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Para II un contrat soumis à un processus décisionnel formaliste

A- Un formalisme pour assurer les informations

2- L’information des tiers

357. Le projet de restructuration doit être porté à la connaissance des personnes dont les droits sont susceptibles de subir une modification du fait de la restructuration envisagée. Est ainsi prévu dans les deux systèmes juridiques, un dépôt au Greffe du Tribunal du projet de restructuration (a) ainsi que la publication d’un avis dont les modalités divergent entre le droit OHADA et le droit français (b)256.

a- Un dépôt au Greffe imposé dans les deux législations

358. Le législateur tant africain que français impose aux sociétés participant à une restructuration de déposer le projet de restructuration au Greffe du Tribunal et ce avant que les actionnaires ne l’approuvent. A cet effet, il est précisé que : « Le projet de fusion est déposé au Greffe du tribunal de commerce desdites sociétés et fait l’objet d’une publicité dont les modalités sont fixées par décret pris en Conseil des ministres. »257

359. Cette obligation est un impératif pour les entreprises concernées à peine de voir la restructuration envisagée ne pas se réaliser. Elle a même été sanctionnée par le juge qui a excipé de l’absence de preuve du dépôt du projet de restructuration au Greffe pour annuler les effets d’une fusion. Pour la Cour en effet, l’absence de preuve de ce dépôt préalable rend irrégulières les publications légales relatives à l’opération de fusion absorption empêchant que les droits et obligations de la société candidate à la disparition puissent être transmis à la société absorbante258.

360. C’est dire que du dépôt au Greffe du Tribunal dépendra la suite de la procédure notamment la publicité et les effets de la restructuration. A défaut, d’un tel dépôt, la restructuration de l’entreprise ne pourra se faire. Cette formalité est une condition de

256 Voy. Décret du 9 novembre 2011, in la réforme du droit commun des fusions BJS , 01 mars 2012, n° 3, p.261. 257 C. Com art. L. 236 alinéa 2 et art. 194 al.1de l’acte uniforme OHADA portant droit des sociétés

commerciales et du GIE.

réalisation de la restructuration et partant de l’ opposabilité du plan de restructuration qui doit en outre, faire l’objet de mesures de publication qui diffèrent d’un système à l’autre avec l’entrée en vigueur en France de la loi de simplification n° 2011- 525, du 17 mai 2011, portant loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit.

b. Des modalités différentes de publication du projet de restructuration

361. Le projet de restructuration fait l’objet d’un avis qui dans le principe rapproche les deux systèmes. Mais dans la mise en œuvre pratique, des divergences non moins négligeables existent dans la mesure où le droit OHADA consacre et maintient la publicité classique(b.1) tandis que le droit français a révolutionné ses mécanismes de publication (b.2).

b.1 Le maintien du mécanisme classique en droit OHADA : l’avis dans un journal d’annonces légales

362. Le droit africain a maintenu le mode classique de publication du projet de restructuration dans un journal d’annonces légales. A cet effet, il précise que : « Le projet de fusion ou de scission est déposé au greffe chargé des affaires commerciales du siège des sociétés et fait l’objet d’un avis inséré dans un journal habilité à recevoir les annonces légales par chacune des sociétés »259

Cet avis contient les indications suivantes :

1°) la dénomination sociale suivie, le cas échéant de son sigle, la forme, l’adresse du siège, le montant du capital et les numéros d’immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier de chacune des sociétés participante.

2°) la dénomination suivie le cas échéant de son sigle, la forme, l’adresse du siège social et le montant du capital de la ou des sociétés nouvelles qui résulteront de l’opération ou le montant du capital des sociétés existantes.

3°) l’évaluation de l’actif et du passif dont la transmission aux sociétés absorbantes ou nouvelles est prévue ;

4°) le rapport d’échange des droits sociaux ;

5°) le montant prévu de la prime de fusion ou de scission »260

363. Ce mécanisme de publicité classique est celui qui a toujours existé en droit français. Il a pour but d’informer les tiers et partant toutes les personnes que la restructuration pourrait lésées. Toutefois, ce mécanisme a subi une évolution en droit français qu’il convient de mettre en lumière et qui constitue l’un des éléments de démarcation entre le droit français et le droit OHADA.

b-2 L’évolution des mécanismes de publicité en droit français

364. L’évolution des mécanismes de publicité trouve son fondement dans l’innovation portée aux mécanismes de publicité qui somme toute contiennent des imperfections.

b-2-1L’innovation des mécanismes de publicité en droit français

365. Les mécanismes de publicité du projet de restructuration ont connu une évolution en droit français. Avant le décret n° 2011-1473 du 9 novembre 2011261, l’avis de projet de restructuration devait être publié un mois au moins avant la réalisation de l’opération dans un journal d’annonces légales du département du siège de chaque société participante262

et ouvrait le délai pendant lequel les créanciers des sociétés participantes pouvaient former opposition à l’opération.

