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L'inexistence de règles particulières au régime transfrontalier

Para II L’imprécision du régime des restructurations transfrontalières en droit OHADA

A- L'inexistence de règles particulières au régime transfrontalier

529. Le droit OHADA consacre la possibilité d’une croissance au plan transfrontalier pour les entreprises présentes sur son espace. A la différence de son homologue français, cette restructuration ne fait l’objet d’aucune règlementation particulière même si dans le principe elle est possible (1). Cette absence de particularité a des conséquences qu’il convient de mettre en exergue. (2)

1. Le principe de l’existence d’une restructuration transfrontalière

530. L’acte uniforme sur les sociétés commerciales met en place un certain nombre de règles qui s’appliquent aux fusions et opérations assimilées aussi bien internes qu’intracommunautaires c'est-à-dire dont les sociétés participantes ont leur siège social dans un Etat différent375. Ce régime unifié constitue une aubaine pour la réalisation de ce type d’opération au sein de l’espace OHADA car désormais, ainsi que le précise le législateur, « La fusion, la scission et l’apport partiel d’actifs peuvent concerner des sociétés dont le siège social n’est pas situé sur le territoire d’un même Etat partie. Dans ce cas, chaque société concernée est soumise aux dispositions du présent acte uniforme dans l’Etat partie de son siège. »376.

531. Il s’agit d’une innovation du législateur OHADA qui offre sur ce point une ébauche du régime juridique des fusions transfrontalières. Cette technique peut permettre à une société d’un Etat de se rapprocher d’une autre société relevant d’un autre Etat. Elle poursuit un objectif de renforcement de la capacité concurrentielle desdites sociétés. Avec cette innovation, le droit OHADA devrait faciliter les restructurations internationales au sein de la zone d’application de l’OHADA puisqu’il permet, par son caractère communautaire, d’éviter les conflits de lois applicables pour les restructurations impliquant des sociétés ayant leur siège social dans différents Etats membres.

A titre d’exemple, le droit et les procédures applicables seront les mêmes en cas de restructuration entre une société immatriculée en Côte d’ivoire et une société immatriculée au

375 Notons qu'à la différence du droit français où le régime juridique des fusions transfrontalières a été élaboré

seulement en 2005 avec l’entrée en vigueur de la directive sur la societas europeas et s’est poursuivi en 2008 avec la loi de 2008 transposant la directive FT, le droit OHADA a depuis son entrée en vigueur édicté des règles concernant les restructurations transfrontalières.

Sénégal. En raison de cette uniformité, toutes les dispositions au plan interne vont trouver à s'appliquer au niveau transnational et la conséquence c'est que le droit OHADA à la différence du droit français a en théorie une conception élargie de la restructuration transfrontalière.

2. Les conséquences de l’absence d’un régime particulier aux restructurations transfrontalières

532. L’absence d’un régime particulier applicable aux restructurations transfrontalières a pour conséquence de permettre l’élargissement conceptuel tant de la notion que du champ d’application, c’est à dire des entreprises concernées par la restructuration à la différence du droit français.

a- L'élargissement des opérations transfrontalières

533. Le législateur OHADA semble avoir élargi les opérations transfrontalières car a contrario de la législation française, il ne limite pas les opérations de restructurations aux seules fusions qui en tout état de cause, ne demeurent pas les mécanismes exclusifs à utiliser dans le cadre d’un projet de développement transfrontalier. Cet élargissement qui a l'avantage de mettre à la disposition des entreprises participantes à un projet de rapprochement transfrontalier le “triptyque“ des instruments juridiques prévus, trouve son fondement dans l'uniformité du régime juridique applicable auxdites opérations en droit interne car en effet, en raison du caractère communautaire de la législation OHADA, les règles applicables au plan interne le seront aussi au plan transfrontalier.

534. Cette uniformité devrait, pour ce qui nous concerne, rendre la restructuration plus simple et attractive évitant ainsi l'application de règles juridiques disparates qui se juxtaposant pourraient en complexifier le régime. En raison de cette extension, la conception de la restructuration a contrario de la législation française ne devrait pas se limiter aux seules fusions de sociétés commerciales mais s’étendre aux autres types de restructurations notamment la scission et l’apport partiel d’actif.

