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Irrigation et développement agricole

TROISIEME PARTIE : DYNAMIQUES DEMOGRAPHIQUES ET DYNAMIQUES

D ’ UN ESPACE DIFFERENCIE

1. L A ZONE DE L ’O ULJA : UNE INTENSIFICATION MARQUEE PAR LE MARAICHAGE

1.1 Irrigation et développement agricole

1.1.1. Développement des irrigations

Au Sahel la sédentarisation totale et le morcellement des terres, se sont accompagnés d’une intensification de plus en plus accrue dans l’Oulja, grâce à l’amélioration des systèmes techniques, notamment le pompage.

L’adoption de la plupart des exploitations de motopompes, efficaces dans l’exploitation de la nappe sur une plus grande échelle, a contribué à une extension spectaculaire des surfaces irriguées donc intensifiées, et a permis de se passer de l’énergie animale et des moyens traditionnels de puisage inefficaces et au rendement dérisoire.

D’ailleurs, le développement de l’irrigation, par un accroissement progressif du nombre de puits et des changements de modes de puisage, a permis une extension sensible des superficies irriguées au Sahel des Doukkala, notamment à l’Oulja, ce qui est en lui-même un indicateur significatif de la nature des changements survenus et une manifestation de l’intensification du système agraire.

En effet, les superficies irriguées dans le Sahel des Doukkala sont estimées actuellement à plus de 3800 ha, dont plus de 85% dans l’Oulja uniquement. L’accroissement moyen des superficies agricoles irriguées est estimé à environ 80 ha par au depuis 1958.

Tableau : Évolution estimée des cultures irriguées dans le Sahel des Doukkala

Cultures irriguées (ha) Accroissement annuel moyen (ha/an)

Années 1958 1985 1992 1940-54 1954-79 1980-89 1990-90

( ha ) 500 2185 3200 20 50 150 50

Sources : DRHT. F.A.O. 1994. P :43

D’après une étude de la DRHT, le développement des pompages n’a pris de l’importance qu’au début des années 50 avec une croissance rapide entre 1953 et 1957. L’inventaire de 1952 mentionne 185 puits équipés de pompe, l’inventaire de 1958 en recense 717151. L’inventaire de la DRHT montre aussi une croissance rapide jusqu’en 1989 des nouvelles installations de pompes –en remplacement d’équipements anciens de faible capacité ou sur de nouveaux puits– avec un rythme moyen de l’ordre de 40 nouvelles pompes/an. A partir de 1990 la mise en place de nouvelles pompes retrouve un rythme de croissance moins rapide152.

Le développement des pompages dans le Sahel est ainsi lié, en grande partie, à l’amélioration des techniques de puisage par l’installation de pompes modernes de forte capacité. Ce développement a conduit à la mise sous irrigation de nouvelles superficies, non seulement dans la dépression côtière de l’Oulja, mais aussi sur la haute terrasse dans les premières dépressions inter dunaires sur la bordure ouest du Sahel.

Les techniques récentes d’irrigation ont contribué alors à étendre les sols irrigables aux sols caillouteux du Sahel. Certes, ces changements techniques et ce développement des

151

DRHT/FAO-PROJET TCP/MOR/2251, MARS 1994. Op. cit. p.40 175

irrigations sont dus exclusivement à l’initiative privée des agriculteurs, d’où résulte une augmentation considérable des coûts d’investissement et d’exploitation. Ainsi, l’intensification du système agricole de production est expliquée sur la base de ces attributs. Cependant, le processus de l’intensification et du choix des enjeux, outre le fait qu’il reflète en même temps l’héritage historique de cette région, tient compte aussi de l’accroissement démographique qui pèse sur la région.

1.1.2. irrigation et intensification

L’ampleur des investissements pousse ainsi les agriculteurs à adopter un système agraire capable de couvrir les dépenses et permettant un accroissement de la production agricole.

A cet effet, l’intensification, sous toutes ses formes est une alternative essentielle, car elle permet aussi d’augmenter le nombre de travailleurs à l’hectare, ce qui permet d’occuper une main d’œuvre familiale très abondante.

Les changements du système agraire se sont traduit alors dans la région du Sahel par une spécialisation accentuée et par le développement des productions orientées vers le marché extérieur, notamment la tomate. C’est une spécialisation qui ne dépend pas essentiellement des conditions naturelles offertes par le milieu, mais plus par cette dynamique marquée par un degré extraordinaire d’interdépendance et d’interaction entre l’héritage de la période coloniale, la politique de l’Etat marocain indépendant et la nature de l’évolution démographique de la région.

