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Instruments et méthodes complémentaires pour l’imagerie de phase . 37

2.4 Instrumentation pour la métrologie et l’imagerie de phase en rayons X

2.4.4 Instruments et méthodes complémentaires pour l’imagerie de phase . 37

Les techniques de métrologie en rayons X durs reportées dans la section précédente sont transposables directement pour l’imagerie de phase, et parfois ont été developpées pour cette application avant d’être employées pour la caractérisation de faisceaux, notamment pour l’interférométrie à réseaux. Cette dernière est actuellement la plus répandue dans la littérature, et usuellement est référencée avec deux réseaux (G1, G2) unidimensionnels cou-plés à une analyse par phase stepping (ZANETTE,2011). L’intérêt grandissant ces dernières années pour cette version instrumentale est notamment dû à sa possible transposition sur sources X de laboratoires incohérentes par l’ajout d’un troisième réseau permettant de res-taurer les propriétés de cohérences nécessaires à la génération des franges et représente ainsi un fort potentiel de valorisation des travaux de recherche vers de multiples applications dans le domaine du médical, du contrôle non destructif [(MOMOSE,2003), (STAMPANONI

et al.,2011)] etc... Cet engouement est d’autant plus soutenu que F. Pfeiffer et. al. ont montré que cette technique permettait également de mettre en évidence un signal particulier qui serait relié à la diffusion de l’échantillon et qu’ils nomment “Dark-field image” (PFEIFFER

et al.,2008), et fait l’objet de beaucoup de travaux de recherche. Cette configuration inter-férométrique est plus répandue que l’utilisation de grille Hartmann, malgré la simplicité du montage, pour des raisons de résolution spatiale. En effet, pour les limiter les effets de

“cross-talk” elle serait limitée à une ou deux dizaine(s) de microns en rayons X durs, mais, différentes équipes l’ont déjà mise en œuvre avec succès [(WEN et al., 2010), (MORGAN, PAGANINet SIU,2011)].

Cependant la première mise en œuvre d’un interféromètre dans le domaine des rayons X remonte aux années 1965 (BONSEet HART,1965) avec une interféromètre à cristaux monté en configuration de type Mach-Zender comme représenté sur la figure 2.28a). Des lames sont taillées dans un cristal de silicium et diffractent le faisceau incident selon la loi de Bragg (2.18). Les deux faisceaux subissent une seconde diffraction de Bragg, puis sont recombinés avant d’interférer sur le détecteur. Un échantillon peut être placé dans un des bras, et l’ana-lyse de la figure d’interférence permet d’accéder à la phase directement modulo 2π et se fait de façon classique comme dans le cas du LSI. Les faibles densitées de matériaux mesu-rés par cette technique ont démontré sa sensibilité et son intérêt pour l’imagerie de phase (MOMOSE et al., 1996) notamment sur source cohérente synchrotron (MOMOSE,2003). Ce-pendant l’efficacité de diffraction des lamelles cristallines étant faible, le flux de photons

FIGURE2.28: Autres instruments et méthodes d’imagerie de phase en rayons X, a) Interférométrie Mach-Zehnder à cristal, b) Analyseur à cristal, c)

Mé-thode propagative, d) MéMé-thode de projection de speckle.

reçu par le détecteur est limité et peut conduire à des temps d’acquisitions très longs, de l’ordre18s(MOMOSE, TAKEDAet ITAI,2000). Ce point est d’autant plus préjudiciable que la stabilité mécanique est citée dans la littérature comme un des points les plus critiques avec cet instrument. Enfin les phénomènes de diffraction parasite dans la lamelle placée après l’échantillon introduisent du flou dans le signal et limite la résolution spatiale du système estimée alors à une dizaine de microns.

