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LA PSYCHANALYSE AVEC LES ENFANTS : HISTOIRE, THÉORIE, CLINIQUE

I. Le petit Hans, Max Graf et Sigmund Freud

5. Hans - Herbert Graf

6.1. La relation d ’objet

6. De Freud à Lacan : ponctuations cliniques et théoriques

La moitié du Séminaire IV, La relation d’objet est consacrée à l’étude du cas du

petit Hans. Lacan situe la problématique de l’enfant et les obstacles auxquels il se

confronte pour trouver une solution satisfaisante à l’impasse symptomatique dans

laquelle il se trouve. Ce séminaire est un document précieux car il met en place des éléments théoriques et cliniques fondamentaux et ouvre des perspectives particulièrement intéressantes concernant la psychanalyse avec les enfants.

6.1. La relation d’objet

La relation d’objet a une importance cruciale dans la structuration du sujet. Pour

les psychanalystes post-freudiens, l’objet est régulé, organisé et naturellement adapté

aux désirs et aux pulsions du sujet. En qualifiant l’objet comme bon ou mauvais, Klein

désigne une modalité de la relation d’objet telle qu’elle apparaît dans la vie

fantasmatique de l’enfant, selon que l’objet est ressenti comme frustrant ou gratifiant.

L’école anglaise souligne les implications de la relation d’objet dans la structuration

subjective et Lacan lui donne une autre envergure en analysant ses implications logiques et cliniques. En effet, après 1945, la relation d’objet ouvre la voie vers une refonte

69

Lacan J., (1956-1957). Le Séminaire, Livre IV, La relation d’objet, op.cit., p. 408.

70

Rizzo F., (1972). « Les mémoires d’un homme invisible. Un demi-siècle de souvenirs de

théâtre », l’Âne, 57/58, 1994, p. 64.

71

générale de la notion d’objet en psychanalyse, d’où découle aussi bien l’objet

transitionnel de Winnicott que l’objet a de Lacan.

En ce qui concerne le concept d’« objet », les prémisses de son élaboration sont

présentes dès le texte sur Le stade du miroir72 (4). Puis Lacan le développe au cours du Séminaire VI, La relation d’objet et du Séminaire V, Les formations de l’inconscient73

. Il introduit sa propre conception de l’objet, qu’il nomme l’objet petit a, dans Subversion

du sujet et dialectique du désir dans l’inconscient freudien74

, puis au cours du Séminaire VIII, Le transfert75 et du Séminaire X, L’angoisse76

. L’objet a désigne l’objet

désiré par le sujet se dérobant à lui au point d’être non représentable ou de devenir un

reste non symbolisable À ce titre, il n’apparaît que sous une forme éclatée à travers les

quatre objets partiels détachés du corps : le sein, la scybale, le regard et la voix. Selon Lacan, c’est un objet partiel parce qu’il représente partiellement la fonction qui le

produit (par exemple : l’œil et le regard) et non pas parce qu’il est une partie du corps

considéré comme objet total. L’objet a, c’est l’agalma du Banquet de Platon77

c’est

l’objet du désir qui se dérobe et qui renvoie à la cause même du désir ; la vérité de

celui-ci restant cachée à la conscelui-cience. En 1967, Lacan transforme ce petit a en un reste, un réel impossible à symboliser qu’il identifie à la jouissance. Soulignant la permanence de

la pulsion78 et sa puissance à la désunion, l’objet a n’est aucun des objets partiels, il

n’est ni spécularisable, ni concevable et se réduit à la fonction de « cause du désir »79

ou

72

Lacan J., (1936 a). « Le stade du miroir. Théorie d’un moment structurant et génétique de la

constitution de la réalité, conçu en relation avec l’expérience et la doctrine psychanalytique »,

Communication au XIVe Congrès international, Marienbad, (2/8.8.1936) (non remis pour la publication).

73

Lacan J., (1957-1958). Le Séminaire, Livre V, Les formations de l’inconscient, Paris, Le Seuil, 1998.

74

Lacan J., (1960 b). « Subversion du sujet et dialectique du désir dans l’inconscient freudien »,

dans Écrits, op. cit., p. 793-827.

