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Chaîne de valeur et système d’activités

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Section I.2 Vers une représentation enrichie du business model

2.1 L’approche unidimensionnelle

2.1.1 Chaîne de valeur et système d’activités

Le concept de chaîne de valeur a été introduit par Porter dans son célèbre ouvrage de 1985,

« L’avantage concurrentiel ». La chaîne de valeur est un modèle qui permet de décomposer l’activité de l’entreprise en séquences d’opérations élémentaires, et d’identifier les sources d’avantages compétitifs potentiels. Porter (1985) distingue les activités génératrices de valeur en activités principales et en activités de soutien. Les activités principales décrivent le processus de création matérielle, de vente, de transport et de service après vente du produit.

Les activités de soutien, caractérisées par leur transversalité, viennent à l’appui des activités principales sur l’ensemble du processus. Il s’agit, selon Porter, des infrastructures, des ressources humaines, du développement technologique et des approvisionnements. Les gisements de compétitivité trouvent leurs origines dans le renforcement de chaque maillon, et dans l’optimisation des flux entre chaque maillon. Dans le cadre d’une analyse dynamique, le management de la chaîne de valeur doit se consacrer au renforcement des liaisons entre chaque maillon. Cette approche peut être segmentée en trois sous-systèmes. Nous avons d’une part la gestion verticale des interactions entre activités de soutien. Nous identifions d’autre part une gestion horizontale des interrelations entre activités principales. Apparaît enfin la possibilité d’une gestion transversale de l’ensemble du système, intégrant les synergies entre activités principales et activités de soutien. La coordination entre chaque activité est un élément déterminant du processus de création de valeur. Si les activités sont

efficientes indépendamment les unes des autres, celles-ci ne peuvent créer de valeur sans mécanismes de coordination pertinents. Cette chaîne de valeur de Porter est modélisée de la façon suivante.

Figure 5. Chaîne de valeur de Porter (1985)

La chaîne de valeur permet d’identifier les activités et les interactions génératrices de valeur.

Ce diagnostic de la chaîne de valeur permet également de déterminer les activités à externaliser ou à internaliser. Toute organisation ne contrôle pas intégralement l’ensemble de sa chaîne de valeur. Par exemple, au niveau des activités principales, le transport peut être confié à une entreprise spécialisée si les coûts de transaction sont jugés inférieurs aux coûts d’organisation. Au niveau des activités de soutien cette fois, la formation professionnelle peut être confiée en partie à un cabinet de conseil ou bien à un organisme de formation spécialisé.

La décomposition de la chaîne de valeur en système d’activités (cf. figure 6, p.53) permet de mieux rendre compte des relations entre les composantes et entre les acteurs en charge de la mise en œuvre des activités associées. Cette représentation met également en lumière les potentielles logiques vertueuses de création de valeur entre certaines activités. La détermination de ces logiques vertueuses peut avoir une influence sur le management de la chaîne de valeur, notamment en ce qui concerne les décisions relatives aux frontières de la firme.

Figure 6. Exemple de système d’activités simplifié

Porter (1996) développe, dans son article « What is Strategy ? », ce concept de système d’activités. Considéré comme le fondateur de l’école du positionnement, l’auteur considère que la performance de l’entreprise dépend de sa capacité à se différencier durablement de ces concurrents : « A company can outperform rivals only if it can establish a difference that it can preserve » (Porter, 1996 : 62). Porter propose trois types de positionnement différenciant : « Strategic positions can be based on customers’ needs, customers’

accessibility, or the variety of a company’s products or services » (Ibid, p.66). La première option, nommée « variety-based positioning », consiste à répondre à un nombre réduit de besoins sur une large clientèle. La deuxième option, nommée « needs-based positioning », consiste au contraire à répondre à un grand nombre de besoins sur une clientèle ciblée. La troisième option, nommée « access-based positioning », consiste à répondre aux besoins d’une clientèle peu accessible.

Au-delà du positionnement, le choix des activités et de leur mise en relation spécifique jouent un rôle essentiel dans la compétitivité et la pérennité des entreprises : « Whatever the basis - variety, needs, access, or some combination of the three - positioning requires a tailored set of activities hecause it is always a function of differences on the supply side; that is, of differences in activities. » (Ibid, p.68). Le choix des activités suppose un arbitrage ou des compromis (« trade-offs ») dont la pertinence se révèle déterminante pour la soutenabilité de l’avantage concurrentiel : « Strategy is making trade-offs in competing. The essence of strategy is choosing what not to do » (Ibid, p.70). Ces compromis permettent de limiter les

pertes de valeur liées à l’incompatibilité de certaines activités : « trade-offs occur when activities are incompatible » (Ibid, p.68).

