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La notion d’ONG : tentative de définition

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 130-134)

Section I.2 La diversité des partenariats ONG-entreprise

2.1 Les ONG : une réalité plurielle

2.1.3 La notion d’ONG : tentative de définition

Les frontières et le contenu de la notion d’ONG sont extrêmement flous. L’ONG, « objet bizarre et mal identifié » (Ryfman, 2004), renvoie à « une catégorie très vaste (…) définie par soustraction. » (Conseil d'Etat français, 2000). Aucune base juridique communément admise ne régit le statut d’organisation non gouvernementale. Il s’agit « d’organisations qui ne relèvent pas du Droit international, mais au mieux des structures issues des Droits internes » (Meyer, 2001). La diversité des appellations existantes pour qualifier cette notion témoigne de ce flou conceptuel. Il n’est pas rare d’entendre parler d’associations internationales (AI), d’associations ou d’organisations de solidarité internationale (ASI, OSI) ou transnationales (ATN, OTN), d’acteurs non étatiques (ANE), d’organisations de la société civile (OSC), de Community-Based Developement Organizations (CBDO) dans l’hémisphère Sud, ou encore d’organisations populaires économiques (OPE) en Amérique latine. Cependant, c’est le terme d’organisation non gouvernementale qui fait autorité malgré ses imperfections terminologiques. La consécration de ce terme s’explique par son usage généralisé, ainsi que par la création d’instruments juridiques internationaux et l’existence de législations nationales dédiées aux associations.

Les ONG forment donc un ensemble d’organisations très divers et hétérogène. Il existe une multitude de définitions et de classifications de cette notion d’ONG : « Within the category, however, there are many different types, characteristics and purposes of NGOs » (Yaziji et Doh, 2009 : 4). Utilisé pour la première fois en 1945 par le Conseil Economique et Social des Nations Unies (ECOSOC), le terme d’ONG visait à distinguer les organisations issues de la société civile des organisations étatiques afin de les associer aux discussions internationales.

Mais aucune base juridique ne permet de qualifier une organisation de « non gouvernementale », il n’existe par conséquent aucune définition type, communément admise de ce qu’est une ONG. Ce flou est extrêmement problématique d’un point de vue conceptuel, et ceci pour diverses raisons. Tout d’abord, il existe une immense variété d’organisations assimilables à des ONG, ce qui rend particulièrement difficile l’appréciation de l’ampleur du phénomène, tant d’un point de vue quantitatif que d’un point de vue qualitatif. Ensuite, l’hétérogénéité et l’opacité du secteur des ONG génèrent une forte incertitude quant à ses attentes et à ses évolutions, alors qu’elles constituent des acteurs incontournables de la vie

économique contemporaine. Enfin, les carences juridiques au niveau international posent le problème de la légitimité et de la crédibilité de ces organisations qui ne relèvent pas de structures strictement démocratiques.

La proposition d’une définition stricto sensu de la notion d’ONG est donc un exercice difficile. Selon Ryfman (2004), de nombreux chercheurs et analystes ont tenté de fournir une définition de ce vocable. « C’est paradoxalement l’un des domaines où les travaux sont si abondants qu’il est impossible de les passer tous en revue, même brièvement ». Le département de l’information des Nations Unies en donne la définition suivante35 : « Un groupe de citoyens volontaires, sans but lucratif et organisé à l’échelon local, national ou international. Les ONG remplissent divers types de services et fonctions : humanitaires, d’information aux gouvernements sur les préoccupations de leurs citoyens, de surveillance des politiques des gouvernements et de promotion de la participation politique au niveau communautaire. Elles fournissent des analyses et des expertises, servent de mécanismes d’alerte avancée et aident à superviser et mettre en œuvre les accords internationaux.

Certaines sont organisées autour de questions spécifiques telles que les Droits de l’Homme, l’environnement ou la santé. Leurs relations avec les différents bureaux et agences des Nations-Unies diffèrent selon leur objectif, leur siège et leur mandat ». Une résolution du Conseil économique et social de 1996 précise par ailleurs qu’une ONG doit être dirigée démocratiquement et que ses financements doivent être d’origine privée. Mais rien n’interdit les financements publics si ceux-ci sont clairement identifiables.

Dans une définition plus technique, Hudson et Bielefield (1997 : 32) voient les ONG comme des « organizations that (1) provide useful (in some specified legal sense) goods or services, thereby serving a specified public purpose, (2) are not allowed to distribute profits to persons in their individual capacities, (3) are voluntary in the sense that they are created, maintained, and terminated based on voluntary decision and initiative by members or a broad and (4) exhibit value rationality, often based on strong ideological components ». Teegen et al.

(2004 : 466), dans une définition plus succincte font référence au mandat social des ONG :

« private, not-for-profit organizations that aim to serve particular societal interests by focusing advocacy and/or operational efforts on social, political and economic goals, including equity, education, health, environmental protection and human rights ».

35Rubio, F., Dictionnaire pratique des organisations non gouvernementales, Ellipses, Paris, 2004,

Dans son ouvrage entièrement consacré aux ONG, Ryfman (2004) propose une rétrospective des principaux apports respectifs de juristes, de politiques, de sociologues et d’économistes.