75

Lacan J., (1960-1961). Le Séminaire, Livre VIII, Le transfert, Paris, Le Seuil, 1991.

76

Lacan J., (1962-1963). Le Séminaire, Livre X, L’angoisse, Paris, Le Seuil, 2004.

77

Platon., (385 av. J.-C). « Le banquet », dans Œuvres complètes, t. I, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1993.

78

Lacan J., (1974 a). Télévision, Paris, Le Seuil, 1974, p. 42-43.

79

Lacan J., (1964 a) « Du “ Trieb ” » de Freud et du désir du psychanalyste », dans Écrits, op.

de « manque à être du sujet »80. Et dans sa Lettre adressée à trois psychanalystes italiens, il parle de l’objet a comme de quatre substances épisodiques substituables l’une

à l’autre : « Il y a l’objet (a). Il ex-siste maintenant, de ce que je l’aie construit. Je

suppose qu’on en connaît les quatre substances épisodiques, qu’on sait à quoi il sert, de

s’envelopper de la pulsion par quoi chacun se vise au cœur et n’y atteint que d’un tir qui

le rate81. »

À partir de sa lecture rigoureuse de l’œuvre freudienne, Lacan rectifie les

réductions biologiques et psychologiques du concept d’« objet » freudien et approche

autrement la question de la relation de l’enfant à la mère. La relation d’objet est située

du côté du manque de l’objet : l’objet manquant mobilise le désir du sujet qui selon

Freud est en relation avec les formations de l’inconscient et l’organisation sexuelle.

Entre 1956 et 1957, Lacan va au-delà de l’autre imaginaire et de l’Idéal du Moi (5)

comme prototype de l’objet libidinal et centre son analyse sur deux objets particuliers :

l’objet fétiche et l’objet de la phobie : « l’objet phobique en tant que signifiant à tout

faire pour suppléer au manque de l’Autre, et le fétiche fondamental de toute perversion

en tant qu’objet aperçu dans la coupure du signifiant82

. » Il souligne le caractère de l’objet manquant, définitivement et irrémédiablement perdu, tant par rapport à la

pulsion qu’au désir qui introduit la division subjective : « Rappelons-nous où Freud le

déroule : sur ce manque du pénis de la mère où se révèle la nature du phallus. Le sujet se divise ici, nous dit Freud à l’endroit de la réalité, voyant à la fois s’y ouvrir le gouffre

contre lequel il se rempardera d’une phobie, et d’autre part le recouvrant de cette

surface où il érigera le fétiche, c’est-à-dire l’existence du pénis comme maintenue

quoique déplacée. D’un côté, extrayons le (pas-de) du (pas-de-pénis), à mettre entre

parenthèses, pour le transférer au pas-de-savoir, qui est le pas-hésitation de la névrose.

Lacan J., (1964 b). Le Séminaire, Livre XI, Les quatre concepts fondamentaux de la

psychanalyse, op.cit., p. 61.

80

Lacan J., (1958 c). « La direction de la cure et les principes de son pouvoir », dans Écrits, op.

cit., p. 613.

81

Lacan J., (1974 c). « Lettre adressée à trois psychanalystes italiens », dans Autres écrits, op.

cit., p. 309.

82

Lacan J., (1958 c). « La direction de la cure et les principes de son pouvoir », dans Écrits, op.

De l’autre, reconnaissons l’efficace du sujet dans ce gnomon qu’il érige à lui désigner à

toute heure le point de vérité. Révélant du phallus lui-même qu’il n’est rien d’autre que

ce point de manque qu’il indique au sujet83

. »

Le sujet ne peut appréhender l’objet qu’en relation au manque qui est situé

différemment selon les registres du réel, du symbolique et de l’imaginaire : chaque

forme du manque est liée avec l’agent qui l’introduit et à la forme d’objet qui

l’affecte84

:

