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L’emploi et la croissance sont-ils indissociables?

Dans le document PERSPECTIVES DE L ÉCONOMIE MONDIALE (Page 185-190)

Synthèse : quels sont les éléments qui ont favorisé le renforcement de la résilience?

Encadré 4.1. L’emploi et la croissance sont-ils indissociables?

–0,5 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 0 2 5 7 9 11 14 16

Pays avancés Pays émergents

et en développement

Pays avancés Pays émergents

et en développement 1. Variation du nombre de chômeurs

(en millions)

2. Variation du taux de chômage (en points de pourcentage)

Source : calculs des services du FMI.

Graphique 4.1.1. Tendances divergentes du marché du travail à l’échelle mondiale, 2007–11

Les auteurs de cet encadré sont Davide Furceri et Prakash Loungani, avec le concours de Jair Rodriguez et Hites Ahir en matière de recherche.

par rapport à son taux naturel et l’écart de la produc-tion par rapport à son potentiel : 

ut – ut* = a(yt – yt*) + erreurt, (4.1.1) où u et le taux de chômage, y est le logarithme de la production, et * indique un niveau (taux naturel ou potentiel) à long terme. L’équation (4.1.1) repose sur l’hypothèse selon laquelle les variations de la demande globale provoquent des fl uctuations de la production, lesquelles amènent à leur tour les entreprises à engager ou à licencier des salariés. Le terme d’erreur rend compte des facteurs qui infl uent sur la relation chô-mage–production, comme les variations inhabituelles de la productivité et ou de la participation au marché du travail. Pour mesurer u*, le taux naturel de chô-mage, et y*, la production potentielle, nous lissons les séries pour u et y au moyen du fi ltre Hodrick-Prescott.

Nous estimons également une version de la loi d’Okun en diff érences premières :

ut – ut–1= c + a(yt – yt–1) + erreurt. (4.1.2) Dans ce cas, la variation du chômage est fonction de celle de la production et d’une constante. Cela découle de l’équation (4.1.1) si le taux naturel u* est constant et que la production potentielle progresse au taux constant c/a. Il se peut que, pour beaucoup de ces pays, ces hypothèses ne soient pas raisonnables en raison d’une variation dans le temps de u* et des accé-lérations et ralentissements de la croissance. Comme indiqué dans le corps du texte, la production n’y revêt pas souvent la forme de «pentes douces», mais plutôt de «montagnes, falaises, plateaux et plaines». Néan-moins, les deux spécifi cations (niveaux et diff érences premières) font apparaître une robustesse des résultats aux hypothèses de remplacement concernant les ni-veaux de la production et du chômage à long terme1.

1Nous avons aussi conduit d’autres tests de robustesse. Dans la spécifi cation des niveaux — équation (4.1.1) —, nous avons assigné au paramètre de lissage du fi ltre de Hodrick-Prescott des valeurs de 100 et de 12 (la seconde étant proposée par Rand et Tarp, 2002, pour les pays en développement). Les résul-tats étant très semblables, nous limitons ici notre examen au paramètre de 100. S’agissant de la spécifi cation des diff érences premières — équation (4.1.2) —, nous avons également testé une version comportant une tendance temporelle et l’évolution décalée du chômage. Les résultats de ces spécifi cations sont très similaires à ceux de la spécifi cation de référence, aussi n’en rendons-nous pas compte ici.

L’utilité des taux de chômage en tant qu’indica-teur du tassement du marché du travail dans les pays émergents et en développement est souvent mise en doute. L’un des arguments avancés est que nul ne peut se permettre d’être au chômage dans les pays à faible revenu; tout le monde exerce une activité, que ce soit dans le secteur rural ou à titre indépendant. Un autre est que bon nombre de ces pays possèdent de vastes secteurs informels, de sorte que les statistiques du chômage et de l’emploi n’ont guère de pertinence (Agénor et Montiel, 2008; Singh, Jain-Chandra et Mohommad, 2012).

Pour examiner le premier de ces points, nous esti-mons également une version de la loi d’Okun en pre-nant l’emploi comme variable dépendante :

et – et–1= c + a(yt – yt–1) + erreurt, (4.1.3) où e et le logarithme de l’emploi. Nous aborderons le deuxième point plus loin, lorsque nous examinerons la relation entre les coeffi cients d’Okun et le degré d’informalité.

La loi d’Okun dans les pays émergents et en développement : les faits observés2

Nous utilisons les chiff res de l’emploi, du chômage et du PIB réel de 80 pays entre 1980 et 2011, mais la longueur des séries chronologiques varie selon les pays.

