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Récemment, la littérature théorique s'est intéressée à la question des poli-tiques économiques dans le cadre de l'Union Economique Monétaire. D'un point de vue empirique, certains travaux soulignent des problèmes liés à la politique monétaire commune lorsque le canal de transmission est asymétrique. Sur plan théorique selon Villieu [2008], une première orientation de la littérature sou-ligne les eets des solutions coopératives et non coopératives. En ce sens la banque centrale de l'Union tient compte des grandeurs moyennes et ignore les spécicités des Etats membres, alors que les Autorités budgétaires nationales s'intéressent à la situation propre à leur économie.

Par exemple, les politiques budgétaires nationales encouragent la maximisa-tion du bien-être commun de la zone (Benigno [2004] ; Gali & Monacelli [2005]), alors qu'elles renforcent la position des Etats membres nationaux par rapport à la politique commune (Dixit [2001] ;Uhlig [2002]). La supériorité des stratégies de coopération entre banque et Gouvernement est communément ad-mise dans la littérature (Grimm & Ried [2007]). Deuxièmement, d'autre études

s'intéressent à des solutions institutionnelles aux problèmes de crédibilité et /ou à la stabilisation des chocs dans une union monétaire asymétrique.

En eet, les asymétries dans le canal de transmission des politiques mo-nétaires nécessitent la prise en compte des données nationales (De Grauwe [2000] ; Gros & Hefeker [2002] ; De Grauwe & Senegas [2004]). Toute-fois, Grégoriadis et al. [2006] remarquent que la mise en place d'un système de pénalité en fonction des déviations d'ination et de revenu de la zone à la banque centrale commune sous forme de contrat optimal peut rendre ecace les politiques fondées sur des agrégats moyens.

Jusqu'ici, les résultats des discussions théoriques sur l'interaction entre la politique budgétaire et monétaire sont non concluants en termes d'éventuelles retombées de la politique scale sur la politique monétaire (Hefeker [2003]). La politique monétaire distordante force la banque centrale à mener une politique monétaire expansive, sauf en cas de coordination des politiques budgétaires entre les États membres (Beetsma & Uhlig [1999]). Ceci exige non seulement des conditions d'adhésion, mais aussi des règles de conduite de politique budgétaire dans l'union monétaire.

Fatas & Rose [2001], considérant la relation entre les régimes monétaires et la politique budgétaire d'un point de vue empirique, trouvent que l'ancrage unilatéral induit une politique budgétaire moins restrictive que les unions mo-nétaires ou les caisses d'émissions. En eet, le désir de partager une monnaie unique dans le cadre de l'union monétaire (Calmfors [2001] ; Sibert & Su-therland [2000] ; Ozkan & al. [1997], Beetsma & Jensen [1999]), renforce l'intégration monétaire, et crée des incitations de réformes scales.

Pour rendre compte de la manière dont l'union monétaire impacte les inci-tations des Gouvernements à mener des réformes scales, et le policy-mix, par conséquent, le renforcement de la crédibilité des politiques économiques, He-feker [2003], dans le cadre d'un modèle théorique traitant de l'élargissement de l'UEMOA53 à la CEDEAO54, montre qu'une union monétaire symétrique, dans le sens de structures économiques des pays participants relativement sem-blables, conduit les gouvernements à adopter une politique budgétaire plus dis-tordante alors que leurs eorts de réforme sont réduits.

En eet, les Gouvernements n'intériorisent pas pleinement les implications inationnistes négatives d'une telle politique budgétaire. Dans une telle situa-tion, on peut évidemment plaider en faveur d'un certain type de coopération scale pour accompagner la mise en place de l'union monétaire. Cependant, ce n'est pas nécessairement le cas si l'union monétaire est formée de pays asymé-triques. Une union monétaire, formée de diérents pays, va induire ceux qui sont en dessus de la moyenne en termes de besoins de nancement et de distorsions à adopter une politique budgétaire plus restrictive.

