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Chapitre 2 L’incertitude inhérente à l’information géographique et ses impacts

2.2 L’incertitude dans la production de l’information géographique

2.2.8. Communication de l’incertitude par les indicateurs de qualité

2.2.8.3 La nature trompeuse des indicateurs de qualité

À la nature trompeuse de l’information géographique s’ajoute alors la nature parfois trompeuse de plusieurs des indicateurs de qualité. Même si des valeurs particulières d’une mesure de la qualité des données sont transmises à l’usager, les conséquences de ces mesures sur l’analyse restent floues [Fisher, 1999]. Les mesures étant souvent basées sur un ou des échantillons statistiques, il demeure impossible d’obtenir une certitude absolue. Les valeurs associées aux critères de qualité varient dans l’espace et peuvent dépendre du contexte d’utilisation [Aalders et Morrison, 1997].

182 Les facteurs ayant contribué à cette situation sont, selon Duckham et McCreadie [2002], au nombre de quatre. Il y aurait d’abord le manque de consensus sur ce que constitue exactement le terme erreur et comment elle peut être collectée et diffusée. Ensuite, la nature superficielle de la majorité des métadonnées aurait pour effet de limiter grandement la création de routines de manipulation des erreurs. De plus, la nature hautement technique, statistique ou spécialisée de plusieurs routines de manipulation des erreurs auraient eu pour effet d’exclure leur utilisation par plusieurs usagers de systèmes d’information géographique. Finalement, la connotation négative du terme erreur, en dehors du cadre de la recherche scientifique, aurait découragé les producteurs de logiciels et de données de mettre l’emphase sur la manipulation des erreurs.

183 Mollering [1997, cité par Duckham et McCreadie, 2002] aurait dénombré vingt-deux (22) standards nationaux.

184 Ces informations sur les erreurs potentielles ou, en d’autres termes, les conseils nécessaires à une appréciation juste des données font l’objet d’un traitement spécifique au chapitre 4.

Pour pouvoir évaluer la fiabilité de chaque indicateur de qualité, il faudrait y associer un état de sa méta-qualité [Aalders, 2002] ou, en d’autres termes, produire des réserves non seulement sur les données mais sur l’information qualité elle-même [Faïz, 1999], ce qui ne simplifie en rien le processus. Force est d’admettre qu’une telle approche est plutôt rare dans un contexte de commercialisation de masse. La question se pose de savoir qui, entre le producteur ou l’utilisateur, devrait prendre le risque de cette estimation [Faïz, 1999].

La mesure de l’exactitude est basée sur le degré d’adhérence de la base de données aux spécifications (ou terrain nominal) et non au degré de concordance entre la carte et le terrain réel. La notion d’exactitude correspond aux règles prescrites par le producteur qui ne sont pas nécessairement partagées par l’utilisateur [Longley, Goodchild, Maguire, Rhind, 2001]. Pour un usager, particulièrement un consommateur profane, l’évaluation de l’aptitude d’un jeu de données à satisfaire ses besoins demeure un exercice quasi impossible à réaliser.

Pour permettre une utilisation judicieuse, certains auteurs suggèrent d’inclure des informations sur la qualité à des niveaux de détails plus fins. Ainsi, au lieu de les transmettre en regard d’un jeu de données dans son ensemble, elles seraient fournies en fonction de chaque thème, chaque entité [Worboys, 1998a, Gan et Shi, 2002], voire chaque primitive géométrique. Le cas échéant, l’insertion de telles informations relatives à la qualité serait de nature à faire croître de façon importante l’ampleur des bases de données, à ralentir considérablement la durée des traitements informatiques subséquents et de rendre extrêmement complexe la structure de la base de données [Aalders et Morrison, 1997]. De plus, ces informations ne sont pas mises à jour dans l’éventualité de transformations ou de traitements effectués sur les données [Veregin, 1999]. Les producteurs peuvent ne faire que des révisions partielles185 de leurs jeux de données compliquant davantage la gestion de la qualité [Gan et Shi, 2002].

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Une autre piste de solution consiste à demander à l’utilisateur plutôt qu’au producteur d’exprimer ses propres spécifications [Beard et Mackaness, 1992]. La question qui se pose à l’égard d’un utilisateur profane est dans quelle mesure il est possible pour lui d’exprimer de telles spécifications qui requiert des connaissances techniques particulières.

Le fardeau d’interpréter correctement les données géographiques repose sur les épaules de l’utilisateur [Frank, 1998]. Malgré les informations fournies sur la qualité, l’utilisateur est difficilement en mesure de s’assurer que l’application envisagée fait du sens et il ne reçoit normalement aucune garantie à cet égard [Veregin, 1999]. D’ailleurs, les systèmes d’information géographique courants continuent d’opérer comme si les données étaient parfaites, un peu comme dans le cas des cartes sur support analogique [Longley, Goodchild, Maguire, Rhind, 2001], et ils ne possèdent toujours pas d’outils pour gérer adéquatement l’information sur la qualité. Un besoin en recherche et en développement existe toujours dans ce domaine [Qiu et Hunter, 2002]. Généralement, peu d’efforts sont investis pour calculer et communiquer aux usagers l’imperfection inhérente aux données [Windholz, Beard, Goodchild, 2002].

Pour certains auteurs [Reinke et Hunter, 2002], les usagers novices, pourtant les plus oubliés, sont ceux ayant le plus besoin de nouvelles méthodes et de nouveaux outils pour comprendre la nature et l’importance de la qualité des données [Reinke et Hunter, 2002]. Par contre, pour d’autres, plus l’usager est novice, moins il voudra connaître les techniques qui interviennent dans l’information qualité ou même simplement voir l’information qualité [Faïz, 1999]. Les consommateurs ne voudraient simplement pas entendre parler de l’incertitude, la simplicité étant de mise186 [Shi, Goodchild et Fisher, 2002]. Il existe au moins une certitude, les consommateurs ne sont pas des experts, ignorent majoritairement comment l’information est captée, traitée et ce qu’il est raisonnablement possible d’en retirer [Jakobssen, 2002].

186 Ces auteurs signalent justement que c’est ce manque de simplicité qui constitue actuellement le talon d’achille des systèmes d’information géographique en vue de leur expansion.