Nous présentons également les résultats d’un sous-ensemble de pays pour lesquels on dispose de données couvrant au minimum 30 ans.

Les résultats confi rment la validité de la loi d’Okun pour la plupart des pays, même si la solidité de la rela-tion varie. Le graphique 4.1.2, plage 1, illustre la dis-tribution des coeffi cients d’Okun au moyen de l’équa-tion (4.1.2). Comme indiqué, les estimal’équa-tions sont comprises entre de faibles valeurs positives et –0,8, la majorité se situant entre –0,2 et –0,4. La distribution est très semblable pour le groupe de pays pour lesquels on dispose de séries chronologiques plus longues. L’es-timation des spécifi cations de niveaux (équation 4.1.1) fournit des résultats similaires sur le plan qualitatif; la corrélation de rang entre les deux jeux de coeffi cients d’Okun est de 0,6. Avec l’emploi comme variable dépendante, les estimations s’inscrivent dans une

2Cette section s’inspire des travaux de Ball et al. (à paraître).

Encadré 4.1. (suite)

fourchette comprise entre de petites valeurs négatives et 0,8 (graphique 4.1.2, plage 2). La corrélation de rang avec les estimations utilisant le chômage comme variable dépendante est de –0,6.

En résumé, quelle que soit la spécifi cation retenue parmi les trois mentionnées, il existe une relation signifi cative à court terme entre les fl uctuations de la production et les évolutions du marché du travail.

Le tableau 4.1.1 compare la valeur moyenne du coeffi cient d’Okun et la réactivité de l’emploi dans les pays avancés à ceux des pays émergents et en dévelop-pement. À l’évidence, la relation à court terme entre l’évolution du marché du travail et la production est dans l’ensemble plus faible dans les seconds que dans les premiers.

Prise en compte des diff érences entre les pays3 Nous examinons également certains des facteurs qui expliquent la variation des coeffi cients d’Okun selon les pays. Comme indiqué, de nombreux pays émergents et en développement se caractérisent par l’existence de vastes secteurs informels. Intuitivement, ces pays devraient affi cher un coeffi cient d’Okun plus faible — autrement dit, le chômage devrait moins réagir à une variation donnée de la production (gra-phique 4.1.3, plage 1). Ball et al. (à paraître) rendent compte, pour les pays avancés, d’une relation positive entre le coeffi cient estimé d’Okun et le niveau moyen de chômage : dans les pays où le chômage est globale-ment supérieur, il fl uctue aussi davantage en réponse aux variations de la production. Bien que la raison ex-pliquant cette relation ne soit pas évidente, nous obser-vons une corrélation similaire pour les pays émergents et en développement (graphique 4.1.3, plage 2).

De récentes études ont sondé la réactivité de l’emploi à la production (Crivelli, Furceri et Toujas-Bernaté, à paraître; Ahmed, Guillaume et Furceri, 2012). Elles indiquent que cette sensibilité pourrait être fonction de caractéristiques telles que la souplesse des marchés du travail et des produits. Ainsi, dans leur étude des réglementations gouvernant l’embauche et le licenciement dans les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, Ahmed, Guillaume et Furceri (2012) avancent que ces règlements dissuadent «les entreprises de recruter face à une évolution favorable de la conjoncture économique». En d’autres termes, une protection renforcée de l’emploi peut freiner l’embauche et le licenciement en fonction des varia-tions de la production, réduisant ainsi sa réactivité.

3Les données relatives à l’informalité utilisées ici sont tirées de Schneider (2004) et de Schneider, Buehn et Montenegro (2010).

Les indicateurs de la souplesse du marché du travail et de celui des produits sont décrits dans Crivelli, Furceri et Toujas-Bernaté (à paraître).

Encadré 4.1. (suite)

0 5 10 15 20 25 30

–0,19 –0,06 0,07 0,20 0,32 0,45 0,58 0,71 0 4 8 12 16 20 24 28

–0,88 –0,76 –0,63 –0,51 –0,39 –0,26 –0,14 –0,01 'LVWULEXWLRQGHVFRHIƂFLHQWVGp2NXQ

(en pourcentage)

Source : calculs des services du FMI.

'LVWULEXWLRQGHODUÆDFWLYLWÆGHOpHPSORL (en pourcentage)

*UDSKLTXH 'LVWULEXWLRQGHVFRHIƂFLHQWV GHODORLGp2NXQHWUÆDFWLYLWÆGHOpHPSORLt

Tableau 4.1.1. Relation à long terme entre les évolutions du marché du travail et la croissance, par groupe de pays

Coefficients d’Okun (équation 4.1.1)

Coefficients d’Okun (équation 4.1.2)

Réactivité de l’emploi (équation 4.1.3)

Pays avancés –0,39 –0,33 0,49

Pays émergents et en

développement –0,17 –0,29 0,20

Source : calculs des services du FMI.