366. Désormais, il ne fait plus que l’objet d’une publication au Bulletin des annonces civiles et commerciales BODACC263ou sur le site Internet de la société si elle en est

260 Art. 194 A.U. D.S.C et du G.I.E.

261 Décret n° 2011-1473, 09/11/2011 : JO 10 nov. 2011, p. 18893

262

Et, le cas échéant, au BALO, pour les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé.

dotée264, trente jours au moins avant que la première assemblée ne se tienne ou dans la figure de la fusion simplifiée trente jours au moins avant que l’opération ne prenne effet.

367. Le législateur a consacré deux nouveaux mécanismes, une publicité effectuée au BODACC et une autre sur le site internet des sociétés parties à l’opération de restructuration265.Ces deux modes issus du décret du 9 novembre 2011 relatif à la communication en matière de droit des sociétés ont un double objet266. En effet,: « le projet de fusion ou de scission fait l’objet d’un avis inséré, par chacune des sociétés participant à l’opération au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales. »267

En outre, « l’insertion prévues à l’article R.236-2 n’est pas requise lorsque pendant une période ininterrompue commençant au plus tard trente jours avant la date fixée pour l’assemblée générale appelée à se prononcer sur le projet de fusion. 268» Il en résulte deux modes de publicités du projet de fusion en droit français qui se justifient doublement.

368. D’une part, il s’agit de simplifier le recueil du consentement des actionnaires des SA à l'utilisation des moyens de communication électronique pour les formalités préalables aux assemblées générales269 ainsi que le traitement de la feuille de présence aux assemblées générales. En outre, il doit faciliter le recours à la signature électronique270.

369. D'autre part, il complète la transposition de la directive n° 2009/109/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 entamée par la loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit et réduit les coûts liés aux fusions et scissions en limitant les obligations en matière de rapports détaillés et en permettant aux sociétés de fournir les informations utiles aux actionnaires et aux tiers par voie électronique. Toutefois, ces nouveaux mécanismes même s’ils constituent des innovations par rapport au droit OHADA, sont critiquables à certains égards.

264 C. Com., art. R. 236-2-1.

265 Notons par ailleurs que ces deux formalités ne sont pas cumulatives.

266 Communication en matière de droit des sociétés, Bulletin Joly Sociétés, 01 décembre 2011 n° 12, P. 1036 267

C.Com.art.R.236-2.

268

C.Com., art.R.236-2-1.

269

C. com., art. R. 225-63 modifié.

b.2.2 Des innovations critiquables

Les innovations apportées par le législateur aux mécanismes de publicité du projet de restructurations sont critiquables et seront appréhendées suivant que la publication est faite au BODACC ou le site internet de la société.

 Sur la publicité au BODACC

370. L’ancienne formalité de publication de l’avis de fusion dans un journal d’annonces légales était effectuée à l’initiative des sociétés concernées et les journaux d’annonces légales faisant preuve d’une grande diligence. Ainsi le délai d’opposition des créanciers commençait à courir en pratique très rapidement (en général un à trois jours) après la sollicitation du journal d’annonces légales par les sociétés concernées.

371. Le décret du 9 novembre 2011 ne prévoyant aucun délai pour la transmission par le Greffe de la demande de publication au BODACC271, ni pour la publication de l’avis par le BODACC une fois que celui-ci en a reçu la demande, il peut s’écouler plusieurs semaines entre le dépôt du projet de fusion au Greffe et la publication de l’avis au BODACC.

372. La publication du décret le 9 novembre 2011 a pris de court les praticiens souhaitant réaliser des opérations de fusion avant la fin de l’année 2011. Elle a aussitôt donné lieu à un afflux de demandes de publication auprès des greffes et du BODACC, et à un encombrement correspondant.

271 Comme le notent justement l’Afep, l’Ansa et le Medef dans leur requête à la Chancellerie (v., infra), pour

d’autres formalités que les fusions, des délais s’appliquent expressément à la transmission des avis par le greffier au BODACC : formalités relatives à la publicité des modifications statutaires (C. com., art. R. 123-161), publicité des comptes (C. com., art. R. 232-19 et s.).

373. La réforme de la formalité de publicité d’application immédiate a ainsi abouti à un allongement du délai de réalisation des fusions. Nombre de praticiens se sont émus de cette situation272.

374. L’Ansa, l’Afep et le Medef ont interpelé la Chancellerie à ce sujet, en suggérant des mesures d’urgence permettant d’assurer la réalisation d’opérations de fusion en cours avant la fin de l’année 2011, et plus généralement visant à encadrer dans le temps cette formalité de publicité273. Malheureusement, la réponse de la Chancellerie ne laisse pas entrevoir une modification des textes sur ce point274. Il s’ensuit que pour les opérations futures, notamment celles devant être réalisées dans des délais stricts, par exemple avant la fin d’une année ou d’un exercice donné, et sauf à effectuer la formalité de publicité sur les sites Internet des sociétés concernées, l’incertitude sur le délai de publication de l’avis de fusion au BODACC, et donc sur le point de départ du délai d’opposition des créanciers, perdurera et devra désormais être prise en compte et anticipée par les praticiens dans le calendrier de leurs opérations.