AGENT MANQUE D’OBJET OBJET

Père réel Castration Imaginaire

Mère symbolique Frustration Réel

Père imaginaire Privation Symbolique

Selon Lacan, le manque d’objet est constitutif du sujet, il est la force même de sa

relation au monde : « Jamais, dans notre exercice concret de la théorie analytique, nous ne pouvons nous passer d’une notion du manque d’objet comme central. Ce n’est pas un

négatif, mais le ressort même de la relation du sujet au monde85. » « Il est clair que la privation, si nous avons à nous y référer, c’est pour autant que le phallicisme, à savoir

l’exigence du phallus, est, comme le dit Freud, le point majeur de tout le jeu imaginaire,

de tout le progrès conflictuel qui est celui que décrit l’analyse du sujet. Or, ce n’est qu’à

propos du réel, en tant que toute autre chose que l’imaginaire, que l’on peut parler de privation. […] Nous dirons donc que la privation, dans sa nature de manque, est

83

Lacan J., (1965). « La science et la vérité », dans Écrits, op. cit., p. 877.

84

Lacan J., (1956-1957). Le Séminaire, Livre IV, La relation d’objet, op.cit., p. 213.

85

essentiellement un manque réel. C’est un trou86

. » « La frustration est par elle-même le domaine des exigences effrénées et sans loi. Le centre de la notion de frustration en tant qu’elle est une des catégories du manque est un dam imaginaire. C’est sur le plan

imaginaire qu’elle se situe87

. » « La castration, a été introduite par Freud d’une façon

absolument coordonnée à la loi primordiale, de ce qu’il y a de loi fondamentale dans

l’interdiction de l’inceste dans la structure de l’Œdipe. Voilà, si nous y pensons

maintenant, le sens de ce qui a été d’abord énoncé par Freud. C’est par une espèce de

saut mortel dans l’expérience, que Freud a mis une notion aussi paradoxale que celle de

la castration au centre de la crise décisive, formatrice, majeure qu’est l’Œdipe. Nous ne

pouvons que nous en émerveiller après coup, car il est certainement merveilleux que nous ne songions qu’à ne pas en parler. La castration ne peut que se classer dans la

catégorie de la dette symbolique88. »

Quel est donc l’objet qui manque dans ces trois cas ? La castration est du côté de

la dette symbolique, son objet est imaginaire : c’est le phallus. La frustration se situe sur

le plan imaginaire, dommage, dam imaginaire, il concerne un objet réel : c’est le pénis

en tant qu’organe. La privation est un manque réel, son objet est symbolique : c’est un

trou. En un sens, le réel est toujours à sa place, l’absence de quelque chose dans le réel

est purement symbolique. Pour conclure : « Dette symbolique, dam imaginaire, et trou, ou absence, réel, voilà ce qui nous permet de situer ces trois éléments que nous appellerons les trois termes de référence du manque d’objet89

. » 6.2. La question du père

De sa correspondance avec Fliess90 à L’homme Moïse et le monothéisme91

en passant par Totem et Tabou92, la question du père marque toute l’œuvre freudienne tant

86 Ibid. 87 Ibid. p. 37. 88 Ibid. 89 Ibid. 90

Freud S., (1897-1902). « La correspondance Freud-Fliess », dans La naissance de la

psychanalyse, op. cit.

91

du côté de la clinique et de la théorie, que du côté de l’institution psychanalytique. Au

fondement même de la psychanalyse, le concept de « père » renvoie à plusieurs dimensions hétérogènes : celle de l’Urvater, le père mythique, celui de la horde

primitive ; celle du père du complexe d’Œdipe, le père comme nom, comme loi de

L’homme Moïse. La publication de l’Analyse d’une phobie chez un petit garçon de cinq ans, (Le petit Hans) précède de trois ans celle de Totem et Tabou qui occupe une place centrale dans la conception freudienne de la relation entre le sujet, la structure familiale et la loi culturelle. Cette relation clinique est une contribution essentielle pour la compréhension de la structure familiale, même si Freud ne présente pas une étude systématique à propos de la structure et de la fonction de la famille, des concepts fondamentaux y sont discutés au regard de l’expérience clinique.