L’ensemble de ces définitions, bien que différentes, insistent sur différentes caractéristiques stables de l’ONG, à savoir qu’il s’agit d’une association durable et indépendante d’individus poursuivant un objectif commun, ayant une vocation non lucrative à l’échelle internationale.

« Tout regroupement, association ou mouvement constitué de façon durable par des particuliers appartenant à divers pays en vue de la poursuite d'objectifs non lucratifs » (Merle, 1970)

« Association composée de représentants appartenant à plusieurs pays et qui est internationale par ses fonctions, la composition de sa direction et les source de son financement. Elle n'a pas de but lucratif et bénéficie d'un statut consultatif auprès d'une organisation intergouvernementale » (Laroche, 2000)

« Association sur une base indépendante, volontaire et permanente de personnes poursuivant ensemble des buts communs autres que prendre le pouvoir, faire de l'argent ou se livrer à des activités illicites » (Willetts, 2002)

« L'histoire, les motivations et les principes qui les animent semblent s'éloigner du mécanisme habituel envisagé par l'économie » (Piveteau, 1998)

« Organisations économiques dont l'objectif original ou l'ensemble des contraintes qu'elles cherchent à résoudre définit leur action comme une redistribution philanthropique de ressources, d'origine et de nature principalement privées, en faveur du développement. Les ONG sont des organisations médiatrices de l'aide » (Piveteau, 1998)

A la suite de ce large spectre de définitions, et face à la difficulté de se positionner sur une définition stricto sensu, Ryfman (2004) se résout à la méthode dite du « faisceau de caractéristiques ». C’est cette approche que nous retiendrons pour notre recherche. L’auteur identifie cinq éléments constitutifs d’une ONG. La notion d’ONG renferme tout d’abord celle d’association. Il s’agit d’un regroupement de personnes privées fédérées autour d’un idéal ou autour de convictions, pour assurer la réalisation d’un dessein commun non lucratif ou non principalement marchand. Ceci avec la double précision de comporter un certain caractère de permanence, et surtout de constituer un projet au bénéfice d’autrui, et non des membres seuls.

L’ONG implique également la notion de solidarité ou plus largement d’intérêt général. Il s’agit d’une forme juridique particulière que symbolisent ces termes « d’association » ou

« d’organisme non lucratif », au gré des droits nationaux36. Il faut ajouter à cela la notion d’indépendance, au sens d’une position non étatique, pour qualifier le rapport aux puissances publiques comme privées, tant au plan national qu’international, avec comme visée la constitution d’un espace autonome de la sphère des compétences. Ceci n’exclut nullement les liens avec les Etats ou les entreprises, mais suppose que ces derniers ne soient pas à l’origine de sa création, et que la relation avec ceux-ci ne relève pas d’une forme de domestication. Par ailleurs, il faut intégrer la notion de démocratie participative. Cela renvoie à des valeurs impliquant, en même temps qu’un engagement librement consenti, la volonté affichée d’inscrire l’action associative dans une dimension citoyenne insérée dans un cadre démocratique, qu’il s’agisse du fonctionnement interne, du contexte de l’action ou du rapport au politique. Cette action doit être articulée, à des degrés divers, avec les « sociétés civiles », dont elle forme un des segments essentiels. Et enfin, nous pouvons mentionner le caractère transnational de l’action menée. Cela fait référence à deux choses. D’une part au mandat qu’elle s’auto-accorde pour mener une action directement opérationnelle dans une autre partie de la planète, défendre des droits humains à l’extérieur du pays d’origine, ou intervenir pour la protection de l’environnement. D’autre part, au fait que son activité peut impliquer une relation, quelle qu’en soit la nature, avec une entité tierce à l’Etat du siège, qu’il s’agisse d’une ONG, d’une OI, d’une entreprise, ou d’un autre Etat. Ryfman (2004) admet néanmoins que l’on puisse qualifier d’ONG une entité qui ne combinerait que les quatre premiers critères. Cela reviendrait à la qualifier d’« ONG nationale » ou d’« ONG-N ».

Pour conclure, la notion d’ONG, incluse dans celle de société civile, est une notion complexe, aux frontières et au contenu flous et hétérogènes. Aucune base juridique internationale ne régit le statut d’ONG alors que ces organisations tiennent une place croissante dans la vie économique mondiale. Cependant, nous identifions cinq caractéristiques stables, qui combinées, permettent de qualifier une organisation de « non gouvernementale ». Ryfman (2004), à la suite d’un état des lieux exhaustif des définitions proposées dans la littérature en Sciences de la décision, détermine un faisceau de caractéristiques minimales communes en croisant les différents apports disciplinaires. Nous synthétisons sa contribution en proposant la définition suivante : « Une ONG est une association durable de personnes privées, qui

36En droit des associations, une association loi de 1901 est une organisation à but non lucratif qui relève de la loi du 1er juillet 1901mise en place par Waldeck-Rousseau (ancien ministre de l'Intérieur, alors président du Conseil) et du décret du 16 août 1901. Ces dispositions ne concernent toutefois pas les associations ayant leur siège dans les trois départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la

sur la base du volontariat, poursuivent un objectif commun non lucratif et d’intérêt général, dans le cadre d’une organisation indépendante (statut, financement, compétences), à l’échelle internationale ». Dans la continuité de ce travail de définition, nous étudions des typologies d’ONG afin d’en appréhender les divers champs d’action et les grandes modalités d’intervention.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 130-134)