• Aucun résultat trouvé

L’explication par les modes de vie : célibat, monoparentalité, baisse de la fécondité

une forte baisse

2.3 L’explication par les modes de vie : célibat, monoparentalité, baisse de la fécondité

La progression des petits ménages en France et en Île-de-France est issue de la combinaison de plusieurs facteurs. Le vieillissement de la population n’étant pas le principal responsable, il s’agit avant tout de l’érosion des modes traditionnels de cohabitation (Jacquot, 2006) et de l’évolution de la natalité. Ces facteurs sont principalement la hausse du célibat et la mise en couple plus tardive, la baisse de la cohabitation avec les parents âgés, la hausse des séparations et de la monoparentalité, le recul de l’âge au premier enfant ainsi que la baisse de la fécondité (Courson et de Saboulin, 1985). Ces facteurs sont en partie identifiables avec les données du recensement. La hausse du célibat peut être mesurée par la part des ménages d’une personne. Celle-ci augmente avec les recensements, particulièrement chez les plus jeunes. Ainsi à 30 ans la probabilité de vivre seul passe de 17 % en 1968 à 40 % en 2012 en Île-de-France, et de 9 % à 32 % en France métropolitaine (Figure A.4 et Figure A.5).

La baisse de la fécondité peut quant à elle être approximée par la baisse du nombre d’enfants pour les ménages accueillant des enfants et par le nombre de ménages sans enfants (Tableau 1.2). Nous choisissons de nous concentrer sur une période du cycle de vie pour laquelle les enfants sont déjà nés et toujours dans le foyer (comme le montre la Figure 1.2).

25 1 −2,98−3,06

2,25−3,06= 90 % ou 2,98−3,06

2,25−3,06= 94 %. Ce calcul comporte bien sûr une part d’artificiel car l’une des

Tableau 1.2 – Fécondité chez les ménages entre 35 et 45 ans.

1968 1975 1982 1990 1999 2007 2012 Nombre d’enfants de moins de 18 ans par ménage ayant au moins un enfant.

France 2,09 2,07 1,92 1,85 1,86 1,86 1,87 Île-de-France 1,92 1,91 1,82 1,80 1,85 1,85 1,86 Pourcentage de ménages sans enfants

France 18,7 18,6 20,0 21,3 26,7 30,4 31,1 Île-de-France 30,8 29,8 32,5 35,7 37,5 38,8 39,0 Champ : ménages ordinaires

Source : recensements de la population 1968-2012, Insee ; calculs de l’auteur

Le nombre d’enfants diminue donc depuis 1968, mais de façon peu marquée, et connaît même une hausse depuis 1990 (Prioux et al., 2010). C’est la hausse du pourcentage de ménages sans enfants pour la même tranche d’âge qui est la plus significative. Le pourcentage de ménage entre 35 et 45 ans sans enfants gagne ainsi +13,4 p% en France et +8,2 p% en Île-de-France.

La monoparentalité (une personne de référence sans conjoint abritant au moins un enfant mineur) est également en forte progression (Tableau 1.3). La proportion de familles monoparentales au sein du parc des ménages double en Île-de-France au cours de cinq dernières décennies pour attendre une famille sur cinq, pourcentage retrouvé dans Daguet (2007).

Tableau 1.3 – Évolution de la part de familles monoparentales

1968 1975 1982 1990 1999 2007 2012 France métropolitaine 8 % 8 % 9 % 11 % 16 % 19 % 20 % Île-de-France 10 % 10 % 11 % 13 % 18 % 20 % 22 % Champ : ménages ordinaires abritant un enfant mineur

Source : recensements de la population 1968-2012, Insee ; calculs de l’auteur

À l’inverse, les ménages complexes sont en diminution en Île-de-France (Tableau A.2). Il s’agit par exemple des ménages multifamiliaux, ou composés d’une famille et d’individus isolés (Daguet, 2007). La part de ces ménages passe ainsi de 10 % à 6 % en Île-de-France entre 1968 et 2012. Les ménages composés de plusieurs générations baissent fortement tandis que les ménages de personnes en colocations sont en hausse depuis 199926.

En sus des éléments précédents, on constate également au cours des quarante dernières années un report de certains épisodes biographiques pouvant contribuer à la baisse de la taille des ménages. C’est le cas par exemple de la première naissance. L’âge de la P.R. à l’arrivée du premier

26 Les ménages composés de plusieurs générations sont identifiés par la présence à la fois d’un ascendant

et d’un descendant (enfant ou petit-enfant) de la P.R. dans le ménage. Les colocations sont repérées par la présence exclusive d’amis ou de parents (hors ascendants, enfants et petit-enfants) de la P.R. et de son conjoint (lorsqu’il existe). L’inclusion des « autres parents » vise notamment à inclure les éventuelles fratries. Ces deux définitions n’épuisent pas la réalité des modes de cohabitation mais permettent de repérer les tendances parmi les ménages dits complexes. De plus le terme colocation est ici utilisé indépendamment du statut d’occupation.

enfant recule significativement au fil des recensements, passant de 27 ans en 1968 à 32,1 ans en 2012 en Île-de-France, et de 26,5 à 30,8 ans en France (Tableau A.3). Ce recul allonge la période au cours de laquelle le ménage est sans enfants. Si à court terme cela se traduit par une baisse de la taille des ménages, l’effet devrait s’estomper sur le long terme puisqu’il implique in fine un recul du départ des enfants du domicile familial et donc a priori un effet neutre sur la taille moyenne des ménages.

Enfin, seul phénomène jouant potentiellement dans un sens opposé à la baisse de la taille des ménages, la décohabitation des jeunes adultes a lieu de plus en plus tard en Île-de-France (Tableau A.4). Ainsi en 1975, 24 % des 18-24 ans sont P.R. de leur ménage et 48 % sont des enfants de P.R. En 2012, le premier chiffre chute à 15 % en 2012 et le second augmente jusqu’à 71 %, indiquant clairement que cette tranche d’âge vit plus longtemps chez leurs parents.

La comparaison avec la France est à ce titre très instructive, le phénomène inverse y étant observé, bien que de manière moins prononcée. La part de jeunes Français considérés comme P.R. augmente à partir de 1982 (+6 p% ), tandis que le pourcentage d’entre eux habitant chez leurs parents est assez stable mais orienté à la baisse depuis 1999 (-6 p% sur 13 ans). Ces trajectoires opposées entre l’Île-de-France et la France métropolitaine semblent dans une certaine mesure refléter les difficultés rencontrées par les Franciliens pour trouver une habitation abordable au sortir du logement familial (voir Chapitre 3). D’autres facteurs ne sont cependant pas à exclure, notamment la densité d’établissements universitaires dans la région, permettant aux enfants de rester plus facilement chez leurs parents.