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3.3 Méthodes de collecte des données

3.3.6 L’entrevue non directive centrée

Comme le dit si bien Fassin (2000c), « les techniques qualitatives peuvent […] avoir cette

double fonction d’identifier l’impondérable et de dévoiler l’invisible » (p. 128). Voilà

pourquoi les entrevues non directives centrées nous permettent de questionner en profondeur les différents acteurs constituant les groupes stratégiques, de répondre à notre question de recherche et d’avancer dans l’élucidation de nos hypothèses de départ.

Les entrevues individuelles centrées peuvent avoir quatre buts : la découverte, la compréhension, l’apprentissage et l’émancipation (Gauthier 1997). Nous nous situons dans la deuxième catégorie puisque l’entrevue nous a permis d’explorer en profondeur la réalité de la notion de justice sociale au regard de la problématique de la mise en œuvre de l’IB dans le district, tout en ayant offert aux individus la possibilité d’exprimer leur perception de façon individuelle. Nous limitons ainsi la pression du milieu qui pouvait s’exercer lors d’entrevue de groupe. Les entrevues ont été non directives centrées, c’est-à-dire orientées à l’aide d’un guide préalablement construit. Compte tenu du contexte particulier de l’étude, notre guide a été revu localement à l’aide des commentaires d’un sociologue burkinabé pour l’adapter à la culture locale. Les questions ont été préalablement préparées en fonction des informations particulières que nous souhaitions récolter, mais l’entrevue laissait largement la place à l’approfondissement de thèmes particuliers émergeant au cours de l’entretien (Paillé 1991). L’intérêt particulier de ce type de questionnement est qu'il nous a permis de recueillir des données relativement uniformes entre les entrevues, mais qu’il a laissé malgré tout, la place à « l’improvisation ». Le sujet traité étant assez complexe, guider les personnes nous semblait essentiel afin de leur permettre de répondre aux questions de façon plus précise. Une entrevue trop ouverte ne nous aurait pas permis de collecter suffisamment d’informations valides. Les personnes intéressées ont participé à l’entrevue, après avoir pris connaissance des objectifs de l’étude.

Puisque la compréhension de la participation des quatre groupes stratégiques et de leurs interactions est essentielle pour répondre à notre question de recherche, nous avons privilégié la comparaison intergroupe au détriment d’une saturation empirique intragroupe.

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Nous mettons donc l’accent sur la diversification externe et le contraste (Pires 1997). Ajoutons que, fidèle au principe de l’échantillon par homogénéisation, puisque nos groupes sont bien définis, nous avons sélectionné les individus les plus différents possibles (principe de diversification interne) à l’intérieur de ces mêmes groupes afin d’accroître notre capacité à comprendre le point de vue des acteurs d’une façon globale. Ayant un accès privilégié à l’arène de notre recherche, les sujets retenus l’ont été pour leur accessibilité (Patton, 1980, cité par Deslauriers et Kérisit 1997), tout en respectant les critères que nous venons d'évoquer. La répartition des répondants, correspondant ainsi à ce que nous pourrions nommer un échantillon heuristique, est présentée à la figure 35, étant entendu, par exemple, qu’un responsable peut être également un agent. La sélection des personnes interrogées a été réalisée après une minutieuse identification des personnes les plus pertinentes pour chacune des catégories d’acteurs. Cela a été possible grâce à notre intégration dans le milieu, à la rencontre de dizaines d’acteurs et aux conseils de plusieurs autres. Les entrevues individuelles n’ont démarré qu’au quatrième mois de notre présence sur le terrain. Certains acteurs de la catégorie des responsables auraient pu être insérés dans celle des agents puisqu’ils sont des fonctionnaires du ministère de la Santé. Cependant, le contexte particulier du Faso nous a donné la possibilité de les interroger plutôt en tant que responsables, et cela pour deux raisons. D’abord, les politiciens burkinabé ne sont pas très au fait des politiques de santé et ne sont pas souvent impliqués dans leur implantation. La politique étudiée ne relève pas d’une décision législative. Ensuite, les fonctionnaires du niveau central (directeurs de services) que nous avons insérés dans la catégorie des responsables sont, bien souvent dans ce pays (et ailleurs), à ce poste pour des raisons liées à leurs engagements politiques. La politisation de l’administration burkinabé est bien connue et a encore été récemment dénoncée par le Comité d’éthique national (2003). En ce qui concerne les particuliers, l’approche a été la suivante. Nous avons d’abord décidé de choisir des utilisateurs des services de santé, mais aussi des non utilisateurs. Les deux utilisateurs ont été choisis aléatoirement au sein des personnes fréquentant deux centres de santé lors de deux journées différentes et dans deux régions diamétralement opposée au sein du DS. Un non utilisateur a été choisi dans un village par l’intermédiaire du RAV alors qu’une non utilisatrice a été identifiée grâce à un groupement féminin d’une ville. De plus, la présence