375. Afin d’éviter que l’objectif initial de simplification des formalités de publicité des fusions n’aboutisse à un allongement du calendrier des fusions, il paraît souhaitable que le

272 V. notamment, MAITRE A., et BOILLOT C., « Fusions… et confusions – À propos du décret du 9 novembre

2011 » : JCP G 2011, 2334.

273 Avis Ansa n° 11-055, « Décret du 9 novembre 2011 sur les fusions – Difficultés pratiques – Requête

commune Afep-Ansa-Medef ». Cette requête proposait notamment la publication d’un texte rectificatif imposant une transmission sans délai par les greffes des avis de fusions au Bodacc, et la fixation à quatre ou cinq jours du délai de publication des avis par le Bodacc. Elle suggérait également le report pur et simple, au 1er janvier 2012, de l’entrée en vigueur du chapitre II du décret relatif aux fusions et scissions.

274 La Chancellerie, dans sa réponse du 25 novembre 2011, s’est bornée à rappeler (i) que le Conseil national des

greffiers des tribunaux de commerce avait adressé à l’ensemble de la profession une circulaire attirant l’attention des greffiers sur la nécessité de transmettre sans délai au BODACC les avis de projet de fusion (circ. CNG n° 50/2011, 17 nov. 2011) et (ii) que le délai de publication au BODACC des avis transmis par les greffiers pouvait être ramené à sept jours dès lors que le greffier soulignait l’urgence de la publication lors de la transmission de l’avis au BODACC. À l’heure où ce dossier était sous presse, les auteurs ont été informés de ce qu’un projet de décret serait en cours d’élaboration, dont le contenu pourrait aller jusqu’à revenir à l’ancien système de publication de l’avis de fusion dans un… journal d’annonces légales (l’affaire est donc… à suivre).

Code de commerce soit modifié sur cette question par l’ajout de délais impératifs pour la publication au BODACC des avis de fusion275.

 la publication des sites internet des sociétés concernées

376. Cette faculté qui constitue une alternative à la publication d’un avis au BODACC et nous semble-t-il au BALO276 peut réellement contribuer à l’allègement du formalisme pour celles des sociétés qui disposent d’un site Internet.

377. Néanmoins, ce mode de publicité comporte également quelques incertitudes. Il n’est pas aisé d’apporter la preuve d’une publication du projet de restructuration277

sur un site Internet « pendant une période ininterrompue » de trente jours. Le point de départ notamment, la mise en ligne pourra certes être constatée par voie d’huissier, comme le suggèrent certains praticiens278 mais l’on s’éloigne alors d’une simplification des formalités.

378. Quant à l’absence d’interruption, celle-ci sera difficile à démontrer même si juridiquement, c’est bien plutôt l’interruption qui devrait être établie. Toute interruption d’au moins vingt-quatre heures devant donner lieu à la publication d’un avis au BODACC, le choix de la publication sur le site Internet est également porteur d’incertitudes sur le calendrier de la fusion (non plus sur le point de départ du délai de trente jours, mais cette fois sur son écoulement).

275 L’ordonnance du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés aurait pu constituer un moyen de procéder à

cette mise en harmonie. Mais force est de constater que celle-ci ne contient aucune disposition concernant les opérations de restructuration.voy. Revue des sociétés, réflexions collectives sur l’ordonnance du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés précité.

276 V. C. com., art. R. 236-2-1 précité.

277 Du fait de la rédaction peu claire de l’article R. 236-2-1 nouveau, qui fait référence à la publication du projet

de fusion ou de scission, la prudence impose de publier sur les sites Internet non seulement un avis analogue à celui qui serait publié au Bodacc, mais également le projet de fusion ou de scission dans son intégralité.

379. Enfin, le nouveau texte exige une publication « dans des conditions de nature à garantir la sécurité et l’authenticité des documents » sans préciser quelles sont ces conditions, ce qui laisse la place à discussion, et donc à contestation.

380. Le risque de suspension du délai de trente jours en cas d’interruption du site Internet et les risques de contestation soit de la date de mise en ligne, soit de l’absence d’interruption du site Internet, soit des conditions de nature à garantir la sécurité et l’authenticité des documents, sont donc autant d’éléments à prendre en compte dans le choix de la publication du projet de fusion sur les sites Internet des sociétés concernées.

381. En définitive, nous remarquerons que si ces mesures imposées par les législateurs ont pour objectif d’informer les parties et les tiers intéressés à la restructuration de l’entreprise, il est évident qu’elles viennent alourdir la procédure de la restructuration et dans une mesure la rendre complexe en posant l’éventualité du rajout de certaines formalités qui en tout état de cause viennent rallonger le calendrier des opérations.

382. Il serait judicieux pour le législateur de corriger ces imperfections dans l’optique de faciliter la restructuration envisagée. Ce souhait de simplification a en tout état de cause, guidé le législateur français concernant le contrôle de l’instrument de restructuration.

B -Le formalisme dans le but d’assurer le contrôle du projet

383. Dans le but d’assurer la protection des intérêts des actionnaires, les différents législateurs prévoient que l’instrument de restructuration soit contrôlé. Toutefois, il est à remarquer que si dans la désignation de cet expert, la portée du contrôle est différente (1), il convient de préciser que la mission est la même.(2)

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