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La structure de l’utérus

II - Rapports de l’utérus

III- Morphologie de l’utérus

4- La structure de l’utérus

La complexion de l’utérus, sa structure, est en rapport direct avec le rôle que Galien

lui attribue: l’utérus, qui doit à la fois expulser le sang des règles, attirer le sperme mâle, retenir l’embryon et le chasser hors des voies génitales, possède, comme l’estomac ou la vessie, les facultés naturelles rétentives et expulsives qui peuvent être expliquées par l’observation attentive des « tuniques » de l’organe.

Cependant les textes galéniques concernant l’utérus ne sont pas toujours très clairs, car le terme de tunique (xi/twn) n’est pas univoque; « Les uns réservent le nom de tunique (xi/twn) aux enveloppes composées, les autres aux enveloppes épaisses.195 Il en est qui leur refusent cette dénomination si elles ne sont pas par nature à la fois composées et épaisses. On dispute de la même façon au sujet des membranes (u/mh/n). Pour les uns, il suffit qu’elles soient simples, pour les autres, qu’elles soient minces... Les anciens appelaient tuniques, membranes, méninges (mh¤¤nigc) ces parties et toutes les autres semblables; à leur exemple, nous nous abstiendrons d’un vain bavardage sur les noms. »196

Voici ce qu’il nous propose dans son Anatomie de l’utérus: « Le corps utérin proprement dit est fait de deux tuniques, disposées de façon opposée, la tunique externe étant plus nerveuse, l'interne plus riche en veines, et qui peuvent naturellement très souvent se désunir et se resserrer.

La tunique externe est simple et unique, tandis que l'interne est double: ses parties sont mêlées entre elles, mais n'adhèrent pas ni ne font un, mais seulement sont voisines, tenues ensemble par la tunique qui les entoure. Ainsi, si tu voulais les séparer par clivage, tu verrais deux utérus au dessus d'un même et unique col197. Car celui-ci, comme d'ailleurs la tunique de l'utérus, tu ne pourrais plus le séparer en deux. La tunique vasculaire pour sa partie interne est assez rugueuse et surtout au fond. La tunique nerveuse qui l'entoure est beaucoup plus épaisse que la paroi de la vessie et s'en distingue par l'abondance des veines et des artères. »198

Dans son ouvrage Sur les procédés anatomiques, Galien explique: « Il te semblera que l’utérus est unique comme la cavité des deux réservoirs qu’on appelle tous les deux « vessies », c’est à dire la vessie qui est accrochée au foie, la biliaire, et la vessie dans laquelle se recueille l’urine, jusqu’à ce que, après en avoir détaché la membrane qui l’enveloppe de toute part, il t’apparaisse deux cavités qui se séparent facilement sans scalpel par le procédé anatomique qu’Hérophile appela « écorchement »199 par lequel on sépare la peau qui entoure le corps dans son ensemble de ce qui se trouve en dessous... Après avoir écorché la membrane externe qui adhère en toutes ses parties au péritoine, et qui est une prolongation de sa substance, tu peux séparer les deux utérus facilement jusqu’à leur jonction dans le col qu’ils ont en commun, placé à leur extrémité inférieure. »200.

195 Comme Rufus ( Corp.hum.part.app.43): « on appelle membranes (u/mh/n) les enveloppes minces et tuniques (xi/twn) les plus épaisses »

196 Usu part. IV 9 K.III 295

197On peut admettre la correction de Nickel e)f e/ni£ au)xe/ni suivant P2 « deux utérus au dessus d’un même et

unique col » en se reportant à plus loin: « les femmes ont deux utérus qui aboutissent à un même col » . Mais

on peut admettre aussi la version retenue par Kühn u/f e/ni/ xitw/ni « deux utérus sous une même tunique » en suivant « la membrane externe qui enveloppe les deux utérus les unit ensemble » dans Usu part. XIV,19 K.IV 206

198 Anat.ut. VI K.II,896-7 N.44

199 dérivé de de/rw et de/rma voir aussi Anat.adm. III,2 K.II349 Gar.275 et Hérophile Fr.72 Von Staden

