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L'identification juridique complexe des enjeux environnementaux futurs

La complexité actuelle internationale repose dans la pratique juridique sur une multitude d'identifications portant sur plusieurs points, que le droit international de l'environnement originaire ne pouvait prévoir.

Ainsi, se pose aujourd'hui la problématique juridique portant sur l'identification de la nature des risques et de leur fonction.

Viennent ensuite celle portant sur la qualification juridique des victimes directes et indirectes de ces risques. Et force est de constater que l'approche intra-générationnelle des ressources naturelles mondiales ne repose pas sur un mode de gestion préventive, anticipative des risques.

Or, les événements environnementaux des trente dernières années ont démontré une insuffisance d'adaptabilité des principes de précaution et de prévention. Cette double insuffisance portant sur deux principes fondamentaux du droit international de l'environnement transparaît sur le plan international.

Toute dépendance crée un risque de vulnérabilité, générateur d'insécurité sociale, politique et juridique. La complexité repose alors sur l'identification d'une reconnaissance anticipée liées à ces pratiques, pour mieux cibler le principe de vulnérabilité, et les moyens de les évincer.

Cette situation juridique génère ainsi de nouvelles contraintes juridiques et une typologie nouvelle de risques.

Une complexité certaine concerne autant la nature des risques nouveaux, que celle des dommages subis et les responsabilités qui s'y rattachent.

1. Une problématique liée à l'identification juridique des risques

Il n'existe pas d'avancée, de développement économique d'une société, qu'elle soit économique ou juridique, sans prise de risques. Toute activité humaine se rattache ainsi à une notion de risques. La question repose alors de déterminer un cadre juridique adapté, répondant aux principes de précaution et de prévention, et identifiant la nature du risque ainsi que sa portée.

En matière de gestion des ressources naturelles, le choix d'une approche intra-générationnelle reposant sur une gestion au départ économe et optimale des ressources naturelles, établie par la Charte Mondiale de la Nature, reste limitée. La notion de gestion «économe» et «optimale» n'étant pas définie juridiquement, l'application de ce mode de gestion a généré une multitude de risques avérés, mais aussi potentiels et futurs. Comment alors recourir au mécanisme de la responsabilité pour des risques futurs, en établissant la nature des risques, et qui peut s'en prévaloir ?

S'est donc posée d'abord une première problématique, liée à la nature juridique de tous les risques technologiques et naturels, nouveaux, liés aux modes actuels d'extraction des ressources naturelles, leur lien direct ou indirect avec les nouveaux dommages environnementaux. Car les nouvelles technologies ont évolué plus vite que l'encadrement réglementaire les concernant. Et cette rapidité a très vite démontré une inadaptation latente de l'encadrement réglementaire actuel. Quant aux risques naturels, ceux-ci sont passés de l'état probant à l'état réel, et ont participé à l'augmentation d'une insécurité juridique certaine.

S'est ensuite posée une seconde problématique, liée à la portée de ces risques, et notamment de la reconnaissance du dommage environnemental et de son évaluation financière, notamment par le biais du droit des assurances. Des questionnements juridiques portant sur de nouveaux modes de règlements sont apparu. Aussi, si le risque généré est grevé d'une assurance professionnelle spécifique, propre aux exploitants et gestionnaires des ressources naturelles, une insuffisance juridique, portant sur la reconnaissance d'une graduation des risques, demeure.

Ainsi, n’apparaît pas en droit international de l'environnement, la notion de risque

« gradué », alors qu'on pourrait techniquement la rattacher à celle des «trois P ». La proposition de créer sur le plan international, une échelle commune des risques technologiques potentiels, possibles, et probables, peut être retenue. Or, cette graduation n'existe pas en matière d'assurance internationale d'exploitation, alors que la question de l'estimation de ces risques dans leur aspect graduel commence à se poser.

La troisième problématique découle alors de la seconde car la capacité d'un droit reconnu reste liée à sa réactivité d'adaptation. La capacité technologique étant plus rapide que la capacité juridique, la nécessité d'envisager des modes de gestions plus sécurisantes est établie. A été avancée l'hypothèse d'un recours à une gestion publique préventive. Mais rien ne permet de confirmer ou d'infirmer que ce recours servirait la finalité du droit international de l'environnement.

Se pose alors une quatrième problématique, liée à la nature de l'effet « papillon » des conséquences de la gestion des ressources naturelles. Si les activités à risques créent des dommages environnementaux, directs, se pose la reconnaissance des dommages

environnementaux des ressources naturelles périphériques.

