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CHAPITRE 5. LES NOTIONS D’AUTORITE ET DE PROGRES 5.1 I NTRODUCTION

5.2. L ES CODES CULTURELS DANS L ’ INCONSCIENT COLLECTIF

5.2.2. L’inconscient et la pensée

L’on soutient que, pour que les hommes puissent se comprendre et se donner la chance de pouvoir changer quoi que ce soit, il leur est nécessaire de comprendre la manière dont leur cerveau fonctionne. L’on admet également l’existence d’une superposition de trois cerveaux chez l’homme.

 Le cerveau reptilien contrôle les instincts les plus fondamentaux tels que la survie immédiate (Char 2010), ou les besoins de manger et de boire, d’assurer la lignée ou de copuler, etc. Berclaz note à ce sujet que « les pulsions d’autoconservation correspondent à l’ensemble des besoins liés aux fonctions corporelles nécessaires à la conservation de la vie de l’individu » (2002 : 12). L’influence du cerveau reptilien sur l’inconscient est si puissante que notre instinct l’emporte souvent sur notre faculté logique et nos émotions (Rapaille 2006 : 121-123).

 Le système limbique concerne l’affectivité et les pulsions (Char 2010). Au cours de notre vie, nous construisons en nous, de manière plus ou moins consciente, une sorte de banque de données qui consigne à la fois les évènements survenus dans le passé et les émotions qui y sont liées. Le traitement par notre mémoire de ces ensembles de références influe nos choix d’aujourd’hui de faire ou ne pas faire une chose, notamment lorsque le contexte nous renvoie à celui dans lequel nous avons vécu ; d’où l’importance des émotions sur l’apprentissage. Les émotions sont non seulement chargées d’ambivalence mais aussi de très grande puissance en ce sens que lorsqu’elles entrent en conflit avec la raison, ce sont souvent les émotions qui nous guident et dictent nos actions.

 Le cortex cérébral différencie l’homme de l’animal dans la mesure où le premier est capable d’« ordonner, domestiquer les deux premiers [cerveaux] de façon originale ; c’est la fameuse ‘raison humaine’ » (Char 2010). En d’autres termes, il s’agit du siège du raisonnement sophistiqué, de l’intelligence ou de la logique. Il est également la partie qui traite de l’apprentissage et de la pensée abstraite. Dans le fonctionnement inconscient de ces trois cerveaux, il s’avère que c’est le cortex cérébral qui est chargé d’expliquer, ou encore de donner « toujours une excuse, un alibi » aux actions ou aux choix que nous opérons (Laborit 1976 cité par Char 2010).

Rapaille résume l’interaction de ces trois cerveaux de la manière suivante :

notre cortex peut nous dire que l’âge apporte la sagesse. Notre système limbique peut nous suggérer que la santé est seulement une question d’avoir une attitude positive et de se sentir bien. Mais lorsque notre cerveau reptilien parle, nous n’avons d’autre choix que de l’écouter (2006 : 148).

Dans la vie de tous les jours, plusieurs choix et actions, que nous opérons ne sont pas toujours les fruits d’actes délibérés et décidés par notre conscience. Ils sont souvent stimulés par la partie inconsciente de notre cerveau. Effectivement, il est des actes ou des choix dont nous ignorons souvent la vraie motivation logique. Delà émerge la difficulté de déterminer les frontières conflictuelles entre la conscience et l’inconscient. Si la conscience prend essentiellement appui sur la réalité du moment, qui induit à l’opération d’un choix ou d’une décision d’adopter une action, nos émotions et nos jugements incitent à le faire, grâce au côté obscur et refoulé de nos souvenirs passés. Cette force impénétrable mais toujours présente de manière active et vivace conditionne notre état d’esprit présent, même si elle ne le détermine pas de manière constante. Force est de dire que l’ensemble des expériences accumulées tout au long de notre vie, notre réaction face à un événement marquant, ainsi que tous nos souvenirs passés enfouis, ont occasionné des empreintes dans notre inconscient. Toutefois, nous nous servons toujours de la raison, c'est-à-dire de notre cortex cérébral, pour contrôler et orienter nos actes et nos choix, impulsés tantôt par nos émotions tantôt par nos besoins.

La définition freudienne pose que c’est l’inconscient qui nous rend unique dans les choix que nous opérons et dans les décisions que nous prenons. Par contre, la définition jungienne suggère que c’est lui qui nous éclaire dans les choix et les décisions que chacun de nous opère en tant que membre de la société.Cependant, d’un angle de vue culturel, Rapaille soutient que l’inconscient « guide chacun de nous de manière unique selon les cultures qui nous ont produits » (2006 : 59-60). Ainsi chaque homme, en sa qualité d’être social, écoute et fait preuve d’obéissance à son propre inconscient, tout en étant parfois amené s’accommoder aux instincts communs (Dantier 2004 : 4).

Si l’inconscient est essentiellement psychique, il nous est difficile de définir sa nature. Malgré cela, c’est la conscience qui nous aide à le cerner de manière fragmentaire, malgré le fait qu’il y a certains de ses aspects qui échappent « à la conscience attentive présente, comme les souvenirs, les connaissances accessibles, mais non sollicitées par l’occasion de l’attention » (Lacôte 1998 : 25-27). Pour une raison ou une autre, certains de nos souvenirs du passé sont mises hors de la portée de la conscience, sans être pour autant effacés, afin de nous préserver d’un déplaisir qu’elles pourraient occasionner ; d’où un processus de refoulement

(Lacôte 1998 : 116). Nos expériences du passé, souvent associées à des émotions intenses, occasionnent des empreintes, telles des blessures qui laissent des cicatrices pour nous rappeler de ce qui s’est produit à un moment donné dans le passé. Ce sont par la suite ces empreintes qui influencent, d’instinct et de manière insaisissable, nos décisions et nos actions ; c’est ce que Cyrulink (2001) décrit comme l’un des processus de résilience.