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L’inter-médiation, le processus de base de la communiaction®

Section I : L’inter-médiation dans les processus cognitifs d’une activité

Chapitre 5 : Le processus d’inter-médiation en tant que fondement de la

5.3. L’intermédiation dans une arène d’intercompréhension

5.3.3. L’inter-médiation, le processus de base de la communiaction®

En intégrant les objets intermédiaires dans la phase de négociation, nous avons l’intention d’enrichir ce moment princeps de l’élaboration de décisions collectives et de permettre de mieux appréhender la complexité ainsi que le devenir des co-constructions du collectif. La prise en considération de tous les actants mobilisés dans ce lieu pose la pierre angulaire pour embrasser l’ensemble de l’arène

d’intercompréhension. Nous voulons montrer maintenant la genèse de

l’intercompréhension dans l’‘inter’ de l’arène en faisant émerger les différentes facettes de cet ‘inter’ dans le travail collaboratif.

Tout d’abord, on peut se demander pourquoi on crée l’hyperonyme d’inter-médiation pour désigner le processus de médiation dans l’arène et pourquoi le vocable de médiation ne suffit pas. Comme on trouve souvent pêle-mêle l’utilisation du terme médiation, par exemple pour transmettre de l’information à travers des objets, pour instrumentaliser des humains et pour désigner le phénomène en lui-même, nous avons choisi de mettre le focus sur la dynamique de l’‘inter’, c’est-à-dire d’entrer dans le cœur de l’interaction entre les humains et les non-humains dans lequel s’opèrent les mirco-mécanismes de la médiation. Ainsi, par l’emploi du préfixe ‘inter’ nous prônons l’idée selon laquelle le processus se passe bien dans « une zone médiane », pour reprendre le terme de Hennion (2007), et qu’il s’agit d’un mécanisme d’entrelacement.

Des chercheurs en philosophie, en psychologie du travail, en ergonomie et en linguistique interactionnelle se sont penchés sur la problématique de la construction d’objets communs et ils ont appréhendé de manière différente cet ‘inter’ dans lequel cette construction a lieu. Selon les démarches, il s’agit d’un développement ou d’une transformation d’états et la réalisation aboutit soit à un espace partagé, soit à du « grounding » ou encore à un monde commun. Le point inhérent à toutes ces approches concerne la question de savoir comment des perspectives ou des expériences singulières peuvent converger vers une conception commune des acteurs, voire une co-construction d’un objet. Nous allons nous inspirer de différentes perspectives et discuter leurs dimensions-clés.

5.3.3.1. La construction du monde commun en philosophie

Pour entrer dans la problématique, nous allons d’abord nous tourner vers la philosophie. Nous avons choisi deux auteurs-clés, un représentant du réalisme et un autre de l’idéalisme, pour illustrer des manières différentes de s’approcher du sujet. Comme Husserl et Searle ont travaillé le thème de la construction de mondes communs et comme ils ont mis en évidence des aspects-clés de l’appréhension de la réalité sociale, nous allons voir comment ces auteurs comprennent la construction de mondes communs.

En tant que représentant du réalisme, Husserl a contribué aux fondements de la relation sociale en phénoménologie. Pour cet auteur, c’est la chose qui sert de guide transcendantal entre un monde naturel, comportant les objets matériels et le monde de l’esprit, comportant la partie sociale de la réalité. Néanmoins, l’objet matériel n’est pas appréhendé comme l’est un être humain. Par son apport, l’auteur a marqué une rupture par rapport à la vision simpliste de l’objectivité, « mais sans pour autant revenir à une version purement ontologique de la réalité perçue » (Semprini, 1995, p. 45). Il met la notion d’intentionnalité au premier plan qui devient un moteur pour s’interroger sur le monde. Et il précise bien que les objets inanimés, rencontrés dans le cours d’expériences, ne sont pas simplement perçus, qu’ils ne se limitent pas à des données issues d’une sensation quelconque, mais que ces éléments acquièrent une réalité objective, à laquelle tout un chacun pourra se référer. Ainsi, selon Husserl, le corps se constitue selon un mode double, capable d’appréhender les choses objectives rencontrées dans l’environnement et les autres, tout en respectant leur double constitution, chose physique de leur corps et leur expérience personnelle. Pour arriver à entrer en relation subjective avec l’autre, c’est le concept

