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En préambule nous reproduisons ci-dessous l’intégralité de l’introduction des auteurs aux deux chapitres sur les Intégrales Multiples, qui éclaire ce que nous venons de dire et donne le plan d’étude sur lequel repose l’organisation mathématique mise en place et se passe de commentaires.

Pour ne pas brûler les étapes, nous nous sommes bornés, dans le tome 2, à la théorie de l’intégrale simple (intégrale d’une fonction définie sur un intervalle de R). En fait nous allons voir que cette théorie s’étend, sans grande difficulté, aux fonctions définies sur un pavé de Rn : pour n ≥ 2, l’intégrale ainsi obtenue sera dite multiple, afin de rappeler qu’il s’agit de fonctions de plusieurs variables numériques.

Par la suite nous verrons qu’il est nécessaire d’étendre la théorie de l’intégration à des fonctions définies sur des parties de Rn plus générales que les « pavés ». Nous commencerons par les cas de fonctions bornées définies sur des ensembles non bornée de Rn. Les cas des fonctions non bornées ou définies sur des ensembles non bornés conduit à une notion d’« intégrale généralisée » analogue à celle que nous avons rencontrée dans la théorie des intégrales simples.

Un point important de la théorie des Intégrales Multiples consiste à montrer qu’une telle intégrale

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se ramène à des intégrales simples superposées : ce résultat permet des calculs effectifs, et fera l’objet du chapitre V.

Au cours de cet exposé, nous n’oublierons pas que l’intégration est étroitement liée à la notion de mesure d’un ensemble : en fait, nous commencerons par définir la mesure d’une classe élémentaire de parties de Rn appelées pavés, et généralisant les intervalles de R : cela nous permettra de définir l’intégrale des fonctions dites en escalier. Nous définirons ensuite l’intégrale d’une classe de fonctions beaucoup plus générales, dites intégrales au sens de Riemann, et les approchant par des fonctions en escalier, et nous reviendrons enfin à la notion de mesure d’un ensemble : nous pourrons alors donner une définition correcte de l’aire de certains ensembles plans, et du volume de certaines parties de R3.

La notion première est celle de pavé défini de la façon suivante :

Dans Rn, on appelle pavé fermé tout ensemble P défini par n inégalités de la forme (1) ai≤ xi≤ bi (i=1, 2, …, n)

où les ai et bi désignent des nombres réels donnés vérifiant ai≤ bi pour tout i=1, 2, …, n.

Pour n=1, on a un intervalle compact de R ; pour n=2 un rectangle ; et, pour n=3, un parallélépipède étant parallèles aux axes.

Après avoir précisé que les pavés sont des rectangles pur n=2 et des parallélépipèdes pour n=3, les auteurs donnent la définition et le moyen de calculer la mesure d’un pavé :

Soit P le pavé de Rn défini par les inégalités de (1). Les n nombres positifs bi – ai sont les longueurs des arêtes de P ; et leurs produit

1 ( ) n (i i) i m P b a = =∏ −

est appelé la mesure (sous-entendu : n-dimensionnelle) de P. La mesure de P est nulle si, et seulement si, l’intérieur de P est vide.

Les notions de pavé et de la mesure permettent aux auteurs d’introduire l’intégrale des fonctions dites en escalier. Cette introduction passe par la définition de subdivisions d’un pavé fermé d’intérieur non vide que les auteurs appelleront cellule en mettant aussi en évidence l’idée d’hyperplans des subdivisions.

Ils définissent alors l’intégrale d’une fonction en escalier. On trouve le résultat suivant :

Soit f une fonction vectorielle, en escalier sur un pavé P de Rn d’intérieur non vide ; et soit δ une subdivision de P telle que f soit constante à l’intérieur de chaque cellule de δ. Désignons par P1,

P2, …, PN les cellules de δ et par fα (α = 1, 2, …, N) la valeur constante de f sur le pavé ouvert Pα. Alors le vecteur 1 ( , ) N ( ) I f m P fα α α δ = =∑

ne dépend que de f, et non de la subdivision choisie δ.

Le vecteur I(f,δ) est appelé l’intégrale de f sur P, et est noté P f(x)dx.

La notation ∫P f simplifiée est également présente, mais (comme le précisent les auteurs) elle

n’est utilisée que dans les questions d’ordre théorique et représente une intégrale de la façon générale.

A noter qu’aucun exemple ne suit cette définition. Suivent les propriétés essentielles des

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intégrales de fonctions en escalier, que nous résumons dans le tableau ci-dessous.

Propriétés

IV.2.2 Addition par rapport aux ensembles

1

( ) N ( )

Pf x dx=α =Pα f x dx

∫ ∫

IV.2.3 Linéarité par rapport aux fonctions [ ( ) ( )] ( ) ( )

P λf xg x dxPf x dxPg x dx ∫ ∫ ∫ IV.2.4 Croissance Pf x dx( ) ≥Pg x dx( ) IV.2.5 Majoration ( ) ( ) Pf x dxP f x dx ∫ ∫

Une seule propriété (IV.2.3) est démontrée, mais c’est que les auteurs les ont considérées comme suffisamment simples pour que les étudiants les démontrent seuls. Ces propriétés vont permettre la construction de l’intégrale des fonctions plus générales définies sur un pavé de

Rn.

Une telle intégrale se définie par la proximité avec des fonctions en escalier :

Soit f : P → E une fonction R-intégrable sur le pavé P de Rn ; et, pour chaque p∈N, soient

:

p P E

ϕ →

et θp:P→Rdeux fonctions en escalier vérifiant :

(i) ∀(x ∈ P) f x( )−ϕp( )x ≤θp( )x (ii) lim P p( ) 0 p x dx θ →∞∫ = Alors la suite p( ) Pϕ x dx

est de Cauchy, donc convergente puisque E est supposé complet ; et sa limite ne dépend que de la fonction f.

