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L’étude de la vie rurale au Proche-Orient dans l’Antiquité

A. Des premiers inventaires aux prospections systématiques en Syrie centrale (1500-1960) Syrie centrale (1500-1960)

3. L’étude de la vie rurale au Proche-Orient dans l’Antiquité

Une évolution des mentalités et des approches méthodologiques des archéologues est intervenue entre les premiers inventaires archéologiques et les thèmes de recherches développés aujourd’hui. Quelques publications, peu nombreuses, ont été les instruments de cette progression et les études menées actuellement sur les campagnes antiques leur sont en grande partie redevable.

148 MUNDELL MANGO 2004-2005 ; MUNDELL MANGO 2005b ; MUNDELL MANGO 2006 et MUNDELL MANGO 2007.

149 MUNDELL MANGO 2004-2005, p. 117.

150 Voir ci-dessous (d) Les villes : quelques aspects de leurs statuts, fonctions et rôles dans l’économie rurale régionale à travers l’exemple d’Al-Andarin, p. 829.

151 Dehes (SODINI et al. 1980), Serjilla, Al-Bara, Brad. La fouille d’Al-Bara, sous placée sous la responsabilité de G. Charpentier et M. Abdulkarim, et celle de Serjilla, font partie de la « mission archéologique de la Syrie du Nord », d’abord dirigée par G. Tate, puis co-dirigée par M. Abdulkarim et G. Charpentier. On peut y ajouter la fouille de Qal‘at Sim‘an, reprise en 2007, sous la direction de J.-L. Biscop.

152 La fouille de Diyateh (1983 à 1986) a été dirigée par F. Villeneuve ; celle de Si’ (1977 à 1997) par J.-M. Dentzer ; celle de Suwaida (1995 à 1999) par J.-M. Kalos (comme également celles de Sahr al-Leja, de 1993 à 1999 et de Khirbat Masakeb, de 1996 à 1998) ; celle de Bosra (1982 à 2006) par J.-M. Dentzer et P.-M. Blanc et celle de Sha‘ara (1998 à 2006) par J.-M. Dentzer. Voir aussi VILLENEUVE et SADLER 2001 ; DENTZER-FEYDY, DENTZER et BLANC 2003 et CLAUSS 2007 et CLAUSS-BALTY 2008.

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a) Les problématiques syriennes en évolution

(a) Les constructions religieuses

La documentation rassemblée par les premiers inventaires – H. C. Butler et J. Lassus – a posé les bases d’une première étude de l’architecture religieuse. Cette orientation allait de soi, car les églises ont été construites avec un soin tout particulier dans les zones à architecture en pierre (Syrie du Nord, Syrie du Sud, Jabal al-‘Ala), et elles sont aussi souvent en pierre dans les zones où la brique crue est traditionnellement employée. Les constructions religieuses, au moment des premiers inventaires, étaient donc souvent les bâtiments les mieux conservés.

H. C. Butler a publié en 1929 un catalogue raisonné qui rassemble les principales églises de de Syrie du Sud, de Syrie du Nord et de Syrie centrale153. Classés par siècle et par région, les bâtiments sont décrits dans le détail, en plan et en élévation, et certains éléments de la liturgie sont aussi abordés. Il ne s’agit pas d’une véritable typologie, mais au moins des éléments de classification sont-ils avancés (éléments porteurs, décor, chancel). En 1947, J. Lassus présente un catalogue des formes architecturales et liturgiques des églises154, en se fondant sur des exemples tirés des mêmes régions : Syrie du Sud (Hauran, Leja et Jabal al-‘Arab), Massif calcaire et Syrie centrale, avec des références souvent issues de son propre inventaire155. Il s’intéresse à la genèse de l’église comme forme architecturale, à la liturgie et à la vie religieuse en général (clergé et donateurs, moines et reclus). Il adopte une approche de l’église qu’on pourrait qualifier de sociale et étudie les rapports qu’entretiennent les fidèles avec les églises de village. Les édifices de cultes sont longtemps restés au centre des thématiques archéologiques. En témoigne la publication tardive de G. Tchalenko, fondée sur des observations de terrain réalisées dans les années 1960, qui s’intéresse à un dispositif liturgique particulier, le bema156. Les fouilles de Qala’t Sim‘an et Dair Dehes en Antiochène et de Huarteh, en Apamène, montrent également cet intérêt157 et fournissent des données pour une typologie régionale des ces édifices158. Les travaux de P. Donceel-Voûte, dans les années 1980, vont dans le même sens159. Un colloque sur la Jordanie organisé en 1989 s’intéresse aux mosaïques et à la typologie régionale des églises160. Plus récemment, A. Michel a aussi publié une étude typologique et un catalogue des églises jordaniennes161.