On peut citer à titre d'exemple les modes de gestion actuels pour développer les biocarburants première génération, qui ont contribué à une déforestation internationale massive, provoqué la pollution des eaux souterraine et de surface. Peuvent également être rattachés au champ d'application, les ressources naturelles air, se situant localement au dessus des zones d'extraction et d'exploitation. Dans ce cas, la nature des risques encourus reste difficile à établir localement, notamment au vu de la quantification réelle de pollution supposée ou avérée, émise.

On revient alors à reposer la question de la reconnaissance de la notion de risques gradué ou risque « des trois P ». La perte d'une biodiversité locale entrerait-elle alors dans la graduation des risques potentiels, possibles ou probables? Les délicates incertitudes juridiques, liées aux estimations actuelles, ne devraient-elles pas trouver réponse plus ponctuée?

La problématique est ici transversale, car l'aspect juridique déborde sur un aspect politique et économique, non négligeables. Par voie de conséquence, viennent s'entremêler dans cet entonnoir juridique pyramidal, toutes les problématiques futures liées aux dommages divers, liés à l'exploitation des ressources naturelles et leur complexité reposerait sur la nature de ces dommages et la portée de ces derniers sur un territoire donné, mais aussi sur l'ensemble de la société contemporaine.

Ces dommages peuvent être de différentes natures mais affectent autant les habitats naturels, s'accompagnant de la destruction lente ou progressive, de toutes les espèces vivantes locales, que ce soit la faune ou la flore. Aujourd'hui, cette destruction concerne aussi les populations locales.

On peut se référer à titre d'exemple au problème des nouveaux types de polluants chimiques recensés sur le plan international. Leur chiffre est supérieur à soixante cinq millions mais ce chiffre croît car il est recensé, par jour depuis 2002, à travers le monde, plus de onze milles substances néfastes pour l'ensemble des êtres vivants sur la planète404.

La complexité des enjeux futurs concerne en dernier lieu le domaine des responsabilités, nationales et internationales, liées à la gestion d'exploitation optimale des ressources naturelles. Ces nouvelles responsabilités, transversales, intra et extra-étatiques, apparaissent dans plusieurs domaines. Elles concernent d'abord les domaines de la salubrité publique, pour tous les dommages environnementaux liés à l'exploitation et l'extraction. Ces responsabilités concernent ainsi les domaines de la santé publique nationale et mondiale, pour toutes les expositions liées à des produits polluants toxiques. Elles concernent ensuite les domaines de la sécurité publique et aussi ceux de la tranquillité publique, pour tous les dommages liés à l'accessibilité aux ressources naturelles par les populations locales et extérieures.

Or les modes actuels sur lesquels reposent les régimes juridiques sont hétérogènes et posent un grand nombre d'incertitude sur la notion même de responsabilité. Le cadre réglementaire futur doit ainsi avoir une vision transversale des préoccupations des états.

404 EAWAG, rapport 2009, 68 pages, page 25, voir le site http://www. pseau.org/outils/biblio/document resultat.php?o%5B%5D=3209

Ces derniers souhaitent renforcer les liens contractuels avec les gestionnaires, exploitants étrangers mais ne souhaitent pas bloquer les négociations, les ressources naturelles représentant un potentiel économique primordial, pour certaines régions du monde.

Dans ce domaine, les protocoles de transactions, au travers des médiations environnementales homologuées, se sont fortement développées et peuvent représenter dans l'avenir, une des solutions à retenir pour éviter de recourir à la mise en œuvre judiciaire. Une autre vision du droit international de l'environnement s'applique alors.

Mais se pose alors la question de déterminer si la nature de la responsabilité juridique des états pour manquement au devoir de vigilance et de prévention des risques, doit être retenue, au même titre que celle de l'entreprise créatrice du dommage. La subtilité juridique doit donc s'affiner au gré des cadres réglementaires locaux, mettant en exergue en pratique une complexité juridique nouvelle.

Ainsi, la complexité, actuelle et à venir, est de reconnaître l'existence des dommages, le champ d'application des responsabilités des acteurs eux-même mais aussi de la société internationale dans son ensemble.