A l’instar des changements démographiques, marqués par une évolution considérable de la population rurale, et par ailleurs des densités, l’exploitation de l’espace Ouljien, a connu, elle aussi, des changements considérables.

L’exploitation de l’espace Ouljien par les cultures maraîchères, est relativement jeune, ses débuts les plus

marqués remontent à la seconde moitié de ce siècle. Son développement fut modeste jusqu’au milieu des années soixante, pour s’accélérer et s’amplifier après. Dans un demi- siècle, ce phénomène a transformé cet espace en territoire trop exploité et trop peuplé. C’est ce que l’on peut qualifier de « littoralisation » de l’économie et de la société153 :

S’il est certain que la superficie reconvertie aux cultures maraîchères s’est beaucoup développée, il est difficile d’avancer des chiffres précis fixant l’importance et le rythme de ce développement. Néanmoins, en se référant aux données relevées par Hermelin154, à partir des rôles du Tertib pour 1948, on peut conclure que la superficie occupée par les cultures maraîchères irriguées de l’Oulja a triplé en l’espace d’un demi- siècle, elle est passé de 9938 ha en 1948 à environ 3600155 ha actuellement.

La cadence du développement de l’extension de l’espace agricole dans l’Oulja, dépendait certainement des facteurs démographiques et de la conjoncture économico-sociale, mais il est certain aussi que les disponibilités en eaux souterraines et le développement des techniques de l’exploitation de ces eaux intervenaient par leur part dans ce développement.

En procédant à étudier cette cadence à travers le développement de l’exploitation des eaux de la nappe, on relève que l’installation des moto-pompes –qui est un

153

Ce terme est emprunté de Corlay J.P voir : CORLAY, J.P., 1995 : « Géographie sociale, géographie du littoral ». NOROIS, t 42, n° 165. p. 249

154

HERMELIN, M., (1957) op cit. p.196. 155

La superficie de l’Oulja diffère d’un service à l’autre, à cause du découpage administratif et des instances de vulgarisation..

indicateur du développement de l’irrigation– a été à l’origine de l’extension des superficies agricoles dans l’Oulja.

Se basant sur les inventaires établis par la DRHT156, on remarque que les superficies agricoles irriguées équipées de pompes étaient très modestes au début des années cinquante. En 1952 on dénombrait 185 puits équipés de pompes, irriguant une superficie approximative de 240 hectares. La création de nouveaux puits, l’installation des moto-pompes et la mise sous irrigation de nouvelles surfaces se sont poursuivis progressivement, avec un accroissement moyen annuel de 50 hectares jusqu’au début des années 80. Depuis lors, et jusqu’au début des années 90, le rythme d’installation de pompes s’est accéléré avec une moyenne de 40 nouvelles motos-pompes par an, et un accroissement annuel de 150 hectares de nouvelles superficies mise sous irrigation, pour reprendre un rythme moins accéléré ces dernières années.

L’extension des superficies irriguées dans le Sahel côtier a été concomitante du développement de certaines spéculations irriguées destinées à l’exportation et qui ont connu les taux de progression les plus élevés. On l’a vu auparavant, les incidences de la dépendance vis à vis du marché international ont de leur part une importance décisive dans cette évolution.

Ainsi la région de l’Oulja, qui a été la première à vivre des changements considérables au sein de la zone étudiée, est devenue de plus en plus, l’une des grandes régions du Maroc spécialisées dans les cultures maraîchères, (la tomate en particulier) destinées au marché national et international.

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La documentation cartographique établie à partir des photos aériennes fourni des renseignements précieux sur l’extension horizontale, mais aussi verticale des cultures maraîchères dans la région de l’Oulja.

Dans le secteur nord de l’Oulja –pris en exemple– (voir cartes & fig.), l’augmentation des surfaces occupées de cultures maraîchères depuis 1960 est clairement sensible, on remarque une extension centripète de l’espace cultivé, grignotant vers le nord, vers l’est aux rebords de la falaise morte et les confins ouest du Sahel intérieur, mais aussi vers l’ouest sur les dunes formant le cordon littoral, jouxtant immédiatement l’océan atlantique.

1.2. L’extension de l’espace cultivé à