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Chapitre 2 Stratégie de normalisation

2.3.2 Quel jugement portent les utilisateurs sur les stratégies de normalisation

Si l’on considère comme ces auteurs que l’éthique :

« Sert de guide pour résoudre les questions et les conflits soulevés par les applications de la science et de la technologie. Le point central de la discussion porte spécifiquement sur les multiples usages que l’on fait des technologies de l’information et de la communication dans l’organisation des réseaux électronique d’information en santé. La science et le technologie, y compris les technologies de l’information et de la communication, permettent aux gens, aux professions et aux sociétés de réaliser des choses inédites, mais il n’est pas toujours vrai d’affirmer que ce que l’on peut réaliser maintenant doit obligatoirement l’être » (idem,p 93).

Ceci nous oblige à poser la notion d’usage de la technologie et de voir s’il est en corrélation avec l’éthique clinique dont se revendiquent les professionnels de santé dans les pratiques cliniques, très proches également de l’éthique professionnelle

Dans cette perspective, posons d’abord la notion d’usage qui même si nous n’en avons pas fait un axe central de recherche dans ce travail, reste quand même un point fondamental pour comprendre ces questions de stratégies de normalisation. L’usage dans la technologie a toujours préoccupé les chercheurs en Sciences Humaines et Sociales qui tentent de les comprendre en organisation. Nous faisons allusion à la sociologie des usages.

En effet, nous avons plus haut montré que le grand obstacle au phénomène des technologique est dû par au fait de mettre en place des normes qui viennent d’une décision unique ou hiérarchique. Nous avons également souligné que ces normes imposées ne prennent pas en compte la dimension éthique de « l’éthique clinique et professionnelle ».

Outre ces problèmes soulevés qui peuvent engendrer une incertitude sur la longévité de la technologie dans le domaine de la santé nous pouvons en plus souligner un autre obstacle. : il se situerait au niveau de l’efficacité. La sociologie de l’usage a souvent soutenu la thèse que la mise en place d’un logiciel dans une pratique clinique d’un professionnel de santé ne garantit pas que ce dernier en fasse bon l’usage.

Nous ne pouvons pas nous associer à cette pensée car le poids des technologies dans la santé a fait qu’elles sont devenues incontournables.

Et c’est exactement ce que confirment une infirmière et une aide soignante qui utilisent toutes deux HM:

« Ce n’est plus possible de revenir au papier. Ou faudrait vraiment une grosse panne mais en générale c’est réparer quand même assez vite. Ou alors on est informé donc de fait qu’on prend le papier mais c’est extrêmement rare. C’est arrivé deux fois ».

« Par rapport au ancien système on avait du mal là c’est plus vite c’est différent et il faut qu’on change notre vision qu’on oublie le premier pour bien passer à celui-là et le maîtriser. Et continuer à l’améliorer je pense. Mais il faudra un petit de temps ».

Ce que je voudrais montrer à travers ces témoignages est que malgré le fait que ces soignants attestent que l’outil n’est pas adapté à leur pratique par conséquent présente des difficultés, elles attendent quand même une amélioration car telles qu’elles le soulignent toujours dans les entretenues :

« Ici en l’occurrence il n’ya plus de support papier après ce sont des directives hiérarchiques donc il y’a un moment aussi on est voué à la hiérarchie on ne peut pas travailler seul dans notre coin. On peut être contre quelque chose, le dire mais à ce moment là on sera aussi évincé parce qu’on n’a pas suffisamment de force tout seul quoi ».

Donc les soignants sont obligés d’utiliser l’outil malgré les problèmes d’efficacité qu’il présente. S’il n’est pas performant ou fiable, les soignants l’utilisent quand même pour répondre aux attentes des personnes qui imposent un système, et non aux attentes dans le déroulement des soins. Pour eux, HM est un outil qui comporte beaucoup d’ « Items », qui sont inutiles, et qui font perdre beaucoup de temps dans le travail médical :

« Si je mets mes transmissions, on cherche où est l’information par exemple ce matin on a eu le cas pour un départ, on chercher l’heure du départ à l’ambulance, il y’avait deux pages sur la même page mais ce n’était pas écrit la même chose sur un chaque page il y’avait deux items différents c’est le négatif ».

« Moi j’ai utilisé ailleurs un autre logiciel qui s’appelle EPSILOQUE et que je trouve plus performant, que je trouve plus réactif, plus facile d’utilisation, plus intuitif quoi. Et HM pour moi il est long quoi. Pour noter une chose il faut passer sur plusieurs choses, ça prend du temps »

Nous voyons bien à travers ces témoignages une ambiguïté qui s’installe autour de ce logiciel. L’usage de ce logiciel présente une incertitude dans la longévité de l’outil dans les pratiques et met en cause son efficacité dans celles-ci. Or, si nous considérons que l’éthique clinique a comme objectif de résoudre les incertitudes, les conflits de valeurs et les dilemmes qui se présentent entre le médecin, son équipe et les autres professionnels de santé, nous avons constaté un décalage entre l’usage du logiciel et les attentes des professionnels. C’est ainsi que nous que les normes sont plutôt érigées dans une logique de technostructure, qui émane de personnes bien déterminées à imposer un système et une logique technocentre, imposée à l’équipe soignante qui intervient.

Dans cette optique, nous pensons élargir ces deux concepts notamment technostructure et technocentre, à une autre perspective, qui est la « culture organisationnelle ». En ce sens nous comptons voir quels sont les enjeux culturels dans cette problématique de changement organisationnel, comment ils sont pris en considération.