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III. APPLICATIONS DE L’IMAGERIE SPR

III.1. ACIDES DESOXYRIBONUCLEIQUES

III.1.2. Interactions ADN/ADN liées au gène κ ras

Les expériences présentées dans cette partie ont été réalisées en collaboration avec E. Lopez-Crapez du groupe Marqueurs tumoraux du CRLC (Centre de Recherche et de Lutte contre le Cancer [130]) de Montpellier. Elles ont été réalisées au début de ma thèse, en 2001, époque à laquelle le banc de mesure n’avait pas encore été automatisé ni optimisé et ne permettait que des mesures qualitatives.

III.1.2.1. Description du matériel utilisé

Par rapport au banc décrit dans la partie II.2 (page 100), le changement d’incidence se fait grâce à une platine de rotation manuelle, le prisme est un prisme équilatéral (Ap = 60°) en

SF10 (n = 1,72 @ λ = 650 nm) et la caméra est une caméra analogique convertie en 8 bits. La procédure de conversion des niveaux de gris en variation de réflectivité n’avait pas encore été mise au point, ce qui fait que toutes les grandeurs mesurées sont en niveaux de gris ou, pour simplifier, en unités arbitraires (U.A.). Pour finir, les couches métalliques (chrome et or) n’étaient pas déposées directement sur le prisme mais sur des lames de microscope (BK7 n = 1,514 @ λ = 650 nm). Le couplage entre le prisme et la lame est alors réalisé par une huile d’indice de réfraction 1,515.

Pour ces expériences, la fonctionnalisation par électrocopolymérisation a été réalisée sur des lames dorées selon le protocole décrit dans la sous-partie II.1.2.2.3. Les dépôts réalisés au CEA de Grenoble, sont composés de 9 plots (φ ≈ 700 µm) distincts de polypyrrole déposés par électrocopolymérisation (U = 2 V, t = 125 ms) d’une solution de tampon phosphate (pH = 7) contenant du pyrrole non greffé (20 mM) et des pyrroles-oligonucléotides (40 µM). Cela correspond à un ratio d’un oligonucléotide pour 500 molécules de pyrrole. Les

différents oligonucléotides, longs de 15 bases, fixés sur les lames sont décrits dans le tableau suivant.

Nom de l’ODN Extrémité Modification Séquence Extrémité N 5’ Pyr-(T) - 10 TGGAGCTGGTGGCGT 3’ M1 5’ Pyr-(T)10- TGGAGCTAGTGGCGT 3’ M2 5’ Pyr-(T)10- TGGAGCTCGTGGCGT 3’ M3 5’ Pyr-(T)10- TGGAGCTTGTGGCGT 3’ M4 5’ Pyr-(T)10- TGGAGCTGATGGCGT 3’ M5 5’ 10 TGGAGCTGCTGGCGT 3’ M6 5’ Pyr-(T)10- TGGAGCTGTTGGCGT 3’ CP 5’ Pyr-(T)10- CCTTGACGATACAGC 3’ Pyr-(T) -

Tableau 5 : Séquence des oligonucléotides correspondant à une partie du gène κ-ras (centrée sur le codon 12) et constituant les sondes du biocapteur. Ces séquences ont été modifiées en leur extrémité 5’ par une chaîne de 10 Thymines (espaceur) suivie d’un groupe pyrrole pour

la polymérisation.

Dans le Tableau 5, le premier oligonucléotide sonde appelé N correspond à la séquence native, c’est-à-dire sans mutations. Les oligonucléotides M1, M2 et M3 représentent

les trois mutations possibles de la base centrale de la séquence native N tandis que M4, M5 et

M6 sont les trois mutations possibles de la 9ème base de N. L’oligonucléotide CP (Contrôle

Positif) est une séquence de 15 bases présente sur une autre partie du gène κ-ras et totalement différente des 7 premières. Ces six mutations de N vont coder, après transcription, six acides aminés différents de l’acide aminé du code natif et vont donc conduire à des modifications de la protéine produite [131].

Les cibles utilisées au cours des expériences sont les oligonucléotides complémentaires (symbolisés par « * ») des sondes déposées ainsi qu’une séquence un peu plus longue et se détaillent ainsi :

Cible Extr. Séquence Extr.

N* 3’ ACCTCGACCACCGCA 5’

M1* 3’ ACCTCGATCACCGCA 5’

CP* 3’ GGAACTGCTATGTCG 5’

Sg0 3’ CAACCTCGACCACCGCATCCGTTCTCACGGAACTGCTATGTCG 5’

Tableau 6 : Séquence des oligonucléotides complémentaires à certaines séquences du Tableau 5 et utilisés en tant que cible dans les expériences.