Les pays se rendent compte que la pression inationniste moyenne sur la banque centrale augmente. Pour compenser cela, et maintenir le taux d'ina-tion bas, ils s'eorcent de réduire ces pressions en poursuivant une politique

53. Union économique et monétaire ouest-africaine est composé de Huit États membres : Bénin ; Burkina Faso ; Côte d'Ivoire ; Guinée-Bissau ;Mali ; Niger ; Sénégal ; Togo.

budgétaire moins distordante. Toutefois, les réformes structurelles seront tou-jours plus faibles dans ces pays qu'avant l'union monétaire. Ainsi, la composition de l'union monétaire a une forte inuence sur l'évolution du mix de la politique induite par l'introduction d'une monnaie commune.

Elle implique également que la coopération scale soit relativisée pour éviter que la politique budgétaire devienne trop  distordante. Une union monétaire asymétrique peut être plus ecace dans la réalisation de cet objectif, au moins pour certains pays, que la coopération. Un régime de taux de change xe impli-quera ainsi que le pays soit moins incité à corriger les distorsions scales car il n'y aura pas de réponse inationniste. Cependant, un tel ancrage peut donner à ces pays un meilleur mix des politiques menées dans le cadre d'une union monétaire.

Les résultats obtenus ont des implications importantes pour l'union moné-taire étendue à la CEDEAO. A partir d'une union monémoné-taire existante entre les membres de l'UEMOA, un élargissement à six membres a dû être mis en ÷uvre. Malgré les exigences de la convergence et des règles communes en matière de politique budgétaire, les deux groupes de pays sont toujours caractérisés par un degré considérable de divergence en particulier dans la politique budgétaire.

Les pays non membres de l'UEMOA (CEDEAO) sont caractérisés par une forte ination et de grandes distorsions scales. Bien qu'il existe quelques cri-tères de convergences scales nominaux, ils ne sont pas particulièrement contrai-gnants, car il n'y a aucune disposition concernant la façon de traiter les pays qui ne parviennent pas à les remplir. Par conséquent, il est important d'ana-lyser comment une union monétaire sans règles budgétaires contraignantes va inuencer la politique scale.

Procéder à l'union prévue sans changements structurels est susceptible d'avoir des eets très divers sur la politique budgétaire qui va encore pousser les pays à la sortie. Au lieu d'une convergence, une autre divergence des politiques bud-gétaires peut être attendue dans le cas de l'union monétaire pour l'Afrique de l'Ouest (Hefeker [2003]).

5.5 Persistance du chômage, dynamique de l'emploi

Intuitivement, dans le modèle de Barro & Gordon [1983], le chômage per-sistant aecte les incitations à poursuivre la politique monétaire. Une politique monétaire expansionniste non-anticipée réduit le chômage de la période courante et future. Par conséquent, plus le degré de persistance du chômage est élevé, plus le biais inationniste généré par l'incohérence temporelle est grave. En eet, la persistance du chômage implique également que la politique monétaire puisse être inuencée par des considérations politiques dynamiques.

Un Gouvernement qui fait face à une probabilité positive de perdre les pro-chaines élections, face à un adversaire avec des préférences potentiellement dié-rentes, peut aecter les contraintes d'incitation futures des décideurs politiques en poursuivant une politique monétaire plus expansionniste. En outre, si l'élec-torat a des préférences sur l'ination et le chômage, la politique monétaire peut inuer sur la probabilité de réélection du Gouvernement.

La persistance du chômage et l'incertitude électorale génère deux stratégies diérentes de politique monétaire. Tout d'abord, un Gouvernement rationnel doit prendre en compte ce qui se passe en cas de défaite à la prochaine élection au prot d'un adversaire avec des préférences diérentes. Une décision moné-taire qui aecte le taux de chômage courant implique aussi une contrainte sur les décisions de politique monétaire future à travers la persistance du chômage. Par conséquent, si le Gouvernement prend en compte les résultats macroécono-miques, une fois qu'il ne sera plus au pouvoir, cette future contrainte d'incitation aecte sa propre décision de politique monétaire (Jonsson [1997] ;Persson & Svensson [1989], Svensson [1994] ;Alesina & Tabellini [1992]).