Soranos, lui aussi, décrit deux couches superposées dans l’utérus, ressemblant assez à l’aspect du muscle utérin (le myomètre) et de sa muqueuse (l’endomètre)201, mais il s’imagine que les connexions entre celles-ci peuvent se relâcher, et « la matrice subit une éversion: la tunique fibreuse reste en place et la tunique interne tombe par inversion. »202

L’anatomo-histologie moderne décrit chez la femme comme chez l’animal, trois couches à la paroi utérine: l’externe, séreuse qui n’est autre que le revêtement péritonéal très adhérent au niveau du fond surtout, la musculeuse ou myomètre, plus épaisse dans laquelle on distingue deux couches musculaires, longitudinale externe et circulaire interne, séparées par une zone conjonctivo-vasculaire, et enfin la muqueuse ou endomètre, très vascularisée et d’épaisseur variable selon le cycle.

Là encore, ce n’est pas à l’anatomie de l’homme ou des primates qu’il faut se référer, mais à celle de la vache ou de la brebis où les deux cornes utérines, dans leur partie inférieure, sont réunies par un tissu conjonctivo-vasculaire (ligament inter-cornual) sous un même péritoine et donnent au corps utérin qu’elles prolongent un aspect extérieur beaucoup plus développé, puisque sa cavité est cloisonnée par le « voile utérin » (voir fig.20). Ce type est moins évident chez les espèces dont les cornes utérines sont très divergentes comme la jument, la truie, la biche ou les carnivores.

Il semblerait alors que la tunique externe décrite comme « la membrane externe qui enveloppe les deux matrices, les unit toutes deux, les recouvre et les rattache aux

parties voisines »203 représente la séreuse péritonéale doublée d’une couche

myométriale, tandis que l’interne serait la partie la plus profonde du muscle, tapissée de l’endomètre, sans doute chez la brebis et la chèvre.

201 Soranos Gyn.I,4 B.I,12 : « Le corps de la matrice est constitué de deux tuniques dont les structures internes sont contrariées, un peu à la manière des fibres dans le papyrus. La tunique extérieure est plutôt fibreuse, lisse, blanche et scléreuse, la tunique intérieure plutôt charnue, épaisse, délicate et d’une couleur tirant sur le rouge; elle est sillonnée de vaisseaux dont les plus nombreux se trouvent vers le fond de l’organe..; ces deux membranes tiennent l’une à l’autre par des membranes minces et des fibres. »

202 Ibidem. L’inversion utérine est un accident gravissime qui survient lorsqu’on essaie d’extraire le placenta avant qu’il ne soit décollé, mais c’est l’utérus dans son ensemble qui se « retourne »; il semble un peu osé d’essayer d’expliquer l’erreur de Soranos comme le fait Malinas (note 52) par une mauvaise interprétation de la vérification anatomique post-mortem; « l’autopsie » n’apparaîtra que beaucoup plus tard... Par contre, l’inversion utérine est bien connue des bergers car elle arrive très fréquemment chez la brebis ou la chèvre lors des efforts expulsifs, peut-être liée à des troubles métaboliques ( L’élevage ovin Institut technique de l’élevage ovin et caprin, Hachette, Paris, 1978)

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Les cornes utérines sont accolées et reliées par le péritoine dans leur portion caudale.

1 ovaire

2 artére ovarienne 3 artère utérine

on a séparé facilement avec le doigt les deux demi-utérus

la partie inférieure est ouverte pour montrer le vagin (4), le canal cervical (5) le corps utérin très court (6)

Si la Nature a créé une double tunique (en ne considérant que la musculeuse) pour l’estomac et l’intestin qui ont besoin d’une paroi charnue pour assurer la coction des aliments et résister à l’action érosive des sucs biliaires204, « pour les matrices nourries d’un sang pur et utile, une seule tunique suffit... mais formée de toutes espèces de fibres »205et ailleurs: « Si tu écorches leur revêtement commun, tu vois la substance particulière (des matrices), un corps avec des fibres dans diverses positions; par « fibres en diverses positions », je veux dire que tu y trouves des fibres qui vont en oblique, la majorité, et d’autres fibres dont certaines vont comme en travers et d’autres verticales.»206