En Palestine, l’intérêt pour les édifices du culte chrétien s’est traduit surtout par des études sur les monastères162. D. Hull, très récemment, s’est aussi intéressé à cette question pour les chaînons calcaires de la Syrie du Nord et a ainsi rendu leur place dans le paysage

153 BUTLER 1929.

154 LASSUS 1947.

155 LASSUS 1935.

156 TCHALENKO 1979-1980 et 1990. Voir ci-dessous Le bema, p. 421.

157 BISCOP 1997 ; CANIVET 1980.

158 SODINI 1989.

159 DONCEEL-VOÛTE 1988a.

160 DUVAL 2003.

161 MICHEL 2001.

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antique à ces ensembles conventuels, que les publications de G. Tchalenko et de G. Tate laissent souvent de côté163.

(b) Le système défensif romain

Les observations aériennes d’A. Poidebard, dans les années 1930 et 1940 ont ouvert la voie à de nombreux travaux portant à la fois sur l’organisation du système défensif romain et byzantin et sur une typologie des forts164. Les recherches sur la mise en défense des frontières sont particulièrement nombreuses en Jordanie. Les travaux de D. L. Kennedy165, dans les années 1980 et 1990, ont été suivis à quelques années d’intervalle par ceux de S. T. Parker166. La problématique a été partiellement reprise par T. Bauzou167 pour la Syrie du Sud, bien que son intérêt aille surtout aux routes romaines. M. Konrad, à travers le « projet

limes » a abordé récemment le thème de l’architecture militaire et de l’organisation – et de l’origine – du système défensif en Syrie centrale au nord de la strata diocletiana168. Alors qu’une littérature abondante existe bel et bien sur la notion de limes169, les installations militaires de Syrie centrale sont finalement restées relativement en marge de ce débat170.

(c) Les premières études rurales

L’une des qualités principales des travaux de R. Mouterde et A. Poidebard, dans lesquels on peut en filigrane discerner les prémices des études régionales à venir, a été quelque peu éclipsée par les recherches de G. Tchalenko. Ces dernières présentent, sous une forme déjà très aboutie dans les années 1960, les grands principes des études régionales actuelles. Les publications de G. Tchalenko portent sur l’ensemble du Massif calcaire et constituent la première tentative visant à inscrire cette région qui est aussi une zone de marge dans l’histoire économique du pays171. Jusqu’alors, les bâtiments avaient été étudiés pour eux-mêmes, indépendamment des ensembles – les villages – dans lesquels ils s’inscrivent et sans qu’on tente de comprendre ni les raisons de leur présence ni les motifs de leur abandon, perçu comme soudain au début de la période islamique.

G. Tchalenko s’est attaché à définir les caractéristiques générales du peuplement dans cette région : la mise en place du peuplement, la période de pleine prospérité puis l’abondon rapide de ces villages. À travers les habitations et les églises, les monastères et les auberges, les pressoirs et les étables, les plans de villages et de quartiers, il propose une reconstitution du cadre de vie de ces populations agricoles : la mise en valeur et l’exploitation du terroir, le caractère et la densité des échanges avec Antioche et le bassin méditerranéen, la nature de la société villageoise, le niveau de vie et le statut des paysans, la question de la propriété, etc.

163 HULL 2006 (non vidi) et HULL 2008.

164 MOUTERDE et POIDEBARD 1945.

165 KENNEDY 1982 ; KENNEDY et RILEY 1990.

166 PARKER 1986 et 1987. Voir aussi ci-dessous 4. Castella, forts et « grands bâtiments », p. 538.

167 BAUZOU 2000a.

168 KONRAD 2001a et 2001b.

169 Voir ci-dessous a) Un « limes » ou une frontière ouverte ?, p. 160.

170 Voir par exemple GATIER 2000, pour un état de la question.

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Autant de problématiques qui restent pertinentes. Comme l’a déjà souligné P.-L. Gatier, « la grande force de Tchalenko est d’avoir réussi à fabriquer, à partir de données disparates, une véritable matière historique, un objet d’étude, ce que n’avaient jamais cherché à faire ses prédécesseurs »172. G. Tchalenko parvient à la conclusion que que l’essor que connaît le Massif calcaire entre la période romaine et byzantine est le produit d’une culture intensive de l’olivier, essentiellement tournée vers l’exportation. Et l’on verra que si le terme de monoculture, déjà mise en cause par G. Tate, est erroné, la notion de culture spéculative, elle, est à retenir pour la Syrie centrale aussi173.

b) Les thèmes de recherche récents sur l’Antiquité au Proche-Orient

L’habitat groupé constitue au Proche-Orient, pendant la période byzantine, la forme de peuplement dominante. Et c’est naturellement le village qui est au centre des discussions lorsqu’il s’agit de caractériser le peuplement des campagnes.

