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L’opérationnalisation des hypothèses

6. Méthodologie

6.2 L’opérationnalisation des hypothèses

Afin de vérifier cette hypothèse, il est indispensable de connaître la façon dont les utilisateurs du groupe étudié ont créé leur compte. Selon nous, la manière dont leurs comptes sont créés se fait en fonction de règles implicites établies et intégrées au sein d’un même groupe de pairs. De plus, la publication de contenus sur la plateforme ne prend son sens qu’une fois que le contenu a été vu et validé par l’entourage à qui il est diffusé. Cette attente de validation sociale participe à orienter ce que l’utilisateur publie. Les paramètres analysés afin de tester cette première hypothèse concernent :

- La fréquence de publication de photos permanentes et de stories.

- Le nombre de publications total.

- Le nombre de comptes suivis par l’utilisateur (les abonnements) et le nombre de personnes qui suivent l’utilisateur (les abonnés, ou followers).

- Si le compte est privé ou public.

- L’utilisation ou non de l’option de mise en évidence de stories sur le profil.

- Le nombre moyen de likes par publication permanente, et de vues par story.

- Depuis combien de temps le compte a été créé.

Pour déterminer si le profil Instagram a été construit selon des codes implicites, nous cherchons à déterminer si ces indicateurs partagent des similitudes à l’intérieur du groupe étudié, confirmant le fait que le compte Instagram a été constitué en fonction de certains critères communs.

La recherche de validation sociale quant à elle est analysée en fonction du ressenti des répondants vis-à-vis d’une éventuelle recherche de reconnaissance, effectuée par les personnes à qui les contenus sont partagés. Cette validation peut être réalisée par le vecteur des likes et des commentaires sur les publications, par le nombre de vues et réactions sur les stories, et de manière générale par le nombre de followers.

Les questions posées lors de nos entretiens afin d’approfondir cette dimension concernent les motivations à partager du contenu sur Instagram, les gratifications retirées et l’importance que prennent le nombre de likes et de commentaires. Nous avons cherché à déterminer si un certain nombre de likes par publication, ou un minimum de followers était attendu de la part de l’utilisateur, et s’il lui était arrivé de supprimer une publication ou une story. Nous cherchons ainsi à vérifier les éventuelles attentes qu’ont les usagers vis-à-vis de leur entourage lorsqu’ils publient du contenu, en vue d’analyser la dimension de la recherche de validation.

H1 : Les jeunes en Suisse romande construisent leur profil Instagram en suivant des codes implicites, visant à l’obtention d’une validation sociale.

Ces trois normes (Yau & Reich 2018) se réfèrent à la manière dont l’utilisateur se présente à son entourage de façon idéalisée. Il s’agit de trois injonctions implicites selon lesquelles lorsque l’utilisateur s’expose sur une plateforme, il poste de manière à se présenter comme à la fois attractif, digne d’intérêt et bénéficiant d’un capital social.

Cependant, quelques éléments viennent compléter ces normes, dans la manière dont les jeunes entre 18 à 25 ans s’exposent sur Instagram dans le contexte suisse romand.

1. En ce qui concerne la norme d’attractivité, les jeunes s’exposent à travers des contenus en partie mis en scène afin de se montrer attractif d’un point de vue physique et esthétique. Cependant, le vecteur de l’humour et de l’autodérision est parfois employé afin de mettre à distance la dimension de mise en scène et de valorisation de son image.

2. Pour la norme d’intérêt, les jeunes ne postent pas uniquement des publications concernant les moments importants de leur vie, mais aussi des contenus liés à leur quotidien.

3. La norme de popularité diffère également, dans le sens où le nombre de likes et de followers prend moins d’importance chez certains utilisateurs. Ces chiffres gardent une importance, mais de manière plus modérée, notamment car Instagram évolue avec l’apparition de l’option stories qui ne permet pas de recevoir de likes, et le fait que la plateforme ait supprimé les likes dans certains pays. Ceci participe à modifier la perspective qu’ont les utilisateurs face à l’importance de ces chiffres.

Les indicateurs nous permettant de vérifier ou réfuter cette seconde hypothèse sont donc liés aux contenus publiés par les répondants.

1. Pour mesurer la norme du désir d’attractivité, l’indicateur principal mobilisé est celui de l’importance de l’apparence physique sur la photo publiée, que ce soit en publication permanente ou en story, et l’importance de l’humour de la photo, ou de la légende l’accompagnant.

2. Pour mesurer la norme d’intérêt, l’indicateur mobilisé est lié au type de contenu posté, afin de déterminer si l’utilisateur poste uniquement des photos de moments importants sortant de l’ordinaire ou si des photos du quotidien sont aussi publiées.

3. Enfin, concernant la norme de popularité, l’indicateur est lié aux personnes présentes sur les publications et l’importance des chiffres (nombres de likes et de followers) sur la plateforme, le but étant de déterminer l’importance (ou non) d’apparaître entouré socialement sur la plateforme.

H2 : Dans leurs stratégies de présentation de soi sur Instagram, les jeunes en Suisse romande se conforment à des normes qui s’articulent autour du désir d’attractivité (se montrer attractif), d’intérêt à susciter chez leurs pairs (se montrer intéressant), et d’un désir de popularité (se montrer entouré socialement).

Afin de tester cette hypothèse, nous avons cherché à mesurer l’imitation sur Instagram, car selon nous, la pression des pairs et la manière dont ils s’exposent sur la plateforme est le facteur principal guidant les stratégies d’exposition des jeunes dans le contexte suisse romand. L’imitation renvoie ici au fait de poster des contenus comparables, et de manière similaire au sein d’un même groupe. Cependant nous tenons compte du fait que les individus ont en général plus de peine à reconnaître le fait qu’ils se conforment, et ont plus tendance à le remarquer chez les autres.

Un biais de désirabilité sociale, exigeant des individus qu’ils gardent leur personnalité propre, est à observer pour tester cette troisième hypothèse. Le groupe de pairs se réfère à l’entourage de l’utilisateur à qui le contenu est diffusé, correspondant au groupe de référence. Cette hypothèse a pour objectif de déterminer si les pratiques d’exposition des jeunes sur Instagram partagent des similitudes. Nous cherchons à déterminer si les modes de publication des pairs exercent une influence sur leurs stratégies de présentation de soi, poussant ces derniers à se conformer de manière plus ou moins consciente.

Les indicateurs mobilisés pour mesurer la pression au conformisme concernent les types de contenus valorisés à publier et ceux à ne pas publier, ainsi que la manière de publier, afin d’analyser si une forme d’imitation s’observe parmi notre groupe de recherche. Nous nous sommes intéressés à la manière dont les jeunes perçoivent la présence de tendances générales sur la plateforme, afin de déterminer si les pratiques de publication de l’entourage participent à définir leurs stratégies d’exposition. Puis, par rapport à ces tendances générales de publication des pairs, comment l’utilisateur se situe quant à ses propres pratiques de présentation de soi.

H3 : Un phénomène d’imitation s’observe sur Instagram dans les pratiques de présentation de soi par les jeunes en Suisse romande.

Synthèse du passage des concepts à l’analyse :

Hypothèse Concept Dimension Indicateurs Méthode

H1

Figure 3 : Tableau synthétisant l’opérationnalisation des hypothèses