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5. ANALYSE

5.3. Pour quelles raisons les grands pendulaires rencontrés décident-ils d’habiter à

5.3.1. La situation défavorable sur le marché immobilier genevois

La raison la plus citée par les pendulaires rencontrés pour expliquer qu'ils habitent en Valais ou à Fribourg est liée au contexte immobilier de Genève et sa périphérie. En effet, la quasi-totalité des pendulaires intensifs expliquent contrer une situation défavorable sur le marché immobilier genevois, situation qui s'oppose à celle du Canton du Valais ou du Canton de Fribourg, dans lesquels les logements vacants sont plus nombreux et plus spacieux pour le même prix.

« Quand on est parti là-bas [en Valais], on a visité, je crois, 6 apparts en une journée, et on pouvait tout prendre, alors qu'ici [à Genève], tu visites un appart' par mois, tu te bats, le loyer ne te convient même pas mais tu vas le payer quand même. On était comme dans un rêve, on avait le choix. C'est complètement fou la différence entre là-bas [Valais] et ici [Genève]. Là, on habite dans un endroit où je pense que 30% des apparts des immeubles qu'il y a autour de chez nous sont vides depuis plus de 2 ans, donc il n'y a pas assez de gens au fait. Et ils te proposent de payer 1 franc pendant une année, pour vivre après. T'es là : « purée, mais venez vivre là les gens ! » » (Mélanie)

« Le balcon genevois, pour nous, c'est l'extension d'une fenêtre, ce n'est pas un balcon ! Nous, on a un jardin, les parents de D. sont vignerons, ça veut dire qu'on a des hectares pour se promener. La vue, l'air n'est pas confiné. » (Céline)

Les personnes ou les familles souhaitant devenir propriétaires ont de la peine à trouver un logement qui leur convienne à Genève, tout comme en trouver un dont les prix peuvent entrer en concurrence avec les régions valaisannes et fribourgeoises.

« On cherchait à acheter une maison. Mais c'est vrai que la difficulté, c'est un petit peu les coûts.

Dans une ville comme Genève, ou même sur la Côte lémanique, les tarifs sont un peu inabordables.

Ce n'était pas un désir de s'éloigner, c'était une contrainte financière en fin de compte. Pour le budget qu'on avait, la région permettait ce genre de choses. » (Alain)

Pour certains de ceux que nous considérons dans notre étude comme les « Valaisans », les coûts des logements à Genève ont été un frein au déménagement. Ils ont préféré penduler, parfois quotidiennement, surtout lorsqu'ils possédaient déjà une maison en Valais.

« Je suis propriétaire de ma maison, je n'allais pas commencer à la mettre en location ou je ne sais quoi. » (Maurice)

« J'aime bien jeter l'argent par les fenêtres, mais de l'extérieur vers l'intérieur ! (rires) » (Philippe)

Pour la majorité des pendulaires rencontrés, le différentiel de prix entre logements genevois et valaisans ou fribourgeois est une explication parmi d'autres à leur choix de ne pas vivre à Genève, elle n'est pas la seule et pas forcément la principale. Pour Alain et Laura, qui vivaient à Genève, c'est cette raison qui explique en premier lieu pourquoi ils ont emménagé en région fribourgeoise : l'impossibilité d'acheter une maison dans le Canton de Genève les a poussés à aller voir plus loin. S'ils voulaient devenir propriétaires, ils n'avaient pas le choix : penduler devenait nécessaire.

« On ne peut pas vouloir devenir propriétaire, et ne pas vouloir donner à la balance. Donc on est quand même obligé de se dire : si je veux devenir propriétaire, je sais que je dois prendre en compte les trajets, la distance. Une fois qu'on a pesé le pour et le contre, si on le fait, ça veut dire qu'on sait à quoi s'attendre. » (Laura)

Pour les « Valaisans », les impôts, estimés plus élevés à Genève qu'en Valais, sont également un frein au déménagement, tout comme le coût de la vie à Genève. Certains pendulaires, notamment ceux qui possèdent un pied-à-terre à Genève, sont bien contents de pouvoir payer leurs impôts dans leurs communes d'origines valaisannes, tout comme leurs plaques de voiture et leurs assurances.

Un rapide survol de quelques indicateurs du marché immobilier, du logement et des impôts montre que la situation ressentie par les grands pendulaires correspond presque totalement à la réalité : le nombre et le taux de logements vacants est plus bas à Genève qu'en Valais ou à Fribourg, le loyer moyen et les prix de l'immobilier sont plus élevés à Genève (Tableau 2 et Figure 2). En revanche, les impôts ne sont pas nécessairement plus élevés à Genève. Par exemple, les taxes fiscales à payer annuellement pour une personne célibataire ayant un revenu net par an de 80'000 CHF varient entre 10'999 CHF et 12'613 CHF selon la commune de

résidence dans le Canton de Genève, alors qu'elles oscillent entre 12'191 CHF et 15'535 CHF dans le Canton du Valais et entre 10'730 CHF et 15'589 CHF dans le Canton de Fribourg.12

Tableau 2 : Logements vacants par canton et loyers moyens

Indicateur / Canton Genève Valais Fribourg Sources

Nombre de logements vacants total 1222 5987 2228 OFS 2018c

Nombre de logements vacants à vendre 305 1995 259 OFS 2018c Nombre de logements vacants à louer 917 3992 1969 OFS 2018c

Taux de logements vacants (%) 0,53 2,37 1,51 OFS 2018c

Loyer moyen (CHF) 1416 1127 1218 OFS 2019e

Figure 2 : Carte des prix de l'immobilier en région lémanique (Genève, Vaud, Valais).

Pour une villa individuelle de 5 pièces, 160 m2 de surface habitable, construit en 2011, de bonne qualité (prix moyen en francs).

Source : Homegate.ch SA, www.homegate.ch/acheter/evaluer-le-bien/carte-des-prix, consulté le 10 juillet 2019.

12 Chiffres tirés d'un calculateur d'impôts. Comparis, https://fr.comparis.ch/steuern/steuervergleich/default, consulté le 5 juillet 2019.