(a) Une économie rurale fondée sur le village

C’est à G. Tate que l’on doit la première étude régionale moderne, avec la publication de la première partie de sa thèse de doctorat en 1992. Son approche du peuplement et des villages du Massif calcaire est fondée sur une analyse statistique des bâtiments, et principalement des habitations et du nombre de pièces qu’elles comportent. Puisque l’épigraphie ne permet pas de dater l’ensemble des constructions, il met au point une méthode de datation fondée sur le décor et le type d’appareil, pour décrire l’essor, siècle par siècle que connaissent les différents chaînons calcaires. Ses travaux, qui s’appuient sur la fouille de certains îlots du village de Dehes (entre 1976 et 1978), passent en revue les différents types de bâtiments et accordent une attention souvent plus pointue que G. Tchalenko à la chronologie relative des maisons. Là où G. Tchalenko voyait des résidences vastes et somptueuses, G. Tate montre que l’aspect final de la construction n’est dû qu’aux agrandissements successifs, apportés par plusieurs générations, à un bâtiment initial modeste.

Les données sérielles que lui fournissent des maisons-témoins lui permettent de montrer pas à pas le développement des agglomérations et l’enrichissement progressif des villageois de la région. Parallèlement à l’habitat, il étudie les évolutions du terroir et remarque qu’alors que la taille des parcelles diminue, les techniques de construction des habitations témoignent d’une augmentation du niveau de vie de leurs habitants.

Il revient sur les hypothèses de G. Tchalenko, qui tendaient à donner à ces villages l’aspect de villes miniatures, avec des places de marchés et des alignements de boutiques, des bâtiments abritant des institutions villageoises développées174, et analyse les fondements du développement des agglomérations. Il rejette la thèse d’une monoculture de l’olivier dont

172 GATIER 2004, p. 63-64.

173 Voir ci-dessous C. La nature des échanges et la circulation des productions, p. 902.

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les produits seraient écoulés dans l’ensemble du bassin méditerranéen175 et privilégie celle d’une agriculture diversifiée, une polyculture associée à l’élevage. Mais il retient l’idée de surplus écoulés sur le marché d’Antioche qui auraient permis l’enrichissement des villages et la mise en œuvre de techniques de construction plus coûteuses. La vision de G. Tate est plus égalitaire que celle de G. Tchalenko. La société villageoise reposerait sur une classe de petits paysans propriétaires : pas ou peu de différences entre les habitations, quasi-absence de bâtiment communautaire (à l’exception des églises et de quelques bains) et petite exploitation régie par une paysannerie libre, donc capable d’accumuler des surplus aussitôt investis dans l’immobilier176.

La publication de la thèse de G. Tate intervient presque dix ans après l’article de F. Villeneuve177 sur les campagnes de la Syrie du Sud178. Dans le Hauran, les recherches ont davantage porté sur les périodes hellénistique et romaine que byzantine – la région semble déjà densément peuplée au Ier siècle av. J.-C.179. Malgré une approche différente, F. Villeneuve soulève pour la Syrie du Sud des questions identiques à celles qui se posent pour le Massif calcaire. La région qu’il étudie présente davantage de contrastes géographiques que le Massif calcaire. Elle regroupe à la fois des coulées basaltiques, au relief plus ou moins accusé (Jabal al-‘Arab ou Jabal Hauran et Leja par exemple) et des zones de plaine et de plateau (Nuqra, Jadur). Les facteurs géographiques, notamment orographiques, climatiques et édaphiques, induisent des différences assez notables dans les types d’implantation. Le village est généralement la règle, mais l’habitat dispersé n’est pas totalement absent, même s’il semble cantonné aux secteurs les moins attractifs. Ces stratégies de subsitance différentes semblent s’être appliquées aux différents milieux qui composent la Syrie du Sud et, à certaines périodes, une agriculture spécialisée n’est pas à exclure : production viticole sur les pentes du Jabal al-‘Arab, céréaliculture sur les plateaux et dans les plaines et part importante de l’élevage bovin dans cette économie.