d’Einfühlung15qui est évoqué. Pour que cette relation soit efficace, il faut être motivé

de participer. Comme les sujets ne peuvent avoir les mêmes appréhensions des choses, Husserl argue que c’est grâce à la relation d’empathie que les sujets peuvent permuter leurs repères propres et faire correspondre les données de sensation pour construire un monde commun. Tout en restant un penseur pleinement inscrit dans la tradition philosophique, il a contribué à travers son questionnement systématique sur le mode d’existence des faits et des objets du monde « à l’édifice constructiviste » (ibidem, p. 48). Avec « sa définition de la conscience intentionnelle comme acte et moment intersubjectif où conscience et monde se façonnent mutuellement, il permet d’envisager la voie de sortie du dualisme naïf du grand partage » (ibidem, p. 48). Ainsi, avec ses travaux, il a marqué un tournant épistémologique que des chercheurs comme Merleau-Ponty et Schutz ont poursuivi.

Du côté des réalistes, c’est Searle, le philosophe californien de l’intentionnalité, successeur et disciple d’Austin, qui nous a légué une théorisation de la réalité sociale et une importante contribution à la théorie des actes de langage. En outre, il a souligné l’importance des valeurs symboliques de différents éléments physiques qu’on rencontre dans le quotidien. Il en déduit des catégories ontologiques, typiquement humaines ; ainsi, à savoir qu’on attribue une valeur symbolique à un certain objet pour le transformer pour une autre utilisation. C’est dans le contexte social que l’on doit partager la même valeur symbolique pour s’y référer. L’auteur a mis en exergue des règles à travers lesquelles se constitue la régulation dans la réalité sociale. Pour Searle, c’est un arrière-plan de capacités qui structure la conscience. Il montre que pour réaliser une intentionnalité collective, c’est-à-dire un vouloir commun, « les êtres humains ne disposent pas uniquement d’un accord concerté, établiin situ» (Clément et Kaufmann, 2005, p. 46). Il met en évidence une autre possibilité : en attribuant de nouvelles fonctions à des objets qui en étaient alors dépourvus, « l’imposition, via l’accord collectif, d’une fonction et des règles constitutives qui lui sont associées est la caractéristique essentielle des faits

institutionnels» (ibidem, p. 46). L’auteur appelle les fonctions de l’accord collectif

des« agentive functions ».Ainsi, parmi de nombreux outils symboliques, le langage

joue pour Searle un rôle primordial et un objet peut avoir un nouveau contenu lui permettant de remplir une nouvelle fonction.

15Ils existent deux termes en français : l’intropathie (Escoubas) et l’empathie (Depraz). C’est la dernière

Comme nous avons remarqué plus haut, Searle a suivi Austin qui a développé les notions d’intention et de convention. Pour ce dernier qui ne s’intéresse qu’à la logique des actes illocutionnaires, on peut voir les actes de langage et les énoncés par lesquelles ils sont accomplis comme un moyen conventionnel pour exprimer et réaliser des intentions. Il a établi une nouvelle classification des actes de langage. Néanmoins, la pragmatique qui s’est développée à la suite des travaux d’Austin et de Searle s’est orientée au début vers une approche codique du langage et de son usage. Sans que les interactions entre les connaissances linguistiques et les connaissances non linguistiques entrent en jeu, pour Reboul et Moeschler, cette approche ne semble pas être une théorie cognitive. « Par certains aspects, elle est plus proche du béhaviorisme que des sciences cognitives » (1998, p. 39).