Une autre technique basée sur l’analyse des rayons réfractés par un échantillon utilise un cristal en incidence de Bragg : seuls les photons satisfaisant la loi atteignent le détec-teur (voir2.28b)) [(FÖRSTER, GOETZet ZAUMSEIL,1980), (INGAL et BELIAEVSKAYA,1995), (DAVISet al., 1995)]. En faisant varier l’angle du cristal, l’image sur le détecteur révèle un contraste dépendant de l’angle sélectionné. L’extraction quantitative des propriétés globales de réfraction et diffusion de l’échantillon se fait par l’intermédiaire d’algorithmes spéci-fiques référencés dans (PAGOTet al.,2003). Dans les deux cas ces montages expérimentaux ne fonctionnent réellement qu’en illumination collimatée, ce qui limite leur emploi, mais les rend particulièrement adaptés à l’imagerie sur sources synchrotron.

Les techniques sensibles à la phase ne nécessitant aucune optique dans le trajet du fais-ceau sont regroupées dans la catégorie des méthodes propagatives [(SNIGIREVet al.,1995), (CLOETENSet al., 1996), (NUGENTet al., 1996)]. Elles consistent à enregister les figures de diffraction de Fresnel produites à différentes distances par l’objet sous illumination cohé-rente. La résolution spatiale de ces méthodes dépend de la qualité du détecteur haute réso-lution employé pour enregistrer les modulations associées au régime de Fresnel ; elle peut alors atteindre des valeurs inférieures au micron (CLOETENSet al.,2006). Les variations de contraste observées sur le détecteur selon les différentes positions sont décrites par l’équa-tion de transfert en intensité2.26(TEAGUE,1985). Celle-ci démontre que pour un échantillon faiblement absorbant, éclairé par un faisceau uniforme en intensité, pour lequel l’intensité I peut être considérée approximativement constante, alors, le second terme de l’équation s’annule, et l’évolution des contrastes en intensité en propagation correspondent au lapla-cien∇2du front d’onde.

−2π λ

∂I

∂z =I∇2Φ +∇I· ∇Φ (2.26)

Une dernière méthode sensible à la phase et développée relativement récemment en mé-trologie de front d’onde repose sur l’analyse des déplacement d’une figure de tavelure géné-rée par un diffuseur et projetée sur un détecteur (figure2.28d)). En comparaison à l’interfé-rométrie à réseau, l’élément diffusant utilisé introduit une modulation haute fréquence dont les déplacements peuvent être analysés par des algorithmes de corrélation croisée comme

2.5. Bilan et philosophie de conception de l’interféromètre de la Ligne Métrologie

la ZNCC (“Zero-normalized cross correlation”) [(PAN et al.,2009), (BERUJONet al., 2014)].

Une fois la carte des déplacements∆x,yobtenue il est possible de remonter à la dérivée du front d’onde connaissant la distancedséparant les deux plans de prise d’image2.27. Cette technique a été utilisée en imagerie de phase rayons X [(MORGAN, PAGANINet SIU,2012), (WANGet al.,2015)] transposée récemment sur source de laboratoire [(ZHOUet al.,2015), (WANG, KASHYAPet SAWHNEY,2016)].

2.5 Bilan et philosophie de conception de l’interféromètre de la Ligne Métrologie

L’état de l’art conduit dans ce chapitre montre la richesse des développements qui ont ac-compagnés l’évolution des sources X, des optiques nécessaires au transport des faisceaux, et des instruments de métrologie adaptés. L’ensemble des techniques présentées ont démontré expérimentalement leur potentiel et intérêt pour la métrologie et l’imagerie de phase. Nous allons tenter ici de les classer selon quatre critères d’intérêt pour la métrologie sur source synchrotron : la sensibilité de mesure, la résolution spatiale, l’indépendance spectrale de mesure et la possibilité de calibration absolue.