Les oligonucléotides cibles décrits dans le Tableau 6 sont injectés dans la cellule d’interactions à une concentration de 1µM dans un tampon PBS avec du Denhardt 1X et de l’ADN de sperme de saumon (10 mg/L). Le Denhardt combiné avec l’ADN de sperme de saumon est un agent bloquant, c’est-à-dire qu’il est destiné à limiter les interactions non spécifiques sur le biocapteur en saturant les différents sites possibles d’adsorption non spécifique des protéines, des sucres et de l’ADN. Toutes les expériences sont réalisées à température ambiante et à débit constant égal à 25 µL/min.

Le protocole de l’expérience, inspiré du protocole type décrit dans la sous-partie I.2.4.1 (page 50), est le suivant :

- Injection du tampon dans la cuve en téflon jusqu’à stabilisation de la réflectivité (blocage de la lame par le Denhardt et l’ADN de sperme de saumon).

- Mesure de la réflectivité en fonction de l’angle d’incidence afin de déterminer l’angle de travail en cinétique (pente de la courbe mesurée maximale).

- Positionnement du miroir à l’angle de mesure déterminé précédemment. - Injection en cuve des cibles à analyser (1 µM) diluées dans le tampon.

- Injection du tampon pour le rinçage et pour mesurer dans le même milieu la différence de réflectivité due à l’interaction entre les sondes et les cibles.

- Injection d’eau pour éviter la neutralisation de la soude par le tampon. - Injection de soude pour la déshybridation des doubles brins formés. - Injection d’eau pour évacuer la soude.

- Injection du tampon afin de comparer le niveau de réflectivité avant l’interaction et après la régénération dans le même milieu.

III.1.2.2. But de l’expérience

Le but de ces expériences est tout d’abord de vérifier, sur le banc d’imagerie SPR, la spécificité de l’interaction entre oligonucléotides complémentaires par l’injection de la cible

CP* totalement complémentaire de la sonde CP et ne correspondant pas du tout aux autres sondes. Ensuite, un autre but est de distinguer sans ambiguïté une mutation ponctuelle (SNP). Pour cela, nous allons injecter la cible N* et comparer les réponses du système sur la sonde totalement complémentaire N et sur les sondes mutées sur la 8éme base (M1, M2, M3) ou sur la 9ème base (M4, M5, M6).

Enfin, le but ultime de toutes les puces à ADN n’est pas de travailler sur des oligonucléotides synthétiques mais sur des fragments provenant de patients amplifiés par

PCR. Ces fragments d’ADN sont beaucoup plus longs que les oligonucléotides sondes utilisés. A température ambiante, qui est notre température de travail, différentes parties d’un même long fragment d’ADN peuvent facilement s’hybrider entre elles et ainsi former une structure secondaire (qui peut être calculée grâce au logiciel gratuit Mfold [ 132 ]). Ces interactions intramoléculaires peuvent limiter l’accès à la zone du fragment complémentaire des oligonucléotides sondes et entrer en compétition avec les interactions intermoléculaires [ 133]. Nous n’avons pas réalisé cette étude, très intéressante et assez complexe par les nombreux paramètres à optimiser mais, nous nous sommes contentés de l’analyse préparatoire d’un oligonucléotide de longueur intermédiaire Sg0 (43 bases) comprenant la séquence complémentaire de N et la séquence complémentaire de CP.

III.1.2.3. Résultats

Le résultat de l’électrocopolymérisation des huit plots correspondant aux huit séquences du Tableau 5 ainsi que d’un plot composé uniquement de pyrrole est représenté sur la Figure 88. Sur cette figure, nous voyons l’image de la lame d’or insérée dans le banc SPR. Cette image a été acquise en polarisation TM lorsque les plots sont en eau et pour une incidence voisine de l’angle de travail en cinétique. Sur cette image, nous voyons une zone d’à peu près 4,5x4,5 mm2 où les plots ont un diamètre d’environ 700 µm, sont disposés tous les 1,5 mm et sont épais de 2 à 3 nm. L’état de développement du biocapteur au moment de cette expérience ne permettait pas une caractérisation plus précise des différents plots.

M6 M5 M4 M3 M1 M2 CP N ppy

Figure 88 : Image SPR en eau des plots d’oligonucléotides pyrrolés décrits dans le Tableau 5 ainsi que du plot de polypyrrole (ppy).