas sans faille, loin s’en faut : près d’un enfant de cadre supérieur sur trois ne parvient pas à reproduire la position du père, malgré un tel niveau de diplôme. Le résultat est d’ailleurs à garder en mémoire : on verra plus loin que l’incapacité à reproduire la position des parents malgré des études longues et un diplôme élevé peut-être vécue comme étant particulièrement injuste par les intéressés, structurant alors leur expérience subjective. La taille relativement importante de l’échantillon initial et la précision de l’enquête FQP permettent de commencer à dessiner le portrait de ces « déclassés » diplômés du supérieur. On peut en effet isoler 99 employés et ouvriers titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur et dont le père est cadre supérieur. 35 d’entre eux sont titulaires d’un DUT et 31 d’un deuxième cycle universitaire (licence ou maîtrise dans le système d’avant LMD). Il semble donc que les études universitaires ne sont « rentables » pour les enfants de cadres supérieurs qu’à partir du troisième cycle, et que les filières courtes (DUT, BTS) ne constituent pas un passeport fiable vers le salariat d’encadrement. Tous les « déclassés » ne sont pas des victimes de l’échec scolaire : un nombre non négligeable d’entre eux ont connu des carrières scolaires honorables, au-delà du baccalauréat général, qui ne les protègent pas de la mobilité descendante.

Concernant le niveau d’études, il faut enfin souligner l’inégalité des chances scolaires qui perdure, y compris parmi les enfants de cadre : ainsi, si près de 56% des individus dont le père est diplômé d’un second ou troisième cycle universitaire ont un diplôme de même niveau, seuls 21% des enfants de père non diplômé détiennent un tel diplôme (FIG.3.6).

FIG.3.6. Diplôme de l'individu en fonction du diplôme du père (%)

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100

Aucun diplôme Inférieur au bac Baccalauréat Bac+2 2ème ou 3ème cycle univ.

Diplôme du père

Dipl

ôm

e du fil

s 2ème ou 3ème cycle univ.

Bac+2 Baccalauréat Inférieur au bac Aucun diplôme

Source : FQP 2003

Champ : enfants de père CPIS, âgés de 30 à 45 ans

Plus largement, plus le niveau de diplôme du père est élevé, plus la proportion d’individus qui obtiennent un diplôme supérieur à bac+2 augmente. Seuls 12% des enfants de père diplômé d’un deuxième ou troisième cycle universitaire n’ont pas le baccalauréat contre plus de 41% des enfants de père non diplômé.

Ces résultats soulignent à quel point la transmission du statut de cadre est assurée par la transmission du capital culturel : si les enfants de professeurs ou de père exerçant une profession libérale sont à ce point favorisés pour devenir cadre, c’est bien parce qu’ils sont plus souvent issus de lignées riches en capital culturel.