D'autres travaux théoriques (Lockwood & Philippoulos [1994] ; Jon-sonn [1997]), formalisent explicitement le pouvoir d'insiders dont dispose les syndicats sous l'hypothèse d'une cible d'emploi qui défend uniquement les in-térêts de leurs adhérents, ou qui assignent un poids moindre à l'intérêt des travailleurs n'appartenant pas à la force syndicale. Cette nouvelle formalisation souligne les limites qui caractérisent la littérature traditionnelle qui stipule que la surprise inationniste ou un choc exogène n'aecte que temporairement le chômage (l'emploi). En particulier, une politique monétaire non anticipée peut réduire le chômage au-dessous de son niveau naturel pendant une période, mais ce dernier revient à son niveau dès la période suivante (Barro & Gordon [1983b]).

Des travaux de Lockwood & Philippopoulos [1994], on déduit que (1) il y a une multiplicité d'équilibres puisque un même niveau de chômage peut être associé à deux taux d'ination (faible et élevé), (2) lorsque l'objectif syndical comporte à la fois une cible d'emploi et une cible de salaire réel, le taux de chômage courant tend, à long terme, à une valeur plus élevée que celle qui aurait prévalue si le syndicat n'avait été concerné que par l'emploi.

Nous présentons le modèle de Jonsson [1997], dans lequel, dans un premier temps, seul l'instrument de la politique monétaire (le taux d'ination) est aecté par les élections, tandis que la variable d'état (le taux de chômage) uctue à l'équilibre autour de son niveau naturel. Deuxièmement, si les votants sont rationnels, informés anticipatifs, et ont des préférences en termes d'ination, et de chômage, en choisissant leurs candidats, ils tiennent compte du taux de chômage courant ; parce que si le niveau de chômage futur est relié à son niveau courant, ce dernier sera aecté par la politique future. Ce taux indique le degré d'attractivité des partis candidats, donc la politique monétaire peut inuencer les résultats électoraux.

Bien qu'il existe des modèles admettant que les Hommes politiques utilisent stratégiquement les variables de politique monétaire dans le but d'inuencer les résultats des élections, peu de modèles expliquent ce comportement dans le cadre d'anticipations rationnelles. Toutefois, Aghion & Bolton [1990] montrent qu'un Gouvernement plus conservateur peut assurer sa réélection par l'accu-mulation de la dette publique. De la même façon, Milesi-Ferretti [1993] et Milesi-Feretti & Spolaore [1994], soutiennent qu'un Gouvernement conser-vateur pourrait émettre une dette non indexée, choisir un taux de change exible et non xe ou collecter des ressources publiques de manière inecace.

La caractéristique commune de ces modèles est que les manipulations de va-riables d'états sont importantes pour les résultats des élections. En eet, contrai-rement aux modèles de cycle des aaires (Rogoff & Silbert [1988] ; Rogoff [1990]), le cadre théorique de Jonsson [1997] indique que, même en absence d'incertitudes électorales, il existe une incitation ex-ante à manipuler le taux de chômage an d'inuer sur les probabilités de réélection.

On suppose un jeu dynamique à deux périodes entre un syndicat monopo-liste et un Gouvernement dans un contexte de taux de chômage persistant. On considère deux cas : Dans un premier cas le Gouvernement est supposé être en mesure de s'engager sur une règle de politique en début de période, et le secteur privé (syndicat monopoliste) forme ses anticipations, et xe les salaires nomi-naux, puis un choc stochastique se produit. Finalement, l'ination est xée par rapport à la règle initiale. Dans un second cas, le gouvernement agit de façon discrétionnaire, autrement dit, le secteur privé forme ses anticipations d'ina-tion, et détermine le salaire nominal en début de période. Ensuite le choc se réalise, et au nal le Gouvernement détermine l'ination impliquant celle du salaire réel et du chômage. Dans les deux cas, les étapes se répètent durant les deux périodes. Enn, on postule que toutes les étapes de la période 1 sont réalisées avant les élections, donc le résultat des élections est connu par tous les votants et l'étape 1 est répétée.