2. Une problématique liée à l'identification des sujets de droits victimes

Le droit international de l'environnement se retrouve aujourd'hui confronté à un autre problématique juridique. Celle-ci porte sur la requalification juridique d'un sujet de droit victime. En effet, la naissance de dommages environnementaux futurs génère des victimes futures, directes, ou par ricochet. Ainsi, dans les domaines de la santé publique, il faut identifier les victimes futures directes et par ricochet, pour toutes les expositions liées à l'ensemble de tous les produits polluants toxiques, et plus généralement, aux dangers sanitaires potentiels et futurs. Or, la liste de ces derniers est non exhaustive et exponentielle.

Si l'on reprend le cas indien de la ville d' Hazaribag405, la question repose alors sur toutes les victimes directes, êtres vivants, localement situées aux abords de la ville, mais aussi sur toutes les victimes par ricochet, touchées par l'exportation des crevettes alimentées par les déchets de cuir fournis par les usines de cuir de la ville. La problématique sanitaire revêt donc un aspect international car l'identification précise de tous les consommateurs de ces produits, qu'ils soient humains, végétaux ou animaux, à travers la traçabilité des lots vendus, serait difficile et très longue à établir. Cet exemple met en avant la complexité en la matière. Mais il a l'avantage d'établir l'existence d'une pluralité de victimes, reconnues et à venir. Ici, en l'espèce, le dommage écologique rejoint le dommage sanitaire mais n'établit pas, pour l'instant, la responsabilité de l'état indien, ni celle de l'exploitant du site industriel. Car la notion d'installations classées protection de l'environnement n'existe pas en droit indien, tout comme les normes Iso pourtant internationales.

D'autre part, se pose ici la problématique de l'identification réelle des victimes directes.

Seules les victimes, sujet de droit, sont reconnues. Cela ne concerne donc que les êtres humains. Et un être vivant non humain n'est pas reconnu comme sujet de droit, mais comme chose.

Or dans cet exemple, transcende un nombre incalculable d'éradication d'espèces vivantes, fauniques ou floristiques. Le problème repose alors sur la reconnaissance d'une identification globale des victimes par ricochet. L'environnement pollué autour du site des usines, est écologiquement mort, la décontamination des sols, sous-sols, de la rivière nécessite du temps et de l'argent. Cet exemple remet en évidence une réalité juridique qui dérange : les victimes, non sujet de droit sont plus nombreuses que les victimes sujets de droit.

Les enjeux liés à cette identification restent primordiaux car l'absence de prise en compte de ces victimes risque d'alourdir à court terme le nombre de victimes, sujet de droit.

Comme dernier exemple, peut-on citer l'utilisation des xénobiotiques406, reconnus comme risques majeurs pour l'environnement et l'homme407. Et se pose alors la question de déterminer le dommage environnemental, la victime et le lien de causalité à établir entre les micro-polluants, la destruction des sols et sous-sols arables et l'augmentation

405 Cf note n°328

406 Substances organiques persistantes toxiques, colloque journées établissements et environnement, clinique du Pont de Chaume, France, 31 mai 2012, compte rendu de 18 pages, page 2

407 CLINIQUE DU PONT DE CHAUME, colloque journées établissements et environnement, 31 mai 2012, compte rendu de 18 pages, page 3 et suivantes

de la stérilité chez l'homme, des cancers du sein chez la femme… Les effets d'une absorption quotidienne de nombreux produits, à de faibles concentrations seraient aujourd'hui méconnus. Les écotoxicologues cherchent à apporter des réponses à ces questions mais la difficulté résiderait dans l'évaluation de cet effet cocktail.

Cette première réflexion a permis de mettre en évidence le caractère insuffisant de rattachement des ressources naturelles au droit naturel, au vu des dispositions de la Charte Mondiale de la Nature du 28 octobre 1982 et de la Convention sur la Diversité Biologique du 5 juin 1992.

L'approche contemporaine juridique de la gestion mondiale des ressources naturelles permet donc de poser un regard nouveau sur la nécessité de reconnaitre et de prendre en compte sur le plan juridique de cette insuffisance, afin de mieux orienter le mode de gestion futur des ressources naturelles vers une meilleure prise en compte des enjeux actuels, et futurs.

Cette approche permet par voie de conséquence de réfléchir à un renforcement plus effectif des modes de responsabilité environnementale.

Afin de renforcer une responsabilité environnementale existante, en droit international et en droit interne, une analyse juridique portant sur la création d'une notion de besoin environnemental, sur l'élargissement de celles de dommage environnemental et de lien de causalité est alors judicieuse.

CHAPITRE II.

LE CARACTERE INADAPTE DE RATTACHEMENT AU