En plus de ces éléments d’histoire agraire, F. Villeneuve s’est aussi attaché à définir les caractéristiques typologiques des villages et des habitations, plus différenciées qu’en Syrie du Nord. Les matériaux, les techniques et les plans sont autant de critères de classification de l’habitat. S’interrogeant aussi sur la nature de la société villageoise et sur ses institutions, F. Villeneuve a produit pour la Syrie du Sud un travail équivalent à celui réalisé en Syrie du Nord, en apportant des nuances liées à la spécificité de sa région d’étude, de là l’irruption de la problématique des nomades ou des semi-nomades. Contre toute attente, cette synthèse sur les villages et les campagnes hauranaises n’a pas été actualisée depuis, malgré des programmes de fouilles et de prospection nombreux dans le cadre de la « Mission

175 TCHALENKO 1953-1958, 1, p. 423-424. G. Tchalenko formule l’hypothèse selon laquelle les productions du Massif calcaire auraient pu être écoulées jusqu’en Italie et en Grèce, mais également en Mésopotamie et en Perse.

176 TATE 1992, p. 215-220.

177 VILLENEUVE 1985.

178 VILLENEUVE 1985. Cet article présente un condensé des recherches que F. Villeneuve a lui-même entreprise dans le cadre d’une thèse de doctorat (VILLENEUVE 1983).

179 Voir ci-dessous a) Une croissance démographique maximale aux périodes romaine et byzantine ?, p. 187,

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française de Syrie du Sud »180. La publication toute récente d’un troisième ouvrage consacré au Hauran apporte des éclaircissements sur certains points de l’histoire des campagnes, mais l’essentiel du volume est consacré aux maisons villageoises181.

Les recherches menées sur d’autres terrains appelaient également une synthèse. C’est ce dont témoignent deux articles publiés par P.-L. Gatier à dix ans d’intervalle, qui mettent en évidence les avancées des travaux archéologiques consacrés aux villages et aux campagnes dans l’ensemble du Proche-Orient182. Mais les travaux consacrés aux villages – organisation, intégration du site dans son milieu sont rares. Pour les provinces de Palestine, on peut mentionner la synthèse d’Y. Hirschfeld, en 1997, qui porte sur les différentes formes de peuplement des campagnes183. Les villages occupent naturellement une place importante dans cette publication, mais leur mise en perspective avec l’habitat isolé constitue une approche novatrice.

(b) Les composantes villageoises

L’habitat occupe, dans l’archéologie du village, une place de choix. En Syrie du Nord, les habitations ont d’abord été examinées par G. Tchalenko184 et son étude a été reprise, systématisée et en grande partie corrigée par celle de G. Tate185. En Syrie du Sud, la publication dirigée par P. Clauss-Balty est venue compléter les données déjà fournies par F. Villeneuve186. Mais l’architecture domestique y est surtout abordée sous ses aspects techniques et matériels et ces travaux n’ont pas donné lieu à une véritable typologie187.

En Jordanie, outre l’étude de ’Umm al-Jimal, P.-L. Gatier signalait, en 2005, les fouilles des sites de Khirbat al-Samra et ’Umm al-Rasas. Le compte-rendu de F. Villeneuve sur la publication par B. De Vries des fouilles de ’Umm al-Jimal entre 1972 et 1981 souligne que trois habitations seulement avaient été fouillées en 1994188. Les autres secteurs fouillés concernent le castrum – dont la fonction est discutée –, le praetorium – interprétation également controversée –, l’enceinte, les églises et le système d’adduction d’eau. Sur le site de ’Umm al-Rasas, l’attention s’est portée en priorité sur les édifices religieux189 et les systèmes de fortification190. Les fouilles des différentes campagnes, à Khirbat al-Samra, font surtout apparaître entre 1981 et 1997 l’intérêt suscité par les églises, l’enceinte de l’agglomération et son castrum, et une construction interprétée comme une auberge191.

180 Si’, Sha‘ara et Diyateh sont interprétés comme des villages, c’est-à-dire des « agglomérations clairement dotées […] d’une organisation communautaire élaborée » (VILLENEUVE 1985, p. 76). Pour la définition du village en Syrie centrale, voir ci-dessous (a) En guise de définition : la kômè en Syrie centrale et les critères d’identification du village, p. 781. 181 CLAUSS-BALTY 2008a. 182 GATIER 1994 et 2005. 183 HIRSCHFELD 1997. 184 TCHALENKO 1953-1958. 185 TATE 1992. 186 VILLENEUVE 1985. 187 CLAUSS-BALTY 2008. 188 DE VRIES 1998 ; VILLENEUVE 2001, p. 210. 189 PICCIRILLO et ALLIATA 1994. 190 BUJARD 1995. 191 HUMBERT et DESREUMEAUX 1998.

