• Aucun résultat trouvé

La vision classique de la politique monétaire

Section I : Les fondements théoriques de la politique monétaire

1. La vision classique de la politique monétaire

Rappelons que dans la vision classique, la monnaie est neutre pour les variables réelles et déterminantes pour les prix, leur analyse suppose que les variables monétaires n’exercent aucune influence sur l’économie réelle. C’est à dire que la monnaie est un instrument destiné seulement à faciliter les transactions. Aussi, la théorie monétaire classique est une théorie fondée sur l’approche dichotomique, elle considère que la monnaie est neutre et n’exerce aucune influence sur l’économie réelle.

Dans l’économie réelle, l’analyse de la production est gérée par la loi de débouchés de J. B. Say, c’est-à-dire que l’offre crée sa propre demande, tandis que dans l’économie monétaire, l’analyse fournit des explications du niveau général des prix grâce de la théorie quantitative2.

Bien évidemment, la monnaie a un rôle unique qui consiste à déterminer le niveau général des prix à travers la théorie quantitative de la monnaie3. Cette théorie quantitative de la monnaie analyse le rapport entre la masse monétaire, et les prix. Aussi, l’idée fondamentale de cette théorie est que le niveau des prix s’accroît lorsque la quantité de monnaie augmente et diminue lorsqu’elle baisse. Pour cela, la monnaie n’a pas d’effets sur l´économie réelle, c’est-à-dire que la monnaie est neutre par rapport aux mécanismes réels de l’économie. Au reste, la monnaie n’exerce d’influence que sur le niveau général des prix.

Cependant, il est intéressant de signaler que dans l’analyse qui suit nous traiterons, en premier lieu, la théorie quantitative de la monnaie selon la formulation de Fisher et Marshal -

1 Document en ligne : disponible sur l’adresse : http://www.ac-orleans-tours.fr/centreco/ecomonet/fiche_12.htm. Date de consultation : 16 Jan. 2016.

2 O. Hueber, "économie générale ", editions technip, Paris, 2005, p 100.

62

Pigou. En second lieu, nous nous intéressons à la politique monétaire selon la vision classique. Puis nous ferons une brève synthèse sur cette politique.

1.1.La théorie quantitative de la monnaie (la formulation par Fisher)

Dans le pouvoir d’achat de la monnaie, publié en 1911, Fisher part d’une constatation simple : « au cours d’une année, le total de la monnaie payée a une valeur égale à la valeur totale des biens achetés »1.

Fisher pose ce qu’il appelle l’équation générale des échanges, représentée selon formule suivante2 :

M ∗ V = P ∗ T

Où :

M : La quantité de la monnaie.

V : vitesse de circulation de la monnaie. P : Le niveau général des prix.

T : Indice de volume de transaction réalisé au sein de l’économie au cours d’une période de temps donnée.

L’équation de Fisher indique que la valeur totale des achats permis par la monnaie en une année (MV) est égale à la valeur totale des biens achetés au cours de la même période (PT)3. L’interprétation de l'équation dépend de plusieurs hypothèses, tel que4 :

- L’offre de la monnaie (M) est une variable exogène, elle est entièrement contrôlée par les autorités monétaires.

- La vitesse de circulation de la monnaie (V) est stable sur le court terme. Pour Fisher, elle est considérée comme un coefficient technique dépendant du type et de la périodicité des paiements. : la structure bancaire de la collectivité (nombre de guichets, facilités de crédit).

- L’indice de volume de transaction (T) est stable. Pour Fisher, il dépend des facteurs réels (production, marché de travail), il est déterminé en dehors de la sphère monétaire c’est-à-dire que l’économie est en situation de plein emploi de facteur de production parce que l’offre crée sa propre demande.

- Le niveau général des prix (P) est une variable dépendante de la quantité de la monnaie, c’est-à-dire que la monnaie est neutre et n’a aucune incidence sur l’économie réelle, de

1 V. Lelievre et al, "économie monétaire et financière", édition bréal, Paris, 2006, p 98.

2 B. Bernier et Y. Simon, "Introduction à la macroéconomie",édition dunod, Paris, 2001, p 302 - 304.

3 M. Mourgues,"économie monétaire (théorie et politique monétaire)", édition Dalloz, Paris, 1976, p 15.

63

sorte que si les prix s’élèvent ou s’abaissent en même temps que la quantité de monnaie s’accroît ou diminue (T et V restent constants).