d’indigents dans l’échantillon nous paraissait indispensable. Ainsi, une indigente a été sélectionnée à l’aide du responsable du service social du CHR et un indigent avec la collaboration d’un major de CSPS rural puisqu’il avait déjà reçu une exemption de paiement des soins. Ainsi, trois hommes et trois femmes ont fait partie de l’échantillon des particuliers.

Tableau 23 : Les répondants aux entrevues individuelles

SEXE PROFESSION FORMATION

M Responsable ONG Médicale

M Chef d'entreprise/Pt Comité gestion ?

M Eleveur/Pt Comité gestion Ecole coranique

M Gérant DMEG Terminale

M Superviseur ONG BTS

INTÉRESSÉS

M Responsable programme Nations Unies Médicale

M Agriculteur Ecole rurale

M Agriculteur - F Vendeuse - F Vendeuse - F Vendeuse CM2 PARTICULIERS M Agriculteur CE2 M Consultant Médicale M Directeur Médicale M Député Doctorat RESPONSABLES M Conseiller Médicale M Infirmier CSPS IDE M Infirmier CSPS IDE M Médecin Médicale M Infirmier CSPS IDE M Pharmacien Licence AGENTS M Pharmacien Pharmacien

Notes : M = masculin ; F = féminin ; pour des raisons éthiques le moins d’informations possibles est donné Source : auteur

La parité homme/femme a été recherchée dans la sélection des interviewés, mais cela n’a été possible que pour la catégorie des intéressés. En effet, pour les autres catégories d’acteurs, ce ne sont bien souvent jamais des femmes55! Une répartition géographique entre

les différents centres de santé du district a aussi été recherchée dans la sélection des

55 En juin 2000, on estime le nombre de femmes travaillant dans l’administration burkinabé à 11206 alors que

les hommes sont au nombre de 33110, de même on constate la présence de 9 femmes parlementaires contre 102 hommes (PNUD 2000), voir tableau en annexe. Le 15 septembre 2003 a eu lieu une réunion entre tous les ICP du DS et l’ECD. Une seule femme était présente et par interim puisqu’elle est venue remplacer l’ICP qui n’a pas pu se libérer pour des raisons d’ordre personnel (observation de l’auteur).

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participants. Si le tableau précédent ne fournit pas beaucoup d’indication sur les caractéristiques des personnes interrogées c’est parce que nous avons affaire à un milieu très réduit et de telles indications pourraient faciliter la reconnaissance des participants à notre recherche.

L’ensemble des entrevues des personnes appartenant au groupe des intéressés a été réalisé en langue locale, le Moore, par un sociologue burkinabé. Il a réalisé les entrevues à l’aide d’un canevas produit par l’étudiant-chercheur et adapté préalablement en collaboration avec le sociologue. Toutes les autres entrevues ont été effectuées par l’étudiant-chercheur en français.

3.4 Type d’analyse