Husserl, comme Searle nous ont proposé une démarche pour s’approcher de la relation sociale entre les acteurs en tenant compte des objets et de l’importance de cette relation sociale pour l’appréhension des objets. Mais la relation est marquée par les dires des uns et des autres. Se posent alors les questions suivantes : comment le sens commun émerge-t-il entre les acteurs de la situation à travers leurs dires ? Comment les constituants sociaux, matériels et non matériels s’intègrent-ils dans l’interaction ? Nous tentons d’apporter des éléments de réponse à ces aspects dans les paragraphes suivants en interrogeant d’abord une démarche où il s’agit d’adapter les sens individuels dans la construction d’une démarche conjointe.

5.3.3.2. La construction du monde commun par une démarche d’ajustement

Une approche récente relative à la construction de bases communes de la compréhension mutuelle a été proposée par Herbert H. Clark dans les années quatre-vingt-dix. Clark explique ce mécanisme de construction et de maintenance de la base commune en affirmant que «two people’s common ground is, ..., the sum of

their mutual, common, or joint knowledge, beliefs and suppositions» (1996, p. 93).

Ainsi, l’auteur met en avant que chaque acteur se construit une représentation des connaissances de l’autre et que les partenaires doivent s’assurer mutuellement qu’ils se sont compris. Cette mise en évidence de la représentation de la base des connaissances de l’autre est la condition de pouvoir construire une base commune et de l’élargir successivement. Clark nomme cet arrière-fond commun le «commun

ground» ou la « shared basis» et le processus de déterminer, de l’actualiser, voire

de le développer le «grounding».

Clark (1996) met en exergue qu’une communication entre des personnes nécessite une coordination et une régulation entre les actions communes (joint activities). Selon le principe du «grounding», un acteur pose une hypothèse, des actions et des processus de diagnostic pour contrôler l’état d’avancement de son collaborateur et de feed-back afin de réparer. L’auteur dépasse le principe du changement de locuteur (turn talking) et donne une certaine importance à la coordination du savoir commun. Pour lui, la communication ne peut réussir que si les partenaires ont la même base commune, par exemple savoir qui est expert et qui est novice dans le domaine en question. Il ne suffit pas qu’un partenaire apporte de nouvelles informations ; il faut bien que les autres acteurs les acceptent, soit par un « hmmm », soit par des questions à propos du nouveau matériel ou par des signes non verbaux. On ne fait pas que structurer la base commune, mais on la restructure. Il s’agit d’un processus opportuniste, car les partenaires essaient de réaliser la conversation avec le moins d’énergie possible. Clark souligne l’influence de plusieurs éléments :la co-présence des interactants ; les objets se trouvant dans le même contexte, c’est-à-dire dans le même champ visible, et pouvant être attribué au ‘commun ground’; les

informations audibles et l’interprétation des signes non verbaux utilisés pour la détermination ducommun ground.

Pour nous, cette approche où il s’agit de reprendre et d’accepter la perspective de l’autre, s’inscrit plutôt dans un modèle d’ajustement de connaissances que d’une co-construction. En outre, Clark met en évidence non pas l’effort individuel, mais l’effort minimal de collaboration. D’autres auteurs, comme Dillenbourg et ses collaborateurs, employant également la notion d’effort optimal de la collaboration, voient dans les incompréhensions non pas des contraintes, mais une opportunité pour s’expliquer et pour se justifier. Avec l’approche proposée par Clark, on est dans une logique où les individus modifient continuellement leur environnement afin d’organiser leurs activités, mais on n’est pas dans une approche de la cognition distribuée qui voit les connaissances du groupe comme un unique système cognitif, distribué à travers les individus du groupe. Nous allons nous tourner maintenant vers des perspectives mettant en avant la dimension de la genèse, du devenir de la construction commune en rendant visible les différents points de vue.