535. Toute société peut se restructurer non seulement par voie de fusion mais aussi en ayant recours aux autres mécanismes de restructuration par voie de transmission

patrimoniale prévus au plan interne377 sans que ne puisse être invoquée, une quelconque règle de conflit de lois. Pourrait par exemple être consacré un principe qui pourrait influencer le droit positif en vigueur dans certains Etats notamment la France : l'admission des scissions et apports partiels d'actifs transfrontaliers.

b. L'admission des scissions et apports partiels d'actifs transfrontaliers

536. Dans la législation OHADA, les restructurations transfrontalières peuvent être initiées en ayant recours aux mécanismes de fusion, de scission ou d'apport partiels d'actif. Cette idée ressort de l'article 199 alinéa 1 suscité qui dispose que : « La fusion la scission et l’apport partiel d’actifs peuvent concerner des sociétés dont le siège social n’est pas situé sur le territoire d’un même Etat partie.. . »378

En droit OHADA, la restructuration transfrontalière peut résulter des autres mécanismes de restructuration par voie de transmission du patrimoine notamment la scission et l'apport partiel d'actif. Se trouve ainsi consacré le principe de l'admission des dits mécanismes au plan transfrontalier. L'acte uniforme de l'OHADA pour notre part semble sur ce point précis, en avance sur le droit français. Des sociétés relevant d’Etat différents pourront non seulement se partager le patrimoine d’une société notamment par voie de scission et les dispositions applicables résulteront des l’acte uniforme qui définit la notion comme « l’opération par laquelle le patrimoine d’une société est partagé entre plusieurs sociétés existantes ou nouvelles. Une société peut transmettre son patrimoine par voie de scission à des sociétés existantes ou nouvelles. La scission entraîne transmission à titre universel du patrimoine de la société, qui disparaît du fait de la scission, aux sociétés existantes ou nouvelles.» 379

537. Mais aussi en ayant recours au mécanisme de l’apport partiel d’actifs ainsi que le prévoit le législateur africain qui l’appréhende comme « l’opération par laquelle une société fait apport d’une branche autonome d’activité à une société préexistante ou à créer.

377 LE CANNU P., Dr. Soc. 2003 n° 1584. Voy. aussi DAIGRE J.J., l’apport scission doit il juridiquement

porter sur une branche d’activité , note sous cass.2ème

civ., 12 juillet 2001,JCP E 2003, jurisprudence, n°281.

378

A.U.D.S.C. et du G.I.E, art. 199 alinéa 1 précité.

La société apporteuse ne disparait pas du fait de cet apport. L’apport partiel d’actif est soumis au régime de la scission »380

538. Par la consécration de ce principe, des sociétés situées sur des Etats différents, pourraient non seulement transmettre une partie de leurs activités à d'autres relevant d'Etats différents mais également transmettre tout ou partie de leur patrimoine à d’autres entreprises. Les procédures applicables seront les mêmes sans possibilité de recours à des règles spécifiques applicables au rapport comme c'est le cas en France ; ni même l’éventualité du recours à l’unanimité en matière de décision d’approbation.

539. Cette innovation est d'une importance capitale pour les entreprises. Toutefois, nous pensons qu'elle est purement théorique d'autant plus que cette possibilité s'avère en pratique, difficile à réaliser parce que non seulement les Etats parties mettent en place une sorte de protectionnisme notamment en matière fiscale mais il n'est pas fréquent de voir des entreprises recourir à ces modes de restructuration.

540. Cet élargissement notionnel de la restructuration transfrontalière a une autre conséquence notamment sur les entreprises pouvant participer aux restructurations transfrontalières et ce à la différence du droit français où toutes ne sont pas concernées par un projet transfrontalier.

541. En effet, en plus de cette extension conceptuelle, il faut noter qu’à la différence du droit français, le législateur OHADA a élargi les types d'entreprises pouvant opérer une restructuration transfrontalière dans la mesure où toutes les entreprises sans limitation peuvent le faire. Ainsi : « Sauf dispositions contraires du présent acte uniforme, les opérations de fusions, scissions et apports partiels d’actifs peuvent concerner des sociétés de formes différentes »381. A priori, toutes les formes de sociétés prévues par l’acte uniforme peuvent participer à une restructuration transfrontalière dès lors qu’elles réunissent les conditions requises par le législateur.

542. Cette extension a le mérite de favoriser la libre mobilité des entreprises à l’intérieur de l’espace OHADA sans restriction d’aucune nature d’une part et d’autre part,

380

A.U. D.S.C et du G.I.E.,art.195.

semble concorder avec la volonté du législateur africain de favoriser l’intégration et permettre la libre circulation et le libre établissement des entreprises dans l’espace OHADA.

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