On le voit cette définition fort rigoureuse a l’inconvénient de n’être pas du tout constructive. Les auteurs la complètent par une propriété qui permet de voir l’intégrale comme la limite d’une suite d’intégrales de fonctions en escalier, grâce au critère de Cauchy, possible par le fait que E est considéré comme complet.

Les auteurs donnent ensuite la définition des fonctions réglées, comme premier exemple de fonctions intégrables. Puis ils démontrent que les fonctions continues sont réglées donc intégrales sur des pavés. Ils généralisent ensuite ce résultat au cas où la fonction continue est définie sur un ensemble quelconque borné en la prolongeant par 0 sur un pavé. Puis ils passent à la notion de support compact. Ceci leur permet de définir ce qu’est un ensemble quarrable.

Une partie bornée A de Rn est dite quarrable si la fonction caractéristique est intégrable ; et, dans ce cas, le nombre

( ) Rn A( ) A

m A = χ x dx= dx est appelé la mesure de A.

Pour n=2 cette mesure est appelé aire ; pour n=3 elle est appelé volume. Elle coïncide en effet avec la notion intuitive d’aire ou de volume pour les ensembles élémentaires de R2 ou de R3, munis de leur structure euclidienne canonique.

Aucun exemple ne suit cette définition.

On voit donc que dans cette construction théorique, en partant de la notion géométrique de mesure d’un pavé, puis en utilisant les fonctions en escalier, on débouche sur la notion

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d’intégrabilité d’une fonction quelconque sur un domaine borné et enfin de mesure d’un domaine quarrable via la notion de fonction caractéristique. Dans cette organisation qui a besoin d’un fort outillage topologique la notion de mesure des ensembles bornés est donc consubstantielle de la notion d’intégrale.

A ce niveau de l’exposé, la question est réglée, mais elle reste très théorique. On ne sait pas trop ce que sont les ensembles quarrables et les définitions nous laissent très démunis pour calculer effectivement les mesures de tels ensembles.

Les auteurs s’intéressent donc d’abord aux conditions d’intégrabilité. Cette question s’outille de la notion d’ensemble R-négligeable, défini comme pouvant être recouvert par des pavés de mesure arbitrairement petite. Ceci permet de donner deux conditions suffisantes pour qu’une fonction soit R-intégrable :

à support compact continue sauf sur un ensemble R-négligeable

continue sur un domaine dont la frontière est R-négligeable. Il n’y a pas de condition nécessaire.

Suivent les démonstrations des propriétés de l’intégrale qui reprennent celles démontrées plus haut pour les fonctions en escalier, plus des propriétés plus spécifiques sur les limites uniformes en particulier. Nous ne rentrerons pas dans les détails de celles-ci, car elles jouent essentiellement un rôle pour outiller les démonstrations à venir.

Le paragraphe qui suit permet de donner une approche plus intuitive de la notion de domaines quarrables et de leur mesure, par une interprétation géométrique. Les auteurs utilisent la notion de domaine pavable (introduite plus haut) c’est-à-dire de réunion de pavés.

Ce paragraphe débouche sur le théorème essentiel :

Toute fonction vectorielle continue et bornée sur une partie quarrable de Rn, et à valeurs dans un e.v.n complet, est intégrable.

Le paragraphe 8 est consacré aux propriétés de la mesure qui découlent de celles de l’intégrale, démontrées plus haut. Les auteurs y examinent la notion d’ensemble R-négligeable, en donnant des exemples. Ils donnent aussi des résultats pratiques, qui permettent de voir que les ensembles bornés dont la frontière est une réunion finie d’hypersurfaces de classe C1 sont quarrables. C’est en effet pratique dans la mesure où cela recouvre une grande quantité de domaines bornés.

Les auteurs étudient aussi de façon rigoureuse l’effet d’une translation, d’une homothétie et d’une isométrie sur la mesure, ce qui permet de voir que les notions de mesure et d’intégrale ne dépendent pas du choix du repère.

Enfin les paragraphes 8 et 9 présentent les résultats essentiels sur les sommes de Riemann, puis de Darboux, qui donnent une approche plus intuitive et plus constructive de la notion d’intégrale. Ils énoncent ainsi un théorème important, dont ils précisent que de nombreux

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auteurs le donnent comme définition de l’intégrale simple ou multiple :

Soit f une fonction numérique bornée définie sur un pavé P de Rn ; et, pour chaque subdivision σ=(Pα) de P, désignons par mα, Mα les bornes inférieure et supérieure de f sur Pα. Posons (20) :

( , ) ( ) S f M m Pα α α σ + =∑ ; S ( , )f m m Pα ( α) α σ − =∑

Pour que f soit intégrable sur P, il faut et il suffit que la borne inférieure des sommes S+( , )σ f soit égale à la borne supérieure des sommes S( , )σ f ; et ces deux bornes sont alors égales à Pf x dx( ) .

On voit donc que l’approche proposée dans ce chapitre permet une construction théorique et conjointe des notions de mesure et des Intégrales Multiples. Les auteurs défendent l’idée d’une interprétation géométrique de ces notions mais restent essentiellement dans un cadre topologique. Les conditions d’intégrabilité ou de « quarrabilité » restent techniquement complexes mais permettent de justifier que la plupart des cas seront couverts. L’exposé se termine par le lien avec les sommes de Riemann et de Darboux qui permettent de donner une vision plus constructive et font également le lien avec les suites numériques.