Dans une logique plus proactive, il s’agit pour l’entreprise d’optimiser les relations entre les activités choisies pour dégager des synergies. La cohérence et la combinaison des activités jouent un rôle clé dans la performance des entreprises : « Positioning choices determine not only which activities a company will perform and how it will configure individual activities but also how activities relate to one another » (Ibid, p.70). Selon Porter, la soutenabilité de l’avantage concurrentiel réside dans le caractère idiosyncratique des combinaisons effectuées.

Ces relations sont difficilement appréhendables de l’extérieur et rendent opaques les sources d’avantage concurrentiel. Porter distingue trois types d’alignements stratégiques (ou mises en cohérence) nommés « simple consistency », « activities reinforcement » et « optimization of effort ». Dans le premier cas, les activités sont combinées en fonction d’une vision stratégique. Dans le deuxième cas, les activités se renforcent les unes les autres. Dans le troisième cas, le renforcement de relations jugées fondamentales est optimisé. Cette approche invite à concevoir les activités de façon systémique, d’où le concept de système d’activités.

Ces travaux se nourrissent d’autres apports théoriques, à l’instar de ceux proposés par Kauffman (1993) et Milgrom et Roberts (1990). Kauffman (1993) propose un modèle de simulation, le « NK model », pour étudier les conséquences des interactions entre les activités.

Ce modèle comporte deux variable : le nombre d’activité (N) et le degré d’interdépendance des activités (K). La procédure permet de déterminer des « topographies de performance » (« performance landscapes »). Autrement dit, celle-ci permet d’identifier des gisements de valeur relatifs aux différentes interactions entre activités. Milgrom et Roberts (1990) proposent un modèle d’optimisation des complémentarités entre activités. Tout d’abord, les auteurs proposent une opérationnalisation de la notion de complémentarité. Dans l’acception de Milgrom et Roberts, la complémentarité est déterminée par la corrélation des revenus marginaux respectifs de deux activités en interaction. Ils proposent ensuite un modèle mathématique fondé sur les travaux de Topkis (1978) permettant de « calculer » les complémentarités au sein d’un système d’activités.

Porter et Siggelkow (2008) proposent une approche contextuelle de l’analyse des interactions entre activités. Cette approche repose sur le croisement de deux variables : le contexte des activités et le contexte des interactions. L’appréciation du contexte des activités repose sur le degré d’interaction entre les activités. Si les interactions entre activités sont denses, alors les

activités sont considérées comme interdépendantes, c’est-à-dire que leur valeur est dépendante de nombreuses autres firmes. Ces activités sont dites « spécifiquement stratégiques » (« strategy-specific activities »). Si les interactions entre activités sont faibles ou nulles, les activités sont considérées comme étant relativement indépendantes, c’est-à-dire que leur valeur n’est pas affectée par les autres firmes. Ces activités sont dites « génériques » (« generic activities »). L’appréciation du contexte des interactions repose sur le degré de différenciation des interactions entre les entreprises. Le croisement des variables « contexte des activités » et « contexte des interactions » permet distinguer sept (7) types de systèmes d’activités. La figure 7 ci-après représente la typologie proposée par Porter et Siggelkow (2008) :

Figure 7. Typologie des systèmes d’activités (Porter et Siggelkow, 2008)

Cette typologie permet de distinguer trois niveaux d’analyse des systèmes d’activités. Les systèmes d’activités peuvent s’analyser au niveau du secteur, des groupes stratégiques ou bien des entreprises elles-mêmes. Plus le niveau d’analyse est bas, plus le système d’activités est spécifique et source d’avantage concurrentiel. Cette typologie permet également de distinguer le niveau de généralisation des pratiques. Plus les interactions entre activités sont différentes, plus celles-ci sont « contextualisées ». D’une manière générale, la typologie de Porter et Siggelkow (2008) permet d’affiner l’analyse des systèmes d’activités en portant une attention accrue sur leur niveau de contextualisation et de spécificité au sein d’un secteur. La finalité d’une telle approche est d’apprécier la capacité des systèmes d’activités à se différencier pour constituer une source d’avantage concurrentiel durable au niveau sectoriel. Cependant, le

concept de système d’activités ne prend pas en compte de manière suffisamment explicite la contribution des parties prenantes externes. Le concept de réseau de valeur élargit l’analyse des systèmes d’activités en intégrant plus avant les différentes parties prenantes externes de l’entreprise (Brandenburger et Stuart, 1996 ; Charreaux et Desbrières, 1998), ainsi que les flux de valeur immatérielle (de Montmorillon, 2001 ; Allee, 2000, 2002, 2008).

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