Encadré 4.1. (suite)

Le graphique 4.1.3, plages 3 et 4, laisse entendre que l’assouplissement des marchés du travail et des pro-duits peut eff ectivement être corrélé à une plus forte sensibilité de l’emploi.

Le tableau 4.1.2 rend compte des estimations par les moindres carrés pondérés (MCP) de ces déter-minants des coeffi cients d’Okun et de la réactivité de l’emploi4. Les résultats présentés dans les deux

4Nos variables dépendantes étant fondées sur des estimations, la variable dépendante est mesurée avec des degrés de précision diff érents selon les pays; c’est pourquoi nous utilisons un estimateur des moindres carrés pondérés. Celui-ci suppose notamment que les erreurs εt sont distribuées selon la formule suivante εi ~ N(0, σ2

÷ si), où si est l’écart-type estimé des coeffi cients d’Okun résiduels

premières colonnes confi rment que les coeffi cients d’Okun dépendent de l’ampleur du secteur informel et du taux de chômage moyen, comme l’indique le graphique 4.1.3, plages 1 et 2. Les quatre autres régressions mentionnées dans le tableau examinent les déterminants de la sensibilité de l’emploi. L’informa-lité infl uence cette dernière, mais le taux de chômage moyen n’a pas d’eff et signifi catif. L’assouplissement du marché du travail et celui du marché des pro-duits augmentent tous deux la réactivité de l’emploi.

Néanmoins, quand ils sont intégrés ensemble dans la régression, seuls les eff ets de la fl exibilité du marché des produits sont statistiquement signifi catifs5. Conséquences pour l’action publique

Les diffi cultés structurelles auxquelles sont confrontés les marchés du travail dans les pays émergents et en développement font à juste titre l’objet d’une grande attention. Le taux de chômage, notamment celui des jeunes, demeure dramatiquement élevé dans beaucoup d’entre eux. D’autres font face au défi d’augmenter la participation au marché du travail, surtout celle des femmes. Les conclusions de cet encadré sont favorables à des politiques visant à résoudre ces problèmes structu-rels : la relation cyclique entre l’emploi et la croissance est plus faible, en moyenne, dans les pays émergents et en développement que dans les pays avancés.

Dans le même temps, la relation signifi cative constatée dans de nombreux pays laisse entendre qu’il ne faut pas faire abstraction des facteurs cycliques.

Les mesures de soutien à la demande globale qui ali-mentent la croissance de la production à court terme peuvent également favoriser la reprise des marchés du travail. Les résultats font aussi apparaître un rapport entre les facteurs cycliques et structurels. La solidité de la relation à court terme entre l’emploi et la croissance est fonction de caractéristiques structurelles natio-nales comme l’informalité et le degré de fl exibilité du marché des produits. Les données indiquent qu’avec la réduction du secteur informel et l’assouplissement des marchés des produits, cette relation se renforcera.

(ou réactivité de l’emploi) pour chaque pays i, et où σ2 est un para-mètre inconnu estimé dans la régression de deuxième degré.

5Nous ne trouvons pas d’éléments probants d’une relation signifi cative entre la souplesse des marchés du travail et des pro-duits et les coeffi cients d’Okun, ce qui correspond aux observa-tions de Ball et al. (à paraître) pour les pays avancés.

–0,6 –0,4 –0,2 0,0 0,2 0,4

0 10 20 30 40

Taux moyen de chômage (en pourcentage)

–0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8

3 5 7 9

Flexibilité du marché des produits (indice; 0–100) –0,2

0,0 0,2 0,4 0,6 0,8

2 4 6 8 10

Flexibilité du marché du travail (indice; 0–100)

3. Réactivité de l’emploi 4. Réactivité de l’emploi –0,6

–0,5 –0,4 –0,3 –0,2 –0,1 0,0 0,1

0 20 40 60 80

Informalité (indice; 0–100)

&RHIƂFLHQWV Gp2NXQ

&RHIƂFLHQWV Gp2NXQ

Source : calculs des services du FMI.

Note : L’indice d’informalité est tiré de Schneider (2004) et de Schneider, Buehn et Montenegro (2010). Les indicateurs de la ƃH[LELOLWÆGHVPDUFKÆVGXWUDYDLOHWGHVSURGXLWVVRQWGÆFULWVGDQV Crivelli, Furceri et Toujas-Bernaté (à paraître).