Hans montre les difficultés du sujet à se confronter avec ce que la culture et la société supposent à la famille dans l’aire culturelle qui est la sienne. Freud souligne la

responsabilité de la famille comme médiatrice entre la loi culturelle, le sujet et la jouissance. La structuration du sujet apparaît non seulement comme une internalisation des idéaux sociaux, mais aussi comme une reconnaissance d’un sujet du désir. Le

complexe d’Œdipe participe à la transmission d’un processus culturel qui engendre des

conflits chez le sujet et dans la famille ; la névrose étant le résultat des difficultés du sujet à atteindre une solution personnelle se distinguant des symptômes. Lors du son Séminaire IV, La relation d’objet, Lacan commence par cette ligne de recherche. Et,

reprenant les concepts freudiens, il réalise une nouvelle lecture du cas du petit Hans qui l’amène à être en désaccord avec Freud sur différents points. Il propose alors une

nouvelle version des complexes d’Œdipe et de castration. En effet, tout comme Freud,

Lacan reconnaît au complexe d’Œdipe un caractère structurant et normatif, néanmoins il

pose une différence entre son essence et ses effets psychologiques. Même s’ils suivent

des formes typiques qui différent d’une culture à l’autre, ses effets psychologiques sont

contingents. Le complexe d’Œdipe comme structure normative est universel car il est la

condition indispensable à la structuration du sujet : il marque la relation du sujet au

92

Freud S., (1912-1913). Totem et Tabou. Interprétation par la psychanalyse de la vie sociale

signifiant, il est porteur de la loi culturelle qui concerne pour chaque sujet la prohibition de l’inceste et il est aussi l’instaurateur du Surmoi comme noyau permanent de la

conscience morale : « Ce surmoi tyrannique, foncièrement paradoxal et contingent, représente à lui seul, même chez les non-névrosés, le signifiant qui marque, imprime, laisse le sceau chez l’homme de sa relation au signifiant93

. » Au passage, je tiens à souligner l’importance du marquage structural du sujet par le complexe d’Œdipe, ainsi

que l’intérêt d’une lecture attentive de l’œuvre freudienne et lacanienne. Je reprendrai

ultérieurement ce thème dans mon étude de l’approche du symptôme réalisée par

l’ethnopsychiatrie puis par la psychanalyse.

Concernant le petit Hans, Freud considère à la fois le côté normatif et le côté

psychologique du conflit œdipien, mais d’une certaine manière il met plus l’accent sur

le second. Par exemple la conception normative et structurante du complexe d’Œdipe

est très présente lors de la rencontre du professeur Freud et du petit Hans. L’intervention

directe de Freud est une véritable narration mythique qui communique à l’enfant la

position subjective qu’il occupe dans le drame œdipien et la relation de celle-ci avec la

forme de son symptôme. Cette unique intervention entraîne quelques changements chez l’enfant et, tel un devin, Freud les annonce94

. Cela n’est pas lié au fait qu’il parle avec

Dieu comme le suppose Hans, non sans humour, mais simplement au fait qu’il possède

lui-même ce savoir inconscient qui lui permet de donner enfin sens à son symptôme et de trouver lui-même le sens œdipien de sa bêtise. Sur ce point Freud et Lacan

divergent : au départ le conflit de Hans est insoluble. Il ne concerne pas, comme l’interprète Freud, l’intensité du désir pour la mère et l’hostilité ambivalente pour le

père perçu comme rival. Selon Lacan, la phobie des chevaux est une tentative pour compenser les défaillances dans l’organisation de la structure œdipienne elle-même. En

ce temps de la névrose infantile, son symptôme est une « plaque tournante »95 qui contribue à régler une articulation préalable au choix de la névrose. Pour Hans, le choix

93

Lacan J., (1956-1957). Le Séminaire, Livre IV, La relation d’objet, op.cit., p. 212.

94

Freud S., (1909 a). « Analyse d’une phobie chez un petit garçon de 5 ans, (Le petit Hans) »,

dans Cinq psychanalyses, op. cit., p. 120.

95

Lacan J., (1968-1969). Le Séminaire, Livre XVI, D’un Autre à l’autre, Paris, Le Seuil, 2006, p. 307.

de ce symptôme est déjà une manière de trouver une solution à l’impasse dans laquelle

il se trouve, mais celle-ci reste partielle car elle l’amène à une sévère inhibition dans ses

déplacements (Freud parle même d’agoraphobie).

C’est à travers l’opération métaphorique de la fonction paternelle que la structure œdipienne est constitutive du sujet. Cette action est liée à la « métaphore paternelle »,

concept qui apparaît dans D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose96 et qui présente la conception de la forclusion du Nom-du-Père comme mécanisme spécifique de la structure psychotique.