En effet, poursuit-il, en se contractant, les fibres droites attirent, les transversales (circulaires) rejettent, et toutes ensemble retiennent.207 Les actions rétentives et expulsives ne peuvent s’exercer simultanément: lorsque l’une agit, l’autre est au repos. Ainsi, « dès le jour même de la conception, la femme sent un mouvement et un retour sur lui-même de l’utérus » pour retenir le sperme; l’orifice utérin se referme: « Hérophile n’a pas hésité à écrire que le bout même d’une sonde ne pourrait être introduit .»208 Ce « mouvement » de l’utérus pour garder le sperme était déjà signalé par Hippocrate 209 et Galien l’interprète comme une aspiration semblable à celle d’une ventouse: « (les femmes) me dirent sentir un certain mouvement de l’utérus, comme s’il attirait et se contractait progressivement lorsqu’elles retiennent le sperme... C’est pourquoi les matrices... ressemblent pour Platon210 à un animal avide de procréation et donc qu’elles attireraient à elles le sperme pour le tenir enfermé —souvent les hommes eux-mêmes peuvent le sentir nettement aussi—en l’aspirant à la façon d’une ventouse médicinale qui serait placée à l’intérieur des parties honteuses.» 211Nous retrouvons donc ici cette comparaison de l’utérus à une ventouse; nous avons vu que pour Rufus et Soranos, elle répondait à la forme de l’utérus; mais Galien, lui, l’em ploie pour sa fonction. Il compare plus loin l’activité de la matrice à celle de l’estomac: « C’est comme l’estomac, qui lorsqu’il désire de la nourriture, s’élève vivement par son fond vers son orifice et se sert de son orifice comme d'une main212; de la même manière, la matrice, avec le désir de la qualité du sperme, se porte vivement vers les parties honteuses et se sert de son col — tout comme l'orifice de l'estomac— comme d'une main qui rassemble le sperme. Ainsi, chaque fois que cet orifice est faible —comme l'autre orifice, celui du ventre— il ne peut attirer le sperme, ce que dit précisément Hippocrate: "son orifice ne peut attirer la semence.213". »214

Inversement, quand la faculté rétentive se met au repos et cède la place à la faculté expulsive ou propulsive, l’orifice utérin s’ouvre, de façon à laisser passer la pulpe du doigt, puis se dilate de façon considérable pour donner passage au foetus, ainsi que l’observent les sages-femmes. Ce phénomène survient quand « les matrices ne peuvent plus supporter leur état de distension, ou quand elles sont irritées par la qualité des humeurs déversées dans leur cavité, alors elles se hâtent de rejeter le fardeau qui les

204 Usu part. IV, 8 K.III 282-5 et V,12 K.III, 387-9

205 Usu part. XIV,4 K.IV,205

206 Anat.adm. XII,2 143 Gar.III,958

207 Nat.fac. III,3 K.II,150-2

208 Nat.fac. III,3 K;II,152 Hérophile Fragm.200 Von St.p.370

209 Nat.puer.XII,2 L.VII,490 J.55

210 Tim.91c

211 Sem.I,2 K.V,514-516 L.66

212 Nat.fac. III,8 K.II,174

213 Mal.fem. II,166 L VIII 344 Ailleurs c'est plus la capacité de l'orifice utérin à "retenir" la semence qu'à

l'attirer" comme dans Mal.fem.II,167 L VIII 346 et Fem.ster.213 L VIII 410 - 241 L 454

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incommode. Ces deux circonstances se produisent parfois de façon régulière et a lieu ce que l’on appelle délivrance et enfantement.»215

L’avortement a pour cause le poids excessif du foetus, l’emploi de médications abortives, ou « la mordication, quand les humeurs, d’abord renfermées dans les membranes, viennent par la rupture de ces membranes à s’épancher dans les matrices elles-mêmes, ou encore quand le foetus corrompu, pourri, réduit en liquides malfaisants, irrite et mord la tunique de l’utérus.» 216