ARDECHE Sexe Age Situation
I.1. Deux territoires ruraux, appartenant au rural isolé, restant très marqués par l’activité agricole
I.1.2. Deux territoires ruraux contrastés mais comparables, appartenant au rural isolé, très vieillissants
I.2.1.1. L’aide à domicile : des services limités aux personnes peu handicapées
Sur chacun des territoires, les services d’aide à domicile se sont développés. La fédération nationale de services à la personne « Aide à Domicile en Milieu Rural » (ADMR) a été active dans le développement de ces services, forte de son réseau national
35 Ces services sont ceux qui se sont mis en place à partir des années 70 à la suite des préconisations du rapport
Laroque et plus tard dans les années 80 dans une logique de médicalisation de la prise en charge de la vieillesse avec notamment le développement des soins à domicile et des maisons de retraite médicalisées.
et de son mode d’organisation, bien adapté jusque là aux habitudes de vie en milieu rural.
En effet, ce sont des bénévoles qui gèrent, dans le cadre de l’ADMR, les équipes d’aide à domicile, de même qu’ils évaluent les demandes et organisent la réponse aux besoins et aux demandes décelés. Les valeurs support de l’ADMR renvoient aux modes de solidarités en milieu rural et l’objectif est de mobiliser la communauté locale autour des personnes âgées en difficulté.
Cependant, sur le territoire ardéchois, une autre association développe également les services de l’aide à domicile. Il s’agit d’une association « fille » de l’UNRPA, fédération nationale développée en 1945 sous l’impulsion du parti communiste. L’existence de ces deux associations de services d’aide à domicile repose donc sur des marquages locaux historiques et idéologiques et les territoires d’intervention de chacune de ces associations sont aussi définis en fonction des orientations politiques des maires des communes.
De même, sur le territoire creusois, une autre association intervient, l’ADESSA36 également affiliée à une structure nationale. Là encore, cette association a longtemps fonctionné avec des bénévoles. Sa professionnalisation correspond au développement du nombre de personnes aidées et à l’embauche de plus nombreux personnels.
En tout état de cause, le fonctionnement de ces associations repose sur un fort bénévolat et sur quelques personnes très impliquées localement, également dans d’autres secteurs de la vie locale. Les responsables des aides à domicile sont le plus souvent des retraités qui investissent fortement dans cette activité au service des autre. « bon, chaque jour je pense, chaque jour on avait…on recevait d’abord des coups de fils, et puis chaque jour on était obligé de se tenir à jour de, parce que nous avions une liste, à un moment donné, on en avait 200, 230. Euh, donc on s’occupait énormément de ces personnes, il fallait aller visiter les personnes pour savoir les capacités qu’elles avaient (…) et pourtant on était content quand on apporte quelque chose à quelqu’un c’est une joie, c’est… » (Madame Bardin, 07,3)
Le nombre de bénéficiaires des services d’aide à domicile est relativement peu élevé au regard du pourcentage de personnes de plus de soixante‐quinze ans dans la population locale. Différents éléments sont avancés par les responsables pour justifier ce faible recours aux services existants : une habitude de fonctionner seul, même dans la difficulté, de moindres exigences individuelles en matière de propreté et d’hygiène, les
36 L’origine de l’ADESSA remonte au début des années 1940, avec la création des Associations Populaires de l’Aide
Familiale. L’ADESSA a pris sa forme actuelle en 2001. ADESSA vient du latin « adesse » qui signifie « être à côté de »
solidarités familiales et de voisinage et le refus de communiquer des éléments financiers pour établir les dossiers d’intervention. Une des personnes interviewées évoque bien ce recours prioritaire aux solidarités informelles : « les repas à domicile s’il y a besoin mais ici il y a pas beaucoup de gens qui les prennent parce qu’il y a toujours les enfants à côté, et puis les soins à domicile quand il y a besoin…(…) Même Alexis et Mathilde, lui il va avoir 90 ans, il conduit encore, ils vont faire leurs courses encore eux, ils ont pas de problèmes et nous on peut rendre service si il y a besoin, en face c’est pareil, eux il y a les enfants qui viennent presque tous les jours. » (Madame Dutel, Creuse 1)
La particularité de ces services d’aide à domicile se situe dans le profil des intervenants. Ce sont pour la plupart des femmes, localement bien implantées et qui ne souhaitent pas travailler sur des temps complets. En conséquence, la gestion des personnels se complexifie du fait de la multiplicité de temps de travail très partiels. Par ailleurs, comme le souligne l’une des responsables de services, la question de la formation est cruciale. Ces salariées à temps partiel ne souhaitent pas s’engager dans des processus de formation et en conséquence, elles sont très peu armées pour faire face à des situations de dépendance lourdes, dans le cadre du dispositif de l’Allocation Personnalisée d’Autonomie.
L’aide à domicile est donc dans ces territoires ruraux essentiellement consacrée à l’accomplissement des tâches matérielles de la vie quotidienne et ne concerne que des personnes âgées relativement peu dépendantes. Lorsqu’une plus forte dépendance s’installe, l’orientation en établissement est quasi‐systématique. On retrouve ici de façon accentuée les limites du maintien à domicile qui s’expriment lorsque la professionnalisation des intervenants auprès des personnes n’est pas aboutie et lorsque le manque de cohérence et de coordination entre les acteurs fait problème. (Ennuyer, 2006).
I.2.1.2. Des soins inégalement assurés sur les territoires.
Sur le territoire creusois, l’offre de soins à domicile est importante. En effet, deux services de soins à domicile co‐existent avec l’intervention libérale qui repose sur 11 Infirmières Diplômée d’Etat (IDE). Le premier service crée en 1987 est agrée pour 62 lits, et couvre deux cantons. Il emploie dix aide‐soignantes et la direction du service est assurée par une IDE. L’attente est longue de plusieurs semaines pour bénéficier de ce service de soins à domicile qui gère difficilement une liste d’attente permanente. L’autre service relève de la Mutualité Sociale Agricole (MSA), couvre tout le département de la Creuse et s’adresse plus spécifiquement aux anciens agriculteurs.