*UDSKLTXH /RLGp2NXQHPSORL HWSURGXFWLRQGDQVOHVSD\VÆPHUJHQWV HWOHVSD\VHQGÆYHORSSHPHQW

Encadré 4.1. (fi n)

Tableau 4.1.2. Déterminants des coeffi cients d’Okun et de la réactivité de l’emploi

Coefficients d’Okun

Réactivité de l’emploi Spécification

niveaux

Spécification variations

(1) (2) (3) (4) (5) (6)

Informalité 0,0027***

(0,0009)

0,0044**

(0,0021)

–0,0034**

(0,0014)

–0,0058***

(0,0014)

–0,0034***

(0,0013)

–0,0044***

(0,0014) Taux de chômage moyen –0,0094***

(0,0030)

–0,0131***

(0,0047)

0,0027 (0,0049)

–0,0003 (0,0048)

0,0057 (0,0046)

0,0031 (0,0047)

Flexibilité du marché du travail 0,0390**

(0,018)

0,0083 (0,43) Flexibilité du marché des

produits

0,0727***

(0,0222)

0,0747***

(0,0250)

R2 0,20 0,14 0,09 0,28 0,30 0,38

N 67 67 67 56 58 55

Source : calculs des services du FMI.

Note : Les statistiques-t sont indiquées entre parenthèses; * signifi catif au niveau de 10 %, ** au niveau de 5 % et *** au niveau de 1 %.

Nous analysons ici l’infl uence éventuelle d’un ralen-tissement de l’invesralen-tissement en Chine sur la croissance d’autres pays émergents et en développement. Au cours de la décennie écoulée, le modèle de croissance chinois est devenu de plus en plus tributaire de l’inves-tissement. Ce dernier a contribué pour 50 % environ à la croissance du PIB national dans les dix premières années du siècle, et tout particulièrement vers la fi n de la décennie (graphique 4.2.1, plage 1). Ce phénomène tient en partie à la forte augmentation de l’investis-sement dans l’infrastructure intervenue dans le cadre des mesures de relance adoptées en 2008–10 face à la Grande Récession. Il apparaît cependant que d’autres facteurs exercent une infl uence grandissante sur la croissance de l’investissement, notamment le processus d’urbanisation en cours, la priorité récemment donnée à la construction de logements sociaux et le renforce-ment des capacités dans le secteur manufacturier haut de gamme et dans celui des services.

Cette évolution s’accompagne d’une transforma-tion fondamentale de la compositransforma-tion des importa-tions chinoises. Compte tenu du développement de l’industrie manufacturière nationale, la part des importations de machines a progressivement reculé, celle des importations de minerais et de métaux enregistrant en revanche une progression régulière (graphique 4.2.1, plage 2).

Ces mutations ont eu des répercussions notables sur les fl ux d’échanges mondiaux au cours des dix der-nières années, une part grandissante des exportations des partenaires commerciaux étant destinée à la Chine (graphique 4.2.2, plage 1). Dans plusieurs pays, la part des exportations vers la Chine marque une progression encore plus prononcée lorsqu’elle est rapportée au PIB du pays exportateur. Ce rapport a globalement qua-druplé en 2001–11 (graphique 4.2.2, plage 2).

Les courbes indiquent que l’expansion rapide de l’investissement chinois a pu avoir des retombées positives appréciables sur la croissance des partenaires commerciaux. Néanmoins, dans la mesure où les inves-tissements représentent déjà près de 50 % de la produc-tion et où la Chine continue d’y recourir pour stimuler la croissance, il est diffi cile de dire si la nouvelle capacité sera rentable. Une interruption brutale et désordonnée

de cette vague d’investissements, même s’il s’agit d’un risque extrême, pourrait avoir des eff ets préjudiciables sur les partenaires commerciaux de ce pays.

Pour apprécier l’ampleur éventuelle de cette dyna-mique, nous mesurons l’eff et d’entraînement de l’activité d’investissement en Chine sur les partenaires commerciaux par le produit des exportations d’un pays vers la Chine (en pourcentage du PIB) et de l’augmentation de l’investissement fi xe chinois1.

1On défi nit plus précisément cet eff et sous la forme suivante : Eff et d’entraînement de la Chinej,t = exCHNj,t × croissance

de l’investissement fi xe chinoist, (4.2.1)

Exportations vers la Chine exCHNj = ——————————j

, PIB

et croissance de l’investissement fi xe chinoist est la variation an-nuelle (en pourcentage) de la formation brute réelle de capital fi xe provenant des comptes nationaux.

Encadré 4.2. En quoi le ralentissement de l’investissement en Chine infl uerait-il

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