La métaphore paternelle est écrite selon l’équation suivante :

Afin d’affiner l’approche de ce cas clinique, Lacan développe une série

d’équations et de formules représentant la situation du petit Hans vis-à-vis de sa

constellation familiale et de son symptôme97. La création, le développement et la résolution de la phobie du petit Hans peut ainsi s’écrire en équations à partir de certains

signifiants déterminants.

La première formule situe le moment essentiel du franchissement de l’Œdipe :

M : la mère ; P : le père ; X : la place où est l’enfant ; ~ : la métaphore paternelle ; ٦: la

faucille du complexe de castration ; S : la signification, c’est-à-dire ce par quoi l’être se

retrouve et où le x trouve sa solution.

96

Lacan J., (1957 b). « D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose »,

(12.1957 - 1.1958), dans Écrits, op. cit., p. p. 557.

97

Dans le cas du petit Hans, celle formule révèle la question insoluble du désir de la mère, qui est aussi une femme, selon la formule (M +  + A) qui signifie : « Mère plus phallus

plus Anna » et qui distingue de façon très claire l’impasse dans laquelle il se trouve et

de laquelle il ne peut sortir, faute de père et d’éléments lui permettant de symboliser ses

relations avec sa mère. Il n’y a rien qui offre une issue via le complexe de castration,

rien qui puisse le sortir de cette relation dévorante où la morsure de la mère (m) devient

menaçante pour le réel du pénis (Π).

En voici la nouvelle formule : (M +  + A) M ~ m + Π  : le phallus de la mère ; α : les enfants.

Puisque l’élément symbolique (P) fait défaut, le cheval (‛ I) en occupe la place

dans la dernière formule :

Cette formule équivaut à la métaphore paternelle sans pour autant résoudre le problème de la morsure qui reste un danger réel touchant à la réalité génitale. Ainsi, dans la succession des équations signifiantes, le cheval est l’élément qui se trouve au

centre de la phobie : il est l’objet substitutif d’une série d’images plus ou moins

confuses autour desquelles l’angoisse ne peut se diluer. Via le transfert, c’est au cours

de son analyse que Hans va pouvoir parvenir à une formulation différente de la métaphore paternelle :

Ainsi : « Dans la phobie, cela est particulièrement simple et exemplaire. Chaque fois que chez un sujet jeune, vous aurez affaire à une phobie, vous pourrez vous apercevoir que l’objet de cette phobie est toujours un signifiant98

. » C’est le sens même de la formule :

L’objet phobique a une fonction métaphorique, il supplée et comble le manque de

l’Autre : c’est un « signifiant à tout faire »99

. Dans le premier temps du complexe

d’Œdipe, il existe un temps de discordance imaginaire où pour la mère, l’enfant n’est

pas seulement un enfant, mais aussi le phallus. L’enfant s’aperçoit alors que c’est le

phallus que la mère désire : « il s’agit de ceci : c’est qu’en quelque sorte en miroir que

le sujet s’identifie à ce qui est l’objet du désir de la mère, et c’est l’étape, si je puis dire,

phallique où la métaphore paternelle agit en soi pour autant que déjà, dans le monde, la primauté du phallus est instaurée par l’existence du symbole, du discours et de la loi.

Mais l’enfant n’en attrape que le résultat : pour plaire à la mère [...] il faut et il suffit

d’être le phallus100

. » La relation avec la mère n’est ni duelle, ni symbiotique et nous

savons que : « Les revendications d’amour de l’enfant sont démesurées, exigent

l’exclusivité, ne tolèrent aucun partage101

. » « Bref, le être aimé, le geliebt werden, est fondamental pour l’enfant. C’est là le fond sur lequel s’exerce tout ce qui se développe

98

Ibid., p. 395.

99

Lacan J., (1958 c). « La direction de la cure et les principes de son pouvoir », dans Écrits, op.

cit., p. 610.

100

entre la mère et lui102. » Dans le deuxième temps du complexe d’Œdipe, le père

intervient comme privateur de la mère qui est ainsi renvoyée à une loi qui est celle de