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2.CADRE THEORIQUE

2.1. NOTION SUR LE PROCESSUS DE SOCIALISATION 1. La socialisation

2.1.3. La socialisation comme incorporation de l’habitus

ARISTOTE semble être le premier à avoir employé le terme « hexis » pour désigner « les dispositions acquises du corps et de l’âme ». Ce mot a été traduit depuis par « l’habitus » que nous devons à LEIBNIZ. Cet auteur, estime qu’une analyse exacte de la signification des mots, et notamment le mot « habitus », ferait mieux connaître que tout autre chose les opérations de l’entendement. Bien plus tard, d’autres auteurs et notamment HUSSERL, reprennent à leur compte cette tradition philosophique. Pour HUSSERL, le terme habitus constitue un médiateur essentiel entre la somme des expériences passées et les principes de perception et de comportement à venir. Emprunté à la philosophie par les premiers sociologues tels que : WEBER, DURKHEIM, TÖNNIES, VEBLEN, le terme « habitus », est depuis devenu un concept sociologique.

Pour DURKHEIM, l’habitus est « la disposition générale de l’esprit et de la volonté qui fait voir les choses sous un jour déterminé ». Cette notion est reprise dans une définition plus complexe, plus dialectique et plus opératoire par BOURDIEU « systèmes de dispositions durables et transposables, structures structurées prédisposées à fonctionner comme structures structurantes, c'est-à-dire en tant que principes générateurs et organisateurs de pratiques et de représentations qui peuvent être objectivement adaptées à leur but sans supposer la visée consciente des fins et la maîtrise expresse des opérations nécessaires pour

les atteindre » (1980, p.88). L’habitus se traduit donc par un ensemble de manière d’être, d’agir, et de penser propre à l’individu, relatif à un apprentissage particulier lié à son groupe d’appartenance qui diffère selon sa classe sociale, sa disposition en capital et la place qu’il occupe dans l’espace social. L’individu est structuré par sa classe sociale d’origine, par un ensemble de règles, de conduites, des croyances, des valeurs, des normes propres à son groupe d’appartenance objet de sa socialisation. Ces dispositions acquises influencent sa manière d’agir, de se représenter. Inconsciemment il va intérioriser des comportements et des conduites qui dirigent ses actions et sa façon d’agir, limité dans ses choix par la structuration dont il est l’objet. La probabilité d’acquérir un statut social est vécue par l’individu comme l’espérance subjective d’appartenir à un groupe. L’habitus assure donc le lien entre probabilités objectives et espérances subjectives précise DUBAR (2006), qui soutient que « l’individu ainsi conditionné (l’habitus fabrique de la cohérence – entre probabilité et espérance – et de la nécessité – chacun reproduit ce qu’il a connu, les pratiques issues de l’habitus étant inchangées), l’habitus semblerait exclure tout changement social. Mais, l’auteur relève chez BOURDIEU, que l’habitus ne reproduit les structures dont il est le produit que dans la mesure où les structures dans lesquelles il fonctionne sont identiques aux structures dont il est le produit. Il est ainsi admis que pour connaître l’habitus d’un individu, il faut connaître celui de ses parents et son rapport à l’avenir au-delà des conditions objectives dans lesquelles il a été élevé. A cet effet, DUBAR (2006) insiste sur le fait que la famille d’origine dispense un ensemble de dispositions subjectives qui génèrent et structurent des représentations et des pratiques qui définissent la trajectoire des individus dans le système scolaire, les champs sociaux, l’univers professionnel, et qui impliquent des mécanismes d’intériorisation des conditions objectives, d’extériorisation des dispositions subjectives, d’où, selon lui, la relation entre conditions objectives et dispositions subjectives. La conception dynamique et complexe du concept d’habitus est essentielle pour en faire un instrument opératoire des interactions sociales.

Pour WEBER, ELIAS, GOFFMAN, un habitus est certes une disposition inconsciente qui répond aux conditions sociales de la socialisation, mais c’est également et surtout un ensemble d’attitudes sociales (façon de faire, d’agir, de parler, préjugés) que l’on peut modifier lentement mais surement à mesure qu’on en prend connaissance.

