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Le choix entre règles et discrétion

Section III : Conduite et stratégies de la politique monétaire

1. La conduite de la politique monétaire (la règle ou la discrétion)

1.1. Le choix entre règles et discrétion

Selon la littérature économique, la politique monétaire a connu un développement passant des politiques monétaires discrétionnaires aux politiques monétaires de règle.

Depuis les années soixante-dix, la stabilité des prix est considérée comme un objectif de la majorité des banques centrales. Les économistes keynésiens préfèrent une politique discrétionnaire, et ce pour plusieurs raisons : ils mettent en relief la complexité de la politique monétaire et la fragilité des systèmes bancaires modernes.

Pour la discrétion, les keynésiens sont partisans de politiques discrétionnaires, leur fondement consiste à essayer d’agir sur l’économie de court terme et d’essayer d’employer toutes les informations et tous les outils disponibles pour tenter d’infléchir l’équilibre économiques dans un sens favorable à la maximisation de l’utilité sociale2. Selon eux, la politique monétaire a besoin d’une régulation macroéconomique fine, et l’équilibre entre offre et demande se fait à travers les quantités et leurs prix3.

On partant de la demande anticipé ou effective :

1 Document en ligne : les documents de travail économique du sénat, " la politique monétaire : Objectifs, méthodes et nouveaux problèmes ", Étude économique n° 4 - 5 novembre 2009. Disponible à l'adresse :

https://www.senat.fr/eco/ec-04/ec-04_mono.html. Date de consultation : 20 Jan. 2016.

2 Document en ligne : http://www.ac-orleans-tours.fr/centreco/ecomonet/fiche_11.htm. Date de consultation : 11-02-2016.

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- volume de production. - Niveau de l’emploi.

À partir de là, l’intervention de l’état sera déterminée dans le cadre de Policy mix, c’est-à-dire la progression de la masse monétaire.

Donc, pour les keynésien, la politique discrétionnaire est basé principalement par une politique de relance monétaire et une politique de relance budgétaire.

Pour une politique de relance monétaire, il suffit la création de la monnaie afin de baisser le taux d’intérêt pour encourager l’investissement. En d’autres termes, cette politique est considérée comme l’augmentation de l'activité économique, elle stimule l’investissement et donc la hausse de la production et la lutte contre le chômage. Par contre, pour une politique de relance budgétaire, il suffit la hausse des dépenses publiques ou baisse des impôts.Donc, c’est une combinaison de la politique monétaire et une politique budgétaire.

Globalement, la politique monétaire discrétionnaire est ajustable et réajustable au gré des circonstances économiques et financières, c’est-à-dire qu’elle alterne des décisions visant à relancer ou à stabiliser l’activité économique1. Ainsi, elle est laissée à la discrétion des autorités en fonction de la conjoncture économique (augmenter ou diminuer les taux d’intérêt de façon contracyclique). Dans ce sens, Z. Ftiti (2010) indique que la plupart des économistes étaient en faveur de ce type de conduite en raison de l’ajustement instantané face aux différentes conjonctures et chocs économiques2.

Par contre, les monétaristes et les nouveaux classique identifient que, les pouvoirs publics sont plus enclins à modifier leur politique et à créer de l’inflation dans une politique discrétionnaire. Ainsi, ils mentionnent que cette politique fait plus de mal que de bien, elle repose sur l’utilisation des variations du taux d’intérêt ou de l’offre de monnaie pour stabiliser l’économie3. Dans ce contexte, B. Bernier et Y. Simon (2002) soulignent que les monétaristes et les nouveaux classiques préconisent que les banques centrales utilisent les règles. Selon eux, « une règle est mieux à même d’empêcher que la politique monétaire soit utilisée à des fins de court terme, la politique monétaire est moins perturbatrice si la banque centrale adopte des règles car ces dernières permettent aux agents économiques de former des anticipations plus correctes »4.

1 Document en ligne : L. Artige, "La politique monétaire ", université de Liège HEC, France, 2008, p 4. Disponible à l’adresse : www2.ulg.ac.be/crepp/profiles/artige/documents/Lapolitiquemonetaire.pdf. Consulté le 25/02/2015.

2 Z. Ftiti, "politique de ciblage d’inflation règles de conduite, efficacité, performance", Institut Supérieur de Gestion de Tunis – ISG- université de Tunis : thèse de doctorat (nr) en sciences économiques, Le 24 février 2010, p 64.