Dans son ouvrage de référence « le pouvoir d’achat de la monnaie » publié en (1911), l’économiste I. Fisher écrit que toute variation de la quantité de la monnaie en circulation dépend du niveau de prix, de sorte que cette théorie quantitative de la monnaie repose sur l’hypothèse de stabilité du coefficient (V) et (T).1

Selon lui, cette relation insiste sur l’influence qu’exerce la quantité de monnaie sur le niveau des prix, et il affirme qu’il existe une relation de causalité entre la monnaie et le prix2. Compte tenu de ces hypothèses, l’équation de Fisher signifie que le niveau général des prix dépend uniquement du volume de monnaie en circulation, c’est-à-dire que les prix sont déterminés uniquement par la quantité de monnaie3. Autrement dit, le niveau général des prix dépend de l’offre de monnaie, qui est une variable exogène dont la valeur dépend de la volonté des autorités monétaires.

1.2.La théorie quantitative de la monnaie (la formulation par Marshall et Pigou)

En quelques années la formule de Fisher allait connaître dans les laboratoires et séminaires de l’université de Cambridge, et sous la double impulsion d’A. Pigou et A. Marshall (1917) une modification décisive de son écriture et de sa lecture. D’une écriture en termes de transactions, les professeurs de Cambridge sont passés à une écriture en termes de revenu, et d’une lecture en termes de vitesse de circulation à une lecture en termes de fonction de demande de monnaie4.

Dans cette construction théorique, le concept fondamental n’est plus pour l’école de Cambridge l’offre de monnaie, mais la demande de monnaie. Cette formulation de la théorie quantitative de la monnaie par Marshall et Pigou est encore appelée équation de Cambridge (1917).

La version cambridgienne de la théorie quantitative abandonne la formulation transactionnelle avancée par I. Fisher et s’appuie sur l’équation suivante :

M = K ∗ P ∗ Y

M : la quantité de la monnaie.

K ; représente le coefficient de l’équation de Cambridge qui est l’inverse de V vitesse de la circulation de la monnaie.

P : le niveau général des prix.

1M. Vaté, "leçon d'économie politique", édition économica, Paris, 1999, p 259.

2 M. Mourgues, "macro économie monétaire", édition economica, Paris, Janvier 2000. p34.

3 Ibid p 15.

64

Y : représente le revenu réel.

D’après A. Pigou et A. Marshall, la nouvelle approche diffère de celle de Fisher car1 : - Cette approche est une approche de demande de monnaie.

- Le volume de transaction (T) est remplacé par le revenu (Y).

- Le coefficient K= (1/V) est constant car la vitesse de revenu est constante.

- L’offre de la monnaie (la masse monétaire) est traitée comme grandeur exogène parfaitement contrôlé par les autorités monétaires.

- l’encaisse nominale des agents est proportionnelle à leurs revenus monétaires (PY). - Dans les situations stables, la masse monétaire est la fonction causale des variations du

niveau des prix (la valeur de la monnaie).

D’après P. Combemale (1999), la nouvelle expression d’A. Marshal tend à souligner que les agents économiques, en moyenne, veulent détenir une certaine proportion de leurs revenus totaux sous forme monétaire2.

Cette équation cambridgienne peut être écrite aussi sous la forme d’une encaisse réelle :

M

P = K ∗ Y

D’après la littérature économique et l’analyse classique, le montant de l’encaisse est choisi par les agents économiques en valeur réelle de sorte que les individus ne veulent pas conserver une somme déterminée en valeur nominale mais certain pouvoir d’achat3.

En revanche, dans la version cambridgienne de la théorie quantitative, l’effet d’encaisse réelle permettra d’expliquer, comment un accroissement de la quantité de monnaie en circulation réagit sur le niveau général des prix. À ce titre, d’après G. Jacoud (2006), « un accroissement de M conduit les agents à recevoir de la monnaie pour un montant supérieur à ce qu’ils souhaiteraient détenir. Ils augmentent donc leurs dépenses, ce qui provoque un accroissement de P tant que l’encaisse réelle n’a pas retrouvé la même proportion avec le revenu réel qu’avant l’accroissement de M »4.