Ainsi que nous l’avons vu, l’individu se socialise en intériorisant des normes et les valeurs d’un groupe d’appartenance ou de référence. A ce titre, il est un être socialement identifiable et identifié. Cependant, chaque individu est confronté à des exigences qu’il doit apprendre à

gérer telles que l’accomplissement des meilleures performances possibles ou encore celles de se faire reconnaître par les autres. Cette relation de reconnaissance aboutit, « à la définition de l’identité comme résultat d’une reconnaissance réciproque, c’est-à-dire connaissance de ce que l’identité du moi n’est possible que grâce à l’identité de l’autre qui me reconnaît, identité elle-même dépendant de ma propre connaissance », selon HEGEL in DUBAR, (2006, p. 85). 2.2. L’INSERTION SOCIOPROFESSIONNELLE

La notion d’insertion est apparue comme une catégorie de l’action publique visant à pallier les défaillances des mécanismes de l’intégration à un niveau essentiellement individuel. L’usage courant du terme serait lié à la publication du rapport SCHWARTZ (1981), faisant de l’insertion socioprofessionnelle des jeunes une priorité. C’est probablement pour la première fois sans doute de manière aussi tranchée, que la question de la transition de l’école à l’emploi est reliée à la notion d’insertion sociale. Il s’agit des conditions sociales de l’entrée dans la vie d’adultes tout en incluant les questions de santé, du logement et des relations entre générations. Il semble cependant, que le terme insertion ait fait son apparition dans la vie politique en 1972. L’insertion désigne alors un état proche de ce que visait déjà le concept plus classique d’intégration. C’est probablement l’instauration du (RMI) Revenu Minimum d’Insertion en 1988 et les débats qui l’ont précédée qui ont contribué à la popularisation du terme mais aussi et surtout son couplage à la notion d’exclusion. Ces deux termes, dans leur usage courant, selon CASTRA (2006), semblent donc adossés à une représentation de la société comme clivée, traversée par une fracture séparant les in et les out, ces derniers étaient caractérisés par leur non insertion sur le marché du travail et une position de marginalité par rapport à la vie socioéconomique. Ainsi ceux qui ne sont pas insérés dans l’emploi, mais qui souhaitent néanmoins travailler sont ceux-là mêmes qui ne sont pas intégrés dans la société et donc exposé à l’exclusion. L’analyse de CASTEL (1995), sur cette nouvelle expression de la question sociale met en évidence la constitution du couplage insertion/exclusion qui remplace totalement le couplage de l’ancienne opposition dominants/dominés issue de la révolution industrielle. L’apparition du couple capitalistes/prolétaires, d’employeurs /employés et celui de patrons/ouvriers ont ouvert la voie d’une société d’ordre où « chacun a sa place et chacun prend sa place » à une société de progrès où « chacun fait sa place et la place fait chacun ». de GAULEJAC et TABOADA LEONETTI (1994) y voient « la lutte des places ».

Pour LABBE (2003), la finalité de l’insertion, l’intégration, est de permettre à la personne-individu de devenir (ou redevenir) une personne-sujet, ce qui recouvre les trois paramètres suivants :

 être en mesure de former son propre projet de vie ;

 disposer des moyens de le réaliser ;

 ne pas être empêché par la société dans la poursuite de cette démarche.

D’une manière générale, une insertion consiste à placer un objet entre deux autres. L’insertion ou réinsertion, est un concept des sciences sociales désignant l’action de mener un individu à ne plus vivre à la marge de la société. C’est un processus qui le conduit à trouver une place reconnue dans la société. L’insertion peut prendre plusieurs faces : insertion professionnelle, sociale, globale.

LIMOGES (1987), présente l’insertion professionnelle comme une stratégie permettant de passer de la condition de non travailleur, à celle de travailleur. Elle se définit par l’existence d’un contrat de travail entre un individu et une structure. L’insertion professionnelle est donc la remise en contact de l’individu avec le milieu de travail ou la réadaptation au marché du travail lui permettant de retrouver une place sociale nouvelle.