Les expériences sur synchrotron sont extrêmement variées, ce qui mène à une large gamme de spécifications en termes de qualité de front d’onde du faisceau et énergies de travail. Dimensionner un instrument interférométrique compatible avec l’ensemble de ces configurations expérimentales (sans modification lourde) représente un véritable challenge qui ne semble pas avoir été relevé dans le domaine des rayons X durs. Ainsi, l’objectif est de concevoir un instrument permettant d’accéder en une acquisition à une information en deux dimensions sur le front d’onde, par une procédure expérimentale courte, reproductible, sur une large gamme spectrale10−30keV et garantissant des performances de mesures en li-mite de diffraction sur toute la bande. La difficulté réside aussi dans la réalisation d’une calibration absolue de l’instrument sans laquelle il est impossible de dissocier les erreurs de l’instrument, et de sa configuration, de la mesure physique. Puisque les optiques de trans-port ne peuvent au mieux que conserver les propriétés de cohérence du faisceau si elles sont limitées par la diffraction, il devient alors impératif de calibrer l’instrument sur la source synchrotron seule en faisceau blanc sur une ligne courte, ou sur une ligne longue en mono-chromatique avec un trou de filtrage. Cependant, à SOLEIL, les lignes longues étant toujours en construction, nous privilégierons donc la première solution en réalisant la calibration di-rectement sur la ligne Métrologie. Ainsi, outre les contraintes de dilatation thermique possi-blement entrainées par cette configuration de mesure, l’instrument doit donc être également capable de fonctionner en faisceau polychromatique et de supporter le rayonnement direct.

De plus, l’intérêt de pouvoir tenir en configuration de mesure sous faisceau blanc, réside également dans la possibilité de réaliser la métrologie de la source synchrotron.

Nous pouvons exclure les techniques plus répandues en imagerie de phase comme les méthodes propagatives, à cristal analyseur ou à réseaux couplées à des procédures de me-sure de type phase-stepping nécessitant dans chacun de ces cas de nombreuses acquisitions.

Il en va de même pour les méthodes d’analyse de déflection de faisceaux par fentes mo-biles. Les techniques de suivi de speckle semblent intéressantes car ne reposent pas sur un montage expérimental très complexe et semblent être faiblement chromatiques du fait de la simplicité de l’optique modulante. Bien que la configuration à distance figée entre diffuseur

et détection compatible d’une calibration absolue ne soit pas la plus répandue pour cet ins-trument elle reste possible. Il n’est pas certain en revanche que les papiers abrasifs utilisés comme modulateurs resistent à la puissance du faisceau blanc, contrairement aux interfé-romètres à réseaux et senseurs de front d’onde Hartmann. On privilégiera le premier type d’instrument pour espérer obtenir une meilleure résolution spatiale. En revanche, contrai-rement aux senseurs Hartmann achromatiques, les interféromètres à réseaux tels que pré-sentés dans la littérature ne satisfont pas à cette contrainte sans accordabilité mécanique qui devient dès lors incompatible avec une calibration absolue. La table2.3présente un résumé de ces éléments de classification.

TABLE2.3: Bilan du classement des techniques de métrologiein-situdans le domaine des rayons X durs.

Techniques Sensibilité Rés. spatiale Ind. spectrale Calib. absolue

Déflection + - - ++

-Hartmann ++ - ++ ++

Speckle ++ + +

-LSI 2 réseaux PS ++ ++ - -

-LSI 2 réseaux Fourier ++ + - - +

Le concept adéquat serait donc à la frontière entre la robustesse de mesure d’un sen-seur Hartmann et la résolution spatiale d’un interféromètre à réseau tout en conservant la possibilité de calibrer l’instrument en absolu. De plus, il devra à la fois fonctionner sous un éclairement polychromatique, et monochromatique sur une large bande spectrale avec des performances de mesures relativement constantes. Par conséquent nous choisirons de dé-velopper dans cette thèse un concept innovant d’interféromètre à réseau unique dans une configuration géométrique figée, qu’il reste à définir.

Chapitre 3

Interférométrie à décalage et applications aux rayons X

3.1 Formalisme d’optique ondulatoire

Avant de rentrer dans le vif du sujet, nous présenterons dans cette section les concepts théoriques fondamentaux d’optique ondulatoire. Ce formalisme rend compte de la descrip-tion des ondes électromagnétiques et de leur propagadescrip-tion. Il sert dans l’ensemble de ces travaux de thèse à la fois à décrire les propriétés de cohérence du rayonnement X (chapitres 2et3), mais également à poser le cadre formel de la diffraction du réseau, élément optique central dans la conception de l’interféromètre (chapitre3).