3 P. Krugman, " Macroéconomie ", édition De Boeck, Belgique, 2009, p.810.

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De plus, le principe d’une politique monétaire des règles facilite la prévisibilité de la stratégie monétaire, cette dernière vise à définir une politique monétaire dans un cadre cohérent et stable et orientée vers la stabilité des prix1.

Pour les partisans des politiques de règle, il suffit de fixer des règles du jeu et le reste est donné. Les marchés vont s’ajuster, les agents vont interagir entre eux et l’équilibre sera réalisé. Le principal mécanisme c’est la flexibilité des prix qui assure l’équilibre sur le marché et l’autorégulation entre l’offre et la demande.

Dans le cas du court terme, la monnaie peut avoir des effets réels. Par contre, à long terme ça n’est pas possible puisque les variations de la masse monétaire n’ont d’effet que sur le niveau général des prix. Les prix relatifs sont flexibles et le salaire (réel) permet d’ajuster l’offre et la demande de travail2.

Ainsi, les monétaristes font l’hypothèse que les anticipations des agents économiques sont adaptatives, c’est-à-dire qu’ils prévoient l’évolution des variables économiques (inflation, revenus) à partir des informations obtenues sur ces variables dans le passé. Pour cela, la politique monétaire peut avoir des effets positifs à court terme qui ne sont que transitoires de sorte que celle-ci s’avère nuisible à long terme, c’est-à-dire qu’elle n’améliore la situation de l'emploi que de façon provisoire mais accélère durablement le taux d'inflation. Dans ce sens, les monétaristes indiquent que l’inflation est un phénomène monétaire qui trouve sa source dans une création de monnaie excessive. Donc, il suffit l’utilisation des règles strictes et simples pour la progression de la masse monétaire (agrégats monétaire), maitrise de l’inflation et la stabilité économique. Dans ce contexte, Friedman, est l’un qui a recommandé l’utilisation d’une règle automatique connue sous le nom : « la règle de K% », selon laquelle, la banque centrale devrait viser un taux de croissance constant de la masse monétaire3.

De même, C. Bordes(1997) cité qu’une règle monétaire consiste pour la banque centrale à trouver une fonction de réaction indicatrice du mécanisme par lequel elle peut stabiliser le système économique4.

1 N. Yamani, « Politique économique et piège du sous-développement au Maroc », thèse Pour obtenir le grade de docteur de l’université de Grenoble Spécialité : Sciences Economiques, 2012, p 42. Disponible à l'adresse : > https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00697235/ >. Date de consultation : 20 Aug. 2016

2 Document électronique, « Faut-il fixer des règles pour la politique économique ? », p 4, Disponible à l’adresse : https://prepaecocarnot.files.wordpress.com/2010/02/regles_et_politique_economique.pdf. Consulté le : 20/03/2017.

3 F. Drumetz, A. Verdelhan, « règle de Taylor : présentation, application, limites », Bulletin de la banque de France N° 45, 1997, p 82.

4T. Zeida, « Règles de politique monétaire : essai de modélisation pour la BCEAO (banque centrale des états de l'Afrique de l’ouest) », Université Ouaga II - Burkina Faso - Diplôme d'études approfondies (DEA)/ Master de recherche option : macroéconomie appliquée 2011. Document en ligne disponible à l’adresse : http://www.memoireonline.com/11/13/7882/m_Regles-de-politique-monetaire-essai-de-modelisation-pour-la-BCEAO--banque-centrale-des-etats-d11.html. Consulté le 20/03/2017.

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La règle de la politique monétaire a été définie par Svensson (1998), comme un guide prescrit pour la conduite de la politique monétaire1.

P. Krugman (2009) souligne qu’une simple règle de politique monétaire est la meilleure façon de stabiliser l’économie, c’est-à-dire que le PIB augmentera régulièrement si l’offre de monnaie augmente régulièrement. Il montre que « les monétaristes pensaient que la vitesse de circulation de la monnaie entrainait une croissance régulière du PIB. »2.

De même, B. Landais (2008) souligne qu'il en existe globalement trois catégories de règle à savoir : les règles passives, les règles actives et les règles de ciblage d'inflation anticipée.

- Les règles passives : l’utilisation d’une règle automatique connue sous le nom : « la règle de K% », selon laquelle, la banque centrale devrait viser un taux de croissance constant de la masse monétaire. Dans ce contexte, T. Zeida (2011) souligne que « les règles passives dont la littérature est peu fournie sont basées sur la croissance monétaire. La principale règle de ce type est celle de Friedman ou règle du k-pourcent. Elle stipule dans une vision monétariste que la masse monétaire devrait croitre au même taux que la production de telle sorte à annihiler toute tendance inflationniste. Autrement, la base monétaire devrait croitre à un taux constant, représentant le taux de croissance de long terme de l'économie »3.