5.3.3.3. La construction du monde commun dans une démarche développementale Parmi les approches décrivant les mécanismes de la construction d’un monde commun, une approche du domaine de l’ergonomie et de la psychologie du travail nous inspire. C’est notamment celle qui est exposée par les ergonomes qui

considèrent la démarche de construire ensemble comme une approche

développementale, voire « un développement conjoint des milieux et des sujets » (Béguin, 2004a, p. 1). Béguin se base sur l’œuvre philosophique de Cassirer, dont Netchyne et Netchyne (1999) « ont souligné les liens avec S. Vygotski et H. Wallon » (Béguin, 2004a, p. 4). Cassirer, héritier de Leibniz, a suivi Kant en développant son idée de la construction du savoir synthétique par l’imagination. Ainsi, l’homme n’accède à la connaissance et aux choses qu’en faisant preuve d’une imagination active qui lui permet d’élaborer un langage et des concepts et Cassirer en déduit que l’homme est un animal symbolique. Selon Béguin, on peut avoir différents systèmes de références face à un objet et selon l’orientation de l’activité. Un fait que nous avons bien relevé dans nos analyses : alors que le corps médical ‘voit’ l’individu en chair et en os, avec sa maladie, nécessitant du sang pendant l’intervention chirurgicale, l’informaticien le voit en tant que code qui doit rester le même dans tous les documents afin de minimiser le risque de malentendus et un troisième acteur, le groupe des gestionnaires ‘voit’ le même individu dans des groupes d’individus de clients qui nécessitent les mêmes soins et dont il faut gérer la sécurité et les coûts. Béguin souligne que pour un même objet, tout individu « a des conduites spécifiques et un jargon différencié, mais aussi des concepts, des critères de réussite, et même différents systèmes de valeurs » (ibidem, p. 4). Ainsi, le monde de chaque acteur s’intercale « entre son action qu’il oriente et la production de son milieu par le sujet »

(ibidem, p. 4). Un phénomène qui se multiplie dans une situation collective avec

plusieurs acteurs. De plus, l’auteur rend attentif aux dimensions visibles et aux implicites du monde de chacun qui dépend du « point de vue » (ibidem, p. 4).

La notion de monde est tout d'abord une conceptualisation de la notion de « point de vue ». Pour illustrer cet argument, l’auteur se base sur Prieto. Au sens de ce dernier, un concept qui consisterait à décrire l'objet dans tous ses aspects serait aussi inutilisable qu'un plan qui serait une copie de la géographie, conservant les propriétés de relief, les distances et la topographie. Ainsi dit Prieto, c'est « à son adéquation, non pas à l'objet, mais au point de vue dont dépend sa pertinence que se mesure la vérité d'un concept » (cité par Beguin et Cerf, 2004, p. 60). Beguin et

Cerf concluent en disant que face à un même objet, co-existent différents systèmes de référence, différents mondes. Pour ces auteurs, le monde commun constitue en « un système de positions différenciées, une cartographie à plusieurs entrées à partir de laquelle l'activité des uns est mise à l'épreuve dans le monde des autres, dans des situations construites pour l'occasion » (ibidem, p. 61). À cet effet, pour Beguin, tout travail devient un acte de création des formes de l’action et de ses ressources, pendant lequel concepteurs et usagers contribuent conjointement à la conception, sur la base de leurs diversités. En prélevant tout un ensemble d’indices sur le produit, des « marbrures », comme l’auteur appelle les traces restantes, traduisent la présence de représentations opératives (2004a).

Selon nous, cet aspect devrait s’amplifier en situation à plusieurs acteurs, du fait de la rencontre de plusieurs mondes particuliers a priori possibles. D’après Béguin, il faut passer d’un développement de premier ordre à un développement de second ordre » (ibidem, p. 5) pour construire un monde commun. Néanmoins, en tant que forme d’articulation, l’auteur réfute la démarche de négociation. « C’est plutôt sur la base de la polyphonie au sein du groupe qu’est susceptible d’émerger la nouveauté et le dépassement des problèmes actuels » (ibidem, p. 5). Ainsi, un « monde commun » est un système de positions différenciées auquel chacun peut se référer et il advient à travers des processus de dialogue et d’ « échange de monde » en les mettant à l’épreuve. Et c’est l’analyse du travail, permettant un étayage qui contribue à cette objectivation, à externaliser et rendre visible les mondes et à les positionner dans le monde commun.

