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Des familles très présentes

Dans le document Vieillir en milieu rural (Page 98-100)

ARDECHE Sexe Age Situation 

I. 3.3.2.3 L’entraide et la solidarité

II.2  Des sociabilités de voisinage différenciées selon les lieux, selon les personnes et leur histoire de vie 

II.3.1.  Un modèle dominant dans les territoires étudiés : la famille entourage‐ locale

II.3.1.1.  Des familles très présentes

locale.  

 

II.3.1.1. Des familles très présentes    

En  Ardèche  comme  en  Creuse,  la  famille  est  souvent  très  présente  ce  qui  tient  à  deux  éléments difficilement dissociables : 

 Vie privée et travail ont été toujours fortement imbriqués ce qui conduit parfois à  des  équilibres  fragiles  et  des  situations  difficiles  dans  la  mesure  où  comme  l’explique  Alice  Barthez,  calcul  économique  et  relations  personnelles  peuvent  s’opposer42.  Dans  bien  des  cas,  les  plus  fréquents  de  ceux  que  nous  avons  rencontrés,  on  retrouve  la  solidarité  si  souvent  évoquée,  l’entraide  étant  une  nécessité  à  certaines  périodes  de  l’année où l’on avait besoin des autres pour affronter les coups durs, les surcharges de  travail comme partager les bons moments de la vie. Madame H. a perdu son mari jeune,  elle  avait  alors  trois  petits  enfants,  son  frère  est  venu  la  rejoindre  pour  l’aider  sur  l’exploitation. 

En  Ardèche  comme  en  Creuse,  ceux  qui  ont  été  agriculteurs  (5  sur  les  12  personnes  rencontrées sur chaque territoire) ont travaillé très tôt pour aider leurs parents. « On n’a  fait que travailler à la ferme, pas de sorties, pas de congés…quand j’avais des congés, c’était pour  travailler  à  la  ferme,  pour  aider  les  parents…. »  (Monsieur  Lassagne  R,  07,  1).  «   Je  rentrais  à’école au mois d’octobre à l’époque, et je finissais à Pâques, parce qu’il fallait travailler avec les  parents, surveiller les bêtes » (Monsieur Lassagne J, 07, 1). Le récit des frères B. illustre aussi  bien  cette  vie  paysanne  telle  qu’elle  existait  il  y  a  40  ou  50  ans.  « Moi,  je  préférais  la  vie  qu’on  avait  malgré  les  difficultés.  Il  fallait  travailler,  il    fallait  garder  mais  on  s’amusait.  Nos  parents, ils avaient pas les sous pour nous faire vivre, alors il fallait travailler, moi j’étais loué  pour  garder  les  vaches  l’été  jusqu’à  la  fin  octobre...  mais  ça  nous  faisait  rien,  on  était  content…Ici, il y a 50 ans, c’était joli, on voyait pas de genêts, il y avait du blé partout, c’était  propre comme tout ». (07,01) 

La référence à la famille est souvent très forte. Tous parlent de leurs parents, du travail  sur  l’exploitation  souvent  difficile  dans  la  mesure  où  il  s’agissait  le  plus  souvent  de  petites  exploitations  pratiquant  la  polyculture‐élevage  et  dont  l’objectif  essentiel  était  d’assurer la vie de la famille et sa reproduction.  

42 Barthez A., GAEC en rupture : à l’intersection du groupe domestique et du groupe professionnel in Weber F.,

Gojard S., Gramain A., 2003, Charges de famille, dépendance et pauvreté dans la France contemporaine, La Découverte

Souvent  aussi,  ils  ont  vécu  avec  leurs  parents  au  début  du  mariage,  parfois  plus  longtemps tant que les parents étaient vivants. « Mes parents, ils sont morts ici , ma mère,  elle est morte en mai 1977, mon père est mort plus vieux en 88… On est seuls depuis qu’ils sont  décédés….  On  avait  une  cuisine  commune,  trois  chambres »  (Monsieur  Courbon,  23,  1).  Aujourd’hui, certains habitent la maison des parents. « C’était la maison de mes parents…  C’est la maison familiale, c’est moi qui l’ai gardé… » (Lassagne m. 07,01).  

Quant  à  la  cohabitation  bien  qu’en  régression,  elle  existe  encore.  Sur  l’ensemble  des  personnes  enquêtées,  deux  cas  ont  été  rencontrés en  Creuse:  un  couple  vivant  avec  la  belle  mère  et  les  enfants  qui  du  reste  n’ont  pas  repris  l’exploitation  mais  travaillent  à  proximité.  De  même,  Monsieur  Touvier,  célibataire,  a  gardé  sa  mère  très  dépendante  jusqu’à  une  chute  qui  l’a  contrainte  à  l’hospitalisation  puis  à  la  maison  de  retraite.  En  Ardèche,  deux  frères  habitent  encore  ensemble,  de  même  que  deux  sœurs  célibataires.  Enfin,  un  frère  a  rejoint  sa  sœur  lorsque  celle‐ci  a  été  veuve,  pour  l’aider  sur  l’exploitation.  

 La proximité explique aussi souvent la place que prend la famille dans la vie des  personnes âgées, l’espace contribuant à la construction des liens familiaux, les individus  pouvant mettre en œuvre des stratégies pour se rapprocher ou s’éloigner de leur famille.  Catherine Bonvallet caractérise la « famille‐entourage » sur la base de trois critères : des  affinités,  la  fréquence  des  contacts,  l’entraide  (le  parent  proche  a  été  aidé  ou  a  aidé)  sachant que la famille‐entourage peut être famille‐entourage locale ou famille‐entourage  dispersée. Dans un cas comme dans l’autre, des relations fortes existent avec un membre  de la parenté, mais le jeu des migrations a pu amener à séparer les familles sans aboutir  pour autant à un relâchement des liens (Bonvallet, 2003). En Ardèche comme en Creuse,  la famille‐entourage locale est un type dominant, les individus reproduisant le mode de  vie  en  famille‐entourage  locale  de  leurs  parents  et  grands  parents.  Il  y  a  là  encore  une  survivance  de  la  société  paysanne  dans  laquelle  vie  privée  et  travail  sont  fortement  imbriqués.  La  lignée  tient  une  place  importante  puisqu’il  y  a  adhésion  au  modèle  familial  et  transmission  des  valeurs,  des  pratiques  et  dans  certains  cas  des  savoirs  professionnels.  

L’aide familiale est souvent importante, voire très importante, sans doute davantage en  Ardèche  qu’en  Creuse.  Souvent  les  enfants  habitent  non  loin  des  parents,  se  soucient  presque  quotidiennement  de  leurs  parents  et  apportent  soutien,  réconfort  et  aide  très  fréquemment. Comment expliquer les différences constatées entre les deux territoires ?   Plusieurs  hypothèses  peuvent  être  formulées :  les  familles  sont  souvent  moins  nombreuses en Creuse : 2 à 3 enfants en moyenne, 5 à 6 en Ardèche. Souvent aussi, les  enfants  sont  partis  travailler  moins  loin  en  Ardèche,  la  vallée  du  Rhône  alors  qu’en  Creuse  la  faible  diversification  de  l’économie  a  souvent  contraint  à  s’éloigner, 

notamment  dans  la  région  parisienne  ou  le  nord  du  pays.  On  retrouve  là  les  vieilles  traditions d’émigration saisonnière et définitive favorisée par la révolution des chemins  de  fer.  Il  est  possible  enfin  que  l’aide  familiale  soit  moindre  en  Creuse,  les  personnes  enquêtées  étant  dans  l’ensemble  plus  jeunes  et  moins  dépendantes  qu’en  Ardèche,  ce  qui à notre avis doit inciter à la prudence dans les comparaisons. 

 

II.3.1.2. Une importante solidarité dans le cadre d’une réciprocité directe 

Dans le document Vieillir en milieu rural (Page 98-100)

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