- Les règles actives : Une règle active de politique monétaire, consiste en une fonction mathématique qui relie à une ou plusieurs variables indicatrices de la situation économique, le niveau de la variable qui sert d’instrument d’intervention à la banque centrale4. Dans ce contexte, d’après T. Zeida (2011), « l'activisme monétaire conduit les banques centrales à rechercher en permanence la stabilité des prix et du niveau d'activité »5.

- La règle de ciblage d'inflation : elles se fondent sur le respect des objectifs fixés par les autorités monétaires. Dans ce contexte, T. Zeida (2011) mentionne que « le ciblage d'inflation est un « dispositif » de politique monétaire dans lequel l'inflation future prévue, comparée à une cible annoncée, est utilisée pour guider les décisions à prendre. Ainsi, l'inflation prévue joue le rôle d'objectif intermédiaire et les autorités monétaires

1 M. Saiful, « Taylor Rule-based Monetary Policy for Developing Economies- A Case Study with Malaysia », International Review of Business Research Papers Vol. 7. No.1, 2011, p 136

2 P. Krugman (2009), Op cit p.816.

3 T. Zeida (2011), Op.cit.

4 G. Cateau et S. Murchison, « L’efficacité des règles de politique monétaire en présence d’incertitude », Revue de la banque du CANADA, 2010, p 28.

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modulent les anticipations des agents économiques en vue d'atteindre la cible à l'horizon temporel fixé (généralement deux ans) »1.

En outre, les monétaristes mentionnent que les variables financières nominales, telles que les taux d’intérêt ou les agrégats monétaires, ne constituent pas non plus des indicateurs fiables du caractère expansif ou restrictif d’une politique monétaire, parce que ce sont les taux d’intérêt réels qui doivent être pris en compte et que ceux-ci ne sont pas directement observables. Les taux d’intérêt nominaux peuvent être bas et la politique monétaire être néanmoins restrictif, si, en même temps, le niveau des prix baisse fortement, c’est ce qui s’est passé en 19292.

Par ailleurs, les études de F.Kydland et E. Prescott (1977) établissent la supériorité d’une politique monétaire basée sur une règle par rapport à celle discrétionnaire. Selon eux, le principe de la référence à une règle a été renforcé par les analyses mettant en évidence le risque « d’incohérence temporelle » des politiques monétaires discrétionnaires3.

De même, les études de Calvo Guillermo (1978) et R. Barro et D. Gordon (1983) ont indiqué que la discrétion et le non crédibilité de la politique monétaire engendrent le problème d'incohérence temporelle des politiques discrétionnaires. Selon les économistes, le non crédibilité de la Banque centrale crée un biais inflationniste. De ce fait, ils privilégient plutôt la notion de règles, qu’ils opposent aux décisions discrétionnaires4. À ce titre, N. Yamani (2012) indique qu’une politique est incohérente « quand une décision de politique future, qui fait partie d’une procédure d’optimisation formulée à un instant initial, n’est plus optimale du regard d’un instant ultérieur à l’instant initial, même si aucune information nouvelle n’est apparue entre-temps»5.

Globalement, le débat entre les politiques de règle et les politiques discrétionnaires trouve des éléments de réponse par la théorie des anticipations rationnelles et par le concept d’incohérence temporelle. Donc, les banques centrales doivent borner leur intervention à assurer un taux de croissance régulier de la masse monétaire compatible avec la croissance du produit intérieur, c’est-à-dire d’adopter une règle de conduite automatique, de se fixer un objectif annuel de croissance de la masse monétaire.

De plus, une politique fondée sur des règles étant plus crédible et fiable qu’une politique discrétionnaire. Dans ce contexte, A. Aguir (2012) a conclu que : « le concept de règle de

1 T. Zeida (2011), Op.cit

2 P. Jaffré, " monnaie et politique monétaire ", édition économica, Paris, 1996.p.54

3 J. Bailly, " Économie monétaire et financière ", édition Bréal, Paris, 2006, p.268.

4 A. Aguir, " Ciblage d’inflation et règle de la politique monétaire", thèse de doctorat, université de Grenoble, 2012, p 26. Disponible à l’adresse : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00746115.

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politique monétaire peut être défini comme un processus systématique de prise de décision, sur la base d'informations économiques et financières fiables et prévisibles »1.