5.3.3.4. Vers la construction du monde commun dans une approche dialogique Dans la même optique, selon Reboul et Moeschler, Grice a également travaillé sur le principe de coopération en essayant d’aborder ce processus à partir d’une entrée ‘conversationnelle’ appuyée sur des maximes à respecter. À côté de notions comme celle de l’implicature, Grice a introduit le principe de coopération, selon lequel chacun contribue à une conversation de manière rationnelle et coopérative pour faciliter l’interprétation des énoncés. Comme l’ont fait remarquer Reboul et Moeschler, « il y a bien évidemment une dimension représentationnelle chez Grice, puisque le système qu’il propose repose sur la manipulation de représentations » (1998, p. 60). En outre, Grice est resté au niveau conversationnel pour expliciter le mécanisme d’inférence par lequel un auditeur interprète correctement un énoncé et lui attribue le sens qu’entendait le locuteur. Dans ce cas, pour nous, on reste alors dans une logique de communicativité.

Afin de pouvoir traiter que les sens non littéraux des segments langagiers et de mieux rendre compte de l’intersubjectivité, des travaux de recherche ont été entamés pour concevoir un modèle de l’enchaìnement conversationnel en adoptant une posture dialogique.

Ainsi, nous voulons montrer que justement ce sens est négocié et construit et non pas découvert dans le flux du dialogue afin de mettre en avant la notion d’intercompréhension comme concept-clé des sciences cognitives. En ce sens, Trognon et Brassac (1992) ont développé une approche qui se situe à l’interface entre l’analyse conversationnelle et l’analyse du discours tout en restant modélisatrice et descriptive. Ils ont envisagé l’enchaînement conversationnel comme un processus qui se construit rétroactivement, c’est-à-dire a posteriori. Pour eux, il est important de mettre en avant qu’au cours du développement de l'interlocution, un sens émerge. De plus ce sens est tel que les interlocuteurs en sont co-responsables.

Le détail de ce mécanisme logique qui est au cœur de ce que les auteurs appellent la logique interlocutoire, se trouve longuement exposé dans Trognon et Brassac (1992) ou encore dans Ghiglione et Trognon (1993). L’idée fondamentale présentée est que l’énoncé initial (contrairement à la théorie classique) n’a pas de statut illocutoire indépendamment de son traitement, au long de la conversation, par les deux interactants. Ainsi, le statut interlocutoire de l’énoncé n’est pas le seul fait de son locuteur, il n’est pas non plus le seul fait de l’auditeur, mais il est élaboré, perlaboré à travers un jeu subtil de négociation de sens par les acteurs et devient le fait de la relation dialogique. Ce résultat conduit à une stabilisation provisoire du sens.

Or, depuis longtemps, des chercheurs ont étudié le sens des propos qui se construit dans une relation intense dans une situation historique et matérielle. À ce sujet, on peut s’inspirer de Bakhtine, penseur soviétique en sciences humaines et théoricien de la littérature. Suivant cet auteur, l’expression-énonciation est déterminée à la fois par la situation de communication et par la présence de l’interlocuteur. Selon lui, « le mot est une sorte de pont jeté entre moi et les autres. S’il prend appui sur moi à une extrémité, à l’autre extrémité, il prend appui sur mon interlocuteur. Le mot est le territoire commun du locuteur et de l’interlocuteur » (1929, p. 129). En son temps, Bakhtine a déjà relevé que la matière linguistique ne constitue qu’une partie de l’énoncé, et que cette partie de l’énoncé est un « horizon commun aux interlocuteurs » (Baylon et Mignot, 1994, p. 217) qui se compose des aspects spatio-temporels communs, des éléments sémantiques et des éléments axiologiques, c’est-à-dire de l’évaluation commune de cette situation.

De même, Vygotski a bien souligné le rôle central de l’activité langagière dans le développement cognitif. Par sa conception de la nature située du fonctionnement cognitif, il a contribué à une base théorique pour l’idée de connaissances variables qui apparaissent à partir de pratiques locales et qui sont dépendantes de contextes