Compte tenu de ces différents éléments, on déduit que cette théorie quantitative de Marshal ne se distingue pas de celle de Fisher, parce qu’elle suppose que K soit constant. Dans ce sens, M. Falise (1959) écrit que « c’est sur cette hypothèse de constance de K, c’est-à-dire de la demande d’encaisses réelles, que se fonde la théorie quantitative »5. Autrement dit, avec

1J. Bourget et Y. Zenoo, "monnaie et système monétaire dans le monde", édition bréal, France, 1995, p166 - 170.

2 P. Combemale, "introduction à keynes", édition la découverte, Paris, 1999, p 71.

3 G. Jacoud, "la monnaie dans l'économie", édition Nathan: France, 1994, p 178.

4 G. Jacoud, "l'europe monétaire", édition Armand Colin, Paris, 2006, p 117.

65

une approche en termes d’offre et de demande. De ce fait, A. Pigou et A. Marshall arrivent aux mêmes conclusions que Fisher1.

Après cette analyse de la théorie quantitative de monnaie on essaye de savoir comment que celle-ci pourrait être traduite en matière de politique monétaire.

1.3.La politique monétaire des classiques

En raison du principe de dichotomie adapté par le modèle classique et d’après la théorie quantitative de la monnaie, on peut dire qu’il n’y a pas d’influence des phénomènes monétaires sur les phénomènes réels. Une politique monétaire expansive n’a d'influence que sur le niveau des prix. Elle engendre des pressions inflationnistes. De ce fait, la politique monétaire chez les classiques est neutre et inefficace, elle n’a pas d’effet sur les variables réelles de l’économie (la production, la consommation, l’investissement).

Bien évidemment, d’après la théorie quantitative de la monnaie, le niveau général des prix dépend de la masse monétaire en circulation, alors il existe un lien causal entre la masse monétaire et les prix. Dans ce sens, toute augmentation de la quantité de la masse monétaire en circulation entraîne une augmentation proportionnelle du niveau général des prix. Donc, s’il existe une bonne raison de pratiquer une politique monétaire c’est pour assurer la stabilité des prix (lutte contre l’inflation). Ainsi, l’objectif général de la politique monétaire classique est la stabilité des prix (lutte contre l’inflation). Elle doit s'appliquer selon un principe réglementaire et non discrétionnaire, c’est-à-dire la régulation de la masse monétaire permet de juguler l’inflation2. Pour ce faire, il suffit de viser un objectif intermédiaire de la politique monétaire qui est le contrôle de la masse monétaire menée par la banque centrale.

En définitive, ce qui importe de souligner au sujet de la politique monétaire des classiques est qu’une augmentation de la quantité de la monnaie (politique monétaire expansive) agit directement sur le niveau des prix. Elle n’a aucune action sur les variables réelles de l’économie à court terme. Par contre, à long terme, la politique monétaire expansive exprime une conception de l’inflation grâce à l’augmentation de la masse monétaire qui se traduit par une hausse du niveau général des prix. Pour cela, l’objectif principal de la politique monétaire classique est la stabilité des prix car l’augmentation de la masse monétaire influence le niveau général des prix qui engendre des pressions inflationnistes. Alors que, l’objectif intermédiaire

1 A. Heertje, P. Barthélemy, et Patrice Pieretti, "principes d'économie politique", édition de boeck, Belgique, 2003, p 102.

66

est le contrôle de la masse monétaire1. Dans le cadre de la vision classique, on peut dire que la politique monétaire doit viser en priorité et en permanence la stabilité des prix.

Dans cette première partie d’analyse de la politique monétaire selon la vision classique, nous pouvons retenir deux points importants. Premièrement, la politique monétaire n’a aucun effet sur l’économie réelle à court terme. Par contre, à long terme, la politique monétaire expansive exprime une conception de l’inflation à cause d’une augmentation de l’offre de monnaie qui entraîne une augmentation proportionnelle du niveau général des prix. Deuxièmement, la politique monétaire classique engendre des pressions inflationnistes. C’est la raison pour laquelle qu’elle est considérée comme neutre et inefficace de sorte que celle-ci n’a pas d’influence sur l’économie réelle.

Lors de la partie suivante, nous allons nous focaliser sur la vision keynésienne de la politique monétaire. En premier lieu, nous donnons des explications de la politique monétaire chez les keynésiens (politique discrétionnaire). Puis, nous étudions par la suite la vision keynésienne et en particulier la politique discrétionnaire, deux types de la politique monétaire à savoir : la politique monétaire expansive et la politique monétaire restrictive. En dernier lieu, nous analyserons l’efficacité de la politique monétaire keynésienne.