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Texte littéraire et compétences de production

A- L’écrit, essais de définition

C’est forcément à l’école que l’enfant acquiert, développe et affine des compétences rédactionnelles. Pour l’aider dans sa démarche d’appropriation des savoirs et des savoir-faire, il faut le mettre en situation de vouloir et pouvoir écrire.

Il ne s’agira pas bien évidemment, comme le souligne O. Séoud (1997, p.162) de « viser à produire des écrivains, ou à ne produire que des écrivains (encore que, si on considère que la littérature est un art et au même titre que la peinture, la sculpture, etc., il ne serait pas illégitime d’y penser, et que, si tout le monde n’est pas écrivain, rien ne nous empêche d’admettre, en théorie, que tout le monde puisse le devenir), mais d’assurer un apprentissage de l’écriture littéraire pour répondre au désir d’écrire ; car ce désir est plus répandu qu’on ne croit (qui peut affirmer ne l’avoir jamais ressenti ?), et s’exprimera sans doute plus fortement, si on prend soin (c’est le rôle de la pédagogie) de lever certains blocages, parmi lesquels la théories des dons n’est d’ailleurs pas des moindres, et dont est responsable l’idéologie culturelle. Apprendre à écrire donc, d’abord, au nom du droit de tous

les apprenants au "plaisir du texte", qui est non seulement un plaisir de lire mais aussi d’écrire et de dire. »

L’écrit, parent pauvre des méthodologies précédentes (où le travail de production était réduit à la phrase ou au texte court), tend à retrouver toute son aura grâce aux approches actuelles qui le considèrent comme une activité primordiale et indispensable qui permette d’explorer la langue, en la voyant au travail.

L’objectif visé par cette "réhabilitation" de l’écrit en le réintroduisant dans le processus pédagogique, est désormais celui d’encourager l’enfant à la production véritable.

L’acte d’écrire ne sera plus envisagé comme une réponse à la seule obligation scolaire. Dans ce sens, G. Vigner (1982) cité par M-H Estéoule-Exel (1993, p.107) affirme que « écrire, […], ne consiste plus à produire un texte sur la seule incitation du professeur mais à transmettre un message à un interlocuteur absent par le moyen d’un texte écrit. Ce dernier se substitue au message transmis oralement dans une communication en face à face. Le passage à l’écrit consistera à réorganiser le message oral de telle sorte que les changements apportés dans le choix du canal de transmission et dans la situation d’énonciation n’affectent pas le contenu du message. L’écrit obéit à des motivations fonctionnelles mieux en rapport avec sa nature véritable. On écrit à quelqu’un faute de pouvoir s’adresser à lui de vive voix.

Les écrits proposés relèveront désormais de genres spécifiques tels que le message, la lettre, le télégramme, le bref rapport, le constat, etc. Beaucoup d’exercices consisteront en la transformation de textes en faisant varier les paramètres de la situation d’énonciation (accident de la route vu par l’automobiliste, un témoin, un journaliste, etc.). »

Cette fonction de communication est décrite par S. Moirand (1979, p.09) en ces termes :

« Par situation d’écrit, nous entendons donc une situation de communication écrite, ce qui implique des scripteurs écrivant à (pour) des lecteurs ou bien des lecteurs lisant des documents produits par des scripteurs, production et/ou réception ayant lieu par ailleurs dans un lieu et à un moment précis, pour une raison donnée et avec des objectifs spécifiques. »

La situation de communication est ainsi envisagée selon que l’on veuille interpréter un document, ou au contraire produire un écrit.

Si l’on veut interpréter un document, on doit tenir compte de certains éléments inhérents à la situation de production et qui répondraient aux questions suivantes, telles qu’elles ont été posées par S. Moirand (1979, p.09) :

A propos de quoi ?

Qui écrit ? A qui écrit-il ? Où ? Pour qui ? Quand Pour quoi (faire) ?

Pourquoi ?

Quant à la production écrite, il s’agit plutôt de se demander : A propos de quoi ?

Quel est le « je » qui écris ? Quel est le « tu/vous » à qui « je » écris ? Où ?

Quand ?

Pourquoi « je » écris ? Pour quoi (faire) ?

Par ailleurs, et pour définir l’acte d’écrire, nous nous appuyons sur la définition donnée par J-P. Cuq (2003, p.79). Pour lui, « écrire, reste associé, dans les représentations sociales, à une activité réservée aux professionnels, en particulier aux écrivains, une attention particulière étant accordée à la forme et au style. »

Pratiquement, ce qui est intéressant pour nous, - et c’est dans cette perspective que nous nous inscrivons -, ce serait l’exigence de lier, comme le préconise D. Leclair (1992), cité par O. Séoud (1997, p.167) « l’écriture à la lecture, la pratique de celle-ci à l’apprentissage de celle-là, et tous les enjeux de cet apprentissage. »

Dans un article qu’elle intitule "Autour du poème, former de vrais lecteurs", D. Leclair défend vigoureusement la didactique de l’écrit.

Elle part de l’hypothèse que « la bonne lecture » est celle qui s’associe à l’écriture, qui se « traduit » en écriture - l’enjeu de cette lecture-écriture étant , outre la (re)découverte des virtualités de la langue, d’accéder à une « parole authentique », de se dévoiler à soi et aux autres.

L’objectif est d’arriver à saisir le texte dans sa totalité, c’est-à-dire ne pas croire que le travail à accomplir est réservé seulement à la langue ou au jeu sur les mots. Il faut aller au-delà, en d’autres termes, dans le temps de l’écriture, même si la consigne peut donner à

réemployer certains matériaux du texte, il ne s’agit pas de répéter ce texte, de l’imiter (même si au départ l’imitation, le pastiche sont des activités "permises"), mais bien de lui « répondre », car l’enjeu de la classe n’est pas seulement linguistique mais doit impliquer l’être du sujet, ce qui suppose, précise D. Leclair, qu’on dise à son tour « je », son histoire ou ses émotions, en effectuant à son tour un travail de singularisation sur la langue.