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La période de la guerre Almohades/Almoravides

Chronologie historique et structurations romanesques fragmentaires

I. La construction narrative bakhaïenne

1.2. Les Enfants d’Ayye entre séquences et micro-récits

1.2.4. La période de la guerre Almohades/Almoravides

La phase initiale de la période de la guerre Almohades/Almoravides

L’histoire se déroule à Tala Imsen, à une période de trouble. Un trouble provoqué par le soulèvement des tribus Masmoudas qui donnent naissance à la dynastie almohade. C’est une époque qui se situe entre la fin du règne almoravide et le début du règne almohade. Les personnages de ce récit sont Ayyoub, Abla et Ibrahim. Cette phase, en même temps qu’elle annonce le début d’un nouveau récit rappelle son lien direct avec la séquence précédente comme l’illustre le passage ci-dessous :

Lorsque sous le règne d’Ali, le petit-fils d’Ibn Tachfin, la grande mosquée s’éleva enfin sur l’esplanade, les descendants d’Abdallah jouissaient encore de l’aura léguée par « l’Andalou ».2

Ce passage démontre aussi le lien qui existe entre les personnages des deux récits, car ils sont liés par la généalogie. Ayyoub et Ibrahim sont les descendants de Abdellah, le héros de la séquence précédente.

La phase événementielle de la période de la guerre Almohades/Almoravides

La force transformatrice

Dans ce récit, il existe un enchaînement de forces transformatrices. Cela est lié à l’époque dans laquelle s’inscrit le récit, car l’histoire fictive se déroule à une période historique troublée. Les principales actions perturbatrices sont la conquête almohade, la naissance de Ibrahim, et le conflit entre Ibrahim et ses parents. Le premier fait va perturber le temps narratif du récit, cette rupture est surtout marquée par le sommaire (le récit va plus vite que l’histoire), ces événements vont accélérer la durée, le rythme de la narration, on passe par exemple de la scène (dialogue) où le temps de la narration est égal au temps du récit, au sommaire (résumé) comme l’illustre l’extrait qui suit :

1 BAKHAÏ, Fatéma. Les Enfants d’Ayye. op. cit., p. 187-189.

- Je suis confuse, dit-elle, avec tout ce qui se passe, ce n’est peut-être pas le moment ! Elle parlait en arabe avec un léger accent. Ayyoub en fut ému […] et s’avança d’un pas mal assuré. - tu es la bienvenu ! dit-il […] Ayyoub et Abla vécurent des années de bonheur dans la plus grande discrétion…1

La force rééquilibrante

Dans cette séquence, il n y a pas de force rééquilibrante, car le nœud provoqué par le climat de trouble dans lequel vivent les personnages va persister tout au long du récit. L’on notera tout de même quelques rééquilibres momentanés tels que : le mariage d’Ayyoub, et la naissance d’Ibrahim. Cependant, ces rééquilibres vont rapidement disparaître, effacés par d’autres troubles. À titre d’exemple, la naissance d’Ibrahim qui constituait au départ un rééquilibre va s’avérer plus tard le véritable trouble qui mettra fin au récit. Le retour à un rythme de narration normal, c'est-à-dire la scène (le temps de la narration est égal au temps du récit) marque le rééquilibre :

C’était un Vendredi. Après la grande prière à la mosquée, la foule se dispersait rapidement et la ville s’apaisait […] Ayyoub referma la porte derrière lui avec le sentiment d’éloigner, pour un temps, le brouhaha du monde…2

La phase finale de la période de la guerre Almohades/Almoravides

Le récit se clôt par une action perturbatrice. Cet événement est le conflit entre Ibrahim et ses parents. Ce conflit va se solder par une dispute, qui va provoquer le départ de ce dernier pour Fès. Le départ d’Ibrahim provoque la rupture avec ses parents, donc rupture avec le passé, ce qui signifie qu’il y a échec du projet initial comme l’illustre le passage suivant : « Ayyoub et Abla s’étaient encore trompés. […] Ibrahim […] ne revint pas, ni le lendemain ni les jours qui suivirent… ».3

1.2.5. La période almohade

La phase initiale de la période almohade

L’histoire se déroule surtout à Fès pendant la domination almohade, sous le règne de Abdelmoumène. Ibrahim vient de s’établir à Fès pour enseigner les

1 BAKHAÏ, Fatéma. Les Enfants d’Ayye. op. cit. p. 214-216.

2 Ibid., p. 219-220.

mathématiques, après avoir quitté Tala Imsen à cause du conflit avec ses parents (séquence précédente). Il assiste au début de la régence almohade au Maghreb. Dans cette partie, le temps narratif1 varie entre scène et pause :

Lorsque Ibrahim arriva à Fès, la ville n’était pas encore aux mains d’Abdelmoumène qui venait de prendre le titre « d’Amir El Mouminine » […] Dans les ruelles étroites de la médina, on hésitait encore à prendre position…2

La phase événementielle de la période almohade

La force transformatrice

C’est l’élément qui va marquer une rupture dans le récit. Dans cette séquence, contrairement aux précédentes séquences, il y a un seul événement perturbateur : c’est le départ d’Ibrahim au camp d’Abdelmoumène. Ibrahim va rejoindre le prince almohade pour devenir son stratège militaire. Ce nœud va être ressenti au niveau du temps narratif, car l’histoire va être ralentie. L’on remarquera dès lors une forte domination de la pause. Le choix d’une narration descriptive parait logique, lorsque l’on sait que la conquête almohade constitue la plus grande partie de ce récit comme l’illustre le passage suivant :

Ibrahim reçut d’abord une formation militaire. Dans un camp, sur un plateau pierreux au flanc de la montagne, les tentes s’alignaient […] Tout était prêt. Arcs et flèches, sabres, javelots, catapultes…Hommes et bêtes attendaient le signal du départ […] Ibrahim fut parmi ceux qui n’applaudirent pas.3

La force rééquilibrante

Dans cette séquence, le nœud va marquer la plus grande partie de l’histoire. Il faut attendre sa fin pour voir le rééquilibre du récit, et cela grâce à un évènement : le décès d’Abdelmoumène et le départ d’Ibrahim pour Cordoue. La deuxième action signifie le retour d’Ibrahim vers son projet initial. Ceci va se répercuter au niveau du temps narratif et l’histoire va reprendre son rythme initial. Cette action va accélérer la narration, le récit va passer de la pause vers la scène :

1 Selon l’analyse de Gérard Genette.

2 BAKHAÏ, Fatéma. Les Enfants d’Ayye. op. cit., p. 257.

Il irait à Cordoue à la rencontre d’un homme dont on commençait à parler […] Après tant d’année ! Pourquoi s’était-il détourné de la voie qu’il s’était lui-même tracé ?1

La phase finale de la période almohades

Le récit se clôt par une action de rééquilibre contrairement aux récits des séquences précédentes qui finissaient par des actions perturbatrices. Cet événement, c'est-à-dire le départ d’Ibrahim pour Cordoue, sert à la fois de retour à l’équilibre et annonce la fin d’une ère. Le décès d’Abdelmoumène marque la fin du récit et le début d’une autre ère. Ceci, est illustré par une fin ouverte comme le démontre le passage qui suit : « Cordoue lui apporterait peut-être une réponse. L’homme qu’il voulait rencontrer s’appelait Abd-El-Wahid Ibn Roschd ».2