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Au Liban, P.-L. Gatier mentionnait les fouilles des villages de Shhim, Jiyeh, Beit Meri et Ghineh. T. Waliszewski et R. Ortali-Tarazi y ajoutent celles de Khan Khaldeh et ’Umm al-Amed : « sites secondaires de type rural ou semi-rural », qui, malgré des travaux en cours, livrent peu d’information sur « l’organisation de leur espace »192. L’objectif des fouilles archéologiques entreprises depuis 1996 sur le site romano-byzantin de Shhim était d’ailleurs de mieux cerner les caractéristiques des villages libanais. Plusieurs habitations, une rue, un temple, une église et des pressoirs y ont été étudiés. Les fouilles de Jiyeh, qui semblent n’avoir commencé véritablement qu’en 2004, se sont limitées cette année-là à une église193. Dans les anciennes provinces de Palestine en revanche, les fouilles d’habitat sont nombreuses. Y. Hirschfeld en a proposé en 1995 une synthèse doublée d’une approche typologique. Sa publication fait cependant état indifféremment de maisons urbaines et villageoises et de l’habitat isolé194.

L’architecture religieuse, païenne ou chrétienne, occupe également une bonne place dans l’archéologie du village. Les temples, les églises et les complexes monastiques ont été largement étudiés. La bibliographie concernant les temples, en Syrie, est assez abondante195. La documentation relative aux églises et aux monastères a déjà été en partie évoquée plus haut : je n’y reviendrai pas196. L’intérêt des archéologues pour les villages s’est aussi traduit par des travaux portant sur les bains – et notamment par un programme de recherche dédié à l’architecture thermale, « Balnéorient ». Dans le Massif calcaire, la thèse de G. Charpentier était entièrement consacrée à ces bâtiments197. L’auteur s’est particulièrement intéressé aux bains de Serjilla et de Brad198. En Syrie du Sud, l’existence de bains villageois est longtemps passée inaperçue : H. C. Butler avait mentionné, à proximité du sanctuaire de Si’, la présence de bains qui n’ont pas été retrouvés par la « Mission française de la Syrie du Sud ». F. Villeneuve signalait, en 1985, des bains à Sha‘ara, fouillés récemment et en cours de publication. À Sleim, au nord de Suwaida, une étude architecturale, dont les résultats sont actuellement sous presse, a été réalisée sur l’établissement thermal. D’autres bains villageois ont été repérés dans la région, mais ils restent pour l’instant inédits199. En Jordanie, quatre établissements de bain ont été fouillés à Khirbat al-Dharih dont, semble-t-il, un seul byzantin. Y. Hirschfeld a aussi attiré l’attention sur la fréquence des bains villageois (plus

192 WALISZEWSKI et ORTALI-TARAZI 2002.

193 WALISZEWSKI 2005.

194 HIRSCHFELD 1995.

195 Les sanctuaires païens de Syrie du Nord ont été étudiés depuis depuis 1972 dans le cadre de la « mission française de la Syrie du Nord ». P.-L. Gatier et O. Callot ont rassemblé une documentation importante sur ce sujet. Consulter par exemple CALLOT 1984 et 1997 et également GATIER 1997 et 2001b. Les autres régions syriennes sont moins bien documentées : en Syrie du Sud, les fouilles de Si’ ont dégagé un sanctuaire. Les fouilles de R. Gogräfe à ‘Itriya, en Syrie centrale, étaient entièrement consacrées au temple. Au Liban, dans le village de Shhim, un temple a également été fouillé, comme dans le village de Khirbat al-Dharih en Jordanie. Deux dossiers de Topoi sont consacrés à la question des sanctuaires du Proche-Orient aux époques hellénistique et romaine : Topoi 7 (1997) et Topoi 16 (2009), plus spécifiquement consacrés aux temples libanais. Voir aussi CALLOT et GATIER 1999 et ALIQUOT 2009 et, en dernier lieu, l’article de P.-L. Gatier et M.-O. Rousset en partie consacré aux temples de Syrie centrale (GATIER et ROUSSET 2010).

196 Voir ci-dessus (a) Les constructions religieuses, p. 352.

197 CHARPENTIER 2000.

198 CHARPENTIER 1994, 1995 et ABDULKARIM et CHARPENTIER 2009..

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d’une dizaine de cas) pour l’état d’Israël, mais ils ne font l’objet d’aucune publication spécifique200. En Syrie centrale, seuls deux établissements, respectivement byzantin et omeyyade, ont été fouillés au sein d’une agglomération présentant des caractères urbains, Al-Andarin. On verra cependant qu’il existe plusieurs de ces constructions dans la région201.

Les études portant sur les pressoirs, des installations par essence rurales – mais pas exclusivement – ont été à l’origine d’une